Accueil > François Pupponi soupçonné de pressions sur un témoin dans l’affaire du (…)
François Pupponi soupçonné de pressions sur un témoin dans l’affaire du Cercle Wagram
par Ariane Chemin
Publie le jeudi 29 septembre 2011 par Ariane Chemin - Open-PublishingLa direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) a perquisitionné, mardi matin 27 septembre, avec le juge parisien Serge Tournaire, les bureaux du maire socialiste de Sarcelles (Val-d’Oise), François Pupponi, ainsi que son bureau de député à l’Assemblée nationale, son domicile de Sarcelles et sa maison de famille, où habite sa mère, à Sainte-Lucie-de-Tallano, en Corse-du-Sud. François Pupponi, proche collaborateur et intime de Dominique Strauss-Kahn, auquel il a succédé à Sarcelles, est aujourd’hui membre de l’équipe de Martine Aubry, qu’il a ralliée après que son mentor a renoncé à se présenter aux primaires. Il s’y occupe des questions de sécurité.
Ces investigations sont liées à l’enquête menée par les juges parisiens Serge Tournaire et Hervé Robert sur le cercle de jeu Wagram, situé à Paris, près de l’Etoile, et fermé - temporairement - depuis le 8 juin, alors qu’il était l’enjeu d’une guerre entre membres du grand banditisme corse. Une équipe a tenté de déloger la première par la force, le 19 janvier, en débarquant dans le cercle et en empêchant ceux qui étaient liés à l’ancienne direction d’y revenir (Le Monde du 23 août).
La police avait procédé à une trentaine d’interpellations et mis quatre personnes en examen pour "association de malfaiteurs, extorsion de fonds et blanchiment en bande organisée". Des mandats d’arrêt ont été délivrés contre trois fugitifs. Certains ont été placés en détention, comme Philippe Terrazzoni, 49 ans, un ami de trente de François Pupponi, entré au cercle Wagram en 1996 comme croupier pour finir, à son départ, le 1er janvier 2010, à la direction de l’établissement. M. Terrazzoni s’était mêlé aux plus gros voyous du moment pour entrer en "commando" avenue de Wagram. Dans l’équipe des "putschistes" : Antoine Quilichini, dit "Tony le boucher", et Stéphane Luciani - tous deux mis en examen avec Jean-Luc Germani dans l’assassinat d’un neveu de "Jean-Jé" Colonna, en juin 2009. Y figurait également une autre terreur insulaire, Frédéric Federici, petit frère d’Ange-Toussaint Federici, incarcéré pour l’affaire de la tuerie des Marronniers de Marseille.
Parmi le personnel sommé de prendre la porte, ce jour-là, une jeune femme de 24 ans, Téresa C, directrice administrative et financière adjointe de l’établissement, qui vient de se constituer partie civile et avait refusé de démissionner après le coup de force. Elle est une exception dans un dossier où tous les employés de l’ancienne équipe évincés disent sur procès-verbal, leur "trouille", leur "peur". Beaucoup ont renoncé à se constituer partie civile.
Le beau-père de Téresa C., Christophe Vedrune, et sa mère, Isabelle Mitsch, deux militants PS venus de La Seyne-sur-Mer (Var), sont employés à la mairie de Sarcelles depuis octobre 2007. Le premier a même été durant six mois le directeur de cabinet du maire, François Pupponi. Un matin d’avril, il est convoqué dans le bureau du maire de Sarcelles, qui lui signifie que sa belle-fille ferait mieux de se taire.
"Le maire m’a fait savoir que j’avais trahi ses amis nommant ainsi Michel Terrazzoni, et que la poursuite de ma carrière à la mairie de Sarcelles était compromise, raconte Christophe Vedrune aux policiers, le 8 juin, dans un procès-verbal dont Le Monde a pris connaissance. Il m’a expliqué que les personnes qui lui ont demandé de délivrer ce message n’étaient pas des enfants de coeur, qu’ils appartenaient au grand banditisme et qu’il y avait un risque pour ma famille. Je lui ai fait savoir qu’il s’agissait pour moi de menaces. (...) Il m’a demandé de protéger ma fille et que ses amis ne comprenaient pas pourquoi elle faisait toujours partie du personnel du cercle Wagram, compte tenu des services que lui-même avait rendus en nous embauchant ma femme et moi."
"Il m’a expliqué qu’il avait été informé par une source policière que j’étais placé sur écoutes (...), poursuit le témoin. Il me recommandait fortement d’arrêter, je cite littéralement ses propos, de "déblatérer" sur les liens entre la ville de Sarcelles et le cercle Wagram. (...) Il m’a dit qu’il avait eu accès à un relevé d’appels téléphoniques. (...) J’ai indiqué à François Pupponi qu’il avait peut-être de mauvaises fréquentations, il m’a répondu que ces personnes avaient changé leur mode de vie mais qu’il ne leur enlèverait pas son amitié."
Contacté par Le Monde, François Pupponi, qui devrait être entendu par le juge Tournaire, à sa demande, le 3 octobre se dit stupéfait de ces perquisitions. Il a indiqué au magistrat qu’il ne souhaitait pas bénéficier de son immunité parlementaire. "M. Vedrune est un employé municipal que je fréquente à peine et qui ne fait pas partie de mes intimes. Je n’ai rien à voir avec l’affaire du cercle Wagram." Son avocat, Me Jean-Dominique Lovichi, poursuit : "Tout ceci est lié à la crise que connaît la droite. Il fallait "déquiller" quelqu’un à gauche. Vous verrez que tout cela va faire "pschitt". Mon client n’entretient aucun lien structurel avec le grand banditisme. Cela irait à l’encontre de ses valeurs et de sa personnalité."