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Guadeloupe : qui a assassiné le syndicaliste Jacques Bino ?
Publie le mercredi 31 mars 2010 par Open-Publishing5 commentaires
DES REVELATIONS FRACASSANTES AUTOUR DE LA MORT DE JACQUES BINO
Le site mediapart, dirigé par Edwy plennel, ancien directeur du Monde, vient de sortir un article qui va faire du bruit, sur les circonstances de la mort de Jacques Bino. Le reporter Erich Inciyan, a mené un véritable travail d’investigation sur ce sujet et a pu avoir accès au dossier de l’instruction.
On découvre pêle-mêle que Ruddy Alexis, le meurtrier présumé n’a jamais avoué le crime qu’on lui reproche et a même fait une grève de la faim pour protester de son innocence. Alors qu’on nous l’a présenté comme "un jeune", on apprend qu’il s’agit d’un père de famille, âgé de 35 ans qui, s’il a commis des erreurs de jeunesse, n’avait plus eu le moindre démêlé avec la justice depuis l’an 2000. Plus grave, le procureur jean-Michel Prêtre avait déclaré qu’on avait retrouvé des balles brennekes (les mêmes que celles qui ont tué Jacques Bino) à son domicile (cf : http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2009/03/01/01016-20090301ARTFIG00019-guadeloupe-le-meurtrier-presume-de-bino-ecroue-.php) Inciyan nous apprend que les seules brennekes retrouvées n’avaient strictement rien à voir avec l’affaire en cours, puisqu’elles avaient été saisies il y a plus d’une douzaine d’années, qui plus est, dans les affaires d’un membre de sa famille, aujourd’hui décédé !
S’appuyant toujours sur le dossier d’instruction, le reporter de Mediapart démontre que les "témoignages précis et concordants", pour reprendre les propos du procureur, mettant en cause Ruddy Alexis, sont en fait un tissu d’approximations et de contradictions, exemples à l’appui, et sous-entend qu’il s’agissait avant tout, au moment de son arrestation, de "désamorcer la crise". Il dénonce l’orientation politique de l’enquête avec l’acharnement des enquêteurs à vouloir relier ce drame au LKP, sur la seule base d’un sms que des milliers de Guadeloupéens ont reçu à l’époque ! Pire, comme je l’avais dénoncé en mon temps (Erich Inciyan cite d’ailleurs Chien Créole et reprend certaines des interrogations et des pistes évoquées par votre serviteur, ainsi que certaines photos extraites du blog), ils font l’impasse sur d’autres pistes qui semblent pourtant beaucoup plus sérieuses, quand ils n’essayent pas purement et simplement de les étouffer... (cf http://chien-creole.blogspot.com/2009/04/contre-enquete.html)
Selon Mediapart, le seul élément vraiment accablant du dossier contre Ruddy Alexis réside dans un témoignage anonyme. Or, comme l’article le rappelle, c’est déjà sur la base de plusieurs témoignages anonymes concordants, toujours à en croire le procureur, que le jeune Patrice Prixam avait été arrêté et brutalisé par le RAID au début de l’enquête, avant d’être totalement innocenté... On sait ce que valent ce genre de témoignages, souvent le fait d’"indics" toujours prêts à rendre service à la police en échange de leur complaisance vis-à-vis de leurs petits trafics.
Au vu de ces révélations, on comprend mal au nom de quoi le juge d’instruction F. Terrier maintient Ruddy Alexis incarcéré à la prison de Baie-Mahault, d’autant que ça fait plus d’un an qu’il croupit à l’isolement, subissant par là-même une pression psychologique redoutable... Enfin, au-delà de la simple personne de R. Alexis, il est révoltant de constater que, comme on pouvait hélas le craindre, il semble se vérifier qu’aucune enquête sérieuse ne semble conduite pour découvrir qui a véritablement tué l’elkapiste Jacques Bino, un certain 17 février au soir...
