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Chère Ségolène

Publie le jeudi 14 décembre 2006 par Open-Publishing
5 commentaires

La petite phrase que tu as regretté que l’on ait diffusé qui concerne les enseignants qui auraient une fâcheuse tendance à donner des cours particuliers payants alors qu’ils n’assureraient que du bout des lèvres leur service est particulièrement insultante pour notre métier.

Cette phrase assénée avec la conviction d’une vérité première, tu ne la renies pas bien sûr. Mais c’est vrai que c’est cohérent de ta part, tu as été à bonne école puisque que tu as été ministre déléguée à l’enseignement scolaire quand Claude Allègre sévissait à l’Education Nationale sous le regard bonhomme des députés de l’opposition du moment.
En tant qu’enseignant, je trouve que le discrédit que tu jettes sur notre profession est totalement injustifié et surtout infondé.

Les enseignants auraient trop de temps libre et donc auraient le loisir de donner des cours payants ? Quand bien même, je me permets de te rappeler que c’est une des rares activités annexes qu’ils peuvent exercer tout en respectant leur statut de fonctionnaire.

Mais que fais-tu de tous ces enseignants qui restent bénévolement le soir à aider leurs élèves ou anciens élèves, dans le seul but de leur donner la possibilité de poursuivre des études comme le voudrait l’école de la République chère à Condorcet ?

Qui a fait passer le temps de présence des enseignants du primaire devant les élèves de 27h à 26 h en 1989 1990 pour économiser sur la formation continue, tout en maintenant les mêmes programmes ? Qui a ajouté des matières nouvelles en élargissant donc les missions des mêmes instituteurs (nommés ainsi par le même Condorcet) rebaptisés pompeusement professeurs des Ecoles en introduisant l’enseignement des langues vivantes en 92 , puis les TICE, les PPAP...? Et ce pour le même salaire.

Mais tu as peut-être raison nous avons trop de loisirs ce qui nous permet de nous consacrer avidement à une autre activité rémunérée ( encore que nous avons perdu le lundi de pentecôte récemment comme beaucoup de salariés). Je me pose toutefois une question. Pourquoi ne pas élargir le champ de ta proposition d’augmenter le temps de présence des enseignants sur leur lieu de travail à d’autres catégories de personnes ?

En tant qu’enseignant au service de l’Ecole de la République, il m’arrive de regarder les débats à l’Assemblée Nationale pendant mes loisirs, trop peu souvent je le concède, mais je ne peux accéder à la chaîne public Sénat qui est elle sur le câble car je n’ai pas les moyens de la recevoir. Sur la chaîne hertzienne de service public donc, je vois de passionnants débats menés dans un hémicycle quelque peu clairsemé, et je me mets à imaginer ce qui se passerait si on appliquait ton raisonnement aux Représentants du Peuple : voir une assemblée faisant salle comble avec ses 577 députés lors des sessions serait sûrement une agréable nouveauté. Peut-être que cela aurait aussi la vertu d’empêcher nos dignes représentants d’avoir le loisir de se consacrer à d’autres tâches payées comme conseiller général ou régional par exemple qui sont, je le concède, légales, aussi légales que de donner des cours particuliers.

Mais je te rassure, même si je donnais des cours payants (alors que j’essaie de laisser cette activité aux étudiants pour financer en partie leurs études) je serai très loin de cumuler à hauteur d’un traitement de député sans parler du cumul avec celui de conseiller général ou régional.

Les députés, que je nomme en classe lors de mes séances d’Education Civique « les représentants du Peuple », ont opéré un glissement de leur fonction en devenant représentants de partis politiques qui eux-même ne représentent pas grand monde puisque ton noble parti politique par exemple ne représente que 200 000 électeurs environ, votre concurrent direct représente environ le même nombre d’adhérents, même en comptant les promotions incitatives comme des cartes du parti à des prix défiant toute concurrence. Si à vos deux partis, on ajoute tous les autres partis politiques, vous n’arriveriez pas à égaler la population d’une commune comme Marseille, et chacun sait que Marseille n’est pas la France, alors imagine un parti....

En attendant, je vais retrouver mon petit train-train d’enseignant et me consacrer à plein temps à une mission à laquelle je confère une certaine noblesse à l’inverse de beaucoup de politiques qui négligent depuis longtemps notre traitement, avancement et depuis quelque temps déjà mettent en doute notre capacité à enseigner ainsi que notre volonté d’instruire les enfants du Peuple au sein de l’Ecole de la République.

Je te souhaite une bonne campagne pleine de conviction et d’engagement comme tu l’as si bien démontré.

PS : Si je me suis permis de te tutoyer, ce n’est pas par familiarité, mais simplement parce que je m’adresse à une Représentante du Peuple, faisant partie du peuple j’ai donc pris l’habitude de tutoyer les gens du peuple...

