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de GABRIELE POLO
Il s’agit peut-être d’un vote local, de plus dans une région "coffre-fort" de la droite et où la mafia est un sujet actif, mais le résultat des élections siciliennes parle à toute l’Italie. Et cela non pas pour dire que le centre-gauche "est fini" mais pour confirmer la désagrégation de la politique en des comités d’affaires et des partis en des entités de plus en plus négligeables.
Ce résultat parle surtout à la gauche qui paye un prix très élevé pour son expérience de gouvernement, comme les prochaines élections administratives le confirmeront probablement. Il est évident que le parti le plus exposé est Refondation Communiste, auquel la culture commune du peuple de centre-gauche a confié le rôle de gardien des droits de ceux qui ont moins et qui ont le plus payé les vingt années de libéralisme, le tunnel sombre du berlusconisme.
Si 27% de la richesse nationale s’évaporent en évasion fiscale, si on continue à proposer que le système des retraites soit sans arrêt soutenu par les sacrifices de ceux qui vont en toucher une, si la lutte à la précarité de l’emploi doit s’arrêter au seuil des exigences des entreprises ou celle pour les droits des individus au seuil des relations avec le Vatican, si les promesses de paix doivent faire bon ménage avec les chars envoyés en Afghanistan (on n’a plus de nouvelles à propos de la Conférence de paix)… si l’on n’arrive pas à faire face à tout cela, le résultat politique est déjà fixée.
Ce ne sera pas le Parti démocrate qui en payera les frais. Tout le contraire. L’inévitable désaffection pour la politique, qui se nourrit de la crise de la représentation, aidera le résultat électoral de ce lobby institutionnel imminent, parce que l’idée même d’une gauche porteuse de transformation en sera frappée. C’est le modèle américain : hors du système l’horizon du changement collectif et dehors (électoralement aussi) ceux qui en auraient le plus besoin. En mendiant – ceux qui le peuvent – des faveurs individuelles auprés de quelques castes ou potentats. Les autres ouvriront le feu dans un campus ou détourneront un car.
Il ne semble pas que ceux qui ont décidé de « rester à gauche » aient pleinement conscience d’un horizon si dangereux. La rupture (historique ou politique) décrétée par la naissance du Parti démocrate a produit, il est vrai, un grand mouvement de meeting, de débats, de rencontres, mais il n’en résulte aucune volonté précise d’aller dans de brefs délais vers la construction d’une pratique commune pouvant devenir un point de référence. Non pas pour changer le monde, mais pour endiguer efficacement ces « si » (nous pourrions en ajouter d’autres) qui constituent une véritable urgence sociale.
Et non pas pour donner à la politique d’en bas (on en fait tellement, dans des comités et des associations, mais tous séparément) une pleine représentation mais au moins un appui dans le territoire complexe du pouvoir. Le temps, en politique, n’est pas un facteur secondaire : si les groupes dirigeants de la gauche actuelle veulent avoir un avenir, ils doivent agir tout de suite, bouger vite, donner des réponses concrètes dans le détail à ceux qui les ont élus, se fixer des objectifs précis sans se penser comme le « tout » et, donc, remettre en discussion – avec ceux qui nourrissent encore des espoirs – les « fusions » décidées sur le papier. Des fusions qui, en tant que telles, ne se réalisent jamais.
http://www.ilmanifesto.it/Quotidian...
Traduit de l’italien par Karl&Rosa