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Le p’tit bourgeois se rebiffe

Publie le dimanche 11 mai 2008 par Open-Publishing
9 commentaires

de P’tit Nico

Sans tabous ni trompettes (de la renommée).

Dans un article récent ("Qu’est-ce que construire une alternative ? 01" et "Qu’est-ce que construire une alternative ? 02" ) Patrick Mignard, tel qu’il signe, nous invite à "faire le bilan de ces presque deux siècles d’erreurs" et "donc, à une révision radicale de la "dialectique de l’Histoire" (à laquelle) il faut procéder, et cela sans réticence et sans tabou… au risque, dans le cas contraire, à reproduire les mêmes erreurs et de se réduire à l’impuissance."

Dans son effort de simplicité (que celui qui n’a jamais rêvé d’une synthèse en quatre lignes de l’erreur et de la vérité, éblouissant par sa clarté le chemin de la rédemption des justes, lui jette la première lettre), à la suite de nombreux autres textes que j’avoue ne pas avoir tous lus, P. M., tombant évidemment dans le simplisme, a le mérite de donner à voir le projet ou la position qui sous-tend sa démarche.

Au vu de l’absence de références (d’où, suppositions : Change the world without taking power ("Changer le monde sans prendre le pouvoir" de John Holloway, éd. Syllepse, Paris, janvier 2008) ? L’An 01 revisité ("On arrête tout, on recommence et c’est pas triste ») ? Ou encore expérience anarchiste de la communauté La Cecilia au Brésil en 1890 ?), quel est le fondement de cette proposition que l’on trouve dans un autre texte de P.M. de mai 2007 ("La "démocratie" contre la démocratie" ) : "C’est donc sur un autre terrain qu’il faut aujourd’hui poser la question stratégique… terrain sur lequel n’intervient aucune organisation… sinon pour s’en servir uniquement de faire valoir, le terrain de l’alternative sociale et politique.

C’est dans ce nouveau champ que doit se construire la véritable démocratie, le monde nouveau, par une pratique alternative qui a la fois fondera une véritable autonomie et autodétermination du citoyen par rapport à un système qui l’oppresse et jettera les bases de rapports sociaux nouveaux. On est alors loin des grenouillages et artifices des élections.

Dans ce domaine tout est à faire, quoique des bases ont déjà été posées, dans le débat et la réflexion économique et sociale depuis le 19e siècle, mais aussi et surtout au travers des structures alternatives qui, plus ou moins empiriquement se sont installées dans le paysage social et économique. Ce sont ces structures qu’il faut développer, étendre, fédérer, intégrer dans une stratégie de critique, de contestation et de dépassement du système marchand. Ce sont ces structures et leur développement qui doivent porter les espoirs pour demain…

Le pouvoir néo conservateur va désormais tout verrouiller : les médias, les institutions. Il va limiter nos marges de manœuvre et d’action par la loi et la répression. S’affronter directement à lui est suicidaire, marcher sagement dans les limites qu’il nous autorise c’est capituler.

Nous n’avons désormais plus le choix. Laissons aux "Sisyphe" de l’action politique le soin et la tâche de rouler indéfiniment la roche de leurs espoirs toujours déçus sur la pente abrupte du parcours du combattant imposé par le système.

Investissons de nouveaux espaces de pratique et de liberté.

Inventons un autre rapport au politique."

Car il s’agit bien de construire « la véritable démocratie, le monde nouveau » (« Construire... ») (dont évidemment on ne nous dit rien vu qu’il est à construire) selon la stratégie défendue par P.M sur le modèle (?) du développement souterrain (social) de la bourgeoisie sous l’Ancien Régime qui après avoir suffisamment colonisé la "réalité" économique n’a plus qu’à conquérir le pouvoir politique par la pichenette de l’action révolutionnaire utilisant "opportunément" des éléments de la situation : « Ce n’est que lorsque l’ancien système est obsolète, a développé ses contradictions au point d’être insupportables et que les nouvelles structures sont opérantes, sont acceptées que le passage à un "autre monde" est possible. » C’est aussi inéluctable que la loi du dépérissement du capitalisme par la baisse tendancielle inéluctable elle aussi du taux de profit, mais ça ne doit pas en être puisque ce dont il s’agit c’est de se débarrasser, justement, de la croyance dans un « déterminisme historique » et d’ « une conception erronée de la "dialectique de l’Histoire" ».

Pour cela, autant s’auto attribuer directement la mission rédemptrice (ce qui a l’avantage de ne pas la soumettre et se soumettre soi-même à l’élection/désapprobation des autres) :

« Si tout ceci est exact nos (c’est moi qui souligne) tâches sont claires :
déconstruire la vision naïve et simpliste que nous avons de l’Histoire héritée du 19e siècle,
 reconnaître, en dépit de toutes nos réticences, du moins de celles de certains, l’échec total de cette vision et les catastrophes qu’elle a entraîné ;
 repenser la "dialectique de l’Histoire" et y adapter une nouvelle stratégie. »
Pour cela encore, « revisiter l’Histoire est un travail indispensable, et cela sans à priori, sans préjugés, sans tabou. Ne plus expliquer les faits par les textes, mais soumettre la critique des textes par les faits. »

Car, bien sûr, les faits, du moins leur constat et leur interprétation (mais les "faits" sont-ils autre chose que ce qu’"on" en "fait" ?), se suffisent à eux-mêmes. La "preuve" ? « Dans le premier cas, tout a échoué,…citez une seule expérience de dépassement du capitalisme qui ai réussi !... ». _ Ben, non. Je peux pas. Ah ! Vous voyez bien que j’ai raison. DONC, vous voyez bien que Marx (mais P.M. ne le cite même pas, de peur de se brûler le stylo ?) a raconté des conneries : « Dans la foulée des progrès de la Science, du développement du Progrès technique et scientifique, dans tous les domaines, des penseurs de l’Histoire, de l’Economie et disons, des Sciences Morales et Politiques, ont élaboré des théories, voire des "modèles scientifiques", ou déclarés comme tel, qui devaient tracer une bonne fois (foi ?) pour toutes, la manière de s’y prendre, d’agir, bref qui déterminaient la "juste stratégie " pour dépasser définitivement, et sans retour possible, le système marchand dominant. (...) Avec le recul du temps, le bilan des analyses, prédications, et autres actions entreprises, est totalement négatif : toutes les tentatives ont échoué,… et pour celles qui avaient ouvert les plus grands espoirs, le retour en force du capitalisme – en principe définitivement vaincu -, dans sa phase la plus inhumaine, sonne le glas des théories qui les avaient fondé. » Enfin, c’est ce qu’aimerait bien P. M. pour qui l’anticommunisme guerrier (c’est-à-dire la guerre contre l’ouvrier) qu’il relaie compte pour du beurre dans "son" Histoire.

Certes, qui ne sera d’accord pour constater que « Les "théoriciens" et "stratèges", au lieu d’essayer de comprendre "où est l’erreur ?"… préfèrent triturer les textes sacrés pour leur faire justifier la situation présente et leur incapacité à penser une stratégie.
Mythifiant les expériences passées – et qui ont toutes échoué – ils les intègrent dans les fastes de leur liturgie politique … leur redonnant une vie non plus comme exemple à suivre mais comme symboles de ce à quoi ils ont cru.
Le constat de l’échec théorique et des pratiques n’a jamais été fait sérieusement, il a été éludé au nom de la "mémoire" ( ?), du "respect de celles et ceux qui ont lutté" ( ?), en fait au nom d’une mythification quasi religieuse du passé. L’erreur commise et qui devrait être un facteur de progrès est devenue une pièce de musée que l’on refuse d’examiner et qui peu à peu se recouvre de poussière faisant disparaître ses formes. » Dont acte.

D’où le verdict sans rémission : « La démarche philosophique qui se voulait à l’origine, critique, a sombré dans un intégrisme qui ne dit pas son nom mais qui révèle une pseudo pratique qui en dit long sur l’obscurantisme de la pensée et l’impuissance qu’elle produit. La rhétorique radicale tenant lieu de prêche incantatoire. Incontestablement, et aussi dur que cela puisse être à admettre, la problématique de l’alternative – on n’employait pas ce mot à l’époque – posée dès le 19e siècle a été fausse. »

Pour en arriver à la conclusion qui est forcément l’aboutissement anticipé de la démonstration : « la classe ouvrière des pays industriels développés, n’a jamais renversé le capitalisme. »

Place au p’tit bourgeois.