Messages

  • LE débat n’est pas facile avec les enseignants :
    si on les consulte, ils avancent pour la plupart, et c’est normal, une longue liste de revendications. Beaucoup de choses sont à améliorer, à transformer dans les bahuts. Les personnels sont consciencieux, passionnés par leur métier, par leurs missions. Ils sont prêts à aller de l’avant, à améliorer les méthodes, l’organisation pour faire mieux, dans l’intérêt des élèves et de la réussite de leur parcours scolaire. Il faut que les choses changent, on n’est plus sous Jules Ferry. Très bien.
    si on parle de modifier les méthodes, l’organisation parce que on peut espérer faire mieux dans l’intérêt des élèves et de la réussite de leur parcours scolaire, alors la plupart de ces mêmes enseignants se braquent : comment, vous croyez que l’on ne s’efforce pas de bien faire, qu’on glande avec nos classes de 30 élèves et nos salaires minables ? On fait un sacré bon boulot et on nous montre du doigt, Allègre, puis De Robien et maintenant Ségolène, tous pareils à nous rabaisser, à nous couler, au grand bénéfice du privé.

    Moi, Marc, si j’enseignais encore (je l’ai fait pendant des années), je dirai : chère Ségolène, chiche. Enfin quelqu’un qui ne parle pas de réduire les moyens, de réduire les horaires, qui souhaite que l’on fasse plus pour l’éducation publique, que l’on accueille mieux les élèves dans les établissements, que le service public d’éducation demeure la référence et ne devienne pas le rebut. Chiche : il y a plein d’enseignants prêts à relever le défi de la transformation, à s’y consacrer. Pour peu qu’on les respecte, qu’on les écoute, et qu’on leur accorde les moyens des ambitions affichées. Oui il ya plein d’enseignants qui sont prêts travailler sur la transformation de leur métier et de leurs conditions de travail. Parce qu’à l’arrivée, ils travailleront mieux et différement, en ayant réformé les règles d’inspection, en ayant réévalué les rémunérations, en ayant mis en place une autre relation avec les élèves, les collègues, l’administration. En n’ayant plus à pourrir les loisirs de sa famille avec la pression du boulot à la maison. Alors chiche, ..
    Marc, avec tes collègues, prenez la balle au bond, interpellez Ségolène pour lui dire que oui, qu’elle se rassure, elle peut vous faire confiance, si elle lance un chantier de rénovation de l’EN, ca va bouger au delà de ce qu’elle imagine.

    • Moi, Marc, si j’enseignais encore (je l’ai fait pendant des années), je dirai : chère Ségolène, chiche.

      Oui mais voilà : VOUS N’ENSEIGNEZ PLUS ! Et je me demande si vous l’avez déjà fait.

      Je vous soupçonne d’être très partisan au point de taire le fait que les enseignants passent énormément de temps à travailler pour l’éducation...chez eux, au moins autant de temps qu’ils passent dans les établissements scolaires, souvent beaucoup plus. Et c’est probablement le seul métier où les "travailleurs" doivent fournir, au moins en partie, l’outil de travail. Surtout dans le primaire.

      Je n’irai pas non plus jusqu’à vous dire que les enseignants sont des gens parfaits. Je ne tiens pas à me montrer aussi partisan que vous.

      Ségolène insinue que si les choses ne vont pas bien dans l’éducation c’est d’abord de la faute des feignants d’enseignants et vous dites chiche. Pfffff

    • Je ne suis pas enseignant. Je n’aimerai pas l’être même si vous laissez entrevoir certains titres de noblesse à votre profession (il n’y a pas de tâches ingrates ni d’autres plus honorantes dans la vie) descendez de votre trone Penseur de rodin ! non je plaisante reste y !).
      Il y a des problèmes plus important que de savoir si les profs font du black ou pas (profession gratifiante hein !)
      le but premier de travailler c’est de gagner sa vie ! si tu fais bac +5 et tu te plains que tu gagnes pas assez fallait faire d’autres études mon pépère ! les mecs qui taffent à l’usine, ou qui font non-stop pendant douze parce que le taulier ceci cela, eux aimeraient juste avoir le lundi de pentecote ! monsieur rodin de la gauche caviare !

    • Je ne serai jamais au coté du patronat, et mes propos sont peut être radicaux effectivement.
      Je voulais juste réagir que quand on a la capacité intellectuelle de faire Bac+5 on a aussi l’humilité de ne pas se placer au dessus des autres et de placer le statut de prof à un héritage d’une noblesse de robe (terme rebaptisés noblesse etc) et souvent accentuent là où ont échoué les parents.
      Voila,
      J’ai réagi furieusement à des propos hautains et vaniteux.
      il y a une réalité industrielle. Les gens travaillant en 3/8 par exemple, voient rarement leur famille parce que horaires décalées, ne gagnent surement pas autant qu’un prof agrégé qui a des plages horaires 27 à 29 heures aménagées d’une façon plus que correcte.
      Je voulais juste replacer les choses dans leur contexte (même si d’une façon maladroite).
      il y en a assez de ces gens qui se plaignent avec leur petite cuillère d’argent dans la bouche...

    • "Noblesse de robe" ???? Ne vois-tu pas que la multiplication et la violence des attaques verbales, physiques, des ministres de l’éducation depuis Allègre, et des médias rendent ton propos plutôt cocasse ?