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PRISONS - Un tour du monde des enfants privés de liberté et de justice
Publie le mardi 27 décembre 2005 par Open-PublishingPRISONS - Un tour du monde des enfants privés de liberté et de justice
Malgré la Convention internationale des droits de l’enfant, partout sur la planète des jeunes sont emprisonnés, dénonce l’UNICEF. Aux Etats-Unis, en Afghanistan, en Israël, aux Philippines, au Rwanda ou ailleurs, des enfants sont victimes de graves violations de leurs droits fondamentaux et survivent dans des conditions inhumaines.
"Aujourd’hui, 143 millions d’enfants vivant dans des pays en développement sont considérés comme vulnérables, soit 1 enfant sur 13 dans le monde. Ces 143 millions d’enfants ont vu mourir au moins un de leurs parents. Plus de 1 million d’entre eux vivent en détention, la plupart du temps pour des délits mineurs", rapporte le quotidien mauricien L’Express, qui reprend le rapport de l’UNICEF (le Fonds des Nations unies pour les enfants) sur la situation des enfants dans le monde, rendu public mi-décembre.
Ce document précise encore : "Les conditions dans lesquelles ces enfants emprisonnés survivent sont fréquemment déplorables et inhumaines - les violences physiques sont courantes (os cassés, mains fracturées, tympans percés, hématomes et autres blessures) et ils sont victimes de profonds traumatismes psychologiques causés par la torture et les interrogatoires."
"Nous ne connaissons pas le nombre exact d’enfants irakiens incarcérés sur le territoire américain", indique The New York Times, "mais la commission internationale de la Croix-Rouge enregistre 107 personnes en détention qui ont moins de 18 ans. Certains d’entre elles ont à peine 8 ans." The New York Times précise encore que "le journaliste Seymour Hersh écrivait voici peu dans le quotidien britannique The Guardian qu’un rapport adressé en 2001 au ministre de la Défense américain Donald Rumsfeld évaluait entre ’800 et 900 le nombre d’enfants pakistanais de 13 à 15 ans emprisonnés’".
Le quotidien américain décrit l’état déplorable des prisons et la manière dont les enfants y ont été traités. "Omar Khadr, un jeune Canadien, avait 15 ans en 2002 lorsqu’il est arrêté en Afghanistan. Il est alors emprisonné à Guantanamo pendant deux ans et demi. Il n’a la possibilité d’avoir ni avocat ni contacts avec sa famille." Pour justifier cette violation flagrante des conventions internationales sur l’enfance, relève encore The New York Times, citant toujours l’enquête de Simon Hersh, "un porte-parole du Pentagone a déclaré que ’l’âge n’a guère d’importance quand il s’agit d’aller en prison’ et que ’ce n’est pas parce qu’elles sont jeunes que ces personnes ne représentent pas un danger potentiel’".
Une opinion que ne partage pas Clarisa Bencomo, de l’organisation internationale de défense des droits de l’homme Human Rights Watch. Elle confie au journal américain : "Il arrive que des détenus trop jeunes pour être responsables pénalement soient incarcérés avec des adultes qui leur font subir de mauvais traitements. Les parents se voient souvent refuser le droit de visite et ne sont pas informés de l’endroit où se trouvent leurs enfants. La détention des enfants est souvent très pénible et difficile à vivre pour leurs familles."
Clarisa Bencomo reconnaît que parmi ces jeunes prisonniers "certains pourraient prendre une arme. Mais même s’ils sont responsables de leurs actes, ils devraient être traités humainement au lieu de subir des tortures ou d’être emprisonnés dans des conditions atroces. La plupart des enfants en détention ne sont pas des criminels. Ils sont arrêtés pour délit de vagabondage ou parce qu’ils ont été pris en train de mendier, de fumer, de sécher l’école ou de boire de l’alcool."
Mais les Etats-Unis ne sont pas seuls à garder des enfants en prison. Daily Times accuse : "Depuis le début de l’Intifada, plus de 2 500 enfants ont été arrêtés. Il y a au moins 340 enfants palestiniens dans les geôles israéliennes. Ces enfants sont considérés comme des adultes, ils font souvent l’objet de tortures physiques et mentales." Mais si le journal pakistanais critique Israël, il se garde bien d’évoquer les mauvais traitements dont sont victimes des jeunes, en particulier des filles, dans certains pays du monde musulman, et notamment au Pakistan. The American Prospect s’en charge, rappelant qu’en "République arabe syrienne, des études soutenues par l’UNICEF sur la justice pour les mineurs ont joué un rôle essentiel pour générer un débat politique et encourager le gouvernement à prendre des mesures concrètes telles que la révision de la législation syrienne et la formation à donner à tous en vue d’améliorer l’administration de la justice pour mineurs".
The International Herald Tribune est, lui, allé à la rencontre des petits prisonniers des Philippines. "Je me suis fait torturé et des prisonniers adultes m’ont brûlé avec les cigarettes," raconte Lando, un orphelin de 16 ans, qui a passé deux mois en prison à Manille parmi les adultes. Le journal américain relève que "selon le rapport de l’UNICEF, plus de 1 million d’enfants dans le monde sont en prison, privés de leur liberté par les forces de l’ordre. Quatre-vingt-dix pour cent d’entre eux en sont à leur premier délit, et souvent il s’agit d’un délit mineur. Aux Philippines, ils sont au moins 20 000 à avoir moins de 18 ans et à être placés dans les mêmes centres de réclusion que les adultes. Ils sont souvent maltraités et victimes d’agressions physiques ou sexuelles."
"Le problème est que le gouvernement philippin applique la même procédure pour les enfants que pour les adultes en matière d’emprisonnement, faute de volonté politique. Il n’existe aucun centre de détention pour les mineurs, ils ne reçoivent aucunes aides sociales ou psychologiques."
Pourtant, une action est possible, comme le montrent les résultats obtenus par l’organisation non gouvernementale philippine Freelava, qui propose un programme de réinsertion dans la société, où les prisonniers mineurs sont accompagnés par des assistantes sociales. "Ce travail porte ses fruits puisque parmi les 500 mineurs qui ont profité de cette opération pendant deux ans, seulement quatre ont commis un nouveau crime", ajoute le quotidien américain.
Quant à The American Prospect, il se souvient que "six ans après le génocide au Rwanda, 4 454 enfants attendaient encore en prison. Plus de 450 d’entre eux avaient été officiellement innocentés de toute participation aux atrocités, mais seulement 196 ont été remis en liberté à ce jour." Le mensuel américain remarque qu’en revanche, "en Namibie, il existe un manuel de formation qui familiarise les policiers avec les normes et les pratiques de la justice pour mineurs. Il contribue à leur faire mieux comprendre les problèmes des enfants aux prises avec la loi."
Et The American Prospect constate : "Une proportion importante des professionnels qui travaillent avec les enfants dans les centres de détention admettent que la plupart de ces jeunes ne devraient pas être incarcérés."