Ce qu’a très bien compris Christian Delarue, qui signe comme tel son commentaire à l’article, s’appuyant sur Gramsci, via Daniel Bensaïd : « Cette compréhension élargie de la notion d’hégémonie permet de préciser l’idée selon laquelle une situation révolutionnaire est irréductible à l’affrontement corporatif entre deux classes antagoniques », reprenant (mais lui ne les cite pas) en cela la théorie de « l’ordre démocratique pluraliste agonistique » de Chantal Mouffe et Ernesto Laclau. Dit plus clairement encore : « L’introduction du concept d’hégémonie modifie la vision du rapport entre le projet socialiste et les forces sociales susceptibles de le réaliser. Elle impose de renoncer au mythe d’un grand Sujet de l’émancipation. Elle modifie aussi la conception des mouvements sociaux, qui ne sont plus des mouvements "périphériques" subordonnés à la "centralité ouvrière", mais des acteurs à part entière, dont le rôle spécifique dépend strictement de leur place dans une combinatoire (ou articulation hégémonique) de forces. »

Exit, donc, la classe ouvrière, place au « peuple », concept flou qui « pour les altermondialistes, lit-on sur le site d’Attac, est sur un territoire donné l’ensemble de la population résidente y compris celle d’origine étrangère. »

Un tabou, néanmoins, n’est pas levé : c’est celui de la place sociale de l’auteur (P.M.), pour qui "petit-bourgeois" ne peut être qu’une insulte : « Alliant la foi dans des valeurs proclamées et une rigueur "scientifique" empruntée aux sciences exactes, leurs ouvrages sont devenus plus que des ouvrages de références incontournables, mais carrément des textes sacrés, dont les adeptes ne pouvaient souffrir, et ne peuvent souffrir, la moindre critique – toute contestation étant considérée comme hérétique, antiscientifique ( ?) et pour couronner le tout "petite bourgeoise" ( ?). » (« Construire... »)
Un professeur d’économie, même à la retraite, n’est-il pas un « petit bourgeois » ? Ne fait-il pas partie de la « nouvelle classe moyenne » d’encadrement de la classe ouvrière, distincte en cela de la "petite bourgeoisie traditionnelle" ? (Pour les détails, voir la série des "Chomdu" ).

Certes la classe ouvrière n’a pas réalisé la société communiste à ce qu’on sache, mais cette nouvelle petite bourgeoisie ne participe-t-elle pas à cet empêchement, soit par sa fonction sociale au service de la bourgeoisie (les détenteurs du capital), soit par le détournement des luttes prolétariennes (abolition de la propriété privée des moyens de production, abolition du salariat, autogestion coopérative, abolition de la séparation "travailleur manuel"/"travailleur intellectuel") vers les luttes des "mouvements sociaux" particularistes (ce qui ne signifie pas qu’il ne faille pas prendre en compte les différentes spécificités de l’exploitation concrète dans la lutte, faut-il le préciser ? - Oui, bien sûr qu’il faut le préciser ! - C’est plus facile quand on se fait les questions et les réponses soi-même.) ?

Le nouveau petit-bourgeois (qui comprend LA et LE n-p-b, cela va de soi) dont la fonction sociale est d’occuper, d’accaparer tous les lieux et instances de parole pour moraliser l’ouvrier, pour l’éduquer, pour le juger, pour le punir, pour lui vendre des produits de merde que ce soit un aspirateur ou un président de la république, pour lui faire prendre sa vessie pour une lanterne, pour lui faire prendre conscience de sa réalité d’exploité (!), etc.. (ce qui ne l’empêche pas lui-même d’être soumis à ces mêmes contraintes normalisatrices mais un peu moins statistiquement et brutalement parlant, voir l’espérance de vie et les accidents du travail) a plusieurs attitudes possibles : soit il adhère à l’idéologie de sa classe (il n’en est pas conscient, lui non plus !) et "croit" à sa "mission" médiatique civilisatrice, soit il en est conscient et opte pour le cynisme ou la fuite dans différentes pratiques "alternatives" y compris révolutionnaires que lui autorise le système s’il ne supporte pas sa vie de merde et sa conscience de merde (qualificatif qui justifie que l’on puisse alors utiliser de manière fondée le mot "petit bourgeois(e)" dans sa connotation d’insulte scatologique), soit, conscient des limites absolues de sa condition petite-bourgeoise, il se soumet sans discussion au leadership de la classe ouvrière : « Chapeau bas devant la casquette, à genoux devant l’ouvrier » (chanson de 1848, année de la parution du Manifeste du Parti communiste).

La mauvaise conscience inhérente à la psychologie du petit-bourgeois (de le, de la) empêche celui-ci malheureusement la plupart du temps de reconnaître son « être » social petit-bourgeois, caca. Aussi se nomme-t-il « de gauche », supprimant du même coup toute chance de se situer objectivement dans la lutte sociale (de classe ! Mais justement c’est ça qui disparaît dans le tour de passe-passe).

Une des notions décisives où se joue ce tour est l’appellation « travailleur intellectuel ». Remplacez travailleur par ouvrier, l’enjeu saute aux yeux.
D’où la persistance (et son succès encore actuel) de cette notion de "travail" auprès des gens (militants et non militants) « de gauche ». Alors que le concept « travail » (est-il nécessaire de préciser là aussi qu’un concept recouvre des pratiques concrètes ? - Oui, il faut - Merci) est consubstanciel à l’organisation de l’activité capitaliste (ce qui veut dire qu’il n’existe pas en dehors, et que donc, il faut appeler autrement la même apparence d’activité dans un autre système, mais c’est un autre débat) : travail = consommation d’énergie (KG/calories) x durée (T) = consommation de la force de travail x nb d’heures = salaire (quantité de temps de travail socialement nécessaire pour produire les marchandises nécessaires au maintien de la force de travail) + profit (surtravail non payé).

Aux défenseurs des « potentialités révolutionnaires du salaire socialisé » (Bernard Friot - Pour un imaginaire communiste du salaire) je me bornerai à citer la conclusion du rapport que le pote Karl à présenté aux réunions du Conseil général de l’Association internationale des Travailleurs les 20 et 27 juin 1865, « Salaire, prix, profit » : « Ces quelques indications suffiront à montrer que le développement même de l’industrie moderne doit nécessairement faire pencher toujours davantage la balance en faveur du capitaliste contre l’ouvrier et que, par conséquent, la tendance générale de la production capitaliste n’est pas d’élever le niveau moyen des salaires, mais de l’abaisser, c’est-à-dire de ramener, plus ou moins, la valeur du travail à sa limite la plus basse.
Mais, telle étant la tendance des choses dans ce régime, est-ce à dire que la classe ouvrière doive renoncer à sa résistance contre les atteintes du capital et abandonner ses efforts pour arracher dans les occasions qui se présentent tout ce qui peut apporter une amélioration temporaire à sa situation ? Si elle le faisait, elle se ravalerait à n’être plus qu’une masse informe, écrasée, d’êtres faméliques pour lesquels il n’y aurait plus de salut. Je pense avoir montré que ses luttes pour des salaires normaux sont des incidents inséparables du système du salariat dans son ensemble, que, dans 99 cas sur 100, ses efforts pour relever les salaires ne sont que des tentatives pour maintenir la valeur donnée au travail, et que la nécessité d’en disputer le prix avec le capitaliste est en connexion avec la condition qui l’oblige à se vendre elle-même comme une marchandise. Si la classe ouvrière lâchait pied dans son conflit quotidien avec le capital, elle se priverait certainement elle-même de la possibilité d’entreprendre tel ou tel mouvement de plus grande envergure.

