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1905, 1906 SEPARATION DU RELIGIEUX ET DU POLITIQUE, DU POLITIQUE ET DU SYNDICAL
Publie le jeudi 2 mars 2006 par Open-PublishingForce Ouvrière Hebdo n°2746 mercredi 1 mars 2006
1906 - LE CENTENAIRE DE LA CHARTE D’AMIENS - 2006
Le 13 octobre 1906, IXe congrès de la CGT adopte une « charte » qui se révélera, au fil des ans, une véritable déclaration des droits du syndiqué et du citoyen. Elle proclame hautement que « l’action économique doit s’exercer directement contre le patronat, les organisations confédérées n’ayant pas, en tant que groupements syndicaux, à se préoccuper des partis et des sectes qui, en dehors et à côté, peuvent poursuivre, en toute liberté, la transformation sociale ». Par ces mots la jeune confédération s’affirme en adulte majeur et rejette toutes les tutelles.
Tout au long de l’année 2006, FO Hebdo commémore l’événement en évoquant l’année 1906 dans ses dimensions sociale, économique, politique, internationale et culturelle.
Les rebondissements du combat laïque
LE PAPE SE REBIFFE
Pie X, par Aristide Delannoy
En 1906, le leader catholique Pie X condamne officiellement la loi française sur la séparation de l’Église et de l’État. Sa pensée a de miraculeuses similitudes avec celle de ses successeurs Jean-Paul II et Benoît XVI.
Le 9 novembre 1905, la Chambre des députés vote la loi sur la séparation de l’Église et de l’État. Ce vote, fruit lointain de la Révolution et résultat immédiat de l’action de la Libre Pensée, a aussi été obtenu grâce à l’habileté du député Aristide Briand, rapporteur de la loi au Parlement, et qui sera nommé ministre de l’Instruction publique et des Cultes en mars 1906. Il a été aidé par le haut fonctionnaire protestant Jules Méjan.
Pour les papistes, les choses sont claires : il s’agit d’un complot des rouges, des parpaillots et des francs-maçons. Pour le pape Pie X, il s’agit « de sectes impies qui veulent décatholiciser la France ». Cet homme n’est pas un enfant de chœur. Né Giuseppe Sarto (1835-1914), il était patriarche de Venise. Remplaçant en 1903 le pape Léon XIII, ouvert au dialogue et à la modernité, il resserre aussitôt les boulons.
De 1903 à 1907, il n’a de cesse de publier des encycliques condamnant le modernisme. Par rapport à la France, il commence par dénoncer l’expérience démocrate-chrétienne de Marc Sangnier et son mouvement, Le Sillon, précurseur du syndicalisme chrétien.
Le 11 février 1906, Pie X publie sa fameuse encyclique « Vehementer nos » contre la séparation de l’Église et de l’État. Il y écrit : « Nous réprouvons et nous condamnons la loi votée en France sur la séparation de l’Église et de l’État comme profondément injurieuse vis-à-vis de Dieu, qu’elle renie officiellement, en posant en principe que la République ne reconnaît aucun culte. »
L’ÉGLISE CONTRE LE PROGRÈS
Lorsqu’il parle du peuple français, Pie X écrit : « Quant à la multitude, elle n’a pas d’autre devoir que celui de se laisser conduire et, troupeau docile, de suivre ses pasteurs. » C’est bien contre cette idéologie que se battent les républicains, les laïques, et plus largement les hommes et les femmes épris de liberté, depuis plus de deux siècles dans le monde entier.
La loi de 1905 était acceptée par les catholiques libéraux. Mais l’encyclique, qui demande aussi l’unité de tous les catholiques sous cette doctrine, va les isoler et renforcer les intégristes, qui dénoncent « les francs-maçons, la haine de la Croix et la nouvelle spoliation de l’Église ». La publication de ce texte a été voulue par le Vatican dans le contexte de l’affaire des inventaires des biens ecclésiastiques pour mettre de l’huile sur le feu. Les fidèles se rassemblent alors dans les églises et des incidents, orchestrés par la presse conservatrice, se produisent avec la police, à Paris, en Bretagne, dans le Velay et au Pays basque. Le 3 mars, un homme est tué dans une église du Nord.
Pie X sera sanctifié en 1954. Par un effet de la providence, l’archevêque traditionaliste Mgr Lefebvre, exclu de l’Église par Paul VI, appel-lera son organisation « Fraternité saint Pie X ». Dans la suite de l’idéologie de Pie X, Jean-Paul II va condamner le préservatif, l’avortement et la théologie de la libération. Son successeur, Benoît XVI, a récemment rencontré les amis de Mgr Lefebvre. Son histoire, en cycliques prédications, enferme le Vatican dans un éternel retour.