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"Affaire DRAC "

Publie le samedi 20 septembre 2003 par Open-Publishing

Le vendredi 19 septembre 2003.

"Affaire DRAC "

Martineau brille !

1 Les faits

2 le point de vue de Pierre Foviau

3 La lettre de Max Gaillard (directeur du théâtre missionné d’Arras )

4 le point de vue de Marie Agnes Sevestre (directrice de l’Hippodrome de
Douai )

5 Le communiqué de presse (Syndeac,acpsv et la coordination )

6 les articles de Libération de Haydée SABÉRAN

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1 Les faits

 Le 16 Septembre, à 9h30, Pierre Foviau, metteur en scène ,membre de la
coordination des professionnels de la création Nord/Pas de Calais a été
convoqué au Commissariat de police de Lille (M° Grand Palais).Dès le
lendemain une nouvelle convocation concernait Anne Conti, comédienne .

 Il ne s’agissait pas d’une simple convocation : Pierre Foviau et Anne
Conti ont été placés en garde à vue pour 48 heures et mis en examens pour
"exhibitionnisme", lors de l’occupation de la DRAC du 4 septembre à Lille.

 Rappel des faits :

Le 4 septembre dernier, journée nationale d’action des métiers du spectacle
et de l’audiovisuel, la coordination des professionnels de la création 59/62
avait décidé d’occuper symboliquement la D.R.A.C. Nord - Pas de Calais.
L’objectif de cette action était d’interpeller le Directeur Régional des
Affaires Culturelles ,Monsieur MARTINEAU , sur l’actuelle mobilisation des
intermittents, afin qu’il fasse " remonter " au Ministère les paroles des
artistes travaillant en région. A cette occasion, le drapeau français a été
mis en berne par les occupants, symbole d’une république en deuil qu
sacrifie la culture. Une manifestation devait rejoindre quelques heures plus
tard, le premier groupe, afin d’investir les abords de l’édifice. La rue
(peu passante) était principalement occupée par les manifestants et les
forces de police. Vers 19 h 15, ayant appris le nouveau refus de Monsieur
Aillagon d’abroger l’ordonnance du protocole d’accord sur le régime des
intermittents et d’entamer de nouvelles discussions, une dizaine d’artistes,
montés sur le toit du bâtiment, a décidé de se mettre à nu, symbole du
dépouillement dans lequel les conditions actuelles et à venir plongent la
création artistique et les professionnels de ces secteurs d’activité. Les
manifestants ont ensuite été expulsés de la DRAC sans opposer de résistance.

2 le point de vue de Pierre Foviau

Quelques mots sur une garde à vue pour un mauvais film
Identifié dans le hall de la mairie de Lille le 12 septembre, je suis
convoqué le même jour par les services de police pour une audition le 15.
Je me rends à cette convocation le 16 à 9h30, pour m’entendre signifier ma
garde à vue pour ma participation à l’action à la DRAC de LILLE. Les faits
reprochés sont : Outrage au drapeau français, exhibition sexuelle et
dégradation de bien public et vol. S’en suit la procédure classique :
audition, perquisition à mon domicile, audition, identification (photo,
empreintes) puis placement en cellule en attendant l’avis du parquet.
Je dénonce ici une réelle volonté de placer le contexte de notre lutte dans
un contexte délictuel sans commune mesure avec notre volonté d’assumer notre
engagement citoyen envers la culture notamment. Je souhaite faire part de la
correction des services de police qui ont eu en charge mon dossier. Chacun
est resté à sa place , avec correction, sachant les uns et les autres, la
police et moi-même que nous étions les instruments d’une lutte politique :
Un Etat de droit qui se rappelle au souvenir de citoyens responsables et
dont l’expression aujourd’hui dérange. Aujourd’hui, je suis convoqué au
tribunal le 23 janvier 2004 pour recevoir un rappel à la loi ou
avertissement : pour exhibition sexuelle. Avertissement que je refuse tant
cette qualification ne correspond pas à l’intention de mon geste. Plus que
jamais restons dérterminés sur la nécessité à nous exprimer à nous faire
entendre, pour que la culture et l’art reste au coeur de notre société.
A bientôt. Pierre.