En même temps, et tout à fait en dehors de l’asservissement général qu’implique le régime du salariat, les ouvriers ne doivent pas s’exagérer le résultat final de cette lutte quotidienne. Ils ne doivent pas oublier qu’ils luttent contre les effets et non contre les causes de ces effets, qu’ils ne peuvent que retenir le mouvement descendant, mais non en changer la direction, qu’ils n’appliquent que des palliatifs, mais sans guérir le mal. Ils ne doivent donc pas se laisser absorber exclusivement par ces escarmouches inévitables que font naître sans cesse les empiétements ininterrompus du capital ou les variations du marché. Il faut qu’ils comprennent que le régime actuel, avec toutes les misères dont il les accable, engendre en même temps les conditions matérielles et les formes sociales nécessaires pour la transformation économique de la société. Au lieu du mot d’ordre conservateur : "Un salaire équitable pour une journée de travail équitable", ils doivent inscrire sur leur drapeau le mot d’ordre révolutionnaire : "Abolition du salariat".

Après cet exposé très long et, je le crains, bien fatigant, mais qu’il me fallait faire pour traiter de façon satisfaisante mon sujet, je conclurai en proposant d’adopter la résolution suivante :

1. Une hausse générale du niveau des salaires entraînerait une baisse générale du taux des profits, mais ne toucherait pas en somme au prix des marchandises.

2. La tendance générale de la production capitaliste n’est pas d’élever le salaire normal moyen, mais de l’abaisser.

3. Les trade-unions agissent utilement en tant que centres de résistance aux empiétements du capital. Elles manquent en partie leur but dès qu’elles font un emploi peu judicieux de leur puissance. Elles manquent entièrement leur but dès qu’elles se bornent à une guerre d’escarmouches contre les effets du régime existant, au lieu de travailler en même temps à sa transformation et de se servir de leur force organisée comme d’un levier pour l’émancipation définitive de la classe travailleuse, c’est-à-dire pour l’abolition définitive du salariat. »

Lela petit(e)-bourgeois(e) a tout intérêt à assimiler le caractère d’exploitation de l’activité ouvrière que le terme travail contient à leur propre activité intellectuelle au service du capital pour nier magiquement leur place de petit-bourgeois. De même que le terme "salariés" sert en confondant l’origine des différents salaires à escamoter la spécificité du travail ouvrier seul à l’origine du profit. Mélangeons, mélangeons, le prolo n’y retrouvera plus ses petits.

Dans un article du 26 mars 2008, la camarade La Louve, puisqu’elle signe ainsi, (pour prendre un exemple qui montre mon courage anonyme d’exercer ma critique à l’encontre de l’égérie de nombreux "bellaciens", fans dont je vais à n’en pas douter subir les foudres olympiennes, ce qui me permet de préciser - le faut-il ? - que je m’en tiens à l’ordre du discours et non aux personnes dont je respecte les engagements concrets. - D’autant plus qu’elle nous y invite elle aussi dans un autre article "La tentation de la parodie (1968-2008)" du 11 avril 2008 : « Notre rôle est de réfléchir, beaucoup, vite, sans tabou et tous ensemble. » Ne nous privons pas.) : "Pour le communisme : Penser hors du chef"" n’écrit-elle pas : « Or, si l’intellectuel est aussi un ouvrier comme un autre – et vice versa - » ? Le glissement de "travailleur" à "ouvrier" n’est pas anodin, on s’en doute, lorsqu’il s’agit de se positionner dans la structure d’un parti que l’on désire "ouvrier" (Besancenot par exemple a dit "travailleur intellectuel" dans son interview sur Canal+ dimanche dernier). Ce qui est immédiatement et clairement affiché : « et à ce titre, a évidemment toute sa place dans une organisation communiste ». Un petit-bourgeois en tant que tel n’aurait-il pas sa place dans le parti des communistes ? Si, mais peut-être pas « toute » une place à l’égal de l’ouvrier. C’est ce qui explique l’allusion à la querelle Luxembourg/Lénine « sur les notions d’avant garde éclairée et de dictature des chefs, "que faire" vs/ "marxisme contre dictature" ». Dans son nouvel article "Sur le communisme. Il y a loin de la coupe aux lèvres...." du 9 mai 2008 , elle enfonce d’ailleurs le clou : « cette classe, notre classe (je souligne), celle des prolétaires, de tous les travailleurs », « pour éveiller la conscience de la partie des prolétaires qui peut encore estimer se satisfaire de son sort (ce sentiment qui fait que les cadres (sic !), dans une entreprise, ne s’estiment pas dans « le même bateau » que les ouvriers ou le personnel technique par exemple…) »...

Si Christian Delarue met en cause la notion d’hégémonie pour évacuer la classe ouvrière, pour la camarade La Louve il s’agit d’amalgamer intellectuel et ouvrier, petit bourgeois et prolo, pour que le petit-bourgeois justement prenne la place qui doit lui revenir : « Notre rôle (à nous communistes) est aussi d’agir,d’encadrer ,de soutenir. Notre rôle est d’agir sur nos propres structures, par tous moyens. Notre rôle est , toujours, plus que jamais, d’éclairer la route. Pas parce que nous serions meilleurs, mais parce que nous sommes plus engagés, parce que nous sommes plus déterminés, parce que nous avons plus d’expérience. » (« La tentation... »).

Parce que l’enjeu est bien celui-là. Citons P’tit Nico (Chomdu 27) :
 C’est pour ça qu’la p’tite bourgeoisie qui prétend épouser les positions d’la classe ouvrière, parce qu’« la conscience qui est la conscience communiste (...) peut se former aussi, bien entendu, dans les autres classes quand on voit la situation de cette classe » comm’ y dit l’pote Karl, « ne peut-être unifiée qu’en s’unissant à la classe ouvrière sous l’hégémonie et la direction de celle-ci », y dit l’pote Poulantzas.
« Mais ces éléments, qui ont été poussés vers nous par la misère sociale, politique et intellectuelle des conditions actuelles, amènent avec eux une manière de penser qui nous est tout à fait étrangère, une conception différente du but et de la méthode de lutte du socialisme. Il faut d’abord qu’ils soient élevés par l’éducation au point de vue de classe du prolétariat, il faut qu’ils soient subordonnés, assimilés au socialisme prolétarien. » qu’ell’ dit la pote Rosa -

Le petit bourgeois nouveau ne conçoit pas de ne pas avoir la place qu’il estime devoir être la sienne sur l’estrade. Et l’on est bien obligé d’émettre la suspicion d’une stratégie de la lutte pour « la place » (qui est à la mode depuis toujours, n’en déplaise) dans le Parti, qui, malgré son masque, vieux comme l’opportunisme lui aussi, de la rhétorique des appels aux mises en cause des directions majoritaires qui refusent les « débats de fond », et donc des « chefs ». Or, cette question ( « comment des communistes peuvent-ils et doivent-ils penser leur organisation hors des notions de chef et de clans ? ») elle la pose en occultant curieusement la dimension institutionnelle du fonctionnement de l’organisation telle qu’elle est validée par la "majorité" de ses membres (sauf à mettre en question la légitimité ou la légalité de cette validation). [Pour ne pas alourdir ce texte, voir l’analyse de texte en PDF à la fin de ce texte].

Le glissement de « travailleur intellectuel » à « ouvrier intellectuel » fait ici sens et apparaît comme mépris de l’ouvrier. Qu’est qui embarrasse dans le fait de se présenter comme petit bourgeois alors même que "l’ouvrier" n’est certainement pas dupe ? Que le "vouloir" (plus que le penser ou le souhait) d’une société dans laquelle chacun participera à l’activité de production et à la réflexion sur les rapports sociaux qui y sont liés (ouvrier "et" intellectuel, donc c’est-à-dire individu autonome émancipé) soit la motivation de ceux qui tendent vers le communisme n’empêche pas que dans la société capitaliste d’aujourd’hui la division manuel/intellectuel participe de l’oppression. Le nier, en tant que petit bourgeois, revient à vouloir berner l’ouvrier sur la situation objective, notamment en traduisant l’intention, en tant qu’avant garde éclairée autoproclamée, de prendre la direction du parti ouvrier (d’où la phrase : « et à ce titre, a évidemment toute sa place dans une organisation communiste », qui permet de se positionner, "au même titre" que l’ouvrier, dans la lutte des places pour la direction du parti).

