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EPR et décroissance

Publie le mercredi 7 mars 2007 par Open-Publishing
24 commentaires

Je ne sais pas pour vous mais moi ça m’angoisse un peu la façon dont on traite la question du progrès en ce moment, notamment à gauche et plus particulièrement à l’extrême gauche. Je pense à la question des OGM, de l’EPR ou plus généralement en ce qui concerne ce dernier sujet, de l’énergie nucléaire.

Donc désormais, pour une partie conséquente de la gauche anti-libérale, l’heure est à la décroissance. « Faut arrêter les nouvelles recherches en matière d’énergie nucléaire, c’est inutile et dangereux » : je résume ici l’inénarrable conférence de presse STOP - EPR du 3 mars dernier sur une péniche parisienne qui a vu intervenir une brochette de candidats à la présidentielle José Bové, Olivier Besancenot, Dominique Voynet rejoints pour l’occasion par la très bourgeoise Corinne Lepage. Drôle d’équipage…

Et dites donc, ca ne partirait pas en sucette tout ça ?

Question : en pleine future pénurie de pétrole (fin des réserves dans 30 ans), en plein réchauffement climatique de la planète dénoncé à juste titre par les militants écologiques, peut-on raisonnablement se passer du nucléaire ? D’une énergie qui ne participe pas du réchauffement de la planète ?

Ce qui me fatigue avec ces zélotes de la décroissance car il faut cesser de se cacher derrière son petit doigt ; c’est bien de décroissance dont il s’agit dans cette lutte anti-EPR. Décider de se priver de l’énergie au plus fort potentielle et qui ne contribue pas au réchauffement climatique, cela signifie que c’est à la croissance de tout l’appareil productif que l’on veut s’attaquer et qu’il faut par conséquent assumer une logique de décroissance.
Donc désormais, il faudrait décroître. Et pourquoi aujourd’hui plus qu’hier ou plus qu’avant hier. La civilisation contemporaine aurait-elle vécue son apogée qu’il faudrait désormais rentrer dans une logique d’autolimitation des capacités humaines ? Non mais ça va bien ! Je crois que l’on mélange tout : le progrès et l’utilisation du progrès. Un livre de Jean Ziegler datant de 2005 (1) montre que la population est capable aujourd’hui de nourrir 12 milliards d’êtres humains. Ce qui est en cause c’est le capitalisme mondialisé qui enrichit une toute petite partie de l’humanité au détriment de l’immense autre partie, celle qu’on exploite cyniquement.

Ne confondons pas l’outil et son utilisation, à force cela évite de désigner les vrais coupables.

 http://briant.gauchepopulaire.fr


(1) Jean Ziegler, rapporteur auprès de l’ONU pour les questions de ressources alimentaires a publié aux Editions Fayard l’Empire de la Honte.

Messages

  • Faut il defendre la croissance (croissance du PIB ?) telle qu’elle est aujoud’hui ? C’est la croissance de quoi ? On a depensé 200 millions d’euro de publicité pour le lancement de nouveaux operateurs pour les renseignements telephoniques. C’est considéré comme de la croissance alors que cet argent aurait pu etre utilisé pour par exemple construire des creches Une etude recente montre qu’il n’y a pas correlation entre la croissance du PIB et la situation sociale des enfants (voir la Grande Bretagne). Le livre d’Herve Kempf "comment les riches detruisent la planete" montre les gaspillages des plus riches et les consequences de cette predation sur les hommes et l’environnement. La crise sociale et ecologique est le resultat d’une croissance productiviste aveugle qui menace les bases meme de la poursuite du developpement humain. Qui ne voit le lien entre l’utilisation des pesticides, de nombreux produits chimiques et la montée en fleche des cancers, des maladies genetiques... Enfin sur le nucleaire, la majorité de nos concitoyens se trompent t ’ils quand ils pensent que cette energie fait peser des risques considerables : risques d’explosion nucleaire et aussi riques liés à la gestion des dechets nucleaires ? Est ce de l’obscurentisme ? Que se serait il passé si il y avait eu une explosion nucleaire à Tchernobyl. Que serait devenu l’Ukraine et l’Europe. L’été dernier il y a eu un grave accident dans une centrale nucleaire en Suede. L’industrie nucléaire ne sera jamais une industrie comme une autre. Alors ouvrons le débat sans anatheme.
    BERNARD

    • Un réacteur nucléaire n’est pas une bombe. C’est dangereux comme tout ce qui fonctionne. La question des déchets n’est pas sans solution. Trier, recycler, entreposer et stocker.

