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MAYOTTE, LABORATOIRE DE LA FRANCE DE DEMAIN
Publie le jeudi 26 février 2009 par Open-Publishing5 commentaires
Auteur : Hervé Gouyer.
Avec la bénédiction des autorités, le maire d’une commune de Mayotte a incendié les cabanons d’un groupe de sans-papiers comoriens. Un exemple de la paix républicaine dont jouit cette miette d’empire français. Contre l’immigration venue des îles voisines, on y applique des solutions débridées : lois d’exception, rafles policières.
A l’aube du 27 octobre, un escadron de gendarmes arrive toutes sirènes hurlantes à Hamouro, petit hameau peuplé essentiellement de Comoriens d’Anjouan, l’île la plus proche de Mayotte. Tous les hommes sont embarqués pour un contrôle d’identité. On en arrête quatorze pour séjour illégal tandis que leurs femmes sont laissées sous la surveillance de trois gendarmes. C’est le moment choisi par le maire du coin pour se lâcher. A la tête d’une quinzaine de fonctionnaires municipaux, l’édile part incendier les vingt-huit paillotes où logeaient les Comoriens. « Nous avons profité que les maisons soient vides pour les détruire », expliquera-t-il laconiquement dans la presse locale. Pour un peu, on le remercierait de ne pas avoir grillé les sans-papiers au lance-flammes.
Dans un témoignage envoyé à CQFD, Maryanne, une habitante de la région, raconte « l’horreur de voir des gens errer parmi les débris, des souvenirs en fumée, de voir un enfant prendre un chat carbonisé dans ses bras et de le serrer comme s’il était encore vivant, de voir des femmes rassembler des morceaux de mousse sous la pluie afin de faire un matelas de fortune, de ramasser des casseroles inutilisables, des regard vides, juste la terreur, l’incompréhension. »
Les politiques se gardent bien de réagir. Il faudra attendre le 13 novembre, jour de la parution dans Libération d’un article sur cette affaire, pour que Mansour Kamardine, député UMP de Mayotte, se décide à monter au front. Non pour condamner le bûcher, bien sûr, mais sa médiatisation. « Comme souvent, l’agitation médiatique orchestrée autour de ces évènements occulte l’essentiel : je veux parler du fléau que constitue l’immigration clandestine à Mayotte. […]
J’affirme, sans esprit de polémique, que le seuil de tolérance est largement dépassé et qu’il est à la mesure de l’exaspération des Mahorais. » (Kwesi, 18/11/03). Dans l’art de jeter de l’huile sur le feu, le préfet Jean-Jacques Brot n’est pas mal non plus. Sa spécialité : inviter caméras et journalistes à assister à la destruction des embarcations sur lesquelles arrivent les clandestins. Une « agitation médiatique » qui, elle, ne dérange personne. Le 10 novembre, après l’incendie des paillotes, le préfet lançait dans le Quotidien de la Réunion : « L’invasion migratoire anjouanaise viole notre hospitalité. » Un vrai message d’apaisement…
Sarkozy est appelé au secours. Le 6 novembre, à l’Assemblée nationale, Mansour Kamardine appelle le ministre de l’Intérieur à aller plus loin dans la chasse à l’homme : « Les 5 266 reconduites effectuées à ce jour pour la présente année […] attestent de la détermination affichée par vos services. De même, la destruction des barques et quelques opérations coups de poing contribuent à une certaine dissuasion. Ma question est donc simple : [ ] quelles mesures d’urgence et quels moyens entendez-vous consacrer à lutter contre l’immigration clandestine ? ». Virer les étrangers de Mayotte ? Dans ce cas, la France devrait être la première à plier bagage.
Car en droit international, l’île est toujours considérée comme occupée. Son rattachement à la France fait suite à deux référendums organisés après à la déclaration d’indépendance de l’archipel des Comores, dont Mayotte fait historiquement partie. Un « coup » réalisé sous la pression des planteurs réunionnais mais aussi dans l’intérêt stratégique de la métropole : « Mayotte abrite aujourd’hui une partie de l’arsenal militaire malgache d’avant 1972, ainsi qu’un des plus grands centres d’écoute. Elle facilite aussi la surveillance de l’approvisionnement en hydrocarbures sur cette ancienne « route des Indes », devenue route du pétrole », explique l’historien Abdou-Salam Saadi. En 1982, l’ONU adoptait une résolution en faveur du retour de Mayotte aux Comores par cent dix voix contre une - celle de la France. Laquelle n’en a jamais tenu compte.
Un député : « Le seuil de tolérance est largement dépassé »
Certes, la crise qui ravage l’archipel a de quoi dissuader Mayotte de revenir dans le giron comorien. Mais la France a une lourde responsabilité dans cette situation. Sur les vingt-six tentatives de coups d’Etat qui ont ébranlé les Comores depuis leur indépendance, certaines ont été dirigées depuis Paris. La France a non seulement soutenu des apprentis dictateurs, mais aussi encouragé les séparatistes d’Anjouan à faire sécession en 1997, poussant l’Organisation de l’union africaine (OUA) à décréter un embargo qui a déstabilisé davantage encore une économie en perdition.
