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Intermittents : Une lutte qui cherche à rebondir
Publie le lundi 20 octobre 2003 par Open-PublishingAprès les manifestations estivales, la coordination mise sur la justice.
Par Bruno MASI
lundi 20 octobre 2003
« Il faut redonner du tonus au mouvement. » Jean Voirin, secrétaire général de la CGT-Spectacle
près trois mois d’une lutte cahotante, les intermittents refont parler d’eux. Certains voient dans leur intervention sur le plateau de la Star Academy l’ultime sursaut d’un mouvement en bout de course. A ce jour, hormis le Lieu unique à Nantes et le théâtre des Treize Vents à Montpellier, tous les centres dramatiques et scènes nationales ont entamé leurs saisons comme si de rien n’était. La grève, tant prônée pendant l’été avec l’annulation des principaux festivals, n’a pas rencontré d’écho suffisant pour perturber la rentrée artistique.
Perte de vitesse. Depuis le 27 juin, les coordinations d’intermittents disséminées partout en France exigent l’abrogation du protocole et la reprise des négociations. Ils étaient 10 000 à le demander dans les rues de Paris le 4 septembre. Mais à peine plus de 4000 jeudi, place de la Bastille. Lundi dernier, au début d’une semaine annoncée « morte pour le spectacle et la culture », Jean Voirin, le secrétaire général de la CGT-Culture concédait : « Il faut redonner du tonus au mouvement. » A l’évidence, si on fait scrupuleusement le détail des troupes, la mobilisation est en perte de vitesse. Les actions comme celle menée samedi à La Plaine-Saint-Denis relèvent, selon cette lecture, plus du désarroi que de l’acte politique.
D’un autre côté, l’intervention des intermittents sur le plateau de TF1 n’est pas si surprenante. Ce qui l’est davantage est d’y être parvenu. Depuis le début de l’été, la coordination d’Ile-de-France avait multiplié les tentatives d’intrusion sur les plateaux d’émissions de télé (lire ci-contre). A de rares exceptions près, ils n’avaient pas réussi à entrer en contact avec les techniciens embauchés sur les tournages, ni avec le public et les téléspectateurs. C’est cette visibilité qu’ils recherchent à nouveau.
Parallèlement à ces coups médiatiques, la réflexion s’est pourtant bien poursuivie. Les intermittents, indépendamment de tout syndicat, ont élaboré un nouveau modèle possible d’indemnisation où ils remplacent les annexes 8 et 10 par une annexe unique, rétablissent le seuil de 507 heures sur douze mois nécessaires à l’affiliation, et remettent en vigueur la date anniversaire pour le réexamen de leurs dossiers par l’Unedic. Depuis septembre, les rencontres avec les spectateurs se sont multipliées. Ils étaient 700 à débattre en Pays de Loire ce week-end. Partout, les tables rondes, forums ou conférences, tant sur ce régime spécifique d’assurance chômage que sur la culture et la création, ont pris le pas sur les regroupements spontanés et les cortèges en ville. La manifestation, forme traditionnelle de revendication sociale, ne semble en effet plus en phase avec un mouvement qui prône désormais davantage la réflexion et le dialogue.
Recours. Devant le silence persistant du ministre de la Culture, Jean-Jacques Aillagon, qui répète à l’envi que rien ni personne ne permettra la réouverture des négociations (du moins avant son entrée en vigueur le 1er janvier), les intermittents en sont réduits à penser dans leur coin. Réunis en coordination nationale il y a dix jours à Marseille, les collectifs se sont exprimés pour une poursuite du mouvement, selon des formes à définir. La principale aujourd’hui, loin des gros plans des caméras, réside dans les recours en justice lancés début octobre. Ceux-ci portent sur les manipulations de signatures qui ont eu lieu entre la ratification de l’accord en juin, celle de l’avenant signé le 8 juillet et l’agrément donné par le ministère des Affaires sociales, un mois plus tard.
A Paris hier, ils n’excluaient pas d’autres actions plus spectaculaires, tout en reconnaissant « l’énorme difficulté à monter de telles opérations ». Avant de rappeler que leur principal objectif est « d’être entendus par le plus grand nombre ».