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EADS : Mme Lagarde ordonne une enquête sur le rôle exact de l’Etat
Publie le lundi 8 octobre 2007 par Open-Publishing1 commentaire
de Anne Michel
La ministre de l’économie, des finances et de l’emploi, Christine Lagarde, a annoncé, vendredi 5 octobre, le lancement par l’inspection générale des finances d’une enquête interne sur" l’action des services du ministère en ce qui concerne EADS entre fin 2005 et juin 2006 ". Quelques heures auparavant, son prédécesseur Thierry Breton avait présenté sa version des faits.
Deux questions sont posées : l’Etat a-t-il couvert l’éventuel délit d’initiés commis par les principaux dirigeants et actionnaires du groupe d’aéronautique et de défense ? A-t-il accompagné de près ou de loin le rachat d’une partie des actions du groupe Lagardère dans EADS, le 28 mars 2006, par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) ? Cet établissement financier public qui finance le logement social, et dont une partie des bénéfices alimente le budget de l’Etat, est censé être indépendant du pouvoir politique, de par la loi qui l’a fondé en 1816. Il a perdu, à ce jour, 200 millions d’euros dans l’opération EADS, en raison de la chute du cours de Bourse de l’action du constructeur franco-allemand à l’été 2006.
A ces deux questions sur le rôle de l’Etat, l’ex-ministre de l’économie, Thierry Breton, en fonctions lors de la vente des actions EADS, a répondu par la négative lors de son audition par le Sénat, vendredi. Il a affirmé qu’il n’avait jamais donné instruction à la Caisse des dépôts d’investir dans EADS. Pas plus qu’il n’avait été informé des modalités de vente de ces titres. M. Breton a même déclaré avoir appris par " la presse " que l’établissement financier public s’était porté acquéreur d’une partie des actions cédées par Lagardère, pour 2,25 % du capital d’EADS.
M. Breton a fait état de son " mécontentement " d’alors à voir la Caisse des dépôts, souvent vue à l’étranger comme le cheval de Troie de l’Etat, réaliser cette opération : " Cela pouvait donner le sentiment à la partie allemande que nous voulions contourner l’esprit du pacte [l’équilibre franco-allemand au sein d’EADS]. " Cependant, un document officiel que s’est procuré Le Monde contredit M. Breton sur une partie de sa version des faits : l’Etat avait bien connaissance du projet de la CDC de racheter une partie des actions EADS de Lagardère, il l’a même approuvé. Il s’agit d’un procès-verbal daté du 12 juillet 2006 d’une réunion de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts, organe de contrôle du groupe public où siègent des parlementaires et où est représenté l’Etat.
" Dans le cadre des dispositions prévues par le pacte d’actionnaires [d’EADS], l’Etat a autorisé la Caisse des dépôts à procéder à cette acquisition ", notifie le procès- verbal. Le document précise toutefois que " l’Etat n’a à aucun moment demandé à la Caisse des dépôts de se porteur acquéreur des titres concernés (…), la Caisse des dépôts a fait part de son intérêt pour l’opération sur la base de critères purement financiers (…) ".*
Interrogé par Le Monde, M. Breton souligne qu’il a " de lui même porté à l’attention du Parlement vendredi le procès verbal concerné ". Il affirme qu’" il s’agit d’une erreur d’interprétation juridique. Certains pensent que l’Etat devait donner son aval à l’opération dans le cadre du pacte d’actionnaires d’EADS, ce qui est juridiquement faux ".M. Breton se dit soutenu dans son analyse par le directeur général de l’Agence des participations de l’Etat (APE), Bruno Bézard, qui a également été auditionné vendredi.
La CDC et son directeur général, Augustin de Romanet, ont, pour leur part, toujours affirmé que l’investissement dans EADS, appartenant à un secteur sensible et stratégique, faisait sens.
LaCDCest l’un des rares investisseurs de long terme en France. Il est vrai qu’en mars 2006, au moment où le rachat a été conclu, les banques d’affaires étaient unanimes pour considérer qu’EADS était sous-valorisé en Bourse par rapport à son grand concurrent Boeing et qu’en conséquence cet investissement pourrait rapporter de l’argent. Ce faisant, M. de Romanet reprend à son compte l’argumentaire de son prédécesseur à la CDC, Francis Mayer, décédé depuis, qui avait conduit l’opération de rachat des actions détenues par le groupe Lagardère.
A ce moment-là, la CDC n’avait pas eu en main la note de l’APE du 20 janvier 2006 qui conseillait à l’Etat d’alléger sa participation dans EADS en raison des probables turbulences qu’allait traverser le groupe franco-allemand.
De leur côté, les représentants de l’Etat ont toujours soutenu que la puissance publique n’avait donné aucun ordre à la CDC pour investir dans EADS, ce que devait confirmer le directeur du Trésor, Xavier Musca, devant la commission des finances de l’Assemblée nationale, lors de son audition, mardi 9 octobre.
M. Musca sera entendu ce jour-là sur les modalités d’achat d’actions d’EADS par la CDC, comme le seront également M. de Romanet ainsi que le directeur financier de la Caisse des dépôts, Dominique Marcel, et le député UMP Philippe Auberger, qui présidait la commission de surveillance de l’établissement public au moment des faits.
M. Auberger a déclaré au Monde qu’il était " convaincu que l’Etat n’avait pas donné d’instruction à la Caisse des dépôts ". Mais il a ajouté " ne pas savoir si l’opération s’était faite ou non en accord avec le cabinet du ministre des finances ".
S’agissant du calendrier, M. Auberger dit avoir été prévenu le 4 avril 2006, soit la veille de l’annonce publique du rachat des titres. C’est seulement le lendemain qu’il a informé la commission de surveillance.
C’est-à-dire simultanément à l’annonce. " Je ne pensais pas que cela irait aussi vite, on m’a expliqué qu’on était dans l’urgence ", explique M. Auberger.
" D’ordinaire, la commission de surveillance et son président sont avertis préalablement d’une opération stratégique. Mais il arrive que, sur des dossiers sensibles, l’information soit faite après coup. " De fait, la façon dont a été géré l’investissement dans EADS pose des questions sur la gouvernance du groupe public. Ces dysfonctionnements donnent des arguments aux partisans d’une réforme de la gouvernance de la CDC, nombreux au sein du gouvernement. Mais cela ne doit pas faire oublier l’essentiel : le délit d’initiés supposé chez EADS.
Messages
1. EADS : Mme Lagarde ordonne une enquête sur le rôle exact de l’Etat, 8 octobre 2007, 20:50
Les promesses n’engagent que ceux qui y croient !Le même jour le gouvernemnt engage une réflexion sur la dépénalisation des infractions financiéres et celles au code du travail.
C’est y pas bien ça !Mais l’imMONDE n’a rien vu !
Jean Claude Goujat PCF