Accueil > Italie : "Des lois inégales pour tous"

"Le comble - affirme le secrétaire de Magistratura democratica (Md) - est dans la nouvelle loi sur les immigrés, un système qui introduit un véritable double niveau de citoyenneté". Dimanche aura lieu l’élection du conseil national des magistrats "de gauche".
Le congrès de Md est ouvert. Claudio Castelli : "Italie partagée entre honnêtes hommes et brigands".
de ALFREDO PECORARO traduit de l’italien par karl&rosa
Il n’y a pas que la réforme du système judiciaire dans les cauchemars des magistrats, mais il y a aussi, plus en général, un concept d’Etat, forgé par le gouvernement Berlusconi, qui est fondé sur l’ "inégalité" sociale, qui se "traduit en augmentation de la pauvreté et en division de la société entre une poignée de nantis et ceux qui vivent dans une précarité de plus en plus grande". Une "inégalité qui atteint le sommet dans la nouvelle loi sur les immigrés, un système qui introduit un véritable double niveau de citoyenneté".
Claudio Castelli n’y va pas par quatre chemins quand il soupèse le système justice qui se traîne, par la faute de "lois faites pour un seul, dans la torsion de normes et de disciplines pour résoudre les procès et les cas singuliers, dans le grignotage quotidien des principes constitutionnels de l’égalité de tous les citoyens devant la loi". Des accusations précises, prononcées par le secrétaire de Magistratura democratica à l’ouverture des travaux du XV congrès national du courant de gauche des magistrats italiens en cours à Palerme.
Et alors, dans une société "inégale", dit le magistrat, "la réponse aux problèmes sociaux irrésolus devient de plus en plus souvent la prison". Les détenus augmentent et leur typologie sociale se stabilise : les migrants sont plus de 31% et les toxicomanes plus de 26%, "des données qui témoignent de comment la justice pénale est principalement un instrument répressif de la marginalité sociale". Ainsi, dans l’Italie inégale "grâce aux récentes réformes concernant le faux en bilan, l’immigration, les délits des sociétés - explique Castelli - il y a deux codes pénaux : un pour les brigands et un autre pour les honnêtes hommes".
Si pour les "comportements des dits cols blancs" on choisit le chemin de la dépénalisation, on exalte la "tolérance zéro pour le contrôle des phénomènes sociaux". "Il suffit de penser - dénonce le secrétaire de Md - à l’immigration et au secteur des stupéfiants, où le credo prohibitionniste est porté à des niveaux paradoxaux, avec pour unique effet de multiplier la répression et la souffrance sans résoudre les problèmes individuels ni augmenter le sens de sécurité de la collectivité".
Pour le magistrat, un exemple de "justice inégale" est sans doute la loi Cirielli, tandis qu’il prévient que "est en cours une tentative de détruire la juridiction en tant que possibilité de faire valoir les droits devant un juge indépendant et impartial". "Il s’agit d’une campagne inquiétante - ajoute-t-il - qui agit en délégitimant les magistrats, en proposant une approche vulgaire qui vise à discréditer les décisions qui ne sont pas appréciées".
De l’autre côté, Md met en évidence la baisse de tension vis-à-vis du crime organisé, avec "une politique inadéquate contre la mafia, de même qu’avec la présentation médiatique du phénomène, qui oscille entre le silence forcé de l’information et le côté polar avec lequel on traite de la criminalité napolitaine ou le folklore sur la fuite de Bernardo Provenzano". "Tandis que la légalité - accuse Castelli " n’