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Fred Vargas affirme que la police française avait localisé Cesare Battisti dès 2006

Publie le lundi 26 mars 2007 par Open-Publishing

Affaire Battisti : L’écrivain ne doit pas être extradé.

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de Ariane Chemin et Annie Gasnier (à Rio de Janeiro)

Par quelles maladresses Cesare Battisti, en fuite depuis l’été 2004, a-t-il pu être repéré et arrêté, dimanche 18 mars, à Rio de Janeiro ? Me Eric Turcon, avocat de l’ancien activiste et écrivain italien, a invité ses principaux soutiens, comme l’auteur de polars Fred Vargas ou son ami, le député Verts de Paris Yves Cochet, à garder le silence, pour ne pas "politiser" l’affaire. Conseils et amis de M. Battisti espèrent que la Cour suprême fédérale brésilienne, conformément à sa tradition (Le Monde du 22 mars), ne livrera pas l’activiste des "années de plomb" à l’Italie, où il encourt la perpétuité pour sa participation directe ou indirecte à quatre "homicides aggravés", en 1978 et 1979.

De son côté, le parquet général de Paris n’a "pas arrêté de décision contre les suites à donner à cette affaire, notamment les poursuites contre le comité de soutien". Depuis deux ans et demi, les amis de Cesare Battisti, qui se savaient placés sur écoutes administratives, "filochés" et photographiés, prenaient leurs précautions. Lorsqu’ils se retrouvaient dans un café proche de la rue Daguerre, ils enlevaient la batterie de leur portable, raconte ainsi Jacques Bravo, le maire PS du 9e arrondissement de Paris, où résidait la famille Battisti.

Les contacts établis par Yves Cochet ont été tenus secrets. Notamment avec deux élus écologistes brésiliens, anciens exilés à Paris sous la dictature : le député fédéral Fernando Gabeira, figure intellectuelle de Rio, ancien membre du Parti des travailleurs du président Lula, et Alfredo Sirkis.

"Je n’ai pas eu de contact personnel avec lui. Yves Cochet m’a appelé il y a quelque temps pour m’expliquer son cas. Il voulait savoir si nous pouvions l’aider", a expliqué ce dernier à la presse italienne. M. Gabeira, lui, a reconnu avoir rencontré Cesare Battisti "sans savoir qu’il était fugitif". Selon nos informations, il a contacté Yves Cochet en novembre 2005, avant un aller-retour du député français au Brésil - un voyage que M. Cochet "n’infirme ni ne confirme".

"JE SUIS DANS LA MERDE"

Lors de leurs rencontres, MM. Gabeira et Sirkis conseillent au fugitif de contacter les avocats des Italiens réfugiés au Brésil, puis de se constituer prisonnier. Cesare Battisti refuse. Le 4 février, déprimé, sans le sou, l’Italien commet une imprudence : un coup de fil à "un ami autrichien", à Paris, selon Le Corriere della Serra. "C’est moi... Qu’est-ce qui est arrivé ? Le contact a été interrompu. Je suis dans la merde... Je suis seul, sans argent, je ne sais pas comment faire." L’ami donne le nom d’une personne à Rio.

Quelques jours plus tard, un coup de téléphone est de nouveau intercepté. D’après un procès-verbal publié dans La Stampa, Cesare Battisti est désemparé. "J’ai eu un gros problème avec une de mes ex... elle m’a repéré et (...) voulait qu’on reprenne notre histoire... Elle m’a fait du chantage, jusqu’à me demander de l’argent. On s’est disputés. J’ai cherché à la mettre dehors. Elle est tombée... elle s’est fait mal. Une ambulance et une patrouille de police sont arrivées, je l’ai convaincue de ne pas porter plainte."

Samedi 17 mars, Lucie Abadia, une historienne de 55 ans qui organise, en novembre, à Pau, un festival de romans policiers, où elle a déjà reçu Cesare Battisti, embarque pour Rio, avec 9 400 euros : "Pour un voyage sur les traces de mon oncle, qui a vécu au Brésil", dit-elle. Dimanche, vers 7 h 30, sa chambre n’est pas prête. Elle patiente sur la plage de Copacabana. Deux policiers brésiliens l’interpellent peu avant 8 heures. "Nous venons d’arrêter Cesare Battisti à 100 mètres de votre hôtel", lui expliquent-ils. Dans le studio qu’il louait, la police a trouvé deux faux passeports français, l’un avec le prénom de Michel, l’autre avec celui de Patrick, validés par de faux tampons d’entrée. La police brésilienne va ouvrir une enquête.

Pour Fred Vargas, qui a hébergé Lucie Abadia à son retour, l’arrestation de Cesare Battisti ne doit pas à ses derniers coups de téléphone imprudents. "Le ministère de l’intérieur fait son travail. C’est normal. Mais Nicolas Sarkozy ment sur les détails. La police française l’avait localisé entre avril et juillet 2006", assure l’écrivain, qui promet de s’expliquer "plus tard".

Jeudi 22 mars, dans une note à la Cour suprême, la Commission des droits de l’homme du Congrès de Brasilia a demandé de faire montre de prudence, rappelant notamment que l’arrestation de Cesare Battisti est associée par la presse française à un coup électoral du ministre de l’intérieur.

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