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En Chine, des dizaines de milliers de cyberpoliciers contrôlent Internet

Publie le samedi 31 mars 2007 par Open-Publishing
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On peut s’éloigner, par Internet

Frédéric Koller

Cai Chongguo décrypte la censure de Pékin. Internet devait détruire les frontières, ouvrir les esprits et favoriser l’essor de la démocratie. Vraiment ? Pour Cai Chongguo, philosophe chinois réfugié en France depuis 1989, la censure de Pékin est si efficace sur le Net qu’elle pourrait contribuer à couper encore plus les Chinois du monde extérieur. Le cyberdissident qui participe ce samedi à un débat sur le contrôle d’Internet dans le cadre du Festival du film et forum international sur les droits humains (FIFDH) s’explique.

Le Temps : Comment la Chine censure-t-elle Internet ?

Cai Chongguo:La censure se renforce. Des dizaines de milliers de cyberpoliciers contrôlent vingt-quatre heures sur vingt-quatre le Net. Aucune société informatique ou serveur n’y échappe. Les 130 millions d’internautes chinois et les 15 millions de blogueurs sont surveillés. L’autocensure est une arme encore plus efficace que la police. Les dénonciations sont par ailleurs courantes : par patriotisme, pour bien se faire voir d’un supérieur, par jalousie ou même pour des raisons de concurrence économique. Le gouvernement va bientôt publier une nouvelle loi sur les blogs qui obligera à s’annoncer sous son vrai nom.

 Un exemple ?

 En janvier la presse chinoise révélait comment un ouvrier d’une mine de charbon du Shandong avait été arrêté après avoir posté anonymement deux mois plus tôt sur un site d’une autre province un article dénonçant le gaspillage des responsables de l’usine et la discipline militaire du travail. Après deux semaines de détention, il a été relâché. Mais il n’a plus de travail.

 La multiplication des blogs ne permet-elle pas une meilleure circulation de l’information, y compris non officielle ?

 C’est plus complexe que cela. Je suis beaucoup plus pessimiste qu’il y a trois ans. Les sujets sensibles sont de plus en plus nombreux. Malgré le développement d’Internet, on n’est pas plus libre.

 Le pouvoir a jusqu’ici gagné son pari : ouvrir l’économie et maintenir le contrôle politique. De ce point de vue, l’exemple d’Internet est emblématique.

 Oui. Les hommes d’affaires, la Bourse, le commerce profitent bien de l’ouverture. Pour eux, Internet apporte beaucoup. Mais, dans le même temps, Internet est devenu un puissant instrument de propagande, de désinformation aux mains du pouvoir. Les forums de discussion sont filtrés, les articles en faveur de la démocratie occidentale disparaissent. La censure sélectionne l’information, fabrique une fausse opinion publique, on trompe le peuple. Avec le développement d’Internet, les Chinois ne créent pas plus de liens avec le monde extérieur. Au contraire, il y a un risque qu’ils en soient de plus en plus coupés, que le malentendu s’accentue. Depuis dix ans, Internet accompagne la montée du nationalisme et de la xénophobie.

Le Temps, Suisse, 17 mars

Cai Chongguo
JOURNAL D’UN CHINOIS :
28 mars 2007

 http://caichongguo.blog.lemonde.fr/...

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