      Le CO2 dans l’atmosphère, c’est bien un déchet. Combien de morts en 2030 ?

      Je ne suis pas un fan de croissance de manière inconditionnelle. Elle peut être bonne ou nocive. Dans le capitalisme, elle est nocive pour la Terre et les travailleurs comme disait le bon vieux Karl Marx (Le Capital, livre I), un anti-productiviste conséquent..

      Claude (coco massicois)

    • Bernard,le probléme n’est pas la décroissance mais une autre croissance et en cela tu a raison et il faut rediriger les sommes dépensées inutilement et donc en finir avec la mise en concurrence des services publics.

      Je ne suis pas un fan du nucléaire mais il faut être logique:qui a fait abandonner les recherches sur les déchets ?qui a fait fermer les centres de recherches de Pierrelatte et de Creys ?est-ce que les centrles n’éxistaient plus,elles ne devaient pas être fermées un jour ?

      En faisant fermer ces centres les écologistes nous ont fait prendre un retard de 10 ans.

      Des ressources alternatives d’accord,mais il faut aussi mettre en avant leurs inconvénients.La grande escroquerie des écolos c’est qu’ils donnent des chiffres de production par éoliennes A VENT CONSTANT,des chiffres de solaire A SOLEIL CONSTANT.Peut être devons nous leur rapeller la difficulté majeure de la production d’éléctricité:elle doit s’adapter en permanence à la consommation et on ne peut pas la stocker.Toute baisse de production entrainera un efondrement de toute la distribution.

      Alors d’accord pour un débat sans tabou mais avec toutes les données du probléme et surtout sans que certains se prennent pour des experts sous prétexte qu’ils sont écolos !

      Jean Claude des Landes

    • Que dit Marx sur le capital ?

      Dans le Capital, Marx analyse le fonctionnement du capitalisme, et il montre la nocivite de ce systeme. Mais a aucun moment, il ne dit que la croissance est nocive pour le travailleur, que ce soit dans le livre 1, le 2 ou le 3 ! D’abord, Marx se met aux cotes des travailleurs, ensuite il essaie d’analyser le cycle du capital, mais il a une attitude tout a fait a l’oppose des apotres de la decroissance : le capitalisme est considere comme un progres par rapport aux societes precedentes et un etape necessaire pour des progres ulterieurs. Par exemple il a une analyse qui est tout a fait a l’oppose des mouvements spontanes de son siecle qui refusaient le progres, brisaient les nouvelles machines...En fait, il montre combien la recherche du profit est le moteur du progres scientifique et technique et a aucun moment il n’esquisse le moindre refus de ce progres. Au fond, il constate un mouvement de progres des societes, et il n’emet guere de jugement de valeur : il cherche a comprendre ce qui est a l’origine du progres economique des societes, et il ne le refuse pas.

      Je ne vois donc pas Marx en antiproductiviste, et le seul livre de l’epoque ou des problemes ecologiques affleurent serait plutot "Dialektik der Natur" de Engels, et encore il me semble que ca tourne essentiellement autour de la degradation des sols due au surpaturage dans les Alpes italiennes...donc pas tellement a la grande industrie capitaliste. Cette derniere est d’abord consideree par Marx comme une source essentielle de PROGRES ! Je ne vois pas que le capitalisme soit d’ailleurs bien plus nocif que les pratiques "socialistes" de l’URSS ou de la Chine.

