Accueil > Cesare Battisti : REVEIL !!!

Cesare Battisti : REVEIL !!!

Publie le jeudi 17 juin 2004 par Open-Publishing
1 commentaire

Depuis bientôt deux semaines ça me tourne dans la tête.

Finalement, impossible de ne pas réagir après ce qui s’est passé le 12 mai dernier, autour de l’affaire Cesare Battisti. Désinformation, dissimulation, déformation, propagande... J’en ai du mal avec le vocabulaire !

J’ai lu la presse, écouté la radio, maté la télé, erré des ténors italiens réclamant la crucifixion aux limiers français exigeant l’absolution. Comment se faire sa religion ? En se réveillant, peut-être, et en se rappelant que qui veut tuer son chien l’accuse de la rage… Car c’est bien, à la fin, ce qui ressort de cet étalage d’arguments, qui jette le pathos à l’assaut de l’analyse, et le recul à la face de l’émotionnel ! Alors réveillons-nous !

Comprenons l’entreprise d’intoxication de nos cerveaux que mènent les médias - NOS MEDIAS ! -, attachés dirait-on à présent à conforter la thèse portée par notre - NOTRE ! - gouvernement, en vue de faire plaisir à celui de Sylvio Berlusconi - LE Berlusconi, celui de l’alliance avec le fascisme, celui des lois commandées sur mesure pour lui permettre d’échapper à sa propre justice, celui qui Sait que les attentats de Madrid sont forcément dus à ETA, car les quatre Bédouins d’Al-Quaeda sont trop bêtes pour avoir organisé un truc aussi complexe, celui qui recrute les figurants Kapos au Parlement Européen, celui qui professe la supériorité des Blancs sur les Noirs, etc.

Lisons comment NOTRE presse s’intoxique et désinforme et donne le « la » de la curée sur Battisti. Constatons que l’éditorialiste italien le plus virulent qui s’y exprime y a par ailleurs son e-mail de correspondant. La presse, qui ouvre ses colonnes au magistrat italien qui avait condamné Battisti, sur la foi de témoignages de repentis (des condamnés qui balancent, se contredisent et sont quand même blanchis, c’est le tarif !).

Et prenons un peu de hauteur : rappelons-nous les rapports d’Amnesty sur la justice italienne des années 80, expéditive, tortures, déni de droit. Réalisons que l’Italie gère actuellement ses Années de Plomb comme il y a dix ans la France gérait l’Algérie : dans le déni, la honte, le silence.

Réalisons, bon sang, qu’on est en train de condamner un homme à la mort lente parce qu’il gêne la bonne conscience, parce qu’il n’a pas demandé pardon humblement, en tournant son bérêt entre ses doigts gourds, et en promettant de ne plus penser de travers !! Où sommes-nous, les démocrates, défenseurs de la libre parole, du libre- arbitre, de la liberté de penser ?? Qui on dérange, quand on se demande si le doute ne devrait pas profiter à l’accusé ? Qui va faire la gueule, si le principe de précaution appliqué à la démocratie signifie qu’on ne livrera pas un individu d’abord (et peut-être seulement) coupable de faire fausse note dans le concert d’auto-congratulation républicaine-démocrate-politiquement-correcte ? Berlusconi ? Ca vous gêne de le gêner ? Perben ? Ca vous gêne de le gêner, ce ministre qui ment en direct à ses électeurs - NOUS !! - à la télé ?

Quelle difficulté insurmontable nous empêche de dire aux italiens "Vous savez, on a l’impression que vous manquez de lucidité dans cette histoire, dans cette Histoire, et on pense que vous faites une erreur" ? C’est bien ce que Chirac a dit aux Américains juste avant le bombardement sur Bagdad, non ? Et nous Français, de gauche comme de droite, nous étions solidaires de cette position, non ? A-t-on matière aujourd’hui à se désoler de celle-ci ?

Qu’est-ce qu’on attend, pour enlever les peaux de saucissons que nous nous sommes collés sur les yeux !! Qu’il y ait un sacrifié de plus, ou cent, parce que Battisti n’est pas le seul, ils sont plus d’une centaine qui attendent patiemment (de patior, souffrir) de passer à la trappe avec lui ? Et là, on osera dire "Ah ben ouais, mais c’était compliqué, vous savez, assez confus en fait, on savait pas trop, on a pas osé dire non, parce que..." Parce que QUOI ??? Encore faire les trois petits singes ?? Encore le voile pudique sur la triste affaire ?

Mais j’ai déjà du mal à expliquer à mes gosses comment un Le Pen est arrivé au second tour d’une élection présidentielle, comment l’armée française - la nôtre, oui, celle qui fait de l’humanitaire - a regardé les Tchetniks massacrer des milliers de civils a Srebrenizca, ou fourni les machettes qui ont égorgé huit cent mille Tutsis ! Pour l’armée, je peux encore dire que j’y étais pas, pour Le Pen, que ça a eu un côté salutaire... Et pour les réfugiés italiens ? Cent personnes détruites pour satisfaire des égos, des carrières, des rancoeurs nauséabondes ? Qu’est-ce que je leur dis, à mes gosses ?

