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Au Gabon, pour qui sonnaient les huées ?
Aux funérailles d’Omar Bongo, les officiels français ont été hués. Fin de la Françafrique ou effet d’une confiscation du pouvoir, selon les points de vue.
El Hadj Omar Bongo Ondimba a été inhumé ce jeudi 18 juin à Franceville, capitale du Haut-Ogooué, sa région natale. Mardi, les obsèques officielles ont attiré une quinzaine de chefs d’Etat, surtout d’Afrique francophone, ainsi que le président français Nicolas Sarkozy et son prédécesseur Jacques Chirac.
A son arrivée à Libreville, le chef de l’Etat français en exercice a été hué par des manifestants, événement symbolique qui sonne le glas, selon certains commentateurs, de la Françafrique. Cette alliance dont Omar Bongo apparaissait comme le dernier « dinosaure », selon le média économique Les Afriques, qui ajoute : « La presse hexagonale lui attribue à tort et à raison la nomination ou la révocation de certains ministres de la cinquième république. Ainsi de la disgrâce de Jean-Marie Bockel, secrétaire d’Etat à la Coopération, qui avait prématurément annoncé, début 2008, la mort de la Françafrique. C’était sans compter sur l’influence du vieux batéké qui obtiendra sans coup férir le scalp du jeune ministre avec en prime, la visite de son successeur, dans une sorte d’allégeance au vieux sage. »
Pour sa part, encouragée par l’analyse de journalistes connaisseurs du pays, France 24 a estimé que « l’importante délégation témoigne en tout cas des liens étroits qui unissent Paris et Libreville ». « La présence de Nicolas Sarkozy et de Jacques Chirac dans ce petit pays de 1,3 million d’habitants montre l’importance de Bongo dans les relations franco-africaines », commente Alain Foka.
Sans doute, mais qui était réellement hué ? Un manifestant a résumé ses griefs au correspondant de l’AFP, relayé par Le Point : « On n’en veut plus de vous, la France est ingrate. Bois, pétrole, manganèse, on vous a tout donné. La France, si elle est ce qu’elle est, c’est grâce au Gabon, on ne veut plus de tout ça ». « A travers Sarkozy, c’est la France qui était huée », assure l’envoyé spécial de Libération dans un billet sonore.
L’Humanité, elle, est plus catégorique – et s’offre le jeu de mot : « La « France à fric » huée à Libreville », a titré le journal, pour qui « ce mini-incident est symptomatique de la récente détérioration des relations entre la France et le Gabon, autrefois partenaire chéri de la Françafrique », tension avivée par les plaintes déposées en France à propos des « bien mal acquis », évoqués ici même il y a quelques semaines.