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Fannie Mae, Freddie Mac et 1.600 milliards de $ de pertes dues au Credit Crunch

Publie le jeudi 10 juillet 2008 par Open-Publishing
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Par Bill Bonner

La Chronique Agora
www.la-chronique-agora.com

Freddie Mac et Fannie Mae sont au grand empire américain ce que l’East India Company était à l’empire britannique au 19ème siècle... et la Compagnie de Louisiane était à la France au 18ème siècle. Gigantesque, stupide, et probablement fatal.

Freddie et Fannie sont d’énormes prêteurs hypothécaires soutenus par le gouvernement américain. Dans la France du 18ème siècle, les spéculateurs pariaient sur les richesses de Louisiane, grâce à la Compagnie de Louisiane, affrétée par le gouvernement. Au 19ème siècle, ils plaçaient leur argent dans les richesses de l’Inde, grâce à la East India Company affrétée par le gouvernement. Et à la fin du 20ème siècle, ils jouaient la hausse des prix de l’immobilier grâce à Fannie et Freddie.

Cette semaine, les jumeaux ont pris une volée de bois vert. Freddie a perdu 18%. Fannie a dégringolé de 16%. La valeur a chuté à son niveau le plus bas depuis 1995, effaçant chaque centime gagné grâce à la bulle immobilière. Sic transit gloria pecunaria. Ou quelque chose comme ça.

Le problème immédiat, c’est que les prêteurs hypothécaires se trouvent à court d’argent. Ils doivent lever 75 milliards de dollars. Il y a quelques années, cela n’aurait pas été un problème. Tout le monde était prêt à mettre de l’argent dans le marché fou fou fou de l’immobilier US titrisé. Puis l’immobilier s’est cassé la figure.

On apprenait lundi que les prix des maisons chutent dans 23 régions urbaines américaines sur 25, selon Case/Shiller. Les saisies grimpent à un rythme de plus en plus rapide, etc., etc.

* (Nous vous épargnons les détails... nous ne voulons pas vous perturber, cher lecteur).

* A présent, Freddie et Fannie ont donc un problème. Ils doivent trouver de l’argent — beaucoup d’argent. Et c’est devenu "très difficile", selon les experts, d’obtenir ce genre de somme. Les investisseurs commencent lentement à faire leurs calculs. Le couple de prêteurs hypothécaires a besoin de plus d’argent. Leur secteur est en chute libre. Leurs capitaux disparaissent. Leurs nantissements perdent de leur valeur chaque mois : "hé, peut-être qu’on devrait vendre l’action !" Résultat de ces délibérations : une très mauvaise journée pour les jumeaux, avec des pertes totales de plusieurs milliards de dollars pour les actionnaires restant, trop lents ou trop benêts pour vendre leurs titres.

** En tout cas, Freddie et Fannie ont désormais besoin d’argent. Et si l’on en croit un rapport provenant de Bridgewater Associates, il en ira de même pour beaucoup d’entreprises... et de gouvernements.

* Le mémo confidentiel de Bridgewater — qui est passé dans la presse suisse avant d’arriver à Ambrose Evans-Pritchard, du Telegraph, à Londres — déclare que les pertes dues au credit crunch pourraient atteindre 1 600 milliards de dollars, soit quatre fois les estimations officielles du FMI.

* 1 600 milliards de dollars, ça fait beaucoup d’argent. Si Bridgewater a raison, le secteur financier tout entier sera vidé de sa substance. Vous vous rappellerez, cher lecteur, qu’après la disparition de l’industrie aux Etats-Unis, il restait la finance. Et la vente au détail. L’immobilier. Les services. Et c’est à peu près tout. Le centre du pouvoir économique est passé de Detroit et Trenton — où l’on fabriquait des choses — à Manhattan, où on les finançait. Les mères cessèrent de rêver un avenir de PDG de General Motors pour leurs enfants ; elles souhaitaient désormais qu’ils aillent à Wall Street. C’est là que se trouvait le véritable argent. La finance était la clé non seulement d’immenses profits en elle-même, mais aussi de la croissance des secteurs de la vente au détail et de l’immobilier. Les gens achetaient des biens durables et des biens de consommation à crédit. Pas de crédit, pas d’achats ; pas d’achats, pas d’économie de consommation.

* Eh bien, à présent, GM a perdu 75% de sa valeur... et le secteur de la finance n’est pas loin derrière.

