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Le Medef suggère de fiscaliser le financement de l’Unedic

Publie le samedi 24 avril 2004 par Open-Publishing

Le Medef a suggéré vendredi de mettre à contribution l’ensemble des
contribuables pour financer l’assurance-chômage (Unedic), alors que l’indemnisation des chômeurs est en plein
imbroglio juridique.

L’organisation patronale, en réalité, exprime tout haut ce que les organisations syndicales
espèrent tout bas avec la perspective d’une annulation de la convention de l’Unedic, dans un contexte de
reprise économique encore bien molle.

Le ministre du Travail, Jean-Louis Borloo, a consulté cette semaine les responsables de l’Unedic,
après avoir reçu les quatre associations de chômeurs la semaine précédente.

"Le déficit actuel de l’Unedic (huit milliards d’euros) ne laisse aucune marge de manoeuvre aux
partenaires sociaux pour un paiement supplémentaire", prévient la CFTC.

Le cas échéant, admet-on côté syndical, "on voit mal l’Unedic faire face toute seule à
l’indemnisation des chômeurs, à moins de réduire l’indemnisation ou d’augmenter les cotisations, ce qui n’est
pas imaginable".

Un complément de financement apporté par l’Etat se heurterait cependant à la situation des
finances publiques. Le ministre des Finances vient de rappeler que même les affaires sociales étaient
concernées par les "réserves de précaution" budgétaires.

L’Unedic se réunira en bureau extraordinaire mardi prochain pour examiner "les conséquences
financières, techniques, administratives et juridiques" de sa condamnation par le tribunal de Marseille,
qui a annulé le 15 avril la radiation de 35 chômeurs "recalculés".

Tous attendent la décision du Conseil d’Etat, saisi en avril 2003 par les associations de chômeurs
pour vice de forme des agréments gouvernementaux donnés à la convention de l’Unedic.

En cas de vide juridique, qui concernerait aussi les annexes 8 et 10 de la convention spécifiques
aux intermittents du spectacle, le gouvernement pourrait se voir contraint d’intervenir par décret
pour fixer le niveau des cotisations et des prestations de l’assurance-chômage en attendant que
les partenaires sociaux renégocient la convention.

Le gouvernement, rappelle-t-on du côté des syndicats, l’avait bien fait en 1982 lorsque le
patronat avait dénoncé la convention de l’Unedic de l’époque.

Au Conseil d’Etat, le commissaire du gouvernement rendra ses conclusions le 7 mai, quatre jours
avant que le tribunal de grande instance de Paris ne se prononce, le 11 mai, sur le sort des
"recalculés" parisiens.

La haute juridiction administrative n’est pas tenue de suivre les conclusions du commissaire du
gouvernement, même si cela est généralement le cas.

UN ACCORD DIFFICILE À TROUVER

Denis Gautier-Sauvagnac, président de l’Unedic et vice-président du Medef, a pris les devants en
accordant une interview à La Tribune.

"La question à se poser n’est pas d’élargir l’assiette des cotisations mais de savoir si, en
période de chômage important, la totalité du financement des allocations doit être assurée par les
seuls salariés du privé et leurs employeurs", déclare-t-il.

La question, ajoute-t-il, est de savoir "s’il convient d’envisager des allocations particulières,
au-delà d’une certaine durée, qui seraient prises en charge par l’ensemble des contribuables qui
aujourd’hui ne financent pas l’assurance-chômage : fonctionnaires, retraités, professions
indépendantes, etc."

La perspective d’une renégociation de la convention de l’Unedic ranime le débat sur la
dégressivité des droits d’indemnisation et la hausse des cotisations, où se situe le clivage entre le
patronat et les organisations syndicales.

Un accord serait cette fois d’autant plus difficile à trouver que la CFDT refuserait d’endosser le
rôle de bouc émissaire et de s’engager sans la CGT et Force ouvrière, non signataires de
l’actuelle convention.

"La suppression de la dégressivité en 2000 est une erreur manifeste. Son rétablissement est
évidemment à l’ordre du jour", ne cache pas Denis Gautier-Sauvagnac, qui réaffirme en revanche son
hostilité à une hausse des cotisations.

"Les cotisations ont déjà augmenté une première fois en juillet 2002 et une seconde en décembre
2002", ajoute-t-il. "Cela suffit dans un pays comme le nôtre, qui supporte déjà des prélèvements
obligatoires parmi les plus élevés d’Europe, décourageant d’autant l’investissement et l’emploi en
France."

La progression du taux de chômage est presque continue en France depuis juillet 2001 et
s’établissait à 9,8% de la population active en février. Le taux de la cotisation au titre de
l’assurance-chômage est actuellement de 6,40% contre 6,60% en 1993, année de la dernière récession en France.

Pour faire face à la crise financière, les organisations syndicales, FO en tête, plaident pour
l’instauration d’une surcotisation destinée aux entreprises qui recourent abusivement aux emplois
précaires, une des causes du déficit de l’Unedic.

Le patronat s’y oppose au nom de la flexiblité du travail.

"Je dis non à cette proposition", réitère Denis Gautier-Sauvagnac. "Taxer ou pénaliser les CDD ou
les contrats d’intérim, c’est en réalité taxer l’emploi et décourager l’embauche."

Depuis janvier, la nouvelle convention de l’Unedic réduit de sept à 14 mois la durée
d’indemnisation selon les catégories de chômeurs.

L’Unedic a évalué entre 1,5 et deux milliards d’euros le surcoût lié à une indemnisation
complémentaire des "recalculés". Selon FO, les "recalculés" étaient 315.000 à la fin mars et leur nombre
augmente d’environ 25.000 par mois. D’ici à 2005, plus de 600.000 personnes seraient concernées.(Reuters)