      Il me semble que Marx est entierement perdu de vue par beaucoup de gens de gauche-quand ils s’en reclament, comme nos amis trotkistes. La seule attitude que je vois est une opposition des plus simplistes et des plus frustres aux nouvelles techniques, aux nouvelles inventions, surfant sur les memes peurs millenaristes que celles qui font rejetter les immigres et autres changements derangeants de la societe : ce sont nos capitalistes qui ont fait hier affluer la main d’oeuvre, allons-nous demander pour cela le rejet de cette immigration ?

      Au fond, on peut considerer la Capital, mais aussi "le Manifeste du parti communiste" comme des constats des forces a l’oeuvre dans le monde (essentiellement les "forces productives"), ou Marx voit le germe de transformations revolutionnaires futures, mais Marx n’a jamais l’idee que l’on peut -ou doit- s’opposer aux transformations. En particulier, il y a une anaylse de la maniere dont a un moment le developpement des forces productives entre en conflit avec les rapports de production, cad que ces derniers genent la croissance !
      Donc il pense qu’elles ameneront ineluctablement le socialisme, comme nouveau moyen de developper les forces productives. Il y a donc "interiorisation’ d’un mouvement ineluctable vers le progres, independant de la volonte humaine. Il ancre sa foi dans le progres en analysant le mouvement du capital qui conduit a creer de plus en plus de richesses et il annonce une societe ou d’autre forces motrices seront a l’oeuvre.

      J’espere faire comprendre que la position de Mrax est a l’oppose de celle de Bove, mais aussi de Besancenot !

      signe : Karva

  • Merci pour cette excellente mise au point.

    J’ai les mêmes craintes concernant les ravages possibles d’un amoindrissement des investissements dans la connaissance et la recherche. Cet amoindrissement me semble engendré par l’ignorance, la naïveté et la duplicité des écologistes d’aujourd’hui qui poussent les politiques aux démissions les plus funestes. La recherche fondamentale sur la matière est indispensable à la sûreté du monde. Confondre l’outil et son utilisation est une des plus grandes mystifications de l’écologie de ce début de 21ème siècle.

    Le Capital préfère des moyens de production individualisés afin d’éviter toute socialisation mettant à mal sa sacro sainte concurrence libre et non faussée... cela va engendrer dans les plus brefs délais l’abandon par privatisation de la production des tarifs d’électricité à prix réduit que propose aujourd’hui EDF du fait du moyen de production électrique nucléaire qui ne peut être que socialisé et collectif.. et un renchérissement du prix de l’electricité : il faudra faire fonctionner des petites unités électrogènes à faible rendement énergétique mues par le pétrole pour couvrir les trous de production des éoliennes et des biogénérateurs !!!

    Il se peut dès lors qu’il y ait une collusion objective entre les écologistes indivitualistes et le Capital : Les écologistes sont les premiers à demander à ce que l’electricité augmente pour en diminuer la consommation, obnubilés qu’ils sont par l’épouvantail nucléaire alors que le réchauffement de la planète est dû à des causes totalement différentes. Le nucléaire représente au contraire un moindre mal à la condition de défendre pied à pied la civilisation de la vie commune et collective contre la barbarie de l’individualisme poussé à son paroxisme par le capitalisme ... et les écologistes !!!

    • Derriere le discours idéologique sur la concurrence libre et non faussée, il y a la realité de la centralisation et la concentration du capital privé. Depuis quand le capitalisme est il favorable à la petite propriété privée des moyens de production ? En realité on passe de monopoles publics à des monoples privés. EDF en voie de privatisation a d’ailleurs a cree une filiale pour le developpement des ENR.

  • Il est rare que l’on demande à quelqu’un qui ignore les rudiments de la mécanique de donner son avis sur un nouveau moteur de voiture, ou à un rebouteux de s’exprimer sur les maladies génétiques rares, mais dans le domaine des sciences tout est permis. Tel personnage qui ne pourrait expliquer, à ses enfants, les phénomènes élémentaires de l’ébullition de l’eau peut, à la télévision, afficher ses certitudes sur l’effet du krypton radioactif qui sort des cheminées de LA HAGUE. ….