3 La lettre de Max Gaillard

Arras, le 17 septembre 2003

Monsieur MARTINEAU Directeur de la DRAC 1, rue du Lombard 59000 LILLE

Monsieur le Directeur,

Je vous demande au nom de l’ensemble des membres du SYNDEAC de la Région
Nord Pas de Calais d’user de votre autorité pour que cesse dans les plus
brefs délais les poursuites qui sont engagées contre les intermittents qui
ont occupé la DRAC le 4 septembre dernier.
Cette situation, si elle devait perdurer, mettrait gravement en péril la
collaboration entre les professionnels de l’action culturelle de notre
Région avec vos services.
Ne doutant pas que vous serez comme nous soucieux de conserver un dialogue
fructueux , je vous prie de croire, Monsieur le Directeur, en l’expression
de ma parfaite considération.

MAX GAILLARD Correspondant Régional

4 le point de vue de Marie Agnes Sevestre

Marie Agnes SEVESTRE 18/09/2003 18:02

Monsieur le Directeur,

Les derniers rebondissements policiers qui viennent d’atteindre deux
comédiens de la région, en réponse à l’action de dépôt de plainte que vous
avez cru bon de porter, sont à la fois excessifs et navrants.
Lorsque la logique sécuritaire est à l’oeuvre, elle s’exprime sans égard
pour la légitimité des causes. Soit. Mais que l’origine de la plainte
déposée se situe dans vos Services, cela est vécu comme une humiliation
supplémentaire par l’ensemble des artistes et personnels du spectacle vivant
de notre région.
Au moment où nombre de personnes qui relèvent de l’intermittence se voient
condamnées à une exclusion plus ou moins rapide de l’assurance chômage, au
moment où s’engagent des pourparlers pour la tenue d’Assises nationales, au
moment où la concertation et la négociation devraient reprendre tous leurs
droits, ce n’est pas d’une vague d’intimidations dont nous avons besoin.
Si les menaces qui pèsent sur Pierre Foviau et Anne Conti (et sans doute
demain d’autres personnes) ne sont pas clairement levées, et que votre
position n’est pas éclaircie vis-à-vis de la profession de notre région, je
ne pourrai plus siéger au Comité d’experts et assumer la confiance implicite
que ce système suppose entre les représentants de l’Etat et les
professionnels.

Espérant que vous saurez trouver les moyens d’apporter l’apaisement que nous
attendons tous, je vous prie de croire, Monsieur le directeur, en
l’assurance de ma considération distinguée.
Marie-Agnès Sevestre

5 Le communiqué de presse (Syndeac,acpsv et la coordination )

DES ADHERENTS DU SYNDEAC EN REGION NORD PAS DE CALAIS
DE L’ASSOCIATION DES COMPAGNIES PROFESSIONNELLES DU SPECTACLE VIVANT
DE LA COORDINATION DES PROFESSIONNELS DE LA CREATION

Nous avons appris hier que deux des artistes qui s’étaient dévêtus lors de
l’occupation de la DRAC Nord Pas de Calais le 4 septembre dernier (voir
rappel des faits ci-dessous) avaient été convoqués au commissariat central
de Lille pour audition mardi 16 et mercredi 17 septembre, puis mis en garde
vue pour " exhibition sexuelle ", " attentat à la pudeur " et " outrage à la
République ". En effet, suite à une plainte déposée par la DRAC pour "
dégradation de matériel " (porte endommagée) et " vol de document " (un
agenda et un fichier ayant disparu), une enquête a été menée et le Ministère
Public a décidé d’engager des poursuites au motif d’exhibitionnisme. Une
perquisition a été effectuée au domicile des deux comédiens afin de trouver,
sans succès, les documents disparus. Aucune charge n’a été retenue contre
eux. Ils ont été relâchés. Cependant, ils seront de nouveau convoqués le 23
janvier pour " rappel à la loi " où il leur sera signifié qu’ils pourraient
être poursuivis une prochaine fois en cas de fait similaire. Durant les
gardes à vue, de nombreux contrôles d’identité ont été effectués parmi les
personnes venues de plus en plus nombreuses les soutenir. Des nouvelles
convocations seront sans doute effectuées dans les jours à venir.
Nous, adhérents du Syndeac en Nord-Pas de Calais, à l’Association des
Compagnies Professionnelles du Spectacle Vivant et membres de la
Coordination des Professionnels de la création sommes indignés par les
poursuites qui sont engagées contre les intermittents qui ont occupé la DRAC
le 4 septembre dernier. Nous condamnons fermement ce que nous percevons
comme une tentative d’intimidation qui aurait pour but d’étouffer un
mouvement qui lutte avant tout pour la richesse et la diversité artistique
et culturelle.

