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A l’hôpital, j’ai croisé la route de Gilles. Jeudi, ce SDF est mort
Publie le mardi 16 décembre 2008 par Open-Publishing7 commentaires

de PhB
Ce lundi, Philippe, un internaute de la région de Nantes, nous a communiqué ce texte, après avoir découvert que l’un des SDF décédés récemment dont parlaient tous les médias n’était autre que son voisin de chambre durant un séjour à l’hôpital, au mois de novembre. Voici son texte, tel qu’il nous l’a envoyé.
"J’ai rencontré Gilles tout récemment, à l’hôpital. Le 24 novembre, j’ai été hospitalisé aux urgences du CHU de Nantes. Après mon opération, comme le service qui m’avait pris en charge était complet, j’ai été orienté vers une chambre double. Gilles était dans cette chambre, il m’y a accueilli. Nous avons eu beaucoup de temps pour parler.
Il a évoqué sa vie. Chacun de nous pouvait aussi entendre les conversations de l’autre avec le personnel médical. Elles sont si indiscrètes, les chambres doubles… Même si une assistante sociale a eu l’attention de proposer à Gilles d’aller discuter tranquillement dans une pièce isolée.
42 ans, à peine plus âgé que moi
Gilles avait 42 ans, quelques mois à peine de plus que moi. Il était dans la force de l’âge, mais cabossé par la vie. Il dormait roulé en boule, comme pour se protéger. Il souffrait d’épilepsie. Il avait travaillé pendant quatre ans comme conducteur routier dans une entreprise qui avait périclité après le décès de son patron.
Puis treize ans dans une autre entreprise, fermée elle aussi, brutalement, après son rachat par une multinationale française du médicament. Près de 100 emplois supprimés d’un trait de plume. Fin novembre, Gilles n’avait plus d’emploi. D’ailleurs, il avait perdu ses permis de conduire à cause de ses problèmes de santé. Il avait perdu son logement. Il a dit qu’il vivait dans la rue depuis un mois. Gilles avait une grande famille : un fils qui travaille dans un pays lointain, ses parents dans les Pyrénées, des frères et sœurs dispersés aux six coins de l’Hexagone. Mais il refusait d’être à leur charge. Il était fier, Gilles. Et il avait des projets ambitieux. Qu’on en juge. Il rêvait d’un logement : "Un coin à moi, rien qu’une chambre, avec un lit et un petit réchaud pour cuisiner." Ce à quoi je me sentais obligé d’ajouter : " Oui, et puis un WC et une douche."
Il disait qu’on trouvait toujours où se laver
Mais il m’expliquait qu’on trouvait toujours moyen de se laver, même dans la rue. Il désirait un emploi : "Je ne peux plus conduire, mais je peux charger et décharger les camions, là il faut du monde." Des demandes auxquelles personne n’a su répondre. Le personnel de l’hôpital était aux petits soins pour lui : "Appelez-nous quand vous avez un problème, Monsieur, nous sommes là pour ça. [...] Surtout, quand vous serez sorti, prenez bien vos médicaments…"
Les assistantes sociales, auxquelles il expliquait qu’il dormait dans les toilettes publiques de Rezé, se démenaient pour lui trouver un hébergement ; l’hôpital retardait de jour en jour sa sortie tant qu’il n’y avait pas de solution. Quand le manque de moyens des services sociaux rejaillit sur le déficit de la Sécu…
J’ai quitté l’hôpital le 27 novembre. Je tiens ici à saluer le personnel de l’Hôtel-Dieu pour son accueil chaleureux et son professionnalisme. Le CHU avait assuré de garder Gilles au moins jusqu’au 1er décembre, dans l’espoir qu’une solution d’hébergement serait trouvée d’ici là. Nous nous sommes salués : "Bon courage Gilles, bon rétablissement". J’étais confiant, je savais qu’il était en de bonnes mains.
Une brève à l’AFP, dure et froide
Et puis jeudi 11, j’ai vu la brève de l’AFP, dure et froide comme une nuit de décembre : "Le corps d’un SDF découvert jeudi matin à Rezé". Le corps d’un SDF ! Paul Eluard, lui, écrivait : "Un homme est mort, qui n’avait pour défense que ses bras ouverts à la vie."
La préfecture précise que "des orientations d’hébergement lui avaient été faites, mais il n’y a pas donné suite et ne venait pas aux rendez-vous". Comme si personne ne savait où Gilles dormait !
