Accueil > Casino : les salariés offerts en sacrifice à la finance internationale ?

Casino : les salariés offerts en sacrifice à la finance internationale ?

par PaulR

Publie le vendredi 31 mai 2019 par PaulR - Open-Publishing

Alors que la société Rallye, actionnaire de contrôle de Casino, est entrée, à son initiative, dans une procédure de sauvegarde afin de restructurer sa dette, les salariés du groupe ne cachent pas leurs inquiétudes. En cas de changement d’actionnaire, le démantèlement du groupe et la casse sociale ne seraient pas loin.

L’heure est grave et les syndicats se mobilisent. FO Casino et FGTA-FO ont adressé une pétition aux ministères de l’Economie Bruno Le Maire et du Travail Muriel Pénicaud (en ligne sur change.org) afin de les obliger à agir pour préserver l’emploi en sécurisant la procédure de sauvegarde de la société Rallye. Ils demandent aux pouvoirs publics de « tout mettre en œuvre pour empêcher le démantèlement du groupe Casino ». « Si la société Rallye devait céder des parts à des fonds prédateurs pour rembourser la dette, il y aurait un vrai risque de démantèlement du groupe avec un fort impact sur le social, estiment-ils. Il en va de l’avenir en France de l’emploi de 75 000 salariés ». Des femmes, des hommes et des familles qui « n’ont pas à être sacrifiés au nom de manipulations boursières exercées à seule fin de spéculations ».

Depuis des mois, l’action Casino fait l’objet d’attaques coordonnées de fonds spéculatifs anglo-saxons pratiquant la vente à découvert. Et aujourd’hui, toujours sous la pression des marchés financiers, le spectre d’un changement d’actionnaire et d’un démantèlement plane sur le groupe. «  Bien sûr on est inquiets, tout en étant plutôt rassuré par le fait que ce soit la direction du groupe qui ait lancé la procédure de sauvegarde pour se donner le temps de trouver des solutions d’échelonnement ou de renégociation de sa dette  », a précisé à l’AFP Laurence Gilardo, déléguée syndicale FO du groupe Casino. «  Ce n’est pas une surprise, le groupe est endetté depuis toujours, il a construit sa stratégie sur la dette. Mais ces derniers temps, la pression des marchés financiers s’était faite plus intense alors que des échéances arrivaient ». « Nous ne sommes pas à l’abri d’un changement de gouvernance, en rupture avec ce qui s’est fait jusqu’à présent  », s’inquiète la syndicaliste. Selon elle, Casino, contrairement à Carrefour avec Alexandre Bompard, n’a pas connu en effet ces dernières années de plan social d’ampleur, les départs se faisant par non-remplacement des personnes partant à la retraite et via le turn-over naturel. La donne serait bien sûr différente en cas de changement d’actionnaire.

Avec ses enseignes de proximité comme Monoprix, Franprix ou Leader Price, une place de n°1 français du commerce digital avec Cdiscount et une avance dans le bio avec Naturalia, Casino est sans doute l’acteur français de la grande distribution le mieux armé pour faire face à la transformation actuelle du commerce. Le groupe ne ménage pas non plus ses efforts pour réduire sa dette de manière drastique via un vaste plan de cession d’actifs non stratégiques, afin de rassurer les marchés financiers. Aujourd’hui, avec cette procédure de sauvegarde, la direction du groupe souhaite trouver des solutions avec ses créanciers pour assurer la pérennité du groupe, tout en continuant à exécuter son plan stratégique.

Mais malgré tous ces fondamentaux positifs, certains analystes financiers parient déjà sur la perte de contrôle de Casino par son PDG Jean-Charles Naouri, voire sur la vente du groupe par appartements. Selon eux, les créanciers obligataires, qui portent plus d’un tiers de la dette de Rallye, vont tenter d’échanger leurs créances contre du capital et devenir ainsi les actionnaires de contrôle de la holding qui détient 51 % de Casino. De plus, si la capitalisation de Casino est basse, les actifs de l’entreprise pourraient avoir bien plus de valeur pris séparément, en particulier des enseignes rentables et bien positionnées comme Monoprix, Franprix ou Cdiscount, qui pourraient attirer les appétits de concurrents en retard dans le commerce de proximité et le numérique comme Carrefour ou Auchan, ou même du géant du e-commerce Amazon qui ne cache pas ses intentions de se développer sur le commerce alimentaire en France.

Ces scénarios de prise de contrôle par des fonds d’investissement ou de vente au détail à la concurrence s’accompagneraient inévitablement d’une forte casse sociale. C’est pourquoi les syndicats, en dépit des divergences qu’ils ont eu et ont toujours avec la direction, ne souhaitent pas que celui-ci perde le contrôle du groupe et en appellent aux pouvoirs publics pour garantir l’intégrité de Casino. Afin que des salariés français ne soient pas, une fois de plus, sacrifiés aux intérêts de la finance internationale.