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Lettre députés sur démantèlement du système de pharmacovigilance

Publie le lundi 30 novembre 2009 par Open-Publishing

Notre santé et notre liberté sont sérieusement menacées par une Proposition de Directive de la Commission Européenne.
Lettre-type envoyée aux députés européens par un collectif de citoyens le 28 Novembre 2009. Vous pouvez faire de même.
Anti-OGM

Objet : Interpellation des députés sur des dysfonctionnements majeurs de la politique de santé publique

Madame, Monsieur le Député

Je soussigné(e), citoyen(ne) français(e) et européen(ne), souhaite vous alerter sur le dispositif mis en place pour parer à une « pandémie » de grippe A H1N1, et ses conséquences, lesquelles m’inspirent les plus grandes inquiétudes.

Je tiens à attirer votre attention sur des faits concernant l’industrie du médicament et sa propension à en injecter la production coûte que coûte dans le corps de ses cobayes, à savoir la population européenne.

1. Il existe une procédure d’autorisation, dite autorisation « prototype », permettant au fabriquant de s’épargner les tests de sécurité d’un produit si celui-ci est considéré comme « équivalent » à l’un de ses produits précédents ayant déjà reçu une AMM (ce dernier ayant été testé). Les fabricants Glaxo Smith Kline, Baxter et Novartis ont ainsi bénéficié de cette procédure spéciale pour leur vaccin respectif contre la grippe A H1N1, au motif que la souche A H1N1 du virus dit « pandémique » serait équivalente aux souches utilisées pour développer leur vaccin contre la grippe saisonnière et ce, sans tenir compte des nouveaux procédés de fabrication, ni des quantités bien supérieures d’adjuvants, ni de leurs nouvelles combinaisons. Cela a permis à ces fabricants de proposer sur le marché un vaccin entièrement élaboré en moins de cinq mois. Pour justifier cette pratique, il a fallu dans le même temps fabriquer beaucoup « d’urgence pandémique » à grand renfort médiatique. A cet effet la définition du concept de pandémie a d’ailleurs été revue et corrigée très largement à la baisse par l’OMS en avril 2009, ce qui a permis de hausser rapidement le niveau d’alerte, le nombre de décès ou cas graves dans le monde n’étant plus un critère pour définir une pandémie. (1)

2. Cette pratique se veut contrebalancée par la mise en place d’un « dispositif de pharmacovigilance renforcé » afin de suivre au plus près l’apparition d’éventuels effets indésirables de ces produits non testés. A cet effet, un fichage systématique des personnes vaccinées est mis en place avec l’aide de la base de donnée de l’Assurance Maladie (2). En somme, la population vaccinée va servir de cobaye à une expérience humaine de produits non testés, menée à grande échelle puisque le dispositif prévoit une campagne de vaccination massive avec 94 millions de doses achetées.

3. Cette pratique, nommée par les institutions « procédure exceptionnelle », fait pourtant partie des dispositions contenues dans la Proposition de la Commission Européenne (2008)(3) qui prévoit de l’étendre à tous les médicaments et d’imposer la mise en œuvre d’un « Plan de Gestion du Risque » (PGR). L’International Society of Drug Bulletins (ISDB)(4) commente ainsi : « La Commission européenne ne prévoit pas de renforcer l’évaluation des nouveaux médicaments avant mise sur le marché.
Elle prévoit au contraire :
 de généraliser l’utilisation de ces PGR (propositions d’articles 104 point 3.c et 104 bis de la Directive, et proposition d’article 21 du Règlement), éventuellement assortis d’études post-AMM (proposition d’article 22 bis de la Directive, et article 10 bis du Règlement) ;
 de favoriser des autorisations de mise sur le marché “sous condition” de médicaments insuffisamment évalués, et ce sans justification par des besoins de santé publique (proposition d’article 21 bis de la Directive)(5) .
Pour la Direction générale Entreprises de la Commission européenne, ces PGR et études post-AMM visent à ouvrir la voie à « des autorisations de mise sur le marché plus précoces [qui] permettent un retour sur investissement plus rapide, une augmentation de la confiance des investisseurs, donc la réduction du coût total de développement du produit ».