Le mépris affiché ici (le prolo a besoin de gens fait pour ça qui pensent pour lui, c’est-à-dire des petits bourgeois détenteurs de l’art du verbe-iage) se retrouve dans l’attitude exprimée lors des révoltes des banlieues vis à vis des actes des jeunes (notamment qui brûlent les bibliothèques) que certains bien pensants qualifient de non politiques. Pour le petit bourgeois de gauche, manifester une attitude politique lorsqu’on fait partie des opprimés c’est forcément s’exprimer "à gauche", voire à "l’extrême gauche", avec des postures "de gauche". Que le prolo s’exprime politiquement "à droite", voire à "l’extrême droite", lui paraît être une erreur de la nature (sur ce point LL nous donne un autre exemple dans son article ( Sur le communisme...) : « Disons qu’un prolétaire qui lutte contre ses intérêts est un travailleur qui n’a pas encore croisé le communiste susceptible de lui éclairer sa lanterne. » Donc ne relevant pas du politique, mais de l’errance idéologique. Comment les patrons recruteraient-ils leurs nervis et la police ses flics nazillons s’il n’y avaient pas des prolos d’extrême droite pour faire leur sale boulot ? Et des p’tits bourgeois itou ? De quel droit ou selon quelle logique un ouvrier avec emploi ou sans ne pourrait-il avoir une conscience politique de droite (comme de gauche d’ailleurs, et même de ni droite-ni gauche re-d’ailleurs, tout ceci ne préjugeant pas du fait que brûler un équipement public, même une bibliothèque, est révolutionnaire ou pas) ?

La fabuleuse intuition de Marx de s’appuyer sur les théories dominantes à son époque (gardons à l’esprit l’extraordinaire foisonnement créatif du capital dans tous les domaines, philosophique, scientifique, technologique, social, dans un climat idéologique marqué par les Lumières et ses zélateurs qui ne prenaient pas outre mesure ombrage de la condition ouvrière ou de celle des colonies, plus préoccupée qu’ils étaient à défendre le droit à "leur parole", "leur" liberté de la presse et "leurs" nouveaux comptes en banque, etc.) pour donner dignité à la classe ouvrière en l’élevant au premier rang dans l’espèce humaine en tant qu’avenir de l’humanité. « Nous ne sommes rien, soyons tout » ! Quel slogan géant pour générer une identité collective fondée sur une "loi" naturelle historique et l’analyse du capitalisme. Voilà le prolétaire, qui n’a rien et encore moins le droit à la parole, vivant dans des trous sous la terre, doté grâce à cette illumination sublime d’une dimension sociale, projeté au coeur de l’action sociale, y tenant le premier rôle avec pour destin inéluctable de régénérer le genre humain à partir de sa condition misérable. Quel coup de pub ! Quelle promo ! Seul les Pères de l’Église avaient fait aussi bien. À la nuance prés que le paradis promis était au ciel, courbait l’échine en prônant la soumission, alors que celui de Marx est sur la terre, redresse la tête et incite à la douce révolte.

J’aime à croire que Marx a pensé comme tel ce tour magistral seul capable de permettre à des individus réduits à l’état de bête par la fatigue, les conditions de travail, de survie et d’existence, soumis à la pression idéologique de la religion, du chef, acculturés, de donner du sens à leurs révoltes (qui n’ont pas attendu Marx) et de se reconnaître collectivement. Si l’on considère les forces autant matérielles que culturelles, idéologiques, psychologiques, auxquelles ils se confrontaient en redressant la tête, le tour de force est à la hauteur du génie de Marx et de son engagement concret auprès des prolétaires : opposer à la naturalisation des rapports sociaux par les "sciences" capitalistes (sélection naturelle, lois sociologiques, lois du marché, etc.) et la téléologie religieuse, la "loi naturelle" du dépérissement inéluctable du capitalisme et de l’avènement inéluctable du communisme.

Seuls des idolâtres peuvent croire que cette pensée puisse être exempte de contradictions, d’errements, de dévoiement. Cette capacité de donner à saisir à l’ouvrier la mécanique de l’exploitation concrète immédiate qu’il subit et dans le même mouvement le support pour s’en libérer me donne à penser que si Marx pensait vraiment que l’Histoire avait pour fin inéluctable l’émancipation de l’homme dans une perspective d’humanisation communiste nul doute qu’il lui suffisait de laisser faire et de tirer profit de son état de petit bourgeois en se livrant à la lutte des places universitaires au lieu de vivre dans la misère. Mais il savait que seul le prolétaire pourrait se libérer de ses chaînes. « Ce sont les hommes qui font l’Histoire, pas le contraire », « L’Histoire ne fait rien, n’engendrent aucune lutte : ce sont les hommes qui font tout », écrit-il.

Sans mythifier évidemment l’ouvrier : « La première chose à faire, c’est de convaincre l’ouvrier que seule l’union lui permettra de changer son existence. Il doit prendre conscience de sa force, de la raison pour laquelle il vit mal et savoir que le capitalisme ne pourra jamais l’aider à résoudre ses problèmes, alors que le socialisme... ». C’est en tant que classe que « seul le prolétariat est vraiment révolutionnaire. Les classes moyennes, petits fabricants, détaillants, artisans, paysans, tous combattent la bourgeoisie parce qu’elle est une menace pour leur existence en tant que classes moyennes. Elles ne sont donc pas révolutionnaires, mais conservatrices ; bien plus, elles sont réactionnaires : elles cherchent à faire tourner à l’envers la roue de l’histoire. Si elles sont révolutionnaires, c’est en considération de leur passage imminent au prolétariat : elles défendent alors leurs intérêts futurs et non leurs intérêts actuels ; elles abandonnent leur propre point de vue pour se placer à celui du prolétariat. Quant à la racaille (oh !), cette pourriture (oh !) passive des couches inférieures de la vieille société, elle peut se trouver, ça et là, entraînée dans le mouvement par une révolution prolétarienne ; cependant, ses conditions de vie la disposeront plutôt à se vendre à la réaction ». La société communiste adviendra ou pas selon la capacité de lutte des ouvriers, mais en tout cas elle n’existera que par "l’hégémonie" de la classe ouvrière dans la lutte révolutionnaire. N’en déplaise au petit-bourgeois autoproclamé avant garde.

Les continuateurs de Marx ne pouvaient qu’extraire le pire de ces théories en dogmatisant et rigidifiant des principes qui auraient dû rester à l’état de slogans : « Tous ensemble, tous ensemble ». Les logiques totalitaires contenues forcément dans ces dogmes donnent raison à P.M. sur ce point, mais non dans les déductions qu’il en tire contre la classe ouvrière manifestant ainsi sa propre espérance projetée et déçue sur un sens de l’Histoire déterministe. Le voilà alors recherchant dans un autre modèle fantasmé un autre déterminisme : la diffusion d’un autre mode d’échange que l’échange marchand devenant hégémonique à son tour, comme des courants communautaires se voulant révolutionnaires l’ont initié avec peu de bonheur dans les années soixante et soixante et dix.

La lutte des classes est un concept politique dans lequel la lutte idéologique est une arme qui vise nos représentations/compréhension du monde. Le bourgeois le sait, qui pour contrer son seul ennemi doit aujourd’hui en inventer de nouvelles, le libéralisme ne pouvant plus masquer les désastres que le capitalisme provoque nécessairement. Voilà donc l’idéologie du "développement durable" associée aux vieilles idéologies des droits de l’homme et de la démocratie pour accompagner la mise en oeuvre de sa "gouvernance" mondiale au mépris des choix des peuples.

« Le développement durable est une nouvelle manière de gérer et d’organiser les activités humaines, autant qu’une référence éthique et politique, c’est-à-dire un nouveau mode de gouvernance » (Rapport Tubiana, Le développement durable dans la politique extérieure de la France -1999). Cela dans le cadre de la croissance, finalité, lorsqu’elle concerne les profits, du mode de gestion libéral de la planète, dans lequel « les grandes puissances commerciales se sont engagées dans un processus consistant à encourager le commerce mondial et à libérer les échanges » (Rapport "Propositions sur les aspects sociaux du développement durable en prévision du Conseil européen de Göteborg" - Ministère de l’emploi et de la solidarité - 2001).

