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« Dans le monde réellement renversé, le vrai est un moment du faux » énonçait Debord. Et il est vrai que la Belgique soit l’un des centres les plus anciens de l’invraisemblable et du « monde réellement renversé » d’aujourd’hui. Son passé de canular historique en atteste.
Aussi comment prendre au sérieux l’éclatement d’un pays qui n’a jamais vraiment existé ? L’Article I de la Constitution dés 1830 ne dit-il pas : « le Royaume de Belgique est institué pour y discuter de l’éclatement de la Belgique ». Comment prendre au sérieux le discours de la classe politique belge et ses faux airs d’outragé ? Sans y voir un imposteur qui a trouvé plus imposteur que lui, momentanément. On savait, depuis Valéry, que la politique c’était l’art d’empêcher les gens de s’occuper de ce qui les regarde ; on sait aujourd’hui que c’est celui de les empêcher de regarder le monde alentour, tellement qu’il n’existe pas. Et pourtant dans le monde réel aucune signalétique ne nous indique que « ceci n’est peut-être être pas la réalité ».
Dans le virtualisme ambiant, et son carnaval de Venise permanent, on ne sait qui est la dupe de qui. Le politique croyant avoir le monopole de la manœuvre en matière communautaire, en jouant tour à tour de l’accélérateur ou du frein, a nourrit le Golem-communauté jusqu’à ce qu’il s’émancipe et vive de sa vie propre et finisse par le dévorer, nous faisant oublier qu’il n’a plus le moindre pouvoir, car le pouvoir est autour de lui, au-dessus de lui, par-devers lui, en-deça de lui, mais plus en lui ; les journalistes de la RTBF croyant avoir fait un coup, car il s’agit essentiellement d’esbroufe pour reconquérir un place de choix dans le champ des médias belges, le JT de référence en Belgique c’est celui de RTL !,ont peut être mis le feu au poudre du vaisseau fantôme Belgique qui n’en finit pas, à marche forcée, d’ appareiller vers un destination inconnue, globalisation oblige, mais plus certainement, ils n’ont fait que réanimer provisoirement un mort, qui a signé son acte de décès peu après l’affaire Dutroux . Une tentative d’exorcisme donc.
Mais ce fut également une bien singulière tentative d’émancipation : les journalistes de la RTBF nous signifiaient qu’ils n’étaient plus « aux ordres » du politique, mais passaient sous les fourches caudines du « marché ». La fausse provocation, n’est-elle pas sa rhétorique préférée ? Quant à la population, dont on a pu juger de sa crédulité, sa panique n’était pas tant provoquée par la subversion de l’entreprise que par la peur du vide ambiant, le constat cinglant que leur univers est régi par un principe d’irréalité : la Belgique-fiction…
Messages
1. Belgique-fiction, 19 décembre 2006, 15:26
L’enfoiré de Philippot ne travaille qu’en étroite collaboration avec les
pubards (il est d’ailleurs président de la RMB). Tout ce qu’il fait à la
RTBF ne va que dans ce sens => faire sauter le plafond du financement de la
RTBF par la pub, alignement du contenu des programmes sur celui de la pub
(afin de gommer tout "contraste" entre info et fiction et décliner
l’ensemble sur le mode du "divertissement"), multiplication des chaines afin
de "cerner" des publics cible pour les annonceurs, partenariats privilégiés
(notamment avec Belgacom) etc etc.
Dans cette optique le "canular" était parfait. Monsieur Philippot a toutes
les raisons de se réjouir => explosion de l’audimat, tous ses (vrais)
partenaires se frottent les mains, on les imagines en train de sabrer le
champagne en petit comité => Belgacom enregistre une augmentation de 20% des
appels sur son réseau, les pubards ouvrent leur tiroir caisse en se frottant
la panse, la RTBF devient une chaîne "sulfureuse" propre à attirer les
annonceurs, quant à la direction de la RTBF elle se permet de noyer le
poisson en se refaisant une image "indépendante" (vierge) du politique,
alors qu’elle n’a jamais été aussi dépendante du vrai pouvoir (financier).
Le tout en montant une opération de marketing digne des grands maîtres
propagandistes => démagogie absolue, il n’y a pas de sujet qui fasse
davantage consensus des deux côtés de la frontière linguistique que
l’anti-séparatisme. De plus, comme le font remarquer en choeur aussi bien
les journalistes véreux que les pubards en général, l’interprétation du
"code de déontologie" n’est pas une "science exacte", en d’autre terme
sabotons le sens et remplaçons-le par le doute, relativisons les valeurs et
semons la confusion, c’est ce qu’il convient le mieux pour pouvoir inculquer
les nouvelles valeurs néo-libérales (qui elles se passent de toute morale).
Le débat divise ? c’est idéal, il n’y a pas de vérité et on peut prolonger
le "débat" pendant un temps record (tout en veillant soigneusement à écarter
toute vélléité de le ramener à la seule réalité "sonnante et trébuchante"
qui est à l’origine de cette affaire).
Bref, gardons-nous bien d’analyser cette opération en s’enlisant dans des
considérations de "sujet" qui de toute façon est traité en permanence depuis
la nuit des temps (ce débat ne permet d’ailleurs guère l’action et nous
écarte des vraies préoccupations qui devraient être les nôtres), mais bien
sur les motivations (à qui profite le crime). Dans ce sens on verra que la
façon dont la RTBF prétend innover le sera sur le mode de la fiction, du
spectaculaire et de l’émotion, ce qui, comme je le souligne, convient bien
mieux aux pubards qu’aux citoyens à la recherche d’info réelle et de
qualité. L’info, qui a besoin de rigueur et d’analyse, se passe volontiers
du spectaculaire, et est handicapée par l’émotion et le mélange des genres
(fiction-réalité). Tout cela inaugure donc une nouvelle phase de
démantèlement du service public et sa dérive vers la télé poubelle (jeux,
fast-food-info, démagogie, réality-show, pub).
Ne nous réjouissons pas, très peu de citoyens auront pu saisir cette
occasion pour s’interroger sur les "médiamensonges", car le vrai débat a été
écarté d’emblée. D’une façon très "didactique" la direction a amplement
"expliqué" aux citoyens le "but" de la manoeuvre, et la majorité aura trouvé
que l’explication était crédible. Il suffit d’ailleurs pour ce faire
d’utiliser l’argument "massue" qu’utilisent en permanence les pubards : "il
ne faut pas prendre les gens pour des cons", pour se rallier la majorité (et
la manipuler encore mieux). Le vrai débat a été écarté et c’est (uniquement)
celui du pouvoir et de la place qu’ont pris les pubards et les annonceurs au
sein de service public. A ce niveau, il ne faut pas se tromper par une trop
courte analyse, il n’était pas nécessaire (au contraire) de truffer de pub
les contours de cette émission, c’est le changement en profondeur (notamment
dans le discours) qu’il faut remarquer, les pubards investissent sur le long
terme.
En conclusion, ce fut une superbe démonstration de la thèse qui veut que
nous jetions la télé à la poubelle, c’est d’ailleurs ce que j’ai fait depuis
longtemps (je n’ai donc pas vu l’émission). Mais je me dis tout de même que
cette arme de distraction massive doit conserver notre attention et que le
sabotage du service public ne peut avoir aucun effet positif. Aussi
devons-nous sans doute continuer à militer pour que cette saloperie de
Philippot (et consorts) en soit viré au plus vite.
P (R.A.P. - Résistance à l’Agression Publicitaire)