FRédéric Gircour (chien.creole@gmail.com)
Chien Créole reproduit ici l’intégralité de l’article de Mediapart :
Guadeloupe : qui a tué le syndicaliste Jacques Bino ?
Par Eric Inciyan
Treize mois plus tard, l’enquête livre des éléments sensiblement éloignés de la thèse présentée quand il s’agissait de désamorcer la crise. Des zones d’ombre persistent sur les points forts (la balle meurtrière, les témoignages « concordants ») de la thèse privilégiée, depuis le début, par le parquet – en minorant d’autres pistes, dont celle d’un commando patronal... La mort du syndicaliste, membre de la CGT Guadeloupe et du LKP, conserve pourtant une forte charge symbolique. Dès le 26 février 2009, le militant donnait son nom de baptême à l’accord sur la revalorisation des salaires signé par les organisations syndicales et une partie du patronat local. Un accord qui conditionnait la fin de la grève générale et de ce mouvement d’une ampleur sans précédent : l’« Accord Jacques Bino ».
La nuit de sa mort, Jacques Bino assiste d’abord à un meeting du LKP (Collectif contre l’exploitation outrancière) à Pointe-à-Pitre. Au volant de sa Fiat Punto, il décide ensuite de rentrer chez lui en passant par la cité Henri IV, qu’il connaît bien, afin de contourner les barrages mis en place un peu partout. Arrivé aux abords de ce quartier populaire, il aperçoit une barricade et entreprend de faire demi-tour. Ces faits sont corroborés par le témoignage d’un ami de Jacques Bino, présent à son côté dans la voiture.
Deux coups de feu sont alors tirés en direction du véhicule, dans un secteur plongé dans l’obscurité. Les témoignages concordent pour établir que le tireur est posté près du barrage et à une centaine de mètres de la voiture. Jacques Bino, 48 ans, est mortellement atteint d’une balle à ailettes d’un type très spécial – une « brenneke » ordinairement destinée à la chasse au « gros gibier ». Ce fait est aussi établi : le projectile a traversé le corps du syndicaliste de part en part, selon l’expertise balistique, et les enquêteurs ont retrouvé la balle correspondante dans ses vêtements. Aux abords du barrage d’où le coup de feu est parti, ils ont saisi « un étui calibre 12 de marque FOB avec l’inscription “gros gibiers original brenneke” », selon le dossier judiciaire.
Huit jours après le drame, le 26 février 2009, les policiers du RAID investissent la maison du principal suspect, Ruddy Alexis, que « la rumeur » (selon le témoignage d’un policier) impliquerait dans le meurtre. Sa femme et sa fille sont interpellées, mais l’intéressé échappe à l’arrestation. Se sachant recherché, il va prendre conseil auprès d’un syndicat local (la CTU) dont il est sympathisant. Puis, sur les recommandations des syndicalistes, il se rend spontanément au commissariat de police. A l’issue de sa garde à vue, il est déféré au tribunal de Pointe-à-Pitre, le 28 février, en même temps que quatre autres personnes qui l’impliquent, à des titres divers, dans l’homicide.
Ce même 28 février 2009, le procureur de la République de Pointe-à-Pitre tient une conférence de presse pour annoncer l’incarcération de Ruddy Alexis. L’homme a tout du « coupable idéal » : il a déjà été condamné à trois reprises pour des faits de violences avec arme. Surtout, selon les propos du procureur Jean-Michel Prêtre tels qu’ils sont rapportés par les journalistes présents, « des munitions du même type et de la même marque que la balle à ailettes de type Brenneke et de calibre 12 qui a mortellement atteint le syndicaliste ont été retrouvées “en grand nombre” au domicile du tireur présumé ».
Logiquement, une accusation aussi étayée convainc alors de la culpabilité du suspect que l’ensemble de la presse présente comme « le meurtrier présumé ». Affaire réglée ?