A quoi s’ajoute l’interdiction à Mayotte des produits maraîchers comoriens au prétexte des normes phytosanitaires. En chassant les clandestins, qui fuient une misère à laquelle elle a grandement contribué, la France joue donc les pompiers pyromanes. Mais rien de tout cela ne perturbe le pouvoir de tutelle. En réponse au député Kamardine, Sarkozy a tenu un langage très clair : « Je n’oublie pas une chose : c’est que, une fois à Mayotte, pour beaucoup le voyage n’est pas terminé, si vous voyez ce que je veux dire… Mayotte, c’est une des frontières de la France. […]
Les tourments de Mayotte aujourd’hui, c’est les problèmes de la France métropolitaines après-demain. ». En somme, Mayotte doit servir de laboratoire. A elle d’expérimenter les politiques du pire visant à réprimer les mouvements de populations pauvres. A cet égard, Mayotte bat déjà des records : les reconduites y sont presque aussi nombreuses qu’en métropole, ce qui donne une idée de l’activité policière déployée sur ce territoire 1 400 fois plus petit. Les moyens consacrés à la répression des immigrés sont dix fois supérieurs à l’aide française dévolue au reste de l’archipel. Malgré ce zèle, l’île continuerait à enregistrer vingt mille entrées par an.
Au péril des exilés : une ONG estime à quatre mille le nombre de fugitifs noyés en mer depuis l’instauration du visa entre Mayotte et le reste des Comores en 1995. Mais ce n’est pas tout : Mayotte a aussi sa propre ordonnance sur l’entrée et le séjour des étrangers. Calquée sur celle de Sarkozy, elle s’offre une commodité supplémentaire : ici, la légalité des interpellations et des expulsions n’est plus soumise à aucun contrôle, ce qui ouvre la porte à toutes les dérives policières. « Les rafles sont vécues dans une routine quotidienne », constate Boris Noulin, un jeune géomètre récemment « immigré » à Mayotte. « Les flics débarquent, il y a une volée de moineaux au marché, ils en embarquent cinq ou six et personne ne dit rien. »
Et il ajoute : « Cette politique est soutenue par les Mahorais. » Comme à la rentrée dernière, quand des femmes ont violemment manifesté contre la scolarisation des enfants comoriens. Cette xénophobie, entretenue par les élites de la république, s’accommode néanmoins d’une grande tolérance pour les travailleurs anjouanais, qui fournissent, au noir, 80 % de la main d’oeuvre ouvrière.
Hervé Gouyer
Publié dans le n°7 de CQFD, décembre 2003.
Messages
1. MAYOTTE, LABORATOIRE DE LA FRANCE DE DEMAIN, 26 février 2009, 18:18, par emorej
Effectivement cette île est un summum du non droit. Clandés, salarié-e-s, le droit "républicain" est inexistant. Contractuel-le-s de l’Educ Nat payé-e-s comme des merdes, smig à 800 euros, consommation courante à plus 70 pour cent comparé à l’hexagone, rafle des élèves dans les transports scolaires, ou dans les écoles primaires, etc. Y a encore des naifs à croire aux Droits de L’Homme ? Je hais la France ses flics et ses patrons, plus que jamais.
2. MAYOTTE, LABORATOIRE DE LA FRANCE DE DEMAIN, 26 février 2009, 20:18, par Abal-Kass
Bonjour,
La discussion sur Mayotte est encore compliqué que ceux ou celles qui veulent publier des articles se feront "bêtes" avant de voir les mahorais comme des "bêtes". Beaucoup jugent que Mayotte souffre et veulent se ralier encore plus à la France pour ne devenir rien, et tous se trompe, laisser svp les mahorais jugé de leur propre sort. Des "mzoungous" ou encore étranger parle de Mayotte comme ils sont dans les coprs de Mahorais ? Non nous n’en voulons pas des commentaires qui n’en veulent pas la peine, ^mais sachant qu’on est dans un démocratie, on peyut toujours causé, mais sachez que c’est notre vie privée.
Publier des articles pour dire des choses en regardant le peuple mahorais c’est pas de l’hummanité.
Aujourd’hui j’éspère que nous, la majorité des mahorais remercient la France de nous avoir éclairé, et de nous avoir donner un peu de leur bien pour ne pas souffrir comme les îles à côté.
Certains disent que la France est à Mayotte par profil, moi en tant que Mahorais je dis que c’est belle est bien normale, qui va quelque part sans intérer, la France comme tout autre pays ou tout autre personne vie avec des intérêts.
