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Tunisie : la « caravane de la liberté » demande le départ de Ghanouchi

Publie le vendredi 28 janvier 2011 par Open-Publishing
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Temoignage

Tunisie : la « caravane de la liberté » demande le départ de Ghanouchi

Par Henda Chennaoui | journaliste | 28/01/2011 | 09H05
Depuis le dimanche 23 janvier, des centaines de Tunisiens du centre du pays campent à El Casbahm dans la capitalem Tunis, et sous les fenêtres du Premier Ministre, réclamant la démission du gouvernement provisoire et surtout ses membres ex-RCDistes (le parti de Ben Ali, ndlr), à leur tête Mohamed Ghanouchi, serviteur pendant 11 ans de l4ancien dictateur.

Le soir du jeudi, Ghanouchi annonce un remaniement ministériel important écartant tous les ministres RCDistes. Les manifestants de la Casbah expriment leur joie mais déclarent, au même temps, qu’ils continuent à protester contre le premier ministre. « C’est une question de principe ! On ne peut pas accepter El Ghanouchi qui a tant servi la dictature », nous explique Hazem, un jeune cinéaste.

Le mouvement décide, de continuer les manifestations à la Casbah, sans l’UGTT qui déclare, le jour même, son soutien au gouvernement du Ghanouchi.

Entre temps, la police continue à exercer sa violence et son oppression contre les manifestants pacifistes. Quatre nuits, et cinq jours, pendant lesquels, la police torture ces jeunes par plusieurs méthodes. La plus médiocre est d’interdire l’accès des aides (nourritures et couvertures) venant des citoyens.
La methode dure

La deuxième méthode, encore plus dure, consiste à l’agression et la violence. L’un des manifestants, Majdi de Gbeli (Sud de la Tunisie), a témoigné que, le 26 janvier, vers 2h du matin, des milices inconnues, ont débarqué avec des armes blanches et des grosses pierres. Au même temps, la police arrive et surveille de loin sans essayer d’intervenir. « Heureusement que l’armée est venue nous protéger de ces criminels » a jouté Majdi.

Le lendemain, 27 janvier, vers 23h, un jeune homme a témoigné que la police a agressé, gratuitement, un manifestant déjà affaibli par la grève de la faim. « Et pour faire de l’ambiance, ils nous jettent de temps à autre des bombes lacrymogènes » ironise-t-il.

Les manifestants souffrent aussi d’une pression médiatique exagérée. Depuis l’arrivée de la caravane de la liberté, les journalistes ont choisi leur camp : c’est celui du gouvernement provisoire. Les médias tunisiens ont réussi à vaincre la grande masse que « la caravane de la liberté rassemble une bande de malfaiteurs, ivrognes et anarchiques ». les médias ont même allé plus loin en défendant l’ancienne composition du gouvernement transitoire comme étant « le meilleur choix pour la stabilité du pays ».

Plusieurs jeunes tunisiens ont adopté ces opinions et ont fait des compagnes anti- manifestants sur Facebook. Certains ont même mis la photo de Ghanouchi pour le soutenir. La majorité a repris la vie normale et se montre indifférente et parfois hostile aux manifestations qui bloquent, selon les médias, l’économie du pays.

Devant cette manipulation médiatique, la caravane de la liberté a pris la décision de refuser tous les médias tunisiens débarquant à la Casbah pour des reportages. Naiîm, de Ben Arous, explique :

« La presse nationale est manipulée, ses journalistes disent que nous sommes des malfaiteurs… Déjà elle nous a déçus et trahis pendant les évènements du 14 janvier… ».

Et il ajoute

« je suis en contact avec plusieurs journalistes étrangers… nous allons faire entendre notre voix sans la grâce des médias tunisiens ».

Après quelques cris de joie et des félicitations entre manifestants à la Casbah, suite au remaniement du gouvernement provisoire, la caravane de la liberté a décidé, de continuer « la lutte pour nettoyer le pays de tous les corrompus du clan Ben Ali, et à leur tête Mohamed Ghanouchi » nous assurent plusieurs activistes de ce mouvement pacifiste.

