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Israël veut priver le raïs de son rêve : être enterré sur l’esplanade des Mosquées
Publie le dimanche 31 octobre 2004 par Open-Publishing
L’opération "Nouvelle page" est prête.
de Stéphanie Le Bars
Jérusalem
Yasser Arafat n’est pas mort mais sa dépouille obsède déjà les autorités israéliennes.
Elles veulent à tout prix éviter que le président de l’Autorité palestinienne
soit enterré à Jérusalem, sur l’esplanade des Mosquées (le mont du Temple pour
les juifs), ainsi qu’il en a exprimé le désir à plusieurs reprises. Et, le moment
venu, il est plus que probable qu’elles ne donneront pas leur autorisation à une
telle cérémonie.
Politiquement, la présence de la tombe de M. Arafat sur ce site, âprement disputé depuis des décennies, équivaudrait à reconnaître une souveraineté palestinienne sur le lieu saint. Les Israéliens craignent, en outre, que le tombeau ne devienne un lieu de pèlerinage et de rassemblements. Ils redoutent également le déferlement de centaines de milliers de Palestiniens en plein cœur de Jérusalem pour l’enterrement.
L’extrême droite israélienne a déjà prévenu qu’elle mobiliserait "des milliers de juifs pour faire barrage de leur corps et empêcher l’accès au mont du Temple", lieu le plus sacré du judaïsme, de la dépouille du président palestinien. Benny Elon, un député d’extrême droite, a demandé au ministre de la défense d’annoncer officiellement le refus du gouvernement israélien de permettre l’enterrement à cet endroit.
Un autre lieu de sépulture est d’ailleurs évoqué avec insistance par les autorités : Abou Dis, un faubourg de Jérusalem-Est, coupé de la ville sainte par le mur de huit mètres construit par les Israéliens. A leurs yeux, une concession "avec vue sur le dôme du Rocher" ferait parfaitement l’affaire.
Jeudi 28 octobre, une autre hypothèse a été envisagée. La région sud a été placée en alerte spéciale dans la crainte que les Palestiniens demandent à enterrer leur chef dans la bande de Gaza. Car, durant quelques instants, en fin d’après-midi, les autorités israéliennes ont pensé que l’heure était arrivée. Selon le quotidien Yedioth Aharonot, le dossier "Nouvelle page", le nom de code attribué par les Israéliens aux procédures à suivre en cas de décès de M. Arafat, a été activé et les permissions ont été annulées.
"FAIRE SANS LUI"
L’emballement s’est révélé prématuré, mais de nouveau, vendredi, des mesures particulières ont été prises. L’accès à la prière sur l’esplanade des Mosquées a été limité aux Palestiniens de Cisjordanie âgés de plus de 60 ans ; les services de sécurité israéliens craignaient que la disparition du raïs au moment de la grande prière de ce vendredi de ramadan ne provoque des troubles.
Là encore les inquiétudes étaient infondées, mais, juge la presse, même vivant, Yasser Arafat est "fini" et il ne se trouve guère d’Israéliens pour s’émouvoir de son sort. "Gravement malade ou mort, écrivent les deux grands éditorialistes du Yedioth Aharonot, depuis cette semaine, Yasser Arafat n’est plus ce qu’il était. L’histoire palestinienne devra faire sans lui. Et nous, les Israéliens, aussi."
Au départ de l’hélicoptère qui emmenait M. Arafat en Jordanie, Ehoud Yaari, le présentateur de la deuxième chaîne de télévision a lancé en direct : "Il ne va pas nous manquer", résumant le sentiment populaire israélien. Avec une rare franchise, 47 % de la population affirment vouloir la mort du raïs, selon un sondage publié vendredi.
http://www.lemonde.fr/web/recherche_articleweb/1,13-0,36-385197,0.html