Non. La vérité des faits est sensiblement différente, à lire aujourd’hui le dossier instruit par le juge Fabien Terrier. Commençons par la preuve balistique. Les balles brenneke saisies « en grand nombre » chez le suspect principal l’ont en effet été... en 1996. Ce vieux dossier concernait Ruddy Alexis et son frère Didier (aujourd’hui décédé).
En 1996, donc, deux cartouches portant l’inscription « FOB spécial gros gibiers original brenneke » (selon l’enquête alors diligentée) avaient été trouvées lors d’une perquisition au domicile familial, dans les affaires de Didier et dans la chambre de ce dernier. Soit la référence exacte, à l’époque, des munitions qui ont servi à tué, treize ans plus tard, le syndicaliste du LKP. Dans cette vieille affaire, Ruddy Alexis avait d’ailleurs été innocenté, après quatre mois de détention provisoire ; il avait même obtenu des indemnités de la justice.
Autant dire que, en février 2009, la perquisition au domicile de Ruddy Alexis n’a pas donné le résultat accablant qui a été décrit par le procureur. Comme l’a déclaré Ruddy Alexis au juge d’instruction, les munitions saisies chez lui par les enquêteurs « ne contenaient que des plombs ». Aucune trace du type de balle à ailettes ayant tué Jacques Bino. Interrogé sur ce point par Mediapart, ces 26 et 29 mars, le procureur n’est pas formel. Il confirme avoir tenu les propos reproduits, lors de la conférence de presse, en étant « persuadé que des munitions, dont des balles à ailettes » avaient été trouvées chez Ruddy Alexis. Et aujourd’hui ? « Je ne sais pas si cette question a évolué depuis. »
L’homme si vite présenté comme le « meurtrier présumé », Ruddy Alexis, est incarcéré dans la prison proche de Pointe-à-Pitre, où il est placé à l’isolement depuis plus d’un an. Il n’a jamais avoué et il a fait une grève de la faim pour clamer son innocence. Ajoutons que le « coupable idéal » a fondé une famille, en 2000, date à partir de laquelle il n’a plus connu de condamnation.
Continuons par la thèse officielle, avant d’en préciser d’autres – celle d’un commando patronal, notamment – qui n’ont guère été exploitées par la police. Avancée au début de l’enquête, la thèse principale n’a guère varié, en effet : « Des éléments concordants laissent à penser que celui qui a tiré était persuadé de le faire sur une voiture banalisée de patrouille de la brigade anti-criminalité », avait dit le représentant du parquet à la presse, en février 2009. « Cette hypothèse n’a pas été contredite, ni par les témoignages, ni par les déclarations », confirme le procureur, lundi 29 mars. « Monsieur Bino n’a pas été personnellement la cible d’un tir intentionnel. »
De fait, plusieurs témoins ont décrit un homme criant, en créole, « Messieurs voici la BAC » avant d’ouvrir le feu sur la voiture de Jacques Bino manœuvrant à une centaine de mètres. Mais les témoignages mettant en cause Ruddy Alexis sont peu précis et encore moins « concordants ». Tous décrivent, certes, que le tireur était masqué et portait une tenue de camouflage militaire cette nuit-là. Mais, selon les cas, le suspect a été reconnu à sa taille (variant de « 1,60 mètre » à « 1,75 mètre ») ou à « sa démarche ». Ou encore à « sa voix car il a dit en créole “O Yo”, ce qui signifie “où sont-ils” », ou à son t-shirt « gris » ou « vert » qui dépassait de la veste de camouflage.
Les témoignages des quatre hommes qui se trouvaient en compagnie de Ruddy Alexis, peu avant le drame, puis l’avaient perdu de vue, sont ainsi tissés de contradictions. Déférés en même temps que lui au parquet, ils avaient été vite libérés par le juge de la détention et des libertés. Parmi ces quatre témoignages, un seul affirme avoir assisté directement à la scène du crime. « J’ai vu Jumpy (surnom de Ruddy Alexis) se baisser, épauler son fusil de sorte que son arme était parallèle au sol et tirer à deux ou trois reprises. Je n’ai pas vu la cible. C’est après que j’ai vu le gars mort », a-t-il déclaré aux enquêteurs. Mais il a été beaucoup plus hésitant, lors d’un interrogatoire ultérieur : « Je pense que c’était Jumpy. Je ne peux être formel ».
