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Génération radicale-chic

Publie le vendredi 3 novembre 2006 par Open-Publishing
1 commentaire

Autain, Pocrain, Besancenot...
Ils vomissent les tièdes et veulent chasser les vieux. Ils font le bonheur des télés et sont le piment des manifs. Portrait de groupe des nouveaux trentenaires rouges

Clémentine avait 24 ans et elle se ressemblait déjà : frêle blondeur et culot d’acier. Avec une copine, elle avait eu une idée : se présenter en ticket, telles deux jeunes féministes, contre la réactionnaire Christine Boutin. C’était en 1997, juste avant les législatives. A Convergence Ecologie Solidarité, la petite boutique de Noël Mamère, des loustics, façon jeune garde, rompus aux jolis coups, avaient alors applaudi des deux mains. Stéphane Pocrain et Sergio Coronado s’étaient connus, quelques années plus tôt, lors d’un grand barnum lycéen. Clémentine Autain, cette jolie fille qui livrait si peu d’elle-même, est devenue leur copine. Une frangine en radicalité et en avenir qui, déjà, leur appartenait. 1997 : c’est l’année où Jospin, le réformiste, est devenu Premier ministre. Déjà ces méchants gosses doués s’agitaient comme des particules élémentaires. Un jour leur tour viendrait...

Est-ce aujourd’hui ? Les voilà trentenaires et ils proclament leur heure. Dieu vomit les tièdes, il faut tuer les vieux ! Clémentine Autain veut aller à la présidentielle en écartant Buffet et Bové. Stéphane Pocrain organise son tour de piste élyséen. Sergio Coronado, stratège d’appareil, attend l’équation de congrès qui fera de lui le numéro un des Verts. « Pour faire quelque chose de ce parti », dit-il. C’est une génération. Pleine de mots de passe. « Les Inrocks », Act Up, « Têtu »... « Lutter contre toutes les dominations », dit Clémentine. Après le mouvement de décembre 1995, elle a dévoré Bourdieu et elle a tout repris. Sauf la haine des médias. Cette génération est télégénique. On ouvre le poste, « Clem » est là. Ou alors Besancenot, encore un pote. Ou Pocrain, qui fut star chez Ruquier.

Ils se connaissent, ils se reconnaissent. D’ailleurs ils vivent dans le même Paris populo-bobo. Ils se retrouvent au Café Beaubourg. « A mi-chemin entre le 20e et la banlieue sud, dit Pocrain. Pas loin de la Fnac des Halles et du quartier gay. » Ils ont des combats « flamboyants », ajoute Coronado. Les minorités sexuelles, les sans-papiers... Pour terrasser l’hydre patriarcale, faire voter des étrangers, en finir avec le colonialisme et ses résurgences ! Ils sont blancs, sauf Pocrain. Aucun prolo dans leurs rangs. Aucun beur. Ils lorgnent sur Razzye Hammadi, le jeune chef des jeunes socialistes, radical, médiatique et internautique. Il va rééquilibrer la composition du groupe. Et accélérer les recompositions ? Pocrain et Hammadi doivent créer un club. En attendant mieux...

Gauche radicale-chic. Ils n’aiment pas l’étiquette. D’ailleurs ils veulent aussi augmenter les salaires et interdire les licenciements. « On a été pauvres », dit Pocrain. Ce fils de Guadeloupéens a grandi dans l’Essonne. Coronado a poussé dans le 93. Ses parents, chiliens, furent chassés par le coup d’Etat. Il a toujours dans l’oreille le « Tu vas payer sale communiste », lancé à son père le 11 septembre 1973. Autain, elle, est une enfant de la balle, fille d’un chanteur révolté, Yvan Dautin, et de Dominique Laffin, une actrice trop fragile pour le monde réel. Clémentine a porté assez de deuils pour être dure. L’idéologie est une armure. Elle ne voit dans les violences que le produit des humiliations. « Comprendre le peuple, c’est avoir une position politique », dit-elle. Elle n’est pas faussement communiste.

Aujourd’hui ils se marient, fondent des familles, et pourtant on les traite encore en gamins. Ils rusent pour échapper aux vieux. Clémentine se fait adopter par l’autre gauche. Coronado s’astreint au classicisme. Pocrain ne supporte que les échappées belles. Besancenot, ce fils de prof devenu fils du peuple, postier autodéclassé par conviction, fait le pont entre un ouvriérisme façon Arlette, sa fidélité à la LCR et son goût du rap et des réseaux... « Si seulement Olivier changeait la Ligue », soupire parfois Autain, sans y croire totalement.
Chacun a sa marque. Pocrain fait des allers-retours entre sa radicalité et son engagement black. Gamin, il chantait en créole. Il a lancé le débat sur l’accablante blancheur de la société française. Il était pote avec Dieudonné, jusqu’au moment où ça n’a plus été possible.

Clémentine Autain va lancer une revue féministe sur internet, « Louise », avec une amie Verte et une copine éditrice. Deux trentenaires encore... Coronado a organisé le célèbre mariage gay de Bègles. Ils agitent et agissent, seuls ou en géométries variables.

« L’expression « fracture coloniale » est de moi », affirme Pocrain, qui avait lancé l’association Devoirs de Mémoires avec Besancenot et Joey Starr avant de prendre la tangente : « Je ne voulais pas m’incruster. » Cela dessine quoi ? « Pas mal de victoires déjà », dit Pocrain. Et ensuite ? Le radicalisme se cherche des têtes. Ce sera l’un d’eux. Ils sont donc rivaux. Ils s’aiment pourtant, ou alors s’y obligent. « Clémentine gagnera, elle le veut plus que nous », taquine Pocrain, qui le veut aussi tellement fort. « La vie sera longue, dit Autain. On sera forts en restant ensemble. » Elle jure qu’ils changeront la gauche. « Quand je ferais les comptes dans trente ans, dit le sage Coronado, même si je n’ai jamais exercé le pouvoir, je n’aurais pas raté ma vie politique. » Vraiment ?

Claude Askolovitch
 http://hebdo.nouvelobs.com/p2191/ar...

Messages

  • ça commence , la horde haineuse et insultante ...et Askolovitch , il s’y connait !
    c’est sûr que des prolos et "beurs" y en a plein autour des autres candidats PS ou autres ! ben voyons !
    A tout prendre je préfère cette génération "radicale-chic", que la ringarde molle choc
    et si on prenait le sens littéral des mots : chic ! une nouvelle génération radicale !
    blindons nous, c’est pas fini !
    Fabienne
    du Collectif Alternative Unitaire 78 Les Mureaux)