4. Concernant le suivi de pharmacovigilance lui-même, la Commission ne prévoit pas de le renforcer ni de développer l’expertise publique mais, au contraire, selon l’ISDB « elle va jusqu’à mettre en place une organisation qui privera des données les équipes spécialisées de ces systèmes de pharmacovigilance :
 les États membres pourront demander aux professionnels de santé de notifier les effets indésirables directement aux firmes (proposition d’article 102 point 1) ;
 [...] et ce sont les firmes qui seront chargées d’enregistrer ces notifications « en un point unique dans la Communauté » (base Eudravigilance) (proposition d’article 107 point 1 de la Directive) ..(6)
Or, plus de 5 années après sa création, la base Eudravigilance n’est toujours pas opérationnelle : les autorités sanitaires nationales ne peuvent pas l’exploiter et dénoncent une approche qui aboutira à un nivellement par le bas. Et la soumission de l’enregistrement des données dans Eudravigilance aux normes de l’International Conference on Harmonisation (ICH) risque de leur faire perdre toute signification clinique (propositions d’articles 101 point 4 et 108 de la Directive)(7) .Cette construction ouvre aux firmes la possibilité de dissimuler et de manipuler les données. »

Cette « pandémie » ressemble donc à une grande répétition entérinant les rôles de deux classes d’acteurs majeurs agissant de concert :
  Des acteurs de la sphère économique qui souhaitent parvenir à supprimer tout contrôle effectif de sécurité des médicaments afin de s’assurer des « retours sur investissement » plus rapides
  Des acteurs de la sphère politique qui, sous couvert de prévention, mettent en place des mesures d’exception (8), afin de limiter – par la force au besoin – la contestation de ce genre de pratiques. La compétitivité de l’industrie pharmaceutique, soutien de la sphère politique, prime sur toute autre considération.

Les deux ont besoin d’un « état d’exception » (9) assez prolongé pour nous imposer leurs volontés et l’OMS a pour cela averti dès le 12 juin 2009, après avoir annoncé l’alerte maximale de niveau 6 le 11 juin, que « la pandémie pourrait durer deux ans ». Par la voix de son porte parole, Gregory Hartl, elle a à nouveau confirmé le 9 octobre 2009 que « cela pourra prendre des années avant de pouvoir baisser le niveau d’alerte pandémique ».

Madame, Monsieur le Député, je vous invite à prendre la mesure de la gravité de ce qui se trame aujourd’hui contre la santé et la liberté de la population française et européenne.

Cela fait des années que nous autres citoyens vous alertons sur les conséquences des dangereux conflits d’intérêts qui gangrènent les institutions françaises, européennes et internationales (dans bien des domaines : semences, OGM, nucléaire, pharmacie, ressources naturelles, etc.). Enhardis par l’absence de véritable réaction parlementaire, leurs bénéficiaires font désormais la loi en Europe, comme ailleurs. Si nous ne mettons pas un terme au lobbying de ces gens, l’Europe se transformera progressivement en un continent où la dictature aura définitivement remplacé la démocratie.

Aussi aujourd’hui je vous demande solennellement de :
  interpeller au Parlement les Ministres responsables de ces décisions et/ou de leur exécution
  porter ce débat sur la place publique afin que tous les citoyens soient informés
  saisir toute instance officielle habilitée à condamner sans ambages ces manœuvres en cours
  mobiliser tous les députés et sénateurs
  soutenir les propositions alternatives, dont celles élaborées par l’ISDB (10) , dans toutes les réunions à venir des instances de décisions.

Je suis impatient(e) de recevoir une réponse positive de votre part et de pouvoir constater que vous agissez pour protéger la santé et la démocratie. De mon côté, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour mobiliser les citoyens sur ces questions.