Ce vendredi, la caravane de la liberté, organise une marche pacifiste sur tout le centre ville de Tunis avec des avocats, des médecins et d’autres militants de la société civile. Une marche de victoire, mais surtout de réconciliation avec des Tunisois qui les ont un peu déçus ces derniers jours.

http://www.rue89.com/2011/01/28/tunisie-la-caravane-de-la-liberte-demande-le-depart-de-ghanouchi-187856

Tunisie : au 41e jour de la révolution !

Sur le terrain, les manifestations se sont poursuivies, notamment à Sidi Bouzid où l’Union régionale de l’UGTT a appelé à la grève générale.

Dans le même jour, la grève générale dans l’enseignement secondaire a été très suivie.

Par ailleurs, l’occupation de la place La Kasba, où siège le Premier ministre, se poursuit pour le cinquième jour. Les manifestants font l’objet d’une pression importante de la part du gouvernement : mise à part l’intervention musclée de la police de temps à autre, on parle même de tentative de corruption de la part du pouvoir qui aurait offert à chaque occupant une « prime » de 1000 dinars (environ 480 euros) pour quitter la place ! En parallèle, la police et l’armée tentent d’intercepter l’approvisionnement qu’apportent des anonymes aux occupants de la place El Kasba.

Mais c’est, surtout, la réunion de la Commission admirative [sic] (CA) de l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT) qui a retenue l’attention aujourd’hui. On parle d’une proposition qu’aurait fait « le gouvernement d’unité nationale » (GUN) à l’UGTT.

La CA vient de terminer ses travaux il y a quelques minutes, voici ses principales décisions :

— Acceptation d’un GUN allégé de certains ministres de Ben Ali, mais Ghannouchi, Jouini et Chelbi, c’est-à-dire trois ministres de Ben Ali restent au gouvernement. À noter que le GUN du 17 janvier comptait 14 ministres et secrétaires d’État du RCD, tandis que celui qui sera probablement annoncé demain n’aura plus que 3 RCD.

— Non-participation de l’UGTT dans ce GUN revu et corrigé. Le vote sur cette décision a été comme suit : pour = 73, contre = 10 (dont 2 du Bureau exécutif sur 12 membres), abstention = 4.

— Reconstitution des 3 commissions indépendantes afin d’y intégrer des représentants des régions et des jeunes. Ces commissions sont : Libertés politiques… ; Corruption… ; Réformes…

Demain, aura lieu la réunion avec les partis et les autres composantes pour se fixer sur une position finale.

D’ores et déjà, les dés sont jetés. Il s’agira demain pour les différents acteurs, à mon avis, de savoir si on sera dedans ou bien dehors. Chaque partie décidera sa position sur la question suivante : quelle sera la réaction des masses populaires, de la jeunesse et des régions ? Et bien entendu, l’intérêt propre en fonction de l’analyse de la situation.

De toute façon, et quels que soient les partis qui accepteront de rejoindre le gouvernement, il sera bien plus affaibli, et le ralliement probable de nouveaux partis au GUN n’y changera rien. Celui-ci aura à faire face à un sentiment populaire qui refuse toujours les ministres de Ben Ali.

À mon avis, ce GUN modifié continuera à alimenter le mécontentement populaire, lequel se nourrira, en plus de la présence des ministres de Ben Ali, des revendications sociales qui sont déjà immenses, et qui se sont aggravées du fait des retombées des luttes sociales et politiques actuelles.

Enfin, si cette nouvelle version du GUN est acceptée demain, on pourra dire que le bras de fer qui dure depuis le 15 janvier entre le mouvement révolutionnaire d’une part, et le camp de la contre-révolution d’autre part, qu’il a été momentanément gagné par ce dernier.

Mais, je ne lui souhaite qu’une victoire de courte durée ! Affaire à suivre…

Ah oui, j’ai oublié de vous dire que K. Morjane, ex-ministre de Ben Ali, ministre des Affaires étrangères vient d’annoncer sa démission du GUN, ce qui va dans le sens de la formule que j’ai évoquée ci-dessus.

