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Evo Morales rencontre les mouvements sociaux : LE PAYS DES VISAGES BRUNS
Publie le dimanche 1er janvier 2006 par Open-Publishing1 commentaire

de Pablo Stefanoni
Le président élu de la Bolivie - avec 54 %, selon le calcul officiel -a dessiné le programme qui l’occupera après sa prise de fonction, le 22 janvier.
La Maison Paysanne, un paisible hôtel de quatre étoiles entouré d’arbres situé dans la localité de Quillacollo, voisine de Cochabamba, s’est remplie hier d’indigènes, de paysans et de quelques représentants des "classes moyennes" pour se réunir avec Evo Morales. À simple vue, c’était la scène de n’importe quelle assemblée syndicale, avec un détail : l’Evo Morales qui la présidait est le premier président indigène élu de Bolivie, le "Frère président", comme l’appellent ses compagnons de lutte, qui ne cachent pas l’orgueil de se savoir participants de ce moment historique.
Les visages bruns - ceux qui dans la Bolivie moderne continuent de subir une sorte d’apartheid - ne sont déjà pas les mêmes, aujourd’hui ils condensent l’attente de se sentir au centre de l’histoire, regardés par la bourgeoisie des quartiers huppés avec un mélange de perpléxité et de crainte des secteurs des classes moyennes, avec l’espérance que "si ceux-là ont gouverné 180 ans et l’ont fait aussi mal, peut être l’Evo le fera mieux" et du monde qui, comme jamais, peut voir un indigène à la une des principaux journaux. "Est venu jusqu’à (la chaîne) Al Jazeera", dit un militant en résumant la geste. "Ce sera un gouvernement des mouvements sociaux", a dit le président élu.
La distribution des assistants en disait beaucoup sur la gauche indigène qui va arriver au gouvernement en Bolivie : il y avait les dirigeants des organisations sociales, près d’Evo Morales et le vice-président élu Alvaro García Linera. En bas, des députés, des sénateurs et les préfets élus, qui "doivent répondre devant les organisations ceux qui "doivent répondre devant les organisations qui ont enfanté l’instrument politique des opprimés". Fondé en 1995, le Mouvement au Socialisme (MAS) semble à la moitié du chemin entre ceux qui proposent "de changer le monde sans prendre le pouvoir" et échappent aux responsabilités institutionnelles, et les partis de gauche qui ont levé des ancres avec les mouvements sociaux qui leur ont donné origine, proposant une nouvelle forme d’articulation du social et du politique. Morales a avancé que lors de sa prise de fonction le 22 janvier "il faut non seulement inviter les présidents étrangers, mais doivent être là les organisations sociales de toute l’Amérique latine, qui serviront à freiner l’orgueil de l’empire".
"Nous n’avons pas gagné pour trois mois, ni pour cinq ans, nous avons gagné pour changer l’histoire des 50 prochaines années", a dit Morales, celui qui s’est vanté d’avoir obtenu 97 pour cent des voix dans la région cocalera du Chapare, un berceau de son activité politique, et d’être le "meilleur sondeur", après avoir anticipé qu’il doublerait le résultat des sondages". Avec 93 % des votes décomptées officiellement, le candidat de la gauche atteignait hier 54,1 %, en face des 28,6 de l’ex-président Jorge
Quiroga.
L’un des sujets centraux de la réunion a été la forte interpellation éthique à l’ensemble hétérogène qui conformera le nombreux bloc de député du MAS. Celui qui est chargé de la réaliser est García Linera : "Vous êtes des soldats des mouvements sociaux qui ont marqué le programme que ce Parlement a à accomplir : l’Assemblée Constituante pour que ce pays se transforme radicalement et le nouveau modèle économique. Vous aurez à approuver la nationalisation des hydrocarbures. D’une manière immédiate nous avons à donner les grandes lois pour que l’histoire de la Bolivie change. Que personne ne croie que le temps du "peguismo" a (charges par situation) est arrivé, tous devons donner un clair signal que nous ne sommes pas là pour nous enrichir. Si ce n’est pas le cas, l’Assemblée Constituante avec des pouvoirs souverains (convoquée pour juillet 2006) saura que faire avec ce Parlement ". Une donnée : la Bolivie fait partie, hier, des 19 pays auxquels le FMI a condamné la dette. Quelques heures auparavant, Evo Morales avait anticipé quelques mesures de gouvernement, parmi lesquelles figurent l’élimination progressive des surintendances de régulation sectorielle et "le changement du vieux système de cuoteo politique" des institutions comme la Cour Nationale Électorale (CNE) et la Cour Suprême de Justice. La conformation du cabinet est en cours.
Pablo Stefanoni, Pagina12, 23 décembre 2005.
Traduction : Fab
Messages
1. > Evo Morales rencontre les mouvements sociaux : LE PAYS DES VISAGES BRUNS, 3 janvier 2006, 12:21
Une précision concernant certains commentaires lus par ci par là :
Evo Morales n’est pas le premier président indien en Amérique latine. Le premier fut Benito Juárez, zapotèque, président à deux reprises (1861-1863 et 1867-1872) du Mexique