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Enseignement de la Shoah en CM2, la presse unanime s’interroge

Publie le vendredi 15 février 2008 par Open-Publishing
6 commentaires

A partir de la rentrée 2008, tous les enfants de CM2 se verront confier la mémoire d’un des 11 000 enfants français victimes de la Shoah. C’est peu de dire que cette proposition de Nicolas Sarkozy fait réagir. A quel saint se voue t-il ? Y a t-il urgence ?

Les Français attendent-ils de ce président qui perd un peu plus de sa popularité à chaque sondage qu’il légifère sur ce sujet éminemment sensible ? Nicolas Sarkozy n’est pas doué pour la parole. Encore moins pour la pensée, seulement pour la tactique et guère pour la stratégie. Il agit à court terme.

Que ses thuriféraires ne viennent pas nous dire qu’on lui fait-là un procès d’intention. Depuis qu’il est au pouvoir les exemples abondent. Nicolas Sarkozy est élu depuis le mois de mai et son gouvernement ressemble à la cour du roi pétaud. Les déclarations les plus contradictoires fusent quotidiennement. Voilà ce qui décrédibilise Nicolas Sarkozy et son gouvernement.

Comme l’écrit Jacques Camus, éditorialiste à La République du Centre : « Nicolas Sarkozy devient inquiétant ». Sa récente proposition, « semble relever de ces soudaines lubies élyséennes plus spectaculaires que réellement réfléchies ».

La question que chacun se pose aujourd’hui c’est pourquoi Nicolas Sarkozy estime t-il bon pour les élèves de CM2 de confier à chacun d’entre eux la mémoire d’un des 11.000 enfants victimes de la Shoah ? Pourquoi estime t-il nécessaire de substituer à l’enseignement des faits la mise en scène de l’émotion ? De quel droit impose t-on cet exercice aux enfants ? Quel logique y a t-il derrière tout ça, sinon celle d’un « abrutissement compassionnel » qui « ne peut amener que trouble dans les esprits des enfants et violences en retour ».

Avec la Religion, ce président n’est pas à l’aise, c’est bien le moins qu’on puisse dire. De la loi de 1905, il prétend la toiletter alors qu’une majorité de français n’en demandent pas tant. Il parle de laïcité positive. Qu’est-ce à dire ?

« La décision pour le moins farfelue du président Sarkozy de « confier la mémoire d’un enfant victime de la Shoah à chaque élève de CM2 » ressemble à un coup politique pour le moins douteux. Le mari de Carla court après sa bonne étoile, déjà très ternie par huit mois de présidence ».

Patrice Chabanet (Le Journal de la Haute-Marne) juge que « l’idée de Nicolas Sarkozy sur le devoir de mémoire n’est pas critiquable sur le fond mais reste discutable sur la forme. On peut légitimement se demander si des enfants de 10-11 ans ont les outils de la connaissance nécessaires pour prendre la mesure du génocide ».

« Cela n’ajoute rien, hormis du pathos. Les jeunes sont gavés de Shoah depuis des années et cela n’a pas empêché la montée de l’antisémitisme dans les banlieues. Ce qui s’enseigne à l’école, c’est l’histoire (...) Le devoir de mémoire défini par Primo Lévi est l’obligation faite aux survivants de raconter. Pas de commémorer » souligne Pascal Brukner dans le Figaro.

D’aucuns s’interrogent sur cette décision qui a surpris jusqu’à Richard Prasquier, président du Crif : « Le moins que l’on puisse dire, c’est que la décision surprise décidée par Nicolas Sarkozy au sortir du repas au CRIF ne laisse personne indifférent, y compris le principal concerné au départ, Richard Prasquier, le nouveau dirigeant du Conseil représentatif des institutions juives de France, prévenu à peine quelques heures avant. Mais il n’est pas le seul : ce soir tout le monde se demande quelle mouche a bien piquer Nicolas Sarkozy. Une mouche étrangère, ou une mouche française ? »

« Même si l’intention du président (...) est louable, les instituteurs n’avaient pas besoin de ce rappel, ni de ce diktat que rien ne vient expliquer. Ils savent comment aborder le génocide, en classe, collectivement, sans y mettre de surcharge affective » précise Michel Vagner de L’Est républicain.

Bernard Revel, de L’Indépendant du Midi, est plus compréhensif :
« Mettre des noms à la place de chiffres abstraits aide à mieux comprendre... La démarche doit être soutenue par tout un ensemble pédagogique ».

Pour Annette Lévy-Willard (Libération), « un président de la République, même démocratiquement élu, n’a pas vraiment légitimité à faire des cours d’histoire télécommandés ».

Francis Brochet, du Progrès, est encore plus sévère : c’est « comme si l’on plaquait sur la Shoah les recettes de la téléréalité, où l’on surjoue chaque sentiment, dans l’excès et l’exhibition, de peur d’ennuyer...Attention : il est des sujets trop sensibles pour qu’on en fasse trop ».

Daniel Ruiz, dans La Montagne, pense que « C’est en aidant la jeunesse à maîtriser ses sentiments et en enrichissant sa connaissance de l’histoire, et de l’actualité, que l’on participe à la construction de la citoyenneté. Pas en faisant parrainer à ces gosses un enfant mort ».