    DES CHOIX CRUCIAUX POUR LA PLANETE SONT EN JEUX .
    L’énergie nucléaire en est un exemple. Nous avons soulevé dans un chapitre spécifique le problème réel qui se pose pour cette source d’énergie à savoir la gestion des déchets radioactifs des combustibles usés qui mérite un débats libéré des propagandes exploitant la peur et l’ignorance, ou la manifestation de minorités violentes qui exigent la liberté de pouvoir utiliser leur cocktails Molotov pour élever à un coup intolérable le prix d’un transport de corps radioactifs moins dangereux que certaines de leurs actions.

    GEORGES CHARPAK PRIX NOBEL DE PHYSIQUE EN1992 physicien au CERN et HENRI BROCH Physicien Directeur du laboratoire de zététique à l’université de Nice- Sofia Antipolis , dans « DEVENEZ SORCIERS , DEVENEZ SAVANTS » Deux physicien de haut niveau sans doute stipendiés par le fantomatique « LOBY NUCLEAIREE »

    Lire également « DE TCHERNOBIL A TCHERNOBYL » du même GEORGE CHARPACK

    « Si EDF veut passer en force à Flamanville, si les lignes à très haute tension se mettent en place, j’appelerai les citoyens à démonter les pylônes et à empêcher » leur construction, n’a pas craint de dire, hier, José Bové. Dans l’Humanité du 2/3/2007

    Non seulement BOVE est barjo, mais il devient dangereux. Démonter un pylone haute tension de

    400 000 volts représente un risque énorme pour ceux qui voudraient le faire (on me dira qu’après tout les ayatollas trouvent bien des kamikazes) mais de plus ce serait tout le réseau français qui s’effondrerait ( information fourni par l’un de mes amis proches ancien directeur du laboratoire d’essais et de contrôle d’EDF de GRENOBLE et ancien directeur des centrales hydroélectriques du SUD EST) L. BOURSON ingénieur retraité, militant PCF.

    • Juste une remarque sur cet article qui en réclamerait beaucoup tant il est empreigné d’eschatologie progressiste. Il est vrai qu’il est plus facile et rassurant de croire que d’assumer la le lourd fardeau de la Liberté !

      Cette phrase :
      "Ne confondons pas l’outil et son utilisation, à force cela évite de désigner les vrais coupables."
      est typique de ceux qui continuent à penser que la technique et la science sont neutres. Or il n’en est rien. L’objet technique, la science dans ses choix, sont porteurs en eux-même de certaines valeurs quelque soit l’usage que l’on en fait !

      Les outils techniques induisent par eux-même certains type de production, d’action, d’organisation sociale, de mode de pensé, de rapport au monde etc...

      Comme cela serait trop long à développer ici, je préfère renvoyer à Ellul, Mandosio, Heideger, Charbonneau, Castoriadis, Marcuse etc. pour des discussions sur ce sujet.

    • ou t’a vu dans mon message que les outils sont neutres ?

      gérald briant

    • Et bien dans cette phrase justement "Ne confondons pas l’outil et son utilisation". Pour moi,
      mais je peux bien évidemment me tromper, celle-ci signifie que seule la façon d’utiliser l’outil compte. Autrement dit seule l’utilisation peut être qualifiée de bonne ou mauvaise. L’objet technique, l’outil, lui ne peut être le sujet de la critique.

      Outil et utlisation sont imbriqués l’un dans l’autre. L’outil rend possible, conduit à, certaines utilisations et pas d’autres. Il n’est donc pas neutre, puisqu’il modifie le monde dans lequel il s’insert.

      Marx avait bien vu que la technique possédait une certaine autonomie. Selon ses mots
      "au moulin à eau correspond la société féodale et au moulin à vapeur la société bourgeoise" (A quoi corresponderait le Nucléaire ??) . Malheureusement, il croyait aussi que celle-ci était neutre, à savoir, que celle-ci ne faisait que repondre de façon plus ou moins efficace à des besoins naturels. Pourtant, outre la modification des outils de production, la technique a crée de nouveaux besoins notamment, aujourd’hui, une production d’électricité demesurée (ce qui est loin d’être un besoin "naturel").

