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Il est interdit de désespérer (Denis Sieffert - POLITIS)
Publie le jeudi 21 décembre 2006 par Open-Publishing9 commentaires
Il est interdit de désespérer
Il faut en convenir : la chose n’est pas aisée à comprendre. D’ordinaire, la démocratie, c’est une arithmétique. Ce n’est pas que cela, mais c’est d’abord cela. Une minorité qui se plie à une majorité. Or il se trouve que, dans l’aventure des collectifs pour une candidature unitaire de la gauche antilibérale, la démocratie et la règle à calcul ne pouvaient pas faire bon ménage. Pourquoi ? Parce qu’il était admis, dès l’origine de ce rassemblement, qu’il existait en son sein une composante plus importante que les autres. Si tout ce chemin parcouru, tous ces débats, toutes ces résolutions et tous ces amendements, tous ces meetings et tous ces ateliers n’avaient eu pour seul but que de démontrer l’hégémonie numérique du parti communiste, le jeu sans doute n’en aurait pas valu la chandelle. Les dirigeants et les militants qui se repaissent de cette victoire à la Pyrrhus ont découvert la lune. Ils’agissait évidemment de tout autre chose. Il s’agissait de dépasser dans un processus constituant la logique mortifère des cartels. Pour le dire, les initiateurs des collectifs avaient, dès le début, usé d’un mot peu habituel sous ces latitudes politiques : le consensus. Ilfallait que le nom du candidat qui représenterait tous ces mouvements, tous ces courants, toutes ces sensibilités, toutes ces cultures, fasse « consensus ». Et il était au moins tacitement admis pour cela que l’heureux promu, pour ne pas dire l’heureux élu, ne pouvait pas être le porte-parole officiel d’un mouvement, et surtout pas du plus important de tous.
D’où cette apparente contradiction entre la démocratie de l’arithmétique et celle du consensus. Ce pouvait être, bien entendu, un communiste. Voire un communiste en vue. Il y avait l’hypothèse Patrick Braouezec, député de Saint-Denis, mais assez indépendant dans sa démarche pour pouvoir réunir sur son nom tous les courants. Il y avait Clémentine Autain, dont l’étiquette d’« apparentée communiste » ressemble déjà à une audacieuse synthèse. Onpoussa même la communistophilie jusqu’à envisager la candidature de l’euro-député Francis Wurtz, qui aurait pourtant du mal à passer pour un dangereux gauchiste, mais qui s’est acquis, par sa pratique au Parlement européen, la sympathie de beaucoup de ses partenaires de gauche. Mais rien n’y fit. Les caciques du parti avaient décidé que ce serait Marie-George Buffet et personne d’autre. Et la preuve qu’ils avaient raison, c’est qu’ils étaient les plus nombreux. Après tout, on ne peut leur reprocher qu’une chose : n’avoir pas dit plus tôt que, quoiqu’il advienne, la candidate officielle du Parti serait... candidate. Et qu’il n’était guère question dans cette affaire que de se compter et d’enfermer dans cette logique des collectifs condamnés à devenir en bout de course de simples comités de soutien. Carc’est ainsi que tout un processus qui avait été pensé pour échapper aux réflexes tribaux a finalement cédé aux réflexes tribaux. Que tout un mouvement qui ne pouvait aboutir que dans le dépassement des patriotismes d’organisations a fini dans l’exaltation des patriotismes d’organisations. Et si le pluriel est ici de mise, c’est qu’il faut bien associer dans ce conformisme politique la LCR au PCF. Chacun selon sa tactique. Pour une fois, ce sont les communistes qui ont fait de l’entrisme.
Mais essayons de voir un peu plus haut, et un peu plus loin. Si tant de militants se sont engagés avec ferveur dans ce mouvement pour une candidature unitaire, ce n’est sûrement pas par passion pour le régime présidentiel, ni par béate admiration pour les institutions de la Ve République, c’est évidemment en conscience d’un autre enjeu. L’objectif était d’inventer une force de gauche nouvelle, résistant aux agressions du néolibéralisme. De donner forme et continuité à ce qui s’est exprimé lors de la campagne référendaire de mai 2005. D’offrir une représentation à une partie de l’opinion qui ne se reconnaît pas, ou plus, dans le parti socialiste, et qui ne peut s’identifier à aucun des groupes ou groupuscules qui se concurrencent sur ce territoire politique en jachère qu’on appelle « la gauche de la gauche ». Et,pour cela, d’opérer une synthèse entre plusieurs cultures. C’est une occasion ratée. Mais les collectifs ont tout de même un formidable acquis. Ils ont converti une tradition protestataire en propositions et en programme. Ils ont réussi le plus difficile et échoué sur le dérisoire. Il faut espérer que ce qui s’est construit ces derniers mois ne sera pas perdu, et reversé au profit du mouvement social, notamment. Mais pas seulement. L’enjeu est si impératif, et l’offre politique actuelle si peu conforme aux demandes de l’opinion, qu’il est interdit de désespérer.
