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Rideau sur le Sarko show

Publie le dimanche 14 décembre 2008 par Open-Publishing
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Rideau sur le Sarko show
Sabine Verhest

Mis en ligne le 13/12/2008, libre belgique

Nicolas Sarkozy a trouvé sa présidence européenne "épanouissante". Le chef de l’Etat a géré avec énergie les crises qui se sont présentées. Mais le couple franco-allemand a été mis à mal.
Bon, alors, vous voulez savoir si cela va me manquer ? Peut-être", lâche-t-il en souriant. "Vous n’allez pas m’en vouloir d’aimer l’Europe !" Exalté, Nicolas Sarkozy. Limite surexcité. Plus expressif que jamais et, en tout cas, extrêmement content de lui, vendredi à Bruxelles, alors que sa présidence européenne touche à sa fin. "Pour le dire franchement, je n’ai aucun regret. Les objectifs assignés, on ne les a pas atteints, on a été bien au-delà ! On m’avait dit : six mois, c’est peu. Mais regardez ce qu’on a pu faire en six mois !"

Peu importe si le paquet de mesures climatiques, censé permettre à l’Union de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 20 pc entre1990 et2020, se voit déforcé par les concessions accordées aux uns et aux autres ces deux jours de sommet. "Ce qui se passe est vraiment historique !" Peu importe si le fonctionnement de l’Union est mis à mal par les engagements pris à l’égard des Irlandais pour les amener à ratifier le traité de Lisbonne. "Le processus est relancé !" La modestie n’est pas la caractéristique principale de Nicolas Sarkozy. "L’image de l’Europe est plus forte aujourd’hui qu’au début de la présidence française." Merci qui ?

Trois cacahuètes

Le chef de l’Etat achève dans l’euphorie ses six mois à la tête de l’Union. "Je me suis fait de nouveaux amis !" D’ailleurs Yves Leterme, qui n’est pas précisément connu pour sa sarkophilie, dit lui avoir "fait une accolade physiquement très poussée". On aurait aimé voir ça, l’eau qui étreint le feu. "Ça m’a passionné, ce que j’ai fait, ça a été une ouverture d’esprit pour moi", assure Nicolas Sarkozy. "C’était épanouissant", "facile" même. Et, il faut bien le reconnaître, efficace. Son style arrogant, son fond souverainiste et sa tendance à faire cavalier seul inquiétaient à l’entame de son semestre hyperprésidentiel. Mais il a écouté - "c’est très difficile d’être à l’écoute" - et "été influencé par les gens que j’ai entendus". Il a aussi organisé. "Je n’aime pas qu’on négocie jusqu’à 4 h du matin pour trois cacahuètes. Les gens normaux se couchent à 22 h 30 - 23 h. On prend la parole pour donner son avis une fois, et pas six. Le rôle de la présidence n’est pas de faire une espèce de monstre inidentifiable pour faire plaisir à tout le monde, mais être juste et équitable. Appelez cela du leadership, c’est de l’organisation."

Mais surtout, et c’est là qu’il a été le meilleur, le pompier Sarkozy s’est démené, que ce soit pour calmer Russes et Géorgiens, qui se livraient une guerre au cœur de l’été, ou pour répondre à la crise bancaire et financière, qui s’est abattue sur l’Union et le monde. Il a "triplé le nombre de Conseils européens par rapport à ce qui était prévu" et "ça m’a bien plu". "Il faut que l’Europe soit beaucoup plus réactive." Elle "doit bousculer le monde". L’homme a trouvé un espace à la mesure de son ambition et les Vingt-sept, y compris ceux qui n’arrivent pas à l’encadrer, peuvent se réjouir d’avoir eu à leur tête un hyperactif, ressortissant d’un pays fondateur de l’Union, membre de la zone euro et de l’espace Schengen, du Conseil de sécurité de l’Onu et du G8. On n’ose imaginer ces six mois s’ils s’étaient passés sous présidence tchèque

Au-delà des hommes, il apparaît clairement que la question de la présidence s’avère capitale. "Personne ne peut contester la nécessité d’avoir un président du Conseil européen exerçant un véritable leadership, pas pour six mois, pour deux ans et demi", dit-il. "L’Europe mérite d’être aimée, incarnée, défendue. Elle mérite d’avoir un visage." Le sien ? Pas sûr qu’Angela Merkel apprécierait. Le côté fonceur, ce n’est pas le truc de la chancelière. Face à la crise, lui veut agir, elle éviter la précipitation. La présidence européenne de Nicolas Sarkozy a mis à rude épreuve le couple franco-allemand au-delà d’une divergence de style. Aussi s’est-il ostensiblement tourné vers le Britannique Gordon Brown qui aurait été, "comme à son habitude, un Européen extrêmement constructif" ; et ça, les Allemands peinent à le digérer. Pas sûr non plus que cela serve la Commission. Si Nicolas Sarkozy a associé à ses activités José Manuel Barroso - "très agréable dans les innombrables voyages qu’on a faits ensemble" -, c’est pour le cantonner bien à sa place et se donner une caution européenne.

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