Fathi Chamkhi

Tunis, jeudi 27/01/2011 à 20h.
Fathi Chamkhi est président d’Attac Tunisie.

http://juralibertaire.over-blog.com/article-tunisie-la-gauche-travaille-27-janvier-65943153.html

Messages

  • À Tunis, les manifestants exultent mais crient « Ghannouchi dégage ! »

    « Tunisie libre, Ghannouchi dehors ! » : une explosion de joie accueille jeudi soir l’annonce du départ des principaux caciques de Ben Ali du gouvernement de transition remanié. Mais les manifestants exigent toujours la tête du Premier ministre Mohammed Ghannouchi.

    « Ghannouchi est le chef du gang, il doit tomber ! », crie un manifestant venu de Kairouan, dans le centre du pays. « Nous avons des hommes compétents, capables de le remplacer. »

    Durant la journée, comme tous les jours depuis dimanche, les manifestants venus pour beaucoup du centre défavorisé de la Tunisie ont réclamé le départ du gouvernement sans se laisser décourager par une pluie parfois battante.

    En soirée, alors que commence la distribution de sandwiches et de plats chauds apportés par des Tunisois solidaires, un homme crie soudain que tous les ministres du RCD, le parti de l’ancien président Zine el-Abidine Ben Ali, sont partis, sauf Mohammed Ghannouchi. En réalité, il en reste deux autres sur sept.

    Aussitôt éclatent des cris de joie et des youyous, place du Gouvernement, à la Kasbah, où se trouvent les principaux ministères. Un premier groupe de manifestants, réuni sous les arcades du ministère des Finances, chante avec enthousiasme l’hymne national au milieu des rires.

    Un autre se dirige vers l’immense esplanade située devant la mairie et récite une sourate du Coran à la mémoire des « martyrs », la centaine de Tunisiens tués pendant la répression féroce du soulèvement.

    Un jeune islamiste juché sur les épaules d’un camarade prend alors longuement la parole pour réciter des prières, ponctuées par les « Amen » de la foule.

    « Mais qu’est-ce qu’il fait ? Pourquoi on ne chante pas plutôt l’hymne national ? », s’agace un sexagénaire en pardessus gris. Le groupe finit par se disperser et les chants patriotiques reprennent, tout comme les « Dégage Ghannouchi ! »

    « À mon avis, ce changement ne correspond pas aux demandes du peuple, qui exige que l’ancien régime soit entièrement déraciné du pays. Nous continuerons notre sit-in et j’espère que (la puissante centrale syndicale) UGTT ne prendra pas de décision contraire à la volonté du peuple », affirme Nabil el-Touihri, un syndicaliste tunisois et employé de banque.

    Avant l’annonce du remaniement, l’UGTT avait toutefois indiqué qu’elle acceptait le maintien de Ghannouchi.

    « Il reste encore à faire dégager Ghannouchi, le plus grand des voleurs. Je vous le dis, il partira », assure Brahim Moataz, un jeune manifestant venu du bassin minier de Gafsa (centre-ouest).

    Rare voix discordante parmi les plus irréductibles des manifestants tunisiens, Houssine Boukriaa, originaire de Tataouine (sud) qui se réchauffe autour d’un petit feu de camp en compagnie de ses cousins, se dit satisfait par le changement. « Les gens ne comprennent pas qu’il s’agit seulement d’un gouvernement intérimaire. Personnellement, ça me convient. Ghannouchi a dit qu’il se retirerait de la vie politique dans six mois alors qu’on le laisse travailler », dit-il.

    Son entourage manifeste bruyamment son désaccord.

    « Non, non, Ghannouchi doit dégager. Ils me dégoûtent, tous, ils n’ont jamais rien fait pour nous, pourquoi changeraient-ils maintenant ? », demande Néjib, un jeune chômeur de Tataouine, qui dit avoir écrit sans relâche au Premier ministère pour expliquer ses problèmes sans jamais avoir reçu de réponse.

    Dans la foule des manifestants, un jeune homme s’est cousu la bouche pour réclamer le chute du gouvernement. D’autres personnes ont entamé une grève de la faim. Au moins trois d’entre elles ont dû être hospitalisées jeudi soir.

    Leur presse (La Dépêche), 28 janvier 2011.

    http://jacques.tourtaux.over-blog.com.over-blog.com/