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Aquila : une petite victime française ignorée des médias

Publie le vendredi 10 avril 2009 par Open-Publishing
5 commentaires

de Fabrice Montebello

Une collégienne de Longwy (54), Maurane, 12 ans, est décédée lors du tremblement de terre de l’Aquila en Italie. Elle était arrivée à l’aéroport de Pescara avec sa grand-mère et sa mère le dimanche 5 avril avant de rejoindre le village de San Gregorio près de l’Aquila.

Les deux femmes et l’enfant devaient passer les vacances de Pâques dans leur famille d’origine. Le plafond de la chambre dans laquelle dormait Maurane s’est effondré sur cette dernière lors de la première secousse sismique, le lundi 6 avril à 3h30 du matin, la tuant sur le coup.

La grand-mère et la mère, toutes les deux blessées, ont été transportées dans un hôpital de Rome.

Ces informations sont tirées du journal régional Le Républicain Lorrain (8 et 9 avril 2009). A ma connaissance, aucun des grands médias nationaux, télévision, radio, quotidiens - pourtant spontanément prompts à la mise en scène spectaculaire du malheur des autres et à la comptabilité macabre de l’appartenance nationale des victimes - n’a mentionné le fait.

Pas même le Président de la République, lui-même champion toutes catégories du coup médiatique. Il faut dire que le Quai d’Orsay a parlé du décès d’une "jeune touriste française". Peut-être devrait-on se féliciter du qualificatif officiel utilisé pour décrire l’état de cet enfant : Non pas une petite-fille qui s’apprêtait à fêter Pâques à l’italienne, comme le faisaient ces ancêtres partis en France il y a des dizaines d’années, mais "une touriste". La preuve parfaite du modèle d’intégration à la française et de l’exemplarité italienne dans le domaine.

En fait, l’information méritait d’être mentionnée car il existe toujours en France une très forte communauté d’immigrés et de descendants d’immigrés des Abruzzes, à l’origine des paysans pauvres, partis chercher un avenir meilleur dans les usines du nord et du nord-est de la France, parfois au-delà comme dans les charbonnages belges, jusqu’à Marcinelle (de sinistre mémoire pour tous les immigrés italiens en provenance des Abruzzes). Là où d’habitude, les journalistes ne perdent pas une seconde pour bricoler des micros trottoirs débiles, flattant le sentiment d’appartenance nationale des enfants et petits-enfants d’immigrés, à l’occasion des matchs de la coupe du monde de football, il ne s’est trouvé personne pour venir enregistrer la profonde émotion suscitée en Lorraine par exemple, non seulement pour le destin tragique de la petite Maurane mais aussi pour celui de toutes les victimes du tremblement de terre de l’Aquila.

Il est vrai que dans la France des années 2000, l’idée qu’un immigré pauvre - tout juste bon à susciter la charité des pièces jaunes de Mme Chirac - représente une charge pour la nation et non une chance pour l’avenir, c’est-à-dire notre passé et notre avenir communs, est devenue, à la faveur du repli égoïste général et de la montée des idées rétrogrades, un des lieux communs médiatiques les mieux partagés.

Fabrice Montebello, Luxembourg.

Messages

  • Oui, c’est ainsi que les médias français l’ont présenté : "une touriste française", mais pas plus. C’est indécent au regard de la maman et sa grand mère qui vivent un tel enfer, ainsi que les amis et famille d’ici et de là-bas !

  • Même dans la mort, il y a de l’injustice. Certaines victimes ont droit aux honneurs de la presse et à la sollicitude des autorités. D’autres, à peine à une mention. Ainsi, le 31 mars dernier, on ap­prenait qu’une embarcation ­partie de Libye pour l’île italienne de Lampedusa avait fait naufrage. Seuls 23 émigrants en réchappaient, sur un total de 300. En théorie, à ­partir du 15 mai, des patrouilles italo-libyennes doivent surveiller les côtes africaines et empêcher les expéditions. C’est pourquoi, ces dernières semaines, les ­passeurs ont fait partir de nombreux bateaux, les chargeant autant qu’ils le pouvaient, sans même tenir compte des dangers de la météo marine… La plupart des journaux se sont contentés de ­donner l’information. Et nous n’avons trouvé dans la presse internationale aucune enquête qui mérite d’être traduite pour ce numéro de Courrier international.

    A peine une semaine plus tard, un autre drame ­survenait non loin de là, au cœur de l’Italie. Dans les Abbruzes, un séisme de grande amplitude tuait près de 200 personnes et en blessait près de 1 500. Cette fois, et c’est compréhensible, les médias ­européens ont largement couvert l’événement, lui consacrant des unes, des entrées de JT et de longues enquêtes…
    C’est donc l’existence d’une opinion publique qui fait la différence. On se sent proche et solidaire des Italiens, nos voisins. Beaucoup moins des Africains clandestins… Autre morale de l’histoire : il faut choisir sa date pour mourir. Le 31 mars, c’était la veille du G20, et les médias n’avaient d’yeux que pour Obama arrivant en Europe. Alors que le 6 avril, date du tremblement de terre, le reste de l’actualité était beaucoup moins dense.

    Enfin, en Italie, nous avons affaire au destin tellurique et aux impérities des services de secours : deux thèmes intéressants à étudier. Dans le cas des boat people libyens, il s’agit des écarts Nord-Sud ­(et de l’exploitation du Sud par le Nord). Il s’agit donc, en plein G20, en pleine crise de notre modèle, ­de notre égoïsme quasi permanent. Un scandale ­évidemment plus difficile à admettre.
    Philippe Thureau-Dangin

  • On applaudit. Comme là-bas, pour la saluer quand elle passe et l’accompagner jusqu’à sa dernière demeure.
    C’est la fonction de la littérature. De faire revivre les morts. Du moins d’empêcher qu’ils ne meurent une seconde fois.
    Merci pour votre article.

  • et moi qui a 1 amie a aquila je ne sais rien delle et sa famille et pourtant jessaie de joindre par telephone lambassade de rome francais et personne ne repond pas sympa du tout de leur part je leur ai anvoie des faxs ecrit par e-mail et toujours pas de reponses !atroce.......

    ma chere francine elena et sergio jattends jattends davoir de vos nouvelles....snif mimi