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Chili, 11 Septembre 1973 - Soirs d’euphorie, matin de désespoir (extrait)

par Pierre KALFON 2003

Publie le mardi 11 septembre 2012 par Pierre KALFON 2003 - Open-Publishing
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"4 septembre 1970.

Je me souviens de l’élection de Salvador Allende.

De la folie joyeuse qui s’était emparée peu à peu de la foule. Des rires et des embrassades dans la rue avec des inconnus qui n’étaient plus des inconnus puisqu’ils se réjouissaient aussi.

Ce 4 septembre 1970, Santiago sortait de l’hiver ; la nuit allait tomber. On avait attendu longtemps les résultats de cette présidentielle si dis- putée. Trop longtemps sans doute pour l’impatience inquiète de ceux qui caressaient encore l’espoir d’une victoire de la gauche et qui frémissaient de l’envie de sortir crier leur joie dans les rues.

Au début, un bruit s’était répandu, inquiétant. Des trois candidats, c’était celui de droite qui l’emportait. Déjà, les partisans de Jorge Alessandri descendaient des beaux quartiers vers le centre-ville en brandissant, narquois, des drapeaux chiliens aux portières des voitures, dans un concert de klaxons. Et puis la rumeur s’était dégonflée, les estimations avaient basculé. Les klaxonneurs, moins farauds, étaient remontés vers leurs demeures cossues au pied de la Cordillère.

On avait encore attendu. Et soudain, ce fut comme une houle. Allende arrivait en tête ! Allende, porté par la coalition de l’Unité populaire. Socialistes, communistes, radicaux, chrétiens de gauche s’étaient unis face à une droite divisée. Cette fois, la victoire était bien là. On hésitait encore, presque incrédules. Pourtant, les chiffres parlaient. Ce n’était peut-être pas un raz-de-marée, mais qui s’en souciait ? Avec plus de 36 % des suffrages, le candidat de la gauche devançait nettement le vieux conservateur Alessandri et, de loin, le démocrate-chrétien Radomiro Tomic. Sans équivoque, Allende faisait le meilleur score. L’éternel vaincu des présidentielles, celui qui, après trois échecs, ironisait, sarcastique, sur l’épitaphe qu’on lui accorderait à sa mort : « Allende, candidat à la présidence », le voilà à présent qui faisait mentir les Cassandre.On criait, on sautait - « El que no salta es momio ! » (...)"

-> L’article est à retrouver en intégralité dans le numéro actuel de Manière de Voir (Ed. Monde Diplomatique) actuellement en kiosque sur "Les gauches au pouvoir"

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