Dans ce but, et parce que le risque pour les "gouverneurs" du monde est aujourd’hui que les pauvres « exportent leurs nuisances : chaos politique, insécurité chronique, émigration clandestine, délinquance, mafias liées à la drogue, épidémies, etc. » (Ignacio Ramonet), les grandes puissances vont promouvoir la lutte contre la pauvreté, pour la démocratie participative, les libertés des femmes, les cultures locales, l’économie solidaire. Tous thèmes à connotation progressiste "reformatés" par les idéologues des think tanks.
Ces politiques sont relayées par l’Union Européenne qui définit la « libre concurrence » comme une « liberté publique » et la politique de concurrence comme une « politique citoyenne ». Cette littérature veut masquer que l’objectif vise « la marchandisation programmée des services publics » (Susan George, Ellen Gould). Et donc la désorganisation, appelée modernisation, des services publics (d’où dysfonctionnement, d’où appel au privé...).

Ainsi prennent formes ces nouvelles politiques dites "villes durables", "transports durables", etc., dans lesquelles les fonctionnaires des administrations et les "intervenants" sociaux sont appelés à collaborer au processus d’adhésion des populations visées : « La dimension culturelle est d’abord un point crucial dans les démarches de développement local. Cela signifie à la fois partir de l’identité culturelle du territoire et redonner sens à l’activité des habitants, pour recréer une "conscience locale". A travers la valorisation sociale de ces valeurs culturelles, il faut alors motiver et impliquer les populations autour d’un projet global qui donne lieu à un consensus. Cela implique tout un travail d’animation, de conscientisation et de formation permanente. A partir d’une telle base, il faut relier toutes les actions de développement à l’intérieur d’un même territoire (agglomération, région), de façon à constituer des réseaux solidaires qui permettent une utilisation optimale des ressources existantes. Toutes ont pris pour point de départ la capacité des populations locales () à se mobiliser. » (Brochure Développement économique et politique de la ville – DIV – 2000). Les "intervenants" sociaux doivent donc participer à la "mobilisation" des populations : « L’enjeu de la cohésion sociale et des territoires (est) que la mobilisation citoyenne, les initiatives locales, les projets territoriaux participent de l’élaboration et de la mise en œuvre d’un projet global de société » (Rapport Delevoye – Cohésion sociale et territoire - Commissariat Général du Plan – 1997 ). Projet de société qui n’a été discuté nulle part, en tout cas par les citoyens. Même si l’intention se veut séduisante puisqu’il s’agit de « retrouver notre capacité à conduire les transformations de la société au lieu de les subir. » Et Sarkozy advint !

L’exemple des politiques publiques actuelles s’emboîtant les unes dans les autres du local au mondial l’illustre.
Cet emboîtement qui fait de la Politique des banlieues un élément de la Politique de la Ville, elle-même volet cohésion sociale du contrat d’agglomération, lui-même volet territorial du contrat de plan Etat – Région, lui-même niveau territorial de l’aménagement du territoire de l’Union Européenne, elle-même engagée dans la politique mondiale onusienne du « développement durable ».
Pour nos planificateurs il s’agit de refabriquer des corps intermédiaires par la constitution de « systèmes locaux d’acteurs ». Dans une perspective de « refondation de l’action publique », le "local" est « reconfiguré comme un corps intermédiaire » selon « le « principe de subsidiarité active » consistant à « s’appuyer de manière continue sur l’expérience des échelons locaux dans les processus d’élaboration des stratégies et dans l’énoncé des finalités qui commandent les règles de l’action, lesquelles demeurent de la responsabilité des échelons supérieurs. » (rapport Delevoye).

Cette politique s’appuie principalement sur le concept de réseau. Dans le cadre de l’aménagement du territoire, le « polycentrisme maillé » cher à la DATAR fait semblant d’ignorer qu’un réseau ne relie que des points, que l’intervalle entre deux points n’est constitué que de voies de conduction qui n’inscrivent rien dans le territoire traversé sinon une blessure et que la maille définit un espace vide, un non-lieu, aussi petite soit-elle. Le réseau est structurellement exclusif et déterritorialisant. Appliquée aux relations humaines, la notion de réseau occulte les conditions matérielles de la construction identitaire, individuelle et collective, les réduisant à une forme distributionnelle de l’information, pseudo communication. Faire partie d’un réseau serait la seule attache d’individus désormais sans appartenance. Qui génère ces réseaux, quelles en sont les têtes, quelles informations pour quel but ? Point de réponses à cela. Il importe de faire croire qu’il s’agit d’une démocratie spontanée, chaque point, à égalité avec les autres, étant tour à tour producteur et receveur d’informations. Pour banaliser la notion et « fabriquer le consentement » (Chomsky), sont amalgamées des pratiques très différentes.

Alors que certains s’organisent en réseau pour constituer de puissants groupes commerciaux, "on" propose aux habitants des quartiers en soi-disant rupture de créer du réseau pour lutter contre la désaffiliation et l’exclusion, avec pour finalité la recréation du lien social mythique nécessaire à la cohésion sociale, elle-même euphémisme pour désigner la paix sociale (au sens militaire et colonial de pacification du territoire) nécessaire à l’image des villes capitales mégalopoles interconnectées.
Ainsi se constitue une nouvelle norme de comportement, le modèle dominant des réseaux d’affaires intercontinentaux, « forme capitaliste de la "fraternité" internationale » selon Marx, se diffusant sous des formes dégradées aux réseaux de vie des dominés. Cette réticulation de l’organisation sociale est en quelque sorte la forme, la matrice qui va accueillir un ensemble de contenus préformés par le développement durable.

Ceci, plus que la versatilité des électeurs, explique peut-être pourquoi les pouvoirs se répartissent de plus en plus entre le local pour la droite "socialiste" (lieu de la citoyenneté et du lien social), le national et l’Europe pour la droite "libérale" (lieux de la participation au commerce mondial).

Le petit-bourgeois (de "droite" et de "gauche") a toute sa place dans cette institutionnalisation de la société mondialisée. Les tentatives actuelles de "refondation" tous azimuts (de l’arabe az-samt, le chemin) des partis "anti-capitalistes" sont peu diserts sur ce thème. Est-ce un hasard ? Ce sera le terrain de jeu de leurs militants. C’est pourquoi il y a peu de chances qu’avec ces « "révélateurs " aux consciences de leurs semblables » (La Louve, « Sur le communisme... ») ce (nouveau) « parti socialiste (qui) ne peut être qu’un outil entre les mains du rassemblement des communistes », (qui doit être) « à la fois un guerrier et un protecteur et ne pas tourner ses armes contre ses enfants (...), permettre, ensuite, la société communiste. » L’Histoire en est écrite. « Il s’agit d’offrir aux gens, au plus grand nombre possible, les outils mentaux susceptibles de faire appréhender correctement la réalité » ... des petits bourgeois.

P’tit Nico, tel qu’il signe.

Messages

  • P’ti Nico : Quel pensum ton truc à lire.

    • Ce texte combine plusieurs problématiques. J’en retiens une.

      « L’introduction du concept d’hégémonie modifie la vision du rapport entre le projet socialiste et les forces sociales susceptibles de le réaliser. Elle impose de renoncer au mythe d’un grand Sujet de l’émancipation. Elle modifie aussi la conception des mouvements sociaux, qui ne sont plus des mouvements "périphériques" subordonnés à la "centralité ouvrière", mais des acteurs à part entière, dont le rôle spécifique dépend strictement de leur place dans une combinatoire (ou articulation hégémonique) de forces. »
      Exit, donc, la classe ouvrière, place au « peuple », concept flou qui « pour les altermondialistes, lit-on sur le site d’Attac, est sur un territoire donné l’ensemble de la population résidente y compris celle d’origine étrangère. »

      1 - Hégémonie : il manque quelqu’un…

      A mon sens invoquer le concept ou la notion d’hégémonie permet d’élargir et de maintenir durablement mais dans le débat voire le conflit le rapport de force à gauche (hors le PS et les Verts roses), de l’inscrire dans une dynamique démocratique et politique beaucoup moins ponctuelle que le FUO, (le front unique ouvrier) mis en place pour une lutte précise. Beaucoup moins ponctuelle aussi que celle des élections politiques. L’hégémonie a rapport à l’unité dans le débat. Onfray (*) dirait « L’extrême gauche plurielle est un vrai concept, très opératoire. Il manque quelqu’un capable de lier cette pluralité. »

      Unir les anticapitalistes est nécessaire mais y adjoindre les antilibéraux aussi. Cela n’ira certes pas toujours de soi à suivre Onfray par exemple : « le capitalisme est un mode de production des richesses par la propriété privée et le libéralisme, une modalité de leur répartition par le marché libre. On peut donc être, ce qui est mon cas, antilibéral et défenseur du capitalisme » Les antilibéraux s’imaginent arriver à satisfaire les besoins sociaux et à enrayer la logique prédatrice de la nature en s’attaquant simplement qu’aux modalités de répartition du surplus et à la marchandisation généralisée en laissant tel quel le mode de production capitaliste, sa logique de profit, d’accumulation, de reproduction de la dépossession, ses rapports sociaux ! A un moment donné, pour le dire un peu abruptement, ils vont donc soit « quitter le navire » pour freiner la dynamique de lutte (quitte a invoquer l’élargissement comme en 2003 ) pour l’émancipation soit rester dans la politique autogestionnaire et anticapitaliste qui mène au socialisme du XIX siècle. A chaque fois c’est la crise politique qui tranche sur la nature des « démocrates ». Quand le peuple est dans la rue : certains freinent, d’autres poussent.