Denis Sieffert
Politis 21/12/2006
Messages
1. Il est interdit de désespérer (Denis Sieffert - POLITIS), 21 décembre 2006, 09:27
Merci pour cette analyse qui décrit si bien le ressenti de nombreux militants des collectifs.
Une précision par rapport à la phrase : "Et il était au moins tacitement admis pour cela que l’heureux promu, pour ne pas dire l’heureux élu, ne pouvait pas être le porte-parole officiel d’un mouvement, et surtout pas du plus important de tous."
Non, justement, dès le départ le PCF, utilisant à son avantage, la règle du consensus pour la transformer en droit de véto, avait refusé que cela soit écrit noir sur blanc. De même qu’il continue à utiliser le consensus pour la rédaction des dernières consignes de travail adréssées la semaine dernière aux comités et dans lesquelles on nous demande, encore, si la candidature de MGB pourrait faire consensus, alors que le compte-rendu de la commission de synthèse des débats à St Ouen disait :
"Les autres sensibilités (autre que le PCF) et plusieurs délégués des collectifs locaux présents ont estimé pour leur part que la candidature de MGB ne faisait consensus, ni parmi les forces politiques, ni dans las collectifs locaux, et qu’il fallait continuer à chercher une candidature pouvant faire consensus."
Ces consignes de travail sont en fait un vote, qui vise à prouver que les collectifs soutiennent la candidature de MGB, et qu’elle sera bien la candidate du mouvement antilibéral. En fait ce vote ne représentera que la présence massive des militants communistes dans les comités et, comme à St-Ouen, la tentative du PCF de faire main basse sur l’ensemble du mouvement en écrasant les autres sensibilités, actuellement minoritaires. Là, par contre, le PCF n’acceptera pas, puisque cela ne l’arrange pas, que ces minorités fassent appel au consensus qui leur donnerait à leur tour un droit de véto (on n’est bien d’accord que le consensus, ce n’est pas ça, mais c’est comme ça que l’utilise le PCF).
Le mouvement antilibéral perd un compagnon, qui nous aurait permis d’avancer plus rapidement (quoi que ?!!), mais il gagne son indépendance et une plus grande cohérence et lisibilité sur ses valeurs. De fait, il ne s’appuiera plus sur les partis politiques, mais sur la société civile, et il répondra ainsi plus sûrement à l’attente de ceux qui ressentent, avec urgence, la nécessité de changer de politique, mais qui ne voient aucun candidat leur proposer à la fois un programme politique différent et réaliste, et une autre façon de concevoir la politique, qui leur permettrait d’espérer changer leurs conditions de vie en passant par les urnes, d’avoir à nouveau envie de s’impliquer dans la vie politique (au sens noble et originel du terme) de leur pays.
Leur proposer, enfin, autre chose que de "voter utile", alors que ce vote ne porte pas leurs espoirs et leurs idées, de s’abstenir, ou de ne trouver d’autre moyen pour exprimer leur désaccord, leur désésepoir et leur impuissance qu’un vote de contestation extrémiste.
Une militante citoyenne
2. Il est interdit de désespérer (Denis Sieffert - POLITIS), 21 décembre 2006, 09:32
Je trouve que cette mise en parallèle est un peu courte et manque d’argumentation. Ce qui ne veut pas dire que je la trouve à coup sûr totalement infondée.
Je vois au moins une différence fondamentale :
Le texte Ambition et stratégie, adopté par l’AU le 10 septembre (ainsi que certains points du programme), est quasiment aligné sur les positions du PCF. Le PCF ne justifie d’ailleurs pas la rupture par des divergences de fond, les textes références de l’AU lui conviennent bien. C’est une histoire de casting qui justifie sa position actuelle.
En revanche, la LCR exprime des désaccords stratégiques, sur le scénario, essentiellement par rapport à la participation à une majorité avec le PS ou à une opposition de gauche au PS. Certains diront que ces divergences servent d’alibi, peut-être en partie, mais elles n’en existent pas moins et sont incontournables, elles auront dans quelques mois des incidences très concrètes.
Donc attention aux parallèles hasardeux, aux racourcis pratiques mais simplificateurs.
OC
3. Il est interdit de désespérer (Denis Sieffert - POLITIS), 21 décembre 2006, 09:55
Mais la période pré-électorale est le pire moment pour ce faire… etcette question n’est devenue urgente qu’à l’approche des élections, justement. La bataille d’egos était dès lors inévitable.
(Et ne parlons pas de cette idéologie de la représentation, de l’incarnation du « peuple » dans un ou des hommes particuliers, qui nous vient droit de l’Ancien Régime.)