    • je re-formule ma question, puis que tu as la gentillesse de préciser ta question. Tu traduis ma phrase par, je cite : "seule la façon d’utiliser l’outil compte". Pourquoi "seule". Y a t-il dans ma formulation "ne confondons pas l’outil et son utilisation" l’idée que l’outil n’influence pas son utilisation ?

      gérald briant

    • Certes l’idée que "l’outil n’influence pas son utilisation" n’est pas explicite dans ta formulation. L’outil doit donc également être pris en compte, nous sommes d’accord !

      Serions nous aussi d’accord sur le fait que l’outil (mais aussi au sens large le progrès de la science et de la technique) induit certaines utilisations, une certaine organisation sociale ?

      Mais dis moi. Pourquoi vouloir distinguer l’outil de son utilisation, si ce n’est pour sous entendre qu’il est possible d’utiliser cet outil en bien ou en mal (donc indépendemment de sa nature propre) ? Il y aurait d’un côté l’outil et de l’autre ce que l’on en fait. Mais de toute façon, est-il raisonnable d’utiliser un mauvais outil ?

    • Bien on avance.

      D’accord avec toi aussi sur l’idée que les développements des sciences et des techniques induisent, je te cite : "certaines utilisations, une certaine organisation sociale". Pour prendre un exemple classique, c’est la première révolution industrielle qui va favoriser une généralisation du capitalisme à l’échelle mondiale.

      Question se pose alors, pour répondre à ton souci sur ce même exemple. Est-il efficient de se poser la question sur la nature (bonne ou mauvaise) de cette même révolution industielle sachant que par rapport au féodalisme, le capitalisme a été un progrès pour l’humanité et que ce même capitalisme mondialisé est un obstacle à l’épanouissement de notre civilisation.

      gérald briant

    • Ici, je pense que nous ne sommes pas d’accord. Selon toi le capitalisme a été un progrès pour l’humanité par rapport au féodalisme. Je n’en suis pas si sûr. Entendons nous bien. Je ne suis certainement pas pour un retour au féodalisme. Pour moi, s’il y a eu une certaine avancée dans les conditions de l’humanité, celle-ci conciste dans la possibilité d’avoir été capable, au moment de la Révolution, de remettre en cause les institutions dominantes de l’époque, principalement l’église et la royauté. C’est cette possibilité de réflexion de la société sur elle même qui est importante. Comme les grecs l’avaient fait déjà à Athène.

      Pour le reste, le projet des lumières a été dévoyé. S’il a destitué Dieu cela a été pour le remplacer par une autre croyance : l’idée qu’il était possible d’organiser la société, la nature, bref le monde sur des bases uniquement rationelles. Ainsi (je fais cours) pour satisfaire le bien être social, on a cru qu’il suffisait d’augmenter indéfinimement la puissance productive, que le bien être passait par une accumulation, elle quantifiable, d’objets, de biens etc... Ce qui, bien sûr, est plus facilement objectivable que, par exemple, tout ce qui à trait au sens de la vie en société. Passant ainsi sous silence la question fondamentale qui est : Pourquoi vivons nous en société ?

      J’aimerai que tu me précise ce que tu entends exactement par "progrès pour l’humanité". Ce progrès ne peut être trouvé ni dans les oeuvres d’art, ni dans la morale. Où est-il ? Pour moi ce terme de progrès renvoie ipso facto à l’imaginaire capitaliste. Marx lui-même si est laissé prendre...

    • Un bon critère est durée moyenne de l’espérance de vie.

      Un autre critère est la diminution de durée moyenne du temps de travail ou l’augmentation moyenne de la durée du temps du non-travail, si tu préfère.

      Un autre peut être la part de la population en dessous du seuil de pauvreté

      D’autres critères concernent l’accès au savoir, à la santé, à la culture, au transport, etc..

      gérald briant

    • Tu remarqueras que tous les critères que tu cites sont de l’ordre du quantitatif mais jamais d’ordre qualitatif.