      Dans cette perspective de constitution d’une gauche hégémonique et active la division entre période démocratique électorale et période autre devient secondaire. Cela ne signifie ni mépris de la conquête du pouvoir d’Etat (avec la question : pour faire quoi ?) ni mépris de l’action de terrains. Les mouvements sociaux de résistances ne sont pas périphériques mais nécessaire au mouvement d’ensemble qui renforce la capacité des dominé.

      Le contexte pousse très fort en faveur de l’unité, de l’unité à gauche sur tous les fronts pendant comme hors période électorale (front syndical, altermondialiste et partis politiques de gauche). Je me contente de liens car le propos n’est pas nouveau mais la division des 3B – Bové, Buffet, Besancenot – la souligner plus encore. Et le succès relatif de la LCR montre que cette unité était souhaitée au-delà de la LCR avec le PCF et des antilibéraux prêts à agir avec des anticapitalistes pour des alternatives qui ne soient pas le rabibochage de l’existant.

      *) cf. A quoi sert l’extrême gauche ?
      Philippe RAYNAUD nomme extrême gauche celle « qui n’est pas engagée dans des stratégies de composition de majorité gouvernementale ». Le PCF mais aussi Les Verts sont tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, voire sur la frontière ! Ils sont à partir de lignes politiques différentes sur une position particulière dans l’échiquier de la gauche entendue largement. Car au PCF comme chez les Verts des forces agissent pour le recentrage et l’alternance avec le PS. Il n’est pas toujours facile de peser le poids de ces courants.

      http://luette.free.fr/spip/spip.php?article35

      Les 3B ont ouvert un espoir…
      Meeting "UNITAIRE 2007" : envie de politique !

      http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=35658

      Pas d’alternative sans unité – Ch PICQUET

      http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=43931

      PCF, LCR, PT : UN, DEUX, TROIS "BEZIERS"

      http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=58217

      FACE A UNE DROITE DURE CONSTRUIRE L’UNITE MAIS SUR DES EXIGENCES CLAIRES

      http://bellaciao.org/fr/spip.php?article48122

      2 - Fin du Sujet de l’émancipation ?

      L’émancipation suppose la domination, des formes diverses et variées de domination. Les dominations sont aliénantes et l’on ne peut se libérer d’une forme de domination sans vouloir aussi se libérer des autres. L’émancipation est un processus global individuel et collectif. Dans ce processus le penser et l’agir marchent ensemble.

      La domination ne se limite pas à l’exploitation du capital contre le salariat (sauf une mince couche supérieure). Le capital sévit bien au-delà du salariat à l’encontre des paysans et des artisans d’où la notion de peuple parfois évoquée et invoquée. Le capital sévit puissamment contre l’environnement et la nature. A la domination de classe il faut ajouter les oppressions sexistes, racistes et les multiples dominations qui se perpétuent dans la société, y compris celles qui parviennent à se faire reconnaître comme légitime par les dominés. Lutter contre toutes les dominations est nécessaire à l’émancipation.

      Les multiples formes de domination nous écrasent, nous brident dans notre liberté. Les structures sont lourdes, les processus abstraits s’imposent à nous. Nous subissons le travail d’aliénation des grands appareils d’influence idéologique qui obscurcissent les enjeux au lieu de les clarifier et ce tant dans la société globale qu’au sein des lieux de travail. Nous subissons la fragmentation du savoir. Nous agissons à partir de compréhensions limitées et dans le cadre d’un espace d’action limité. Mais nous avons des marges suffisamment importantes pour penser et pour agir. Il est de notre responsabilité de chacun des dominés de développer ces marges. Nous avons aussi la possibilité de penser avec d’autres et d’agir avec d’autres pour accroître notre force libératrice.

      L’histoire n’est pas un procès sans sujet (Althusser) ? Si le sujet est flou et incertain donc sans S majuscule n’y a-t-il pas pour autant un sujet ? Les « adieux à la classe ouvrière » doivent ils laisser entendre qu’il n’y a plus de sujet collectif ? Faut-il renoncer au sujet collectif de l’histoire et le remiser au rang des mythes ?

      Tous ces combats de libération sont à mener sur tous les fronts. Individuellement, on peut faire des choix, on peut vouloir se reposer, se divertir et même abandonner la lutte. Mais collectivement tous ces combats sont à penser, à débattre et à agir. Le combat collectif suppose de s’organiser, de se doter d’outils. En réalité il s’agit soit d’intégrer les organisations existantes soit d’en créer de nouvelles. Les grands choix se portent sur l’action collective dans les lieux de travail et hors du travail.

      La classe ouvrière stricto sensu n’a pas disparue et elle a toujours vocation à dire son mot mais elle n’a plus le monopole de la transcendance sociale. Si le capital comme rapport social existe toujours et même s’étend alors les couches et groupes sociaux qui subissent sa subordination, son exploitation, bref sa domination sont bien candidats à l’émancipation collective. Ceux qui luttent, notamment les fonctionnaires, le font d’une part parce qu’ils subissent les attaques de ceux (de droite ou de gauche) qui « libéralisent » et d’autres part parce qu’ils savent ce qu’ils veulent en termes de salaires, de statut sécurisant, de RTT véritable, etc.. Toutes ces revendications sont celles de l’immense majorité des salariés de ce pays mais aussi d’Europe.

      Le sujet collectif est fragmenté avec des niveaux d’activités et de conscience variables, « spontanément trade-unionistes » ou révolutionnaires mais cette classe en soi si floue a bien vocation à devenir la classe pour soi. La domination du capital n’est pas la fin de l’histoire.

      Christian DELARUE

    • Commentaires :

      1) Si m’sieur Onfray le dit...

      2) C’est bien ce que j’avais compris.

      Cordialement, P’tit Nico

  • Bonjour "P’tit Nico".

    J’ai essayé de lire le plus attentivement possible ton texte mais, il est tellement riche, que je vais devoir m’y prendre à plusieurs fois pour ne rien rater. Pour le moment je voudrais juste répondre à la partie qui me concerne directement sur un ou deux points. D’abord tu fais plus que bien de me critiquer - je ne cesse de le dire, je n’attends que cela, dans la mesure où ce ne sont pas des attaques "ad hominem", basses et personnelles, comme celles que j’ai pu subir il y a peu encore ici ou là.

    Je ne crois pas avoir nié que j’étais, en effet, une petite-bourgeoise. Ce n’est pas une insulte, c’est un constat de ce qu’est mon appartenance de classe. Je ne peux donc pas prétendre non plus ne pas en avoir l’habitus ni les intérêts, sans doute, ce quels que soient mes efforts pour rejoindre la classe ouvrière, d’une certaine manière, sauf que, et c’est là que ma position est assez difficile (et que ta critique est peut être un procès d’intention, certes tout à fait compréhensible) je ne crois pas que cette volonté, revendiquée, de "m’assimiler à l’ouvrier" soit pour "garder ma place de cadre" comme tu le dis si j’ai bien compris (pas spécialement pour moi mais pour tout les petits bourgeois) - genre : "je vais vous aider à vous libérer des patrons mais vous tomberez sous le joug des cadres"...