Mais sachez que nous respectons ce dernier, et viove la France à nos côtés, et n’hésiter pas à la renforcer par la départementalisation.
Laissez nous vivre en liberté svp avec la France, nous n’en voulons pas des personnes qui veulent juste installer les troubles. Il faut cessez d’être jaloux ou d’aporter la haine, mais de se soutenir pour aider les pays d’ à côté.
N.B : Sachez qu’il y a peut etre et surement des fautes d’orthographe, ou de grammaire, j’ai fait expré de ne pas me relire, pour pouvoir être objectif de ce que je pense à l’instantané.....
Vive le Monde
Vive l’Europe
Vive la France
Vive Mayotte
1. MAYOTTE, LABORATOIRE DE LA FRANCE DE DEMAIN, 26 février 2009, 20:55, par michel
c est bizarre pour des gens qui ne veulent pas que les francais s interessent a un territoir qui va faire partie du pays. les francais sont en droit de se demander ceux que les mahoaris veulent de la France. Vous n avez pas de descendants europeens. et vous n etes pas une colonie de peuplement comme la reunion, donc c est notre droit le plus legitime de se demander pour quoi vous voulez etre avec la France, alors que vous avez vote pour votre independance en 1958. Est ce que vos leaders ne se foutent pas de la gueule de la France ? nous sommes en droit de nous poser la question, ou bien vous allez nous faire la lecon qu on a pas le droit de vous demander de vous jusifier car vos aines ont choisi. Nous ne voulons plus de conflits comme aux Antilles actuellement.
2. MAYOTTE, LABORATOIRE DE LA FRANCE DE DEMAIN, 1er mars 2009, 09:06, par omar
Réponse à Jean-Jacques H.
Dommage que l’article ne parle du nombre de consultations populaires relatives à l’autodétermination. Je sais on va me répondre que les tonton macoutes avaient obligé les mahorais a voté de telle façon (à moins que je me trompe d’Océan).
Dommage que l’article ne parle pas de la situation paradoxale d’Anjouan qui après avoir voté son indépendance a demandé son rattachement à la France (chose totalement inpensable d’autant que cette île est rattachée au Comores).
Bref un article rédigé à des millers de kilomètres avec un manque d’analyse.
Question pour quoi les mahorais ne souhaitent pas la venue de clandestins. Les emplois !!! Avec 29% de taux de chômage nous ne pouvons pas assimiler des populations extérieures.
Alors laissez nous vivre et faire nos choix et arrêtez de vous poser de fausses questions sur qui est a l’origine de ce mouvement, la réponse est simple LE PEUPLE.
3. MAYOTTE, LABORATOIRE DE LA FRANCE DE DEMAIN, 27 février 2009, 13:36, par Souk Khan
Mayotte est une île très petite et relativement pauvre. Il est impératif, dans ces condtions, de maîtriser la pression migratoire, assez soutenue, il faut le reconnaître. Et malgré toute la bonne volonté du monde, tout l’humanisme imaginable et inimaginable, Mayotte ne peut pas accuellir toute la misère de cette partie du monde. Un jour ou l’autre les gens finiront par se marcher sur la tête et sur le corps.
Rappelons que les clandestins ne font pas que passer, mais ils viennent s’installer de façon définitive sur le territoire.
"L’exaspération de la population" est plutôt à considérer comme un signe de dépit et d’impuissance. On ne peut pas, je pense, accuser les Mahorais de xénophobie ou de je ne sais quel autre grand mot. Les clandestins sont bien accueillis, intégrés au sein de la population, se marient avec des Mahoraises ou des Mahorais. Mais l’immigration à Mayotte a pris une telle proportion que le seuil de l’implosion sociale semble déjà atteint.
Donc à situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle. C’est tout !
De toute façon, la radicalisation des positions est une réalité des 2 côtés : d’un côté, l’Etat comorien a en effet une grande part de responsabilité dans tous ces drames qui surviennent entre les 2 rives. Le marché de l’émigration au départ des Comores est un business qui ne connaît pas la crise. Les filières sont très bien organisées et ont pignon sur rue. Les clandestins partent en plein jour, au vu et au su de tout le monde. Tout le monde voit que les kwassa sont surchargés et parfois coulent avant même de s’éloigner des rivages anjouanais. Les déclarations irresponsables des dirigeants comoriens invitant les clandestins à envahir Mayotte, "leur territoire", n’est pas fait pour apaiser les tensions. De l’autre côté, les Mahorais commencent à en avoir marre, l’el dorado espéré par les clandestins n’est pas vraiement au rendez-vous. Et les relations deviennent de plus en plus tendues.
Et il appartient aux Mahorais de veiller à ce qu’une équilibre et une paix sociale soit garantie.
Donc, au risque d’être taxé de racisme et de xénophobie, il faut dire les choses clairement, les clandestins doivent rester chez eux !