Bref, à travers la presse, nationale, régionale ou participative, les français ont exprimé un malaise devant ce qu’ils pressentent être un « coup médiatique ». Espérons qu’il sera sans lendemain...

http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=36011

Messages

  • cette mesure, a double tranchant, va FORCEMENT développer un ressentiment, justifié ou non, qui sera qualifié d’ANTISEMITISME chez les enfants.

    Selon ce que sous entend la formule consensuelle du "Plus Jamais Ca" la mort d’un enfant français il y a 60 ans serait plus importante que celle d’un enfant d’ailleurs, aujourd’hui. "PLUS JAMMAIS CA" ne veut malheureusement pas dire : "PLUS DE CA NULLE PART" et c’est bien le noeud du probleme...

    PROPOSITION :

    Plutôt qu’inculquer une culpabilité qui n’a pas lieu d’être chez des gamins qui n’y sont pour rien, je propose, que "la mêmoire d’un enfant juif" ,comme dit l’autre, soit confié a tous les élèves de l’école de formation de LA POLICE FRANCAISE.

    Je crois que c’est plutôt a eux et leurs pères de se poser des questions.

    Mauro V.

  • Je ne comprends pas. Que font les pédiatres, les sociologues et les psychologues ? Car ce n’est pas un problème d’historien mais un problème de santé mentale des jeunes enfants.

    Ce n’est pas de l’enseignement de la schoah en CM2 dont il est question lorsque NS parle de son truc, mais de dictat de mise en compassion d’enfants non encore matures. Les causes de ces horreurs mérite être en effet enseignée aux adolescents vers 16 ans pour éviter que tout cela ne recommence. Et la manière dont se prend NS permet d’occulter à tout jamais le moyen d’exprimer les causes de telles horreurs en particulier la collusion de la bourgeoisie européenne avec les visées de Hitler.

    L’effet dévastateur que va procurer dans la tête d’un enfant l’horreur de la mort d’un autre enfant que le monde adulte saura nommer alors qu’il est mort sans protection dans des conditions indescriptibles et la compassion marquée sans recul que développeront les enfants risque d’être extrêmement contre productif. Comment les enfants peuvent-ils comprendre ce qu’il faut faire pour faire que plus jamais cela ne se reproduise.

    Il faut toute la sagesse de la vue d’adulte, des renforts des historiens et des philosophes pour pouvoir commencer à pouvoir y répondre.

    • Les mots de la colère et de l’indignation doivent monter face à cette proposition délirante, inhumaine, destructrice pour des gosses.

      Il ne faut pas être très net pour proposer un tel truc !

      Je note le renfort scandaleux et pitoyable de Hollande à cette proposition.

      Ces gens-là n’ont-ils plus de sens commun ? De respect et d’amour pour les gosses pour qu’ils cherchent à leur faire endosser personnellement une culpabilité précise, sans solutions pour un enfant si ce n’est que, dans certains cas, aller vers l’auto-destruction ?

      Un gosse devrait prendre soin de son double d’il y a 4 générations, endosser la culpabilité de son meurtre, son gazage, d’être brulé par des nazis et des salauds de l’état français il y a 60 ans ?

      Ce petit devra ranger cela sous son oreiller le soir, avec un visage et un nom, afin de faire de beaux rêves ?

      Démissionnez bougres de bons à rien !
      Quelle honte !!

    • "il ne faut pas être très net pour proposer un tel truc"

      Tout à fait d’accord. Cette proposition est d’une ânerie, d’une ocsénité, d’une insanité morbide. Brr, elle fait froid dans le dos...

  • Et pendant c’temps là, les nombreux problèmes accumulés par notre CHER président se dissolvent comme par enchantement dans le brouhaha médiatique .....

    Il serait effarent, par exemple, de médiatiser le viol collectif subit par l’ex République Française. Viol commis en réunion et à la vu de tout le monde. Sauf des médias, qui bien sur, n’ont d’yeux que pour les vicissitudes extravagantes de notre CHER président ....

    « Quand l’escroc montre la lune, le sage regarde le doigt »

    Pitchounet.

  • " A la seconde, mon sang s’est glacé". Simone Veil, qui assistait mercredi soir au dîner annuel du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), n’a pas de mots assez durs pour condamner la proposition de Nicolas Sarkozy de "confier la mémoire" d’un enfant français victime de la Shoah à chaque élève de CM2, dès la rentrée prochaine.

    "C’est inimaginable, insoutenable, dramatique et, surtout, injuste," tranche l’ancien ministre, déportée à 16 ans et demi à Auschwitz. "On ne peut pas infliger cela à des petits de dix ans ! On ne peut pas demander à un enfant de s’identifier à un enfant mort. Cette mémoire est beaucoup trop lourde à porter. Nous mêmes, anciens déportés, avons eu beaucoup de difficultés, après la guerre, à parler de ce que nous avions vécu, même avec nos proches. Et, aujourd’hui encore, nous essayons d’épargner nos enfants et nos petits-enfants. Par ailleurs, beaucoup d’enseignants parlent -très bien- de ces sujets à l’école."
    Aux yeux de Simone Veil, la suggestion du Président de la République risque, en prime, d’attiser les antagonismes religieux. "Comment réagira une famille très catholique ou musulmane quand on demandera à leur fils ou à leur fille d’incarner le souvenir d’un petit juif ?" s’interroge-t-elle.