Nous demandons à Monsieur le Directeur Régional des Affaires Culturelles
qu’il retire sa plainte et qu’il use de toute son autorité pour que cessent
ces poursuites. Car si cette situation devait perdurer, elle mettrait en
péril la collaboration entre les professionnels et les services de la DRAC
sur laquelle s’est construite et fortifiée la vie artistique et culturelle
de notre région. Nous souhaitons qu’une issue honorable à cette situation
soit trouvée rapidement. Nous rappelons que notre action ne se fonde pas
uniquement sur des manifestations publiques, elle s’appuie également sur un
travail de réflexion en collaboration avec tous les acteurs de la création
artistique et de l’action culturelle. Nous sommes porteurs de propositions
que nous présenterons (avec des plasticiens, des auteurs, des musiciens, des
archéologuesŠ) au Grand Mix / Tourcoing* le mardi 23 septembre à 18h30.
En abrogeant l’agrément du protocole d’accord sur le régime d’assurance
chômage des intermittents, le gouvernement créerait les conditions d’une
reprise immédiate des négociations nécessaires pour refonder la vie
artistique et culturelle de notre pays et pourraient déboucher sur
l’élaboration d’une loi d’orientation sur l’art et la culture.

Syndeac en région : Max Gaillard : 03.21.71.76.30

ACPSV : Amaro Carbajal : 03.20.65.96.50

Coordination des professionnels de la création : 03.20.55.32.88

Le grand Mix - 72 rue Saint Jacques - Tourcoing - 03.20.70.10.00 -
M° Colbert

6 les articles de Libération de Haydée SABÉRAN

Un intermittent sans culotte au poste

Un metteur en scène lillois en garde à vue pour avoir manifesté nu.

Par Haydée SABERAN

Mercredi 17 septembre 2003

Le cheveu noir, le sourcil fourni, l’homme est posé, discret. On a du mal à
l’imaginer nu sur le toit de la Direction régionale des affaires culturelles
(Drac) de Lille. Et pourtant il l’était, comme une dizaine d’autres
comédiens, le 4 septembre. Un acte « spontané, théâtral, et très symbolique
pour expliquer, au moment où Aillagon refusait le moratoire sur l’accord,
que si on enlevait à la culture ses moyens, nous étions littéralement à
poil ». Un acte qui a valu à Pierre Foviau, 39 ans, comédien et metteur en
scène lillois, de passer hier plus de cinq heures en garde à vue. Et d’être
convoqué le 23 janvier au tribunal de Lille, en « rappel à la loi », pour
lui signifier que la prochaine fois, il pourrait être poursuivi.
Délit. La loi ne prévoit rien moins qu’un an de prison et 15 000 euros
d’amende pour le délit d’exhibition sexuelle. Car il est reproché à l’homme
de théâtre - qui a joué avec le Royal de Luxe, et met en scène Dans la
solitude des champs de coton de Koltès cet hiver au Bateau-Feu de Dunkerque

 de s’être « mis nu dans un lieu accessible au regard du public ». La
comédienne Anne Conti n’était pas nue, mais en culotte. Elle est pourtant
convoquée à 8 h 30 au commissariat central de Lille ce matin. Elle pourrait
être accompagnée, par solidarité, de cinq autres personnes, qui étaient à
ses côtés dans le plus simple appareil. Anne Conti - qui aurait dû jouer
dans le « in » d’Avignon dirigée par Vincent Goethals - raconte : « On
venait de recevoir un coup de fil nous apprenant le refus d’Aillagon. On l’a
annoncé à la manif qui était en bas. On a dit : "Qu’est-ce qui va nous
rester ?" Et quelqu’un a dit : "A poil." Une fille a commencé, puis on s’est
déshabillés, les uns après les autres. On rigolait. »