    Je pense que mon message "l’intellectuel est un ouvrier comme un autre - et vice versa" est mal compris parce qu’il s’appuie en effet sur un travail insuffisant de ma part quant aux concepts (mais à la limite c’est ce que je retiens de ton immense article, c’est un travail énorme à la fois d’accumulation de savoir et d’analyse critique et je ne peux que me sentir un peu "honteuse". Mon but était d’essayer de traduire mon exaspération face aux "intellectuels" comme ""caste" qui serait "opposée" (et supérieure) aux manuels et une manière de dire aux camarades qui n’ont pas mon parcours ( ou celui d’autres "intellectuels") "lâchez vous, exprimez vous, prenez la parole ET prenez le pouvoir, être un intellectuel évidemment n’a rien de péjoratif et n’a aucun rapport avec les diplômes" .

    C’est une des raisons pour lesquelles, consciente de ma propre "faiblesse" intrinsèque "de classe" (je ne serai jamais une ouvrière même si je décidé d’entrer à l’usine et que j’en adopte la vie et les codes) je ne pourrai jamais prétendre en conscience à un quelconque "poste de pouvoir" que ce soit ( comme certain-e-s, par affection ou par pure méchanceté, l’envisagent pour moi) au sein du parti des communistes, car ce serait déjà un début de trahison.

    Je suis consciente (je pense l’être) d’être une petite-bourgeoise qui embrasse le parti de la classe ouvrière, et je vais dire une chose à double tranchant, mais à laquelle je pense très souvent : je suis consciente d’être potentiellement "pas à ma place" dans une organisation communiste car potentiellement et "par essence" contre révolutionnaire. Ce n’est pas une nécessité mais c’est une possibilité dont je suis consciente.

    Cela, ma conscience de classe, je ne l’ai jamais cachée, je crois.

    Cela étant dit je ne suis pas ouvrière , mais je suis néanmoins une prolétaire au sens strict du terme. Au moins, mon éducation par certain-e-s communistes, la plupart ouvriers , a réussi à me faire prendre conscience de cela. A ce titre, et en effet, cela me donne ma place au sein des communistes. Cela "suffit-il" à faire de moi une communiste ? Je ne le sais pas et d’ailleurs, je ne le prétends pas, car c’est un point où vraiment je garde la modestie de dire "je suis une ignorante". Mais je suis une ignorante qui travaille.

    C’est vrai aussi que céder à la facilité apparemment rassembleuse de parler de "travailleurs" est une erreur et qu’il faut appeler un chat un chat.

    Quand je parle "d’éduquer", là encore il y a maldonne, je parle d’une position qui n’est pas ou ne devrait pas être la mienne, pas du tout pour dire justement "camarades cadres éduquez nous donc ces ouvriers (mais pas trop qu’ils nous fassent pas chier ensuite...)".

    Je parle de l’éducation que moi même j’ai commencé à recevoir de ces mêmes ouvrières et ouvriers au sein de mon syndicat et au sein du parti (ou en dehors). En somme je dis aux ouvriers communistes "exprimez vous, vous êtes aussi valables que nous prétendus intellectuels et éduquez nous". Je ne pense pas que la révolution puisse venir de gens comme moi pour des tas de raisons que tu as me semble t il , bien expliquées dans ton texte.

    On me l’a d’ailleurs reproché plusieurs fois y compris en réunion pour me dire " ta position est hypocrite, ta position est bien pensante, tu pares la classe ouvrière de toutes les vertus, tu manipules, tu es tjs du PS, tu es une gauche catho car tu ne peux pas sérieusement vouloir ce que tu dis etc etc..."

    D’abord non ce n’est pas parce que je pense que les ouvriers doivent entrer au parlement, doivent assurer la formation des communistes, doivent être a u coeur du pouvoir du parti communiste que je fais de l’ouvriérisme ! Il y a des gros cons chez les ouvriers comme chez les cadres, des imbéciles des gens bornés partout, y compris en notre "coeur".

    Ensuite, manipuler, mais pourquoi faire !!? Je n’ai aucune ambition au sens carriériste du terme. Ma seule ambition serait à la rigueur de pouvoir être utile à mes camarades.

    Quant au fait d’être hypocrite non ni aveugle d’ailleurs, ni naïve sur "moi".

    Mon communisme ou ma tentative d’être communiste est donc peut être avant tout affaire d’une volonté pour lutter contre moi même d’abord. Je ne sais pas si tu vas comprendre ceci : la lutte des classes se livre en moi (pas seulement évidemment !) tout les jours. C’est mon effort personnel pour changer de point de vue et d’habitudes et corriger mes erreurs. Pas du tout par "mauvaise conscience" ou "désir d’auto flagellation" ou "relents judéo chrétiens" mais parce que je crois que cela est nécessaire pour l’avenir. Bien sur si je ne le fais pas, personne n’en mourra et ça n’empêchera pas le monde de tourner. Mais il y a des combats collectifs qui ne peuvent survivre qu’au prix de combats individuels contre soi même. Contre ses peurs, contre les faux semblants qui nous tiennent lieu de certitude, contre des habitudes qui tiennent lieu de pensée etc. Peut être cela irait -il un peu mieux si chacun et chacune prenait ce temps de s’analyser et de se critiquer ?

    Donc "place au p’tit bourgeois" non, pas en ce qui me concerne (et surtout pas ce sont eux qui m’ont en partie fait fuir du PS), car pour moi il n’y a pas de "place" à prendre en tout cas pas au sens carriériste et politicien !

    Bref, je ne sais pas si j’ai bien compris ta critique sur les points qui concernent ce que je publie -ce n’est pas certain car tu n’es pas "facile d’accès", donc si je fais erreur, aies s’il te plaît l’obligeance de développer ton point de vue et de le préciser.

    La Louve, (anonyme si on veut...)

    PS : Je ne suis pas une "égérie", j’espère bien ne pas l’être en tout cas, juste une "résidente" et un mb "habituel" de ce collectif - mais une question, quand même, que je te pose à toi (sans provocation) - où est la critique de la position de classe de Marx et Engels ?

    • L’énorme élévation du niveau d’instruction de la population (contrairement aux fables) , les progrès des niveaux de qualification et l’énorme modification de l’activité concrète des travailleurs changent du tout au tout la place des "intellectuels" au sens donné historiquement à ce terme dans le 20eme siècle.

      Une énorme partie de la classe ouvrière a maintenant des tâches en grande partie intellectuelles. Je sais ça peut faire basique de parler ainsi mais le rapport aux gens détenteurs de savoir c’est modifié en grande partie.

      J’ai connu cette mutation de la classe ouvrière à marche forcée, adossée à un niveau d’instruction de plus en plus élevé, des qualifications de plus en plus importantes, mais qui, en retour, a créé une autre classe ouvrière et déplacé certaines frontières (notamment dans la têtes des travailleurs) dont celle de la place historique des intellectuels vis à vis des travailleurs, ainsi que vis à vis du mouvement ouvrier. Et les regards des derniers sur les premiers.

      Il n’y a plus cette ferveur respectueuse vis à vis de gens qui seraient en même temps détenteurs du savoir et en même temps les seuls à l’être.

      Les anciennes classes qui alimentaient le concept de petite-bourgeoisie ont parallèlement périclité de façon importante. Le formidable appétit de la classe bourgeoise les a comprimés au delà de tout, même en prenant le risque de liquider des alliés potentiels face à une classe ouvrière qui réussirait enfin à se construire en classe.

      Le concept qui était déjà foireux, en grande partie, de "petite-bourgeoisie", a volé profondément en éclats. Ce concept est bien plus accepté maintenant dans son registre insultant que comme une catégorie sociale bien identifiable, sauf pour quelque chose de bien maigrichon et de maigrelet, qui a certes son rôle mais....

      Ca eut payé....

      Voila des petits problèmes dont je voulais traiter, périphériques à la conversation .

    • Gramsci et alterdémocratie : conseils d’entreprise et démocratie dans la planification.