Exit l’hypothèse d’un commando patronal intervenant ce soir-là
Exit l’hypothèse d’un commando patronal intervenant ce soir-là dans la cité Henri IV ? Elle avait été publiquement pointée avant le drame, le 12 février 2009, par le porte-parole du LKP, Elie Domota, citant deux membres du patronat local : « Willy Angèle et Madame Koury ont déjà fait une annonce, disant qu’ils inviteraient les leurs à prendre leurs dispositions, avait-il déclaré, en créole, sur le plateau de la chaîne Canal 10. Nous savons qu’ils prennent des dispositions, pour tirer sur des gens. Ils ont monté un commando, une milice armée. Ils payent ces jeunes gars 200 euros, avec pour ordre de tirer si les manifestants viennent manifester dans leur magasin. C’est très clair : si une personne est blessée, un membre du LKP, un manifestant guadeloupéen, il y aura des morts. »
http://www.dailymotion.com/video/xblikv_extrait-les-derniers-maitres-de-la_news?start=1
(reportage Canal « Les derniers maîtres de la Martinique »)
http://chien-creole2.blogspot.com/2010/03/des-revelations-fracassantes-autour-de.html
Messages
1. Guadeloupe : qui a assassiné le syndicaliste Jacques Bino ? , 31 mars 2010, 04:47
Conserver la race dit le vieux : Ben moi, je commence a avoir des cheveux blancs des yeux bleux... Bref Breton d’origine, et je pensais quand j’avais 20 ans que ce genre de crevures racistes clamserait avant moi... Plus aussi sûr !!!
Une chose dont je suis sûr : BINO a été ASSASSINÉ !
A tous les salauds... UN JOUR, promis !!!
Carland
1. Guadeloupe : qui a assassiné le syndicaliste Jacques Bino ? , 1er avril 2010, 21:34
Juste un petit éclaircissement : les ailettes d’une balle breneke pour canon lisse ne servent pas a produire plus de dégât sur les chairs ou les os ni a y donner un sens gyroscopique : mais à s’écraser lors du passage de celle ci dans le choque d’un canon. Choque = retrécissement à la bouche d’un canon de fusil de chasse afin de concentrer une gerbe de plombs et pour que celle-ci ne se disperse pas trop lors de sa sortie. (explication sommaire)
Cordialement Alain 04 chasseur.
2. Guadeloupe : qui a assassiné le syndicaliste Jacques Bino ? , 1er avril 2010, 23:33, par FRédéric Gircour
Oui mais là on ne parle pas de plombs, ami Alain. Ce ne sont pas des plombs qui ont tué Bino.
3. Guadeloupe : qui a assassiné le syndicaliste Jacques Bino ? , 2 avril 2010, 06:26
Je ne parle pas de plomb mai de balle ou on laisse supposer que les ailettes comme l’on fait les journaliste et le représentant de l’état sont d’une gravité extrême. je voudrais savoir quel genre de gibier chasse on avec des balles pour canon lisse en Guadeloupe et qui en détient à par les représentant de l’ordre. Alain 04
2. Guadeloupe : qui a assassiné le syndicaliste Jacques Bino ? , 20 février 2012, 21:10, par Franoise
Si Ruddy Alexis est en prison alors qu’il est sensiblement innocent, que fait-il encore dans cette prison de Baie-Mahault ? Il n’y a pas de preuves tangibles qu’il soit le coupable, alors il faut qu’il retrouve sa famille et le plutôt possible. Nulle n’a le droit de priver un innocent de liberté ! Que fait donc la Justice Française ? Est-elle vraiment JUSTE ? Où se cache la VERITE sur la mort de Jacques BINO ?