Dans l’attente, recevez Madame, Monsieur le Député, l’expression de ma sincère considération.
Date :

Signataire :

Adresse :

Notes :
1. Voir interview de Dominique Legros, coordinateur de la cellule de crise de l’OMS, sur Arte : http://www.dailymotion.com/video/xawj11_1x4-un-virus-qui-fait-debat_tech
2. Voir circulaire aux préfets des Ministre de l’Intérieur et Ministre de la Santé du 21 août 2009
3. Proposition de Directive disponible ici :
http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2008:0665:FIN:FR:PDF
Proposition de Règlement disponible ici :
http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2008:0664:FIN:FR:PDF
4. Créé en 1986, l’ISDB est un réseau international de bulletins sur le médicament et la thérapeutique qui publie des informations comparatives indépendantes reposant sur des données probantes, afin d’aider les professionnels de santé à améliorer autant que possible leurs pratiques thérapeutiques tout en servant au mieux l’intérêt des patients.
5. Pour les patients en impasse thérapeutique (VIH multi-résistant, cancers incurables ou dont les traitements ont des résultats médiocres, etc.), il existe déjà des dispositions, au niveau communautaire et au niveau des États membres, permettant un accès rapide au médicament : AMM conditionnelles (article 14.7 du Règlement (CE) 726/2004), AMM octroyées pour circonstances exceptionnelles (article 22 de la Directive 2001/83 CE consolidée et article 14.8 du Règlement (CE) 726/2004), AMM accélérée (article 14.9 du Règlement (CE) 726/2004) ; en France, “autorisations temporaires d’utilisation” (ATU), “protocoles thérapeutiques temporaires” pour l’utilisation hors AMM à l’hôpital, etc.
6. La Commission européenne propose aussi que les rapports périodiques de sécurité actualisés (Periodic Safety Update Reports, PSUR) préparés par les firmes ne présentent plus d’énumération détaillée des différents cas individuels observés (réf. 1), supprimant le dernier moyen dont disposaient les autorités pour contrôler l’activité des firmes (réf. 17).
7. L’ICH est une entité composée de représentants des firmes et des responsables d’Agences du médicament qui oriente la politique du médicament en produisant des “recommandations” et “lignes directrices”. L’ICH a notamment élaboré le dictionnaire MedDRA° [...], censé servir à “harmoniser” la codification des effets indésirables. En pratique, il nécessite de coder les effets indésirables par “symptôme” en utilisant le terme représentant le “plus petit dénominateur commun” [...], au risque de perdre leur signification clinique. Ce risque est d’autant plus grand que ce “symptôme” doit être rattaché à une ou plusieurs “catégories” [...] : les données d’un patient se trouvent ainsi disséminées dans plusieurs “catégories” ce qui rend difficile l’évaluation des cas (réf. 18). En outre, un rattachement aux mauvaises catégories peut faire “disparaître” certains effets. Par exemple, coder le symptôme “prise de 20 kg” dans la catégorie “examens” [...], où on ne penserait pas à le rechercher, peut permettre de faire passer cet effet indésirable inaperçu.
8. Le contenu du Plan National de Prévention et Lutte Pandémie Grippale, publié conjointement par le Secrétariat de la Défense et le Premier Ministre le 20 février 2009, comprend des mesures coercitives attentatoires aux libertés. Entre autres, suspension des activités collectives : spectacles, rencontres sportives, foires et salons, grands rassemblements, etc. ; restriction des visites et/ou contrôle de l’accès dans les établissements hospitaliers, maisons de retraite, centres d’accueil, établissements pénitentiaires, établissements sociaux et médicaux-sociaux, etc. ; restriction des activités professionnelles, sociales, éducatives et associatives non essentielles.
9. Les mesures contenues dans le Plan de prévention relèvent de l’état d’exception et peuvent être activées à tout moment dès lors que l’OMS a annoncé l’état de pandémie. Elles peuvent ne pas prendre fin tant que l’OMS n’a pas déclaré le niveau 7 signalant la fin de la pandémie.
10. En vue d’amender la proposition de la Commission Européenne, l’ISDB et Médecine in Europe Forum ont émis conjointement un certain nombre de recommandations très pertinentes dont le contenu est accessible sur : www.prescrire.org/docus/Fr_PharmacovigBriefingNoteOct2009.pdf