      Il y a 60 ans commençait la publication du livre d’Antonio GRAMSCI "Les Cahiers de prison". Mais il ne s’agit pas ici d’une révérence mais d’un ressourcement voire d’une confrontation sur quelques thèmes du célèbre révolutionnaire marxiste italien avec ce que j’appelle l’alterdémocratie. J’ai fait appel à des extraits d’un texte de Livio Maïtan (cf. lien).

      Le mot "démocratie socialiste" donne aujourd’hui presque autant de démangeaisons que celui de "dictature du prolétariat". Pourtant un plafond de verre bride l’épanouissement du mouvement démocratique dans des institutions ploutocratiques et un champ d’application restreint. Comment faire sinon reprendre la question et changer les mots .J’ai usé du terme d’alterdémocratie mais dans un sens qui ne le réduit pas à la démocratie représentative quelque peu améliorée avec deux doigts de démocratie participative de quartier.

      La critique de la démocratie restreinte semble n’être que la reprise la démocratie bourgeoise parlementaire mais elle repose plus sur le fait que sous le capitalisme dominant la démocratie ne peut que prendre certaines formes dont le parlementarisme constitue la plus aboutie. Bien souvent elle est matinée de présidentialisme, quand elle ne verse pas dans le césarisme et le bonapartisme.

      1) La démocratie d’un Etat d’un nouveau mode de production.

      Gramsci part de l’analyse de la situation en Italie comme d’« une situation spécifiquement révolutionnaire » et il en tire la conclusion que l’alternative suivante existe : « Soit la conquête du pouvoir politique par le prolétariat révolutionnaire dans le but d’introduire des modes de production et de distribution nouveaux tels à permettre une relance de la production, soit une réaction terrible de la part de la classe propriétaire et de la caste gouvernementale » (p.117) En d’autres termes, la perspective stratégique était celle de la destruction de l’appareil d’Etat bourgeois et de l’instauration d’un Etat ouvrier. Dans la crise révolutionnaire qui s’était ouverte et dans cette perspective, un rôle central appartenait aux conseils d’usine.

      Il suffit de souligner que la conception gramscienne des conseils s’intégrait à une conception plus générale de la démocratie ouvrière. « Le soviet, expliquait-il, s’est avéré immortel en tant que forme de société organisée qui s’adapte plastiquement aux besoins multiformes (économiques et politiques) permanents et vitaux de la grande masse du peuple russe qui incarne et satisfait les aspirations et les espoirs de tous les opprimés dans le monde. » (p. 8)

      2) La participation des masses (on dirait aujourd’hui du peuple)

      Finalement, il est absolument clair chez Gramsci que l’Etat ouvrier doit se baser sur une démocratie prolétarienne réelle, c’est-à-dire sur la participation « active et permanente » des masses ; cela implique qu’il devra « garantir à toutes les tendances anticapitalistes la liberté et la possibilité de devenir des partis du gouvernement prolétarien ». Seront reconnues en tant qu’anticapitalistes toutes les tendances qui s’expriment au sein de la classe ouvrière et acceptent la nouvelle légalité instaurée par la révolution, (p. 59-60)

      Selon Gramsci : « La classe ouvrière a la tâche d’unifier économiquement et spirituellement le peuple italien. Cela ne peut se produire qu’en brisant la machine actuelle de l’Etat bourgeois, qui est bâtie sur une surimposition hiérarchique du capitalisme industriel et financier aux autres forces productives de la nation. En s’émancipant, la classe ouvrière émancipera toutes les autres classes opprimées et exploitées... et ces autres classes ne pourront s’émanciper qu’en s’alliant à la classe ouvrière et en conservant à cette alliance une forme permanente. » (p. 40). Les alliés essentiels du prolétariat sont les paysans pauvres et le prolétariat intellectuel, (p. 134-135)

      En d’autres termes, le prolétariat est la seule classe qui puisse assurer un développement ultérieur de la civilisation dans toutes ses manifestations et qui représente les intérêts de la grande majorité de la « nation », c’est-à-dire même ces couches intermédiaires qui sont beaucoup plus les victimes que les bénéficiaires du système capitaliste. Si le prolétariat est désormais la seule classe « nationale », voilà une raison supplémentaire pour en conclure que la seule solution possible de la crise de la société italienne est la solution révolutionnaire représentée par la dictature prolétarienne.

      Selon Gramsci.de même que selon Marx et Lénine, la classe ouvrière est une classe internationale et la révolution prolétarienne ne pourra triompher, en dernière analyse, qu’à l’échelle mondiale.

      3) La conception de l’Etat

      Nous allons aborder plus loin les thèmes de l’hégémonie et du rapport entre société civile et société politique. Mais, dès maintenant, nous affirmons qu’il n’y a absolument rien dans les Cahiers qui autorise de conclure que Gramsci aurait remis en question la conception marxiste de l’Etat.

      Ce qu’on peut dire, c’est que dans le contexte où il écrit et étant donné la nature des Cahiers il peut mieux développer et articuler son analyse et mettre l’accent surtout sur certaines fonctions de l’Etat bourgeois. En particulier, il insiste à plusieurs reprises sur le rôle économique que l’Etat peut et doit jouer aussi bien aux premiers stades qu’à l’époque du déclin de la société bourgeoise. Ainsi, il rappelle, par exemple, les idées de David Ricardo sur l’Etat « en tant qu’agent économique » (p. 1310)15 et il souligne l’action de l’Etat, notamment aux Etats-Unis, lors de la grande dépression des années trente (p. 2175). Il revient aussi à plusieurs reprises sur les concepts de bonapartisme et césarisme qui ont toujours fait partie de la problématique marxiste (p. 1924 et passim). C’est justement une page sur le bonapartisme, mettant en relief les éléments nouveaux par rapport à 1848, qui confirme que Gramsci n’avait aucunement rectifié sa conception. Selon lui, le but essentiel de l’Etat reste « de défendre la domination politique et économique des classes dirigeantes ». (p. 1620)

      Finalement, des passages des Cahiers font allusion au but historique à long terme de l’émergence d’une société sans classes et du dépérissement de l’Etat avec la suppression de toute distinction entre « gouvernants et gouvernés ». « Seul le groupe social qui se fixe comme but la fin de l’Etat et de soi-même peut créer un Etat éthique visant à mettre fin aux divisions internes entre les dominés, etc. et à créer un organisme social unitaire technico-moral. » (p. 1050, voir aussi p. 1056, 1752, et 1489) Dans un autre passage, Gramsci esquisse la perspective « d’une phase historique d’un type nouveau où, nécessité-liberté s’étant organiquement intégrées, il n’y aura plus de contradictions sociales et où la seule dialectique sera la dialectique idéale des concepts et non plus des forces historiques ». (p. 1482) Voilà une musique du futur qui rappelle de très près une page bien connue de Littérature et Révolution de Trotsky sur la nature des contradictions dans une société sans classes (Julliard, 1964. p. 264-266).

      Extrait de : LE MARXISME REVOLUTIONNAIRE D ANTONIO GRAMSCI par Livio MAITAN

      http://www.lcr-lagauche.be/cm/index.php?com_sectionnav&view=article&Itemid=53&id=738

  • Bien documenté, références bien amenées mais trop nombreuses (ça fait un peu culture toute neuve ,boutonneux en somme ).Ne serait il pas plus simple de conseiller a tous les travailleu-r-se-s intellectuel-le-s,manuel-le-s des villes et des campagnes de déserter la chiourme (ou ils sont nombreux quand même a être volontairement) avant qu’on ne les en lourde quand ils n’ont plus assez de jus et tout juste bon pour la déchetterie ?

    • Juste une précision, il faut dire que c’est très bien de prendre la couverture du bouquin "la foire aux ânes " pour illustrer l’article, bien documenté au demeurant. Derrière la couverture il y a un bouquin fort interessant sur une réflexion pour une gestion nouvelle des relations économiques et sociale entre les gens.Nous avons inclus dans le livre sa traduction en espagnol.
      Donc je me permet de vous donner les réferences de l ’édition. Le coquelicot BP 4078 31029 Toulouse cedex 4
      Pour avoir d’autre articles de Patrick Mignard, vous pouvez aller sur notre site lecoquelicot.info. Cordialement pour les éditions du Coquelicot Juanito

    • boutonneux en somme

      Boutoneux ? hé, ho !