Pouvons-nous exiger d’un homme au bout du rouleau qu’il honore ses rendez-vous comme un homme d’affaires ? N’était-il pas envisageable de lui proposer une petite chambre à lui, plutôt qu’un "hébergement d’urgence" saturé ? Dans quelle société vivons-nous, qui ne se donne pas les moyens d’aider ceux qui en ont le plus besoin ?
Mais le vrai scandale n’est pas là. Quand il faut ramasser quelqu’un à la petite cuiller, c’est qu’il est déjà beaucoup trop tard pour lui remettre le pied à l’étrier.
Gilles avait un bel avenir devant lui. Il avait prouvé, s’il était besoin, qu’il savait travailler, qu’il pouvait fonder une famille. Gilles était comme chacun d’entre nous. Il s’est fait dépouiller de son emploi et de son permis, il n’avait plus de logement. Un mois sans toit avant de se retrouver à l’hôpital. Et à sa sortie, 10 jours de rue ont suffi à le tuer.
Alors chaque fois que nous voyons l’annonce d’un nouveau plan de licenciement, une expulsion de logement, rappelons-nous comment jeudi 11 décembre 2008, dans les toilettes publiques, un homme est mort."
Messages
1. "A l’hôpital,j’ai croisé la route de Gilles" de Philippe, 16 décembre 2008, 08:05, par Carland
Cela se passe en 2008 en Sarkosye. Le MEDEF est au pouvoir avec ses hommes de main, les Sarko et autres anciens militant d’Occident... La France se regarde mourir... Circulez, y a rien à voir !
Pendant ce temps les directions syndicales nous propose (c’est bien le moins !) une journée de grève le 29 janvier.
Combien de morts encore d’ici là ???
Un jour, il nous traiterons de collabos... !
Carland
2. A l’hôpital, j’ai croisé la route de Gilles. Jeudi, ce SDF est mort, 16 décembre 2008, 15:11, par Marcel !
VICTIME DE LA VALEUR RENTABILITE AU DETRIMENT DE LA VALEUR FRATERNITE, QU’IL FAUDRAIT RAYER DES FRONTONS. EN TERMINER AVEC CETTE HYPOCRISIE.
LIBERTE, EGALITE, CHOUCROUTE...
3. A l’hôpital, j’ai croisé la route de Gilles. Jeudi, ce SDF est mort, 16 décembre 2008, 16:10, par momo11
Qu’importe l’humain,tant que le profit existe !Il va falloir me dire a combien est estimée la vie.......merçi le merdef.momo11
4. A l’hôpital, j’ai croisé la route de Gilles. Jeudi, ce SDF est mort, 16 décembre 2008, 17:05, par fcourvoisier
L’espérance de vie des "SDF"(ce sont des Humains )est de cet ordre:42ans !
Merci de lui avoir fait une place...posthume.... mais c’est aux (encore) vivant(e)s qu’il faut penser !
Legrand fait du bon boulot, mais nous pourrions sans doute faire accélérer le mouvement...
Cela se passe en France...
1. A l’hôpital, j’ai croisé la route de Gilles. Jeudi, ce SDF est mort, 16 décembre 2008, 17:53
Le terme typiquement policier de SDF me révulse.
Je propose de le remplacer par un autre, si nous avons encore un peu d’imagination dans les milieux progressistes.
2. A l’hôpital, j’ai croisé la route de Gilles. Jeudi, ce SDF est mort, 16 décembre 2008, 17:54, par gaf
cela ce passe partout,et comme partourt tout le monde s’en fout,si ma chaussure etait terroriste,je te desinerai un mouton
m’enfin gaf
5. A l’hôpital, j’ai croisé la route de Gilles. Jeudi, ce SDF est mort, 17 décembre 2008, 18:34
Nous avons pérdu l’espoir !!nous ne méritons pas de vivre !!!Oû est notres conciences ? Incapables de révolte ! de lutte !!de critique nous laisson passer davant nous yeux et coeur les centaines de morts dans la rue !!dans les écoles(les enfants que ne mangent pas a sa faim) en notre palier(il y ai toujours des voisin que sont dans le besoin ça se voit dans son regard)
Qui nous montrera les chemin !!!!
CE MIEUX LA MORT QUE VIVRE AUX GENEAUX !!!
VIVA LA LIBERTE !!!!!! VIVA LA LUTTE !!