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(videos) Karachi : deux filles de victimes livrent une charge contre la République
Publie le jeudi 18 novembre 2010 par Open-Publishing1 commentaire

de Jacques Follorou
C’est l’histoire d’une rébellion inattendue dans un monde où règne en maître la raison d’Etat. Les familles des victimes de l’attentat qui a coûté la vie, le 8 mai 2002, au Pakistan, à onze Français de la Direction des constructions navales (DCN) chargée de construire des sous-marins pour ce pays ont décidé de briser le carcan anonyme dans lequel les autorités aiment souvent les cantonner.
C’est une véritable charge, signée par deux filles de victimes, Magali Drouet et Sandrine Leclerc. L’originalité de l’ouvrage réside dans l’absence de pathos et la description d’une quête de justice en butte à cette raison d’Etat qui devait, pensaient-elles, soutenir leur besoin de comprendre pourquoi leurs pères sont morts à Karachi.
Confrontées à ce drame, elles découvrent, dans un premier temps, l’impréparation de la DCN, dès lors qu’il agit de venir en aide aux onze familles touchées par l’attentat. L’accès aux corps est entravé et les informations sur les circonstances de l’attentat sont rares. Les familles sont contraintes de se prêter à des mises en scène.
Quant aux représentants de l’Etat, ils ne leur opposent que des mots. Michèle Alliot-Marie, alors ministre de la défense, se déclare joignable à tout instant sans même leur donner un numéro de téléphone. Cela n’empêchera pas Mme Alliot-Marie de communiquer en prétendant recevoir régulièrement les familles endeuillées, les choquant encore davantage.
Les revendications des familles de victimes, soucieuses aussi de voir la justice enquêter activement sur l’attentat, sont présentées comme des caprices, voire pis. Faute de rentrer dans le rang, elles sont accusées, par la DCN, de vouloir tirer un profit financier de la mort de leurs pères. Face à ce qu’elles considèrent comme "de la négligence" et "du mépris", elles vont découvrir l’utilité d’un allié, les médias.
Entre "la presse poubelle", "la presse d’information" et "la presse d’investigation", elles se fraient leur chemin dans un univers où se mêlent les grands contrats internationaux, le secret d’Etat, les relations franco-pakistanaises, qui les condamnerait à l’isolement et au silence si leurs griefs ne recevaient aucun écho public.
C’est sans doute à ce moment que les familles vont changer de posture. De partie civile, adossée à l’Etat protecteur, se satisfaisant des explications officielles et faisant passer l’intérêt individuel après l’intérêt public, elles vont devenir accusatrices. Désormais, elles parlent de "manipulation de l’Etat", elles soulignent leur propre "aveuglement" face à une République qui "dissimule des éléments à son institution judiciaire". L’attitude du président de la République, Nicolas Sarkozy, provoque même "l’écoeurement" et la "colère".
Au terme de cette prise de conscience, les familles sortiront du giron officiel et déposeront une plainte, fin 2009, pour enfin, espèrent-elles, obtenir des réponses à leurs questions. Pourquoi ces pages sonnent-elles si justes ? Parce qu’on n’y trouve nulle croisade concernant la thèse même de l’origine de l’attentat. Est-ce le non-versement de commissions occultes à des intermédiaires qui aurait coûté la vie aux Français ? Est-ce un acte purement terroriste ?
L’avenir le dira peut-être. La démarche dépasse la simple demande de réparation pour le préjudice personnel subi. Elle est guidée par l’espoir de voir s’imposer enfin une justice indépendante digne de notre démocratie.
ON NOUS APPELLE "LES KARACHI" de Magali Drouet et Sandrine Leclerc. Fleuve noir, 246 pages, 17,50 €.
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Messages
1. (videos) Karachi : deux filles de victimes livrent une charge contre la République, 18 novembre 2010, 16:59, par himalove
Bien que je ne partage pas leur thèse quant au mobile de l’attentat du 8 mai 2002, à Karachi, qui ressemble beaucoup à celui contre des ingénieurs chinois, en 2004, à Gwaddar, je soutiens le combat de Sandrine Leclerc et de Magali Drouet.
Les filles des victimes d’une vente d’armes qui a mal tourné valent plus que les crapules qui nous gouvernent.