* Et Bridgewater continue en disant qu’une perte de 1 600 milliards de dollars dans l’industrie financière signifiera une perte de 12 000 milliards de dollars de crédit pour l’économie dans son ensemble. Lorsque les prêteurs n’ont pas de capitaux, ils ne peuvent pas faire de prêts. Donc si un dollar de capital disparaît de leurs comptes, ce sont jusqu’à 10 $ de crédit qui disparaissent de l’économie.

* Dans les bureaux européens de la Chronique Agora, nous sommes habitués aux prix élevés. Un milliard de dollars ? Oh là là, on a dépensé ça rien que pour déjeuner, ou presque. 12 000 milliards, par contre, ça commence à faire une somme. 12 000 milliards soustraits à l’économie de consommation US, voilà qui commence à ressembler à la Grande dépression. Comme le Japon entre 1990-2006... en pire. Un effondrement du prix des actifs. Une hausse du chômage. Des banqueroutes. Des faillites.

* Bien entendu, aucune banque centrale, aucun gouvernement n’entrera sans violence dans cette bonne nuit. La Fed réduira ses taux... assouplira ses critères de réserve... et interviendra probablement directement sur les marchés. Les banques seront nationalisées, dans les faits... comme ce qui s’est déjà produit pour Northern Rock en Grande-Bretagne. Le gouvernement fédéral augmentera l’emprunt et les dépenses pour essayer de compenser l’argent disparaissant des marchés et de l’économie. Un déficit de 1 000 milliards de dollars ? Plutôt 2 000 milliards. Voire plus.

* Et les étrangers ? Les fonds souverains ? Ils ont beaucoup d’argent, eux. Ne pourraient-ils pas aider à la recapitalisation du système de crédit américain ? Hélas, les fonds souverains n’ont que 3 000 milliards de dollars, actuellement. Et les étrangers ? Nous sommes d’avis que lorsqu’ils réaliseront ce qui se passe, ils chercheront désespérément à se débarrasser des dollars et du papier US de toutes sortes. Au lieu de cela, ils voudront de vraies ressources, des usines, des marques, du béton et des terrains. Et ils auront de belles opportunités. A mesure que les prix des actifs chutent, ils pourront acheter plus de propriétés de valeur aux Etats-Unis à des prix plancher. Abu Dhabi a déjà acheté l’Empire State Building. Une brasserie belge, gérée par des Brésiliens, achète Budweiser.

Bill Bonner
La Chronique Agora
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 http://www.24hgold.com/viewarticle....

L’ardoise de la crise serait de 1.600 milliards de dollars et non 400

(CFO-news). Les pertes attendues sur la crise financière seraient de 1.600 milliards de dollars alors que jusqu’à présent les établissements financiers ont annoncé 400 milliards. Cette prévision pessimiste provient d’une étude confidentielle de Bridgewater Associates, le deuxième gérant de hedge funds au monde.

Le risque de ces actifs s’élève en valeur à 26.600 milliards de dollars et les pertes y sont de 1600 milliards de dollars (dixit Bridgewaters). « Nous nous trouvons face à une avalanche d’actifs douteux », peut-on lire dans l’étude. Les plus grandes pertes seraient localisées aux États-Unis. « Nous avons de grands doutes en ce qui concerne les institutions financières quant à leur capacité à trouver de nouveaux fonds propres pour couvrir les pertes », écrivent les auteurs.

En outre, les États-Unis sont dépendants de capitaux étrangers pour leur style de vie. « Les perspectives pour le dollar sont sombres. Très, très sombre », déclare un ancien banquier suisse.

Phase 1 : la crise des subprime a été marquée par l’effondrement du marché immobilier aux Etats-Unis et le crash Subprime sur le marché des hypothèques.
Phase 2 : une sorte de répit a commencé avec le secours de la banque d’affaires américaine Bear Stearns à la mi-mars. Cette action s’est achevée en juin acommpagnée d’un regain d’optimisme sur les marchés financiers.
Maintenant commence la phase 3...

« Bridgewater est pessimiste sur le papier, rien à dire », déclare George Magnus, Senior Economic Adviser de l’UBS à Londres, « mais Bridgewater a absolument raison ».

Bridgewater Associates jouit dans les milieux financiers d’une réputation de premier ordre et en particulier Ray Dalio créateur du cabinet il y a plus de 30 ans. Plusieurs grandes banques comptent aussi parmi leurs clients.

Synthèse Laurent Leloup / CFO-news
Mardi 08 Juillet 2008
 http://www.cfo-news.com/CFO-news-L-...

