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Cordon solidaire autour des gamins de l’école Buisson

Publie le mercredi 6 septembre 2006 par Open-Publishing

Sans-papiers . Parmi les familles menacées d’expulsion en Tarn-et-Garonne, quatre scolarisent leurs enfants dans ce groupe scolaire montalbanais. Parents et enseignants se mobilisent.

Montauban (Tarn-et-Garonne)

Telles des sentinelles solidaires, elles ont pris place devant les entrées de l’école primaire et maternelle, dès 7 h 30, ce lundi matin. Depuis quelques jours, des parents, des enseignants, des amis engagés dans le Réseau Éducation sans frontière s’organisent pour assurer tout à la fois une rentrée scolaire dans les meilleures conditions possibles et la protection pour ces gamines et gamins menacés avec leurs familles d’expulsion du territoire national dans un délai d’un mois. Albanais, Géorgien, Angolais, Congolais, Marocain, ils sont huit enfants - cinq en primaire, trois en maternelle, pour la plupart déjà scolarisés depuis plus d’un an - dans le groupe Ferdinand-Buisson situé sur la rive gauche du Tarn, à devoir supporter cette angoisse persistante.

une pétition ouverte

« Fraternité Humanité » s’affiche en lettres multicolores aux portes de l’école. À côté, des dessins d’élèves qui « veulent garder leurs copains ». Des grandes banderoles accrochées à l’entrée revendiquent « le droit pour tous de grandir en paix ». Sur une table, à côté du café offert aux plus matinaux, des mères signent la pétition ouverte depuis vendredi soir par une assemblée d’une trentaine de parents de l’école. « Au nom des droits de l’homme, peut-on y lire, des droits de l’enfant, au nom tout simplement de l’humanité la plus élémentaire, les parents d’élèves refusent que des enfants venus d’ailleurs dans des circonstances souvent tragiques soient reconduits dans leur pays d’origine. »

Autour de cette école comme dans d’autres établissements scolaires montalbanais, la mobilisation a pris rapidement corps depuis ce mercredi noir pour « la terre d’accueil que devrait être la France ». Ce jour-là, le 30 août, quatorze familles sont convoquées à la préfecture. Douze n’ont comme réponse à leur demande de régularisation qu’une brutale fin de non-recevoir. Une famille peut être expulsée à tout moment, les autres doivent quitter le territoire national d’ici un mois.

une scolarité

pour tous

L’une des animatrices du collectif solidaire mis sur pied, Corinne Laval, se dit favorablement impressionnée par la capacité des parents de l’école à répondre présent. « Comme tous, je suis choquée sur le plan humain et politique de voir que des copines et copains de nos enfants risquent ainsi d’être arrachés de l’école ». Elle ne supporte pas la ségrégation que le gouvernement veut instaurer entre ceux qui seraient autorisés à vivre ici et les autres à qui on l’interdirait. « C’est, en 2006, un système qui date du bon vieux temps des colonies ». La liste des signatures s’allonge sur les pétitions. Orthophoniste à l’école Buisson, Sophie Scyeur ne peut tolérer que le droit à une scolarité pour tous les enfants, quels qu’ils soient et d’où qu’ils viennent, puisse être bafoué. Brahim Kassemi dénonce une « sorte de concours entre préfets pour savoir, après le rappel à l’ordre de Sarkozy, celui qui régularise le moins ». Et d’interroger : « Comment un département comme le Tarn-et-Garonne et ses deux cent mille habitants ne pourrait-il pas accueillir une douzaine de familles supplémentaires ? » Instituteur à la retraite, Michel Veyres n’hésite pas à rappeler les pages sombres de l’histoire quand l’État français ouvrait des camps et dressait des barrières pour recevoir les réfugiés espagnols ou les Allemands antifascistes.

Bientôt 8 h 30 et la sonnerie de rentrée. Les mères et les pères des familles menacées d’expulsion arrivent avec leurs gamins à la main. Embrassades avec des parents solidaires, avec d’autres qui les hébergent. On s’échange les numéros de téléphone. Puis, très vite, sourires aux lèvres, Armen, Soraya, Marseda, à moins que ce ne soit José, partent en courant rejoindre leurs copains de classe.