Cobab
1. Il est interdit de désespérer (Denis Sieffert - POLITIS), 21 décembre 2006, 10:09
Les consignes sont alors un vote .......
Belle conception de la démocratie que votre usine a gaz qu est le concensus
Continuer a baver sur le pcf
NOUS ON AVANCE
Et merci a tt ceux qui heurtent notre intelligence en nous prenant pour des demeurés C est vrai MGB a tenue la mains des communistes jusque dans l urne .....
Bon sans quelle femme .....!!!!!
C EST GENANT QUAND CE SONT LES ADHERENT DU PCF QUI DECIDENT DES DECISIONS STRATEGIQUES
Pour d aucun ici la démocratie reste une abstraction NOUS on le fait vivre et la pratiquont
Bon je par prendre l air pour etre en pleine forme pour la campagne A janvier ...
C F VITRY 94
PS/ A la place de certain je regarderais de plus pres avant d affirmer la mort du PCF
Hier j ai moi vu des communites tant a l entreprise qd local avec une peche comme je n avais p)as vue depuis longtemps l
2. Il est interdit de désespérer (Denis Sieffert - POLITIS), 21 décembre 2006, 10:37
C’est vrai on a vu la démocratie à l’oeuvre pour sûr : un vote à 81% des militants d’un PCF sur la position demandée par l’appareil bureaucratique, présenter Buffet pour sa survie. Avec une argumentation "démocratique" génial : elle fait pas consensus mais on est plus nombreux que les autres forces du rassemblement, votez pour elle. Il suffit pas de voter pour faire marcher la démocratie, il faut mettre sur la table le fond des raisons des choix : ici la volonté de préserver l’appareil du PCF, ses élus et son groupe parlementaire par une alliance avec le PS.
3. Il est interdit de désespérer (Denis Sieffert - POLITIS), 21 décembre 2006, 10:38
d’accord mais fallait le dire avant, que vous vouliez que les collectifs fassent la campagne du pcf, ca aurait eu le mérite d’etre clair, au lieu de ça, vous avez manipulé les collectifs pour votre interet boutiquier, et de par ce fait cassé l’élan unitaire et populaire, ca m’ettonerai beaucoup maintenant que vous arriviez à faire des meetings de 4000 personnes, vous avez trahi, le peuple une fois de plus, et le pire c’est que vous ne vous en rendez pas compte, continuez, vous allez faire vos petits 2%, vous le ferez sans moi, on a etait sans doute trop naif, on avait cru que le pcf avait changé, et bien non il était toujours le meme, et ne parlez surtout pas de démocratie majoritaire, parce que cette idée dans le cadre des collectifs est totalement stupide, meme un enfant comprendrai cela, lenine doit une fois de plus s’en retournai dans sa tombe Phil
4. Il est interdit de désespérer (Denis Sieffert - POLITIS), 21 décembre 2006, 10:39
Comme quoi :
1. La pêche a un gros succès en ce moment (avec ou sans canne).
2. Ceux qui voulaient une candidature PCF sont contents. C’est un scoop.
C’est génant... qui décident... entre eux... des décisions stratégiques... de l’Alternative Unitaire ?
– oui.
5. CE QUE NOUS VOULONS, 21 décembre 2006, 10:48
On continue, un peu moins nombreux au début peut-être, mais beaucoup de nos compagnons de route du PC ne nous abandonneront pas.
Et puis, nous deviendrons peut-être de plus en plus nombreux. Nos moyens matériels seront certes drastiquement diminués, mais il vaut mieux aller à pied où on veut qu’en avion là où on ne veut pas. N’oublions pas les luttes de terrain : il y a des campings en bord de seine, il y a des avions qui précisément emmènent des gens là où ils ne veulent pas, il y a des assistantes sociales (dans le Puy de Dôme) qui se font sanctionner pour avoir voulu faire leur métier. Il y a plein d’autres choses encore.
Rebâtissons les collectifs sur des bases solides, et ne mettons pas toute notre énergie dans une campagne électorale confuse, mais restons ensemble en vue de constituer une vraie force antilibérale, solidaire et unitaire sur le terrain.
4. Il est interdit de désespérer (Denis Sieffert - POLITIS), 21 décembre 2006, 12:14
Je comprends l’amertume de tous ceux qui ont construit ces collectifs depuis deux ans... je suis au PCF et pourtant je regrette profondément la manière dont il a agi. Alors maintenant ? Si on a fait tout ça, c’est surement pas pour perdre espoir maintenant : le PCF n’est pas ce bloc monolithique que beaucoup de membres des collectifs accusent, dépassez un peu ces anciens schémas et il n’y a que comme çà que vous ferez bouger le PCF (et vous savez combien il en a besoin !)
Pierre, adhérent PCF