Messages

  • Fannie, Freddie et les paparazzi

    Publié par Paul Jorion dans Economie, Monde financier, Subprime

    11/07

    Ce texte est un « article presslib’ » (*)

    J’hésite depuis plusieurs jours à parler des GSE, de Fannie Mae et de Freddie Mac, les Government–Sponsored Entities, encore appelées « Agencies » – les deux piliers de la titrisation des crédits immobiliers américains, les autres éléments du système étant tous récemment décédés – et ceci pour plusieurs raisons. La première est que j’ai déjà parlé d’elles ad nauseam dans ce blog et dans mes livres (1), la seconde est qu’il n’y a rien de très précis à en dire, si ce n’est qu’elles sont entrées dans une période que j’ai appelée ici de « drôle de crise » sur le modèle de la « drôle de guerre » : les huit mois d’expectative qui séparèrent l’invasion de la Pologne et l’invasion par l’Allemagne de la France et du Benelux (voir La « drôle de crise »).

    Si je n’avais pas peur du ridicule, j’irais même plus loin, je parlerais de « Bear Stearnisation », pour souligner le parallèle entre le processus dans lequel elles sont aujourd’hui embourbées et la période de dégradation de sa condition qu’endura la banque d’affaires Bear Stearns avant que sa chute brutale en quelques jours ne conduise à son sauvetage précipité et in extremis en mars dernier.

    La différence serait alors celle-ci : il n’était pas couru d’avance que les autorités américaines viendraient au secours d’une banque d’investissement alors qu’il est répété depuis des dizaines d’années que vu les 5 mille milliards de dollars de crédits immobiliers que garantissent ou possèdent personnellement aujourd’hui les GSE, l’Oncle Sam ne les laissera JAMAIS au grand JAMAIS tomber, le « jamais » étant écrit en majuscules, caractères gras et italiques. Maintenant que l’heure de vérité se rapproche, on constate cependant que ceux qui étaient si convaincus de l’indéfectibilité de ce « jamais » se rapprochent lentement mais sûrement de la sortie de secours… au kazou, vous comprenez. Témoignent de ce dégagement progressif le cours de leurs actions en bourse (ayant subi une déperdition de plus de 80 % en un an), ou le taux défavorable dont se sont vues handicapées les obligations à deux ans que Fannie Mae a émises hier (de 74 points de base [0,74 %] supérieur à celui des notes du Trésor de même maturité, soit un doublement de leur handicap en un an) et le prix grimpant en flèche des CDS, ces assurances privées synthétiques sous forme de pari que les entreprises prennent sur leur bonne santé mutuelle (le montant de la prime a doublé au cours des deux derniers mois). Ce « spread » de 74 points de base signifie que le marché attribue – de fait – à Fannie Mae, une notation de cinq crans plus faible que le « AAA » dont elle bénéficie auprès des notateurs.

    Il faut dire que les autorités n’aident pas, comme quand l’administration Bush se gratte publiquement la tête à propos de ce qu’il conviendrait de faire si les GSE devaient défaillir, ou quand la Fed envisage des scénarios « bris de la vitre » (pour empoigner la hache en cas d’incendie) ou encore quand Mr. William Poole, ex-gouverneur de la Fed déclare ce matin que les GSE sont d’ores et déjà insolvables. Ça fait mauvaise impression pour deux institutions qui constituent la machine de guerre supposément invincible que le gouvernement américain a déployée pour enrayer la chute qui va en s’accélérant du marché immobilier résidentiel.

    Une « drôle de crise » vous fait entrer dans l’ère du mensonge : les comptes des établissements financiers sont désormais truqués avec la bénédiction tacite des régulateurs, les « bonnes nouvelles » sont distillées à intervalle régulier par l’office de la propagande, pardon, par les experts de tout poil. Mais quand un couple de vedettes déclare à tous vents que son bonheur est sans nuage, on sait à qui revient le mérite de faire éclater la vérité. Mr. Henry Paulson, la ministre américain des finances, a déclaré hier que tout va bien pour Fannie et Freddie. Il emboîtait le pas à Mr. James Lockhardt, le patron de l’OFHEO, l’organisme de supervision des GSE, qui affirmait – croix de bois, croix de fer – que plus solvable qu’elles tu meurs ! Mais, ils sont là, sur leurs petits scooters, pétaradant en cercle autour d’eux : les paparazzi qui vendront la mèche.

    ––––––––––––––––––––––
    (1) Pages 102 à 108 de « Vers la crise du capitalisme américain ? » (La Découverte 2007) et pages 203 à 212 de « L’implosion. La finance contre l’économie : ce que révèle et annonce la “crise des subprimes” » (Fayard 2008).

    http://www.pauljorion.com/blog/?p=659