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LE VIOL : UNE ARME DE GUERRE. LA VIOLENCE SEXUELLE ET SES CONSÉQUENCES.

Publie le samedi 31 juillet 2004 par Open-Publishing


Claude Rosseel

En réponse à la création de deux groupes d’opposition armés en février et avril 2003, le gouvernement du Soudan a donné carte blanche à des milices nomades pour attaquer les villages de groupes ethniques sédentaires du Darfour
(Soudan occidental). Les attaquants tuent les hommes, violent les femmes et déplacent les villageois de force. Ils brûlent également les maisons et pillent ou volent les cultures et le bétail, qui sont les principales ressources des communautés visées. Les forces gouvernementales soutiennent la milice Janjawid, dont les membres portent désormais presque tous des uniformes de l’armée, et les accompagnent dans leurs raids.

Ces attaques ont provoqué le déplacement d’au moins 1,2 million de personnes. On compte par ailleurs au moins un million de personnes déplacées à l’intérieur de leur pays. Ces dernières ont été contraintes de se rapprocher des villes ou des grands villages du Darfour. Des milliers de femmes ont été violées, quelque 30 000 personnes ont été tuées et plus de 170 000 autres ont cherché refuge au Tchad.

En mai 2004, une délégation d’Amnesty International est retournée au Tchad afin d’obtenir des informations complémentaires sur les violences perpétrées contre les femmes dans le Darfour. L’organisation a recueilli un très grand nombre de témoignages et recensé les noms de 250 femmes violées lors du conflit qui déchire cette région. Ces témoignages, ainsi que les rapports émanant des Nations unies, de journalistes indépendants et d’organisations non gouvernementales, montrent sans conteste que les viols et les autres formes de violence sexuelle sont très répandus dans le Darfour.

Une quinzaine de femmes et de jeunes filles ont été violées dans différentes maisons du village. Les Janjawid ont brisé les membres de plusieurs femmes et jeunes filles pour les empêcher de s’enfuir. Les Janjawid sont restés six ou sept jours dans le village. » « Cinq ou six hommes nous ont violées, l’un après l’autre, pendant des heures pendant six jours, toutes les nuits. Mon mari n’a pas pu me le pardonner, il m’a rejetée. » Paroles de réfugiées soudanaises interviewées par Amnesty International.

Des fillettes âgées de huit ans sont victimes de viols dans le Darfour, au Soudan, ou utilisées comme esclaves sexuelles. Les viols de masse qui se poursuivent dans le Darfour sont des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité mais la communauté internationale fait très peu de choses pour y mettre un terme.

Ces actes ne sont pas une simple conséquence du conflit ou de l’indiscipline des troupes. Les informations recueillies par Amnesty International indiquent que, dans le Darfour, le viol et les autres violences sexuelles sont de véritables armes de guerre utilisées pour humilier, punir, contrôler, terroriser et déplacer les femmes et leurs communautés. De tels agissements constituent de graves violations du droit international humanitaire et relatif aux droits humains, voire des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.

Les souffrances et exactions subies par ces femmes vont bien au-delà de la violence physique. Les viols ont un effet catastrophique sur la santé des femmes et des jeunes filles ; de plus, les survivantes sont stigmatisées à vie et se retrouvent marginalisées à la fois vis-à-vis de leurs familles et de leurs communautés.

« La communauté internationale doit prendre le viol beaucoup plus au sérieux et traiter la question de façon beaucoup plus énergique. Des professionnels de santé qualifiés doivent être dépêchés immédiatement sur place pour venir en aide aux survivantes », a déclaré Amnesty International.

En soutenant les milices dans leurs attaques contre la population et en les laissant agir en toute impunité, le gouvernement du Soudan a transgressé ses obligations légales en matière de protection des civils.

Amnesty International lance également un appel pour que :
 toutes les parties au conflit mettent un terme à ces pratiques et condamnent le viol comme arme de guerre et pour que des mécanismes appropriés soient mis en place pour assurer la protection des civils ;
 les milices des Janjawid soient désarmées et dissoutes et que cessent leurs attaques contre la population civile ;
 une commission internationale d’enquête soit mise en place immédiatement pour procéder à l’examen des éléments tendant à prouver l’existence de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et autres violations du droit international humanitaire, viols et allégations de génocide notamment ;
 les auteurs présumés d’attaques à l’encontre de civils, notamment de violences contre des femmes, soient traduits en justice lors de procès répondant aux normes internationales d’équité. La sécurité des victimes et des témoins devra être assurée.

MODELE DE LETTRE AU PRESIDENT SOUDANAIS :


Lieutenant General Omar Hassan Ahmad AL-BASHIR, President’s palace, PO Box 281, Khartoum, SUDAN

Your Excellency,

I have read testimonies of civilians being killed, raped and abducted, their homes burnt and possessions looted, and hundreds of thousands having to flee their homes. I am writing to urge you to take strong action to put an end to human rights violations in Darfur.

Your government has the responsibility to protect all of its citizens from human rights violations. Therefore I am urging the Sudanese authorities to cease all attacks on the civilian population - including women and children - immediately disarm and disband the Janjawid militias, and ensure that they are no longer in a position to commit human rights abuses, in accordance with the ceasefire agreement signed on 8 April 2004 and the Joint Communiqué with the United Nations of 3 July 2004.

Amnesty International is also calling for your government to issue immediate clear instructions to all troops under its command that rape and other forms of sexual violence will not be tolerated and that they are grave criminal offences and those suspected of being responsible will be investigated and brought to justice.

I am also urging you to ensure that allegations of rape and sexual violence committed by the Janjawid, government forces or members of the National Security and military intelligence are promptly, thoroughly and independently investigated. These investigations should encompass the ordering or condoning of rape or sexual violence, the findings of such investigations should be made public and those responsible brought to justice.

As an immediate step, all human rights defenders ask you to stand by your promise to accept the full and unhindered deployment of international human rights monitors who should investigate all allegations of human rights abuses by all parties to the conflict in Darfur and report publicly.

Yours sincerely,

Signature


http://www.amnestyinternational.be/doc/article4123.html