Réveillons-nous !!! Parlons-en, parlez-en autour de vous, plein de gens croient que Battisti a tiré sur le gamin qui depuis est sur un fauteuil, c’est faux !! Archi-faux !! Plein de gens croient que l’Italie fonctionnait comme une démocratie au sens actuel, noble du terme, dans les années soixante-dix et quatre-vingt, c’est faux ! Archi-faux !! Que pour les Italiens ce soit difficile à accepter, c’est compréhensible, mais croyez-vous que le lynchage annoncé va les aider à faire ce travail de deuil ?

Les Italiens ont beaucoup reproché à Battisti de se considérer comme l’un des perdants d’une lutte intérieure, en arguant qu’il n’y avait pas de lutte, simplement des criminels attaquant une communauté. Ne font-ils pas précisément cette lecture-là, en identifiant clairement chacun des camps ? Berlusconi, ses amis, et au-delà toute la classe politique italienne, ont choisi la version qui doit figurer dans les livres d’histoire : il acquittent et décorent les anciens d’extrême-droite, et s’appliquent à salir l’autre camp. On dort mieux quand on sait qui sont les bons et qui sont les méchants…

Et nous, les Français, si soucieux du Droit, de la Justice, de l’Equité, garants d’une « certaine idée » de la démocratie, toujours prêts à donner des leçons aux brebis égarées, nous allons soutenir nos amis démocrates transalpins dans cette entreprise négationniste ? Je le crois pas, mais je le crois pas !! Réveillons-nous ! Réveillons-les !!

Nous appartenons depuis trois semaines à une communauté de vingt-cinq pays. Qui se veut une sorte de phare pour l’humanité du vingt-et-unième siècle - je me trompe ? La Troisième Voie, tout ça... Toutes ces avancées, obtenues à 6 , puis à 9, puis 12, 15, et parmi elles la libre circulation des citoyens... Schengen, ça. Mais est-ce qu’au nom des nécessaires concessions qui sont le prix du consensus, doit-on aller jusqu’à la compromission, transformer la libre circulation en libre entravement ?

Dans ce cas, exigeons solennellement l’arrestation, l’extradition et le jugement et la condamnation bien sûr et l’exécution de la peine (lourde, s’il vous plaît, pis incompressible, hein) immédiats de Monsieur Berlusconi, pour crimes contre l’intelligence, apologie de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, incitation à la violence policière et à la haine raciale, trafic d’influences et délits d’initié. Et avec lui Monsieur Perben, pour association de malfaiteurs en vue d’une entreprise de diffamation aggravée, de faux témoignages, de dissimulation de déni de justice, transaction illicite d’êtres humains et complicité de négationnisme historique….

Réveil, chanson québécoise d’alarme aux Anglais. La tunique n’est plus rouge, elle est brune : REVEIL

Messages

  • " Plein de gens croient que l’Italie fonctionnait comme une démocratie au sens actuel, noble du terme, dans les années soixante-dix et quatre-vingt, c’est faux ! Archi-faux ! "...

    Bon d’accord, durant la période ’70-’80 il y a eu d’innombrables excès flicardiers en Italie (ils ne sont hélas d’ailleurs toujours pas passés de mode : le G8 de Gênes en est, passez-moi l’expression, l’exemple le plus frappant...).

    Mais je regrette, Monsieur Le Perron : les élections et la presse y étaient libres, et l’opposition de l’époque (avec à sa tête un PCI qui cartonnait à 30-35%) a fait ce que toute opposition "démocratique au sens actuel et noble du terme" se devait de faire à partir du moment où ça flinguait grave à tous les coins de rue du pays : soutenir un gouvernement d’unité nationale pour préserver les institutions démocratiques (des institutions certes imparfaites, mais certainement plus "perfectibles" dans un contexte parlementaire plutôt que dans celui d’improbables dictatures de prolétariat...).

    Monsieur Battisti doit rester en France, car la France lui a proposé un deal qu’il a scrupuleusement respecté depuis ’91 : se tenir à carreau.
    Pour le reste (si, bien sûr, reste il y a), qu’il se démerde avec sa conscience.

    Amicalement

    Brunz

    PS : un vrai persécuté, un du fascisme des années ’30 par exemple (pour rester dans le registre transalpin), n’a jamais eu la "chance" de se retrouver sous la coupe d’une demande d’extradition : les tueurs déboulaient direct chez lui...
    C’est encore en celà que réside la différence entre cette chose sordide et ridicule qu’est Silvio Berlusconi et cette chose atroce que fut Benito Mussolini.