      Concernant la durée moyenne de l’espérance de vie, certes celle-ci a augmenté globalement. Mais il ne faut pas oublier que cela est du en grande partie au fait que c’est surtout lors du plus jeune âge qu’il y a eu des avancées. L’espérance de vie conditionnelle, c’est-à dire par exemple l’espérance de vivre jusqu’à 60 ans sachant qu’on au déjà 40 par exemple, a elle
      évolué beaucoup plus modestement. Mais surtout, c’est le type de vie que l’on mène, sa qualité, qu’il faut prendre en compte. A quoi cela sert de vivre jusqu’à 200 ans si on est privé de dignité, de liberté, de joie de vivre etc. ? A quoi sert l’acharnement thérapeuthique ?

      Idem, pour le travail. Il faut parler du type de travail. Avec la révolution industrielle, on passe à une organisation du travail ultra-spécialisé, déqualifié (ce qui fera que le femmes et les enfants seront les premiers à travailler sur les nouvelles machines), détruisant les liens sociaux qui maintenaient une certaine dignité, avec les corporations par exemple. Ainsi, exit le petit producteur, exit aussi l’artisan. Pourtant eux, grâce à une relative autonomie, ils maîtrisaient leur conditions de vie. En outre, la pénibilité psychique a alors largement remplacé la pénibilité physique. Travailler face à une machine (y compris un ordinateur) toute la journée à un rythme imposé, avec des horaires fixes, sans pouvoir faire preuve d’initiative etc. est-ce vraiement plus enviable que de travailler dans son atelier, dans son exploitation ?

      Quant au seuil de pauvreté. Je crois qu’il ne faut pas confondre misère et pauvreté. Aujourd’hui dans notre société individualiste, atomisé (ce qui est au passage une conséquence de la conception moderne de l’individu, c-à-d comme individu substance existant de par lui même hors de la société) la pauvreté s’est changée en misère. Les liens sociaux qui assuraient une reative entraide on été remplacé par des lois juridiques abstraites qui tout en promettant la lune renforce l’atomisation et l’incapacité des individus à vivre-ensemble. La pauvreté est matérielle, la misère est morale ! C’est pire.

      L’accès au savoir. Mais auquel et pour quoi faire ? Il ne faudrait pas croire, que le monde, la réalité, est en essence obectivable. C’est à dire que les avancés de la science dévoilent toujours un peu plus d’une Vérité qui existerait en soit, indépendemment de celui qui observe (en l’occurence l’homme). Le projet positiviste a été battu en brèche par la mécanique quantique et l’étude des système non linéaire.

      La santé. Là c’est vrai qu’il y eu de réelles avancés. Mais aujourd’hui, comme l’a bien démontré Illich, nous avons franchi un seuil et la médecine crée de nouvelles maladie, nouveaux virus plus résistants, maladie iatrogènes, etc. En outre nous sommes passé d’une médecine peu coûteuse et simple à mettre en oeuvre au sein de la cellule familliale, à une médecine dispendieuse, hétéronome où l’individu est pris en charge par des experts sans qu’il n’est plus son mot à dire !

      Le mot culture a lui plusieurs sens. Parle t-on de culture spectacle : Dallas, Star-Ac etc. ou bien de culture comme imaginaire collectif, partagé par tout un chacun, qui fonde les valeurs de la société ?

      Enfin concernant le transport. Est-ce que voyager mieux c’est forcéement voyager mieux et/ou plus vite ?

      Tous ces exemples sont bien trop quantitatif à mon goût. On ne peut espérer mesurer un progrés moral. Le sens de la vie dans une société, c’est-à-dire celui qu’on lui donne, ne peut être ramené à de simples chiffres. Tu es d’accord ?

    • Si tu veux pouvoir comparer les choses, tu as besoin de critères objectifs et donc quantitatifs. essaye de comparer 2 imaginaires, juste pour voir.

      Sinon je trouve que tu ergotes sur la question de l’allongement de la durée de l’espérance de vie.

      gérald

    • Justement il faut donner aux citoyens toutes les informations et les formations pour qu’ils puissent en toute connaissance de cause decider des choix énergetiques. Les conferences citoyennes montrent que cela est possible. Arretons au nom de la science de décider ce qui est bien pour le peuple.