L’enquête a démarré sur plainte de la Drac, pour dégradation et vol. Les
manifestants sont entrés dans les locaux, une porte aurait été dégradée sous
la poussée et un agenda aurait disparu. Les policiers se sont rendus hier au
domicile de Pierre Foviau, « où ils n’ont rien trouvé », précise le
comédien. Joint par téléphone hier, le procureur de la République, Philippe
Lemaire, se montrait menaçant : « La position du parquet est claire : une
manifestation aboutira à des poursuites si l’on entre dans les services de
l’Etat par la force. La ligne jaune a été franchie. S’il y a de nouveau
envahissement de locaux avec dégradations, j’augmenterai la pression. » Dans
la perspective de l’opération « Lille capitale européenne de la culture » en
décembre, les intermittents voient là une « intimidation ». Au commissariat,
Pierre Foviau a remarqué sur les murs la photo d’une femme posant seins nus
pour une marque de lingerie. « J’ai fait remarquer que ça n’était pas très
respectueux. Les femmes flics souriaient. »

Siège. Parallèlement, une centaine d’intermittents a occupé hier matin les
locaux de la Drac de Bretagne à Rennes. A Paris, après la pose de banderoles
sur la façade du Medef (VIIe ar.), 400 comédiens et techniciens ont pris
possession d’un théâtre, rue du Cherche-Midi (VIe ar.), propriété de Gérard
Depardieu. A l’étroit dans le commissariat du IIIe arrondissement, qu’ils
occupent depuis le début du mois, ils entendaient faire de ce bâtiment leur
siège. Dans la soirée, ils négociaient toujours avec l’agent de l’acteur. Le
théâtre n’a pas vu l’ombre d’un spectacle depuis dix ans.

Lille : nouvelle garde à vue d’intermittente Une comédienne interpellée pour

« exhibition sexuelle ».

Par Haydée SABERAN

jeudi 18 septembre 2003

Une femme en string, seins nus. L’image orne les murs et les écrans de
veille des ordinateurs du commissariat central à Lille. En voyant l’affiche,
format Abribus, Anne Conti a « cru rêver ». La comédienne a été retenue en
garde à vue, hier, quatre heures durant, pour « exhibition sexuelle ». Elle
s’était déshabillée le 4 septembre sur les terrasses de la Direction
régionale des affaires culturelles de Lille (Drac), avec neuf autres
intermittents du spectacle. Elle n’était pas nue, mais en culotte. « C’était
un acte théâtral, en réponse à une attaque politique, au moment où nous
apprenions qu’Aillagon refusait le moratoire sur l’accord. Si on était
violents, si on jetait des pierres, ce serait facile de nous coincer. On se
déshabille, ils sont embêtés. On préfère se battre avec des mots et des
images. »

Disparition. Comme le metteur en scène Pierre Foviau, gardé à vue la veille
pour le même motif, elle est convoquée au tribunal de Lille, le 23 janvier,
pour se voir signifier un « rappel à la loi », en avertissement. « On essaie
de paralyser le mouvement avant Lille 2004 (la ville sera alors capitale
européenne de la culture, ndlr) », analyse la comédienne.
Tout est parti d’une plainte de la Drac, pour vol et dégradation. Une
cinquantaine d’intermittents avaient envahi ses services lors de la
manifestation du 4 septembre. La porte d’entrée aurait été abîmée et un
« agenda » aurait disparu. Les policiers ont perquisitionné au domicile
d’Anne Conti avec elle, à la recherche dudit agenda. En vain.
« Zèle ». En signe de protestation, une demi-douzaine d’intermittents ont
déposé, hier à la Drac, des agendas choisis avec soin chez Tati. Les
sénatrices du Nord Marie-Christine Blandin (Verts) et Michelle Demessine
(PCF) n’ont pas pu rencontrer l’actrice pendant sa garde à vue, et s’en sont
émues. La première dénonce « un zèle répressif », la seconde, « une
intimidation ». Hier après-midi, les intermittents ont réclamé le retrait de
la plainte. Le directeur régional de la culture, Richard Martineau, n’a pas
réagi ; il est injoignable depuis deux jours. Ironie du sort, Anne Conti
faisait partie des rares intermittents membres du comité d’experts de la
Drac dont l’avis peut être pris en compte lors de l’attribution des
subventions aux compagnies. Hier, elle a posté sa lettre de démission.

Xavier xboyaud@nordnet.fr pour la coordination Nord/Pas de calais