    • Deux imaginaires ne sont pas comparables. Nous sommes d’accors. Par contre, comme
      le souligne bien la philosophe Isabelle Stengers, dans Sciences et Pouvoir, il est possible de comparer des "choses" de manière objectif sans pour autant utiliser des critères quantitatifs. Prenons l’exemple d’une soirée entre amis. Il est tout à fait possible dire, de façon objective, si la soirée s’est bien passée, si tout le monde s’est bien amusé, si il y avait de l’ambiance etc. sans pour autant avoir recours à du quantitatif. Ce n’est pas le nombre de litre de bierre bu, par exemple, qui peut mesurer tout ça.

      Concernant l’esperance de vie, je te conseille de lire ce petit article fort instructif :

      http://senshumus.wordpress.com/2006/11/02/une-histoire-de-vieux/

    • Justement il faut donner aux citoyens toutes les informations et les formations pour qu’ils puissent en toute connaissance de cause decider des choix énergetiques. Les conferences citoyennes montrent que cela est possible. Arretons au nom de la science de décider ce qui est bien pour le peuple.

    • mouais, ça me fait penser aux réunions des collectifs unitaires avec le fameux double consensus. En la matière, l’histoire a montré que rien ne vaut le bon vieux suffrage universelle. On en revient à la notion de quantité contre celle de la qualité, finalement du matérialisme contre l’idéalisme.

    • Le suffrage universelle suppose, comme le disait Aristote, que les individus sachent tout à la fois gouverner et être gouvernés. Il y bien une idée de qualité derrière...

    • Et moi, j’ai le droit de vote ?

    • de Karva

      Je suis chercheur scientifique, et bien entendu passionne par le developpement des sciences comme moyen extraordinaire de connaitre le monde et d’agir sur lui. Ces deux aspects sont indissociables a mon avis ("pour connaitre le gout d’un poire, il faut la gouter", cad la transformer, c’est de MTT). Nous transformons sans arret le monde, et en transformant le monde, nous transformons l’homme. Un exemple est celui de la reproduction (bebes eprouvettes, pilules...) et de la genetique (OGM, therapie genique, cellueles souches...). Ce n’est pas par hasard que les forces reactionnaires (eglise catholique, fondamenatlistes divers) s’opposent a l’utilisation de ces techniques et meme a la Recherche dans ces domaines. Il y a de plus un blocage specifique sur "le vivant" car nous heritons de la conception dualiste qui instaure une muraille de Chine entre le vivant et le materiel. Bien entendu, je pense que l’homme est dans le monde materiel, et qu’il ne peut etre exterieur au developpement de la connaissance et aux applications resultantes.

      Cela ne peut evidememnt se faire sans controle, mais je ne comprends pas qu’il puisse exister une opposition "de principe" aux OGM, au nucleaire...Je pense que c’est le produit d’une grande ignorance, plus que d’une position "de classe". Pour une raison que je saisis mal, ce qui me passionne dans les decouvertes de l’humanite, a un moment de la vie de beaucoup de gens s’est fixee en haine de la Science, haine basee probablement sur la difficulte a la comprendre, en particulier quand le milieu social n’en simplifiait pas l’acces. Je considere donc que le premier probleme auquel nous sommes confrontes est un probleme d’education : un pays moderne a besoin que ses travailleurs aient une meilleure comprehension des forces a l’oeuvre dans la nature. La connaissance est le premier moyen de faire reculer les peurs ancestrales, telle que celle du feu chez les animaux : le mythe de Promethee. Je pense que ca n’est pas facile : je hante les librairies, et je suis terrifie par l’ampleur des rayons d’esoterisme ou de psy-qqchse et la faiblesse des rayons de Science ou de Philosophie. Demander une information plus rationnelle de notre peuple, est-ce faire preuve d’optimisme excessif ?

      En tous cas, c’est ce que je demanderai d’abord a tous ceux qui s’expriment sur ce site, et qui sont interesses par l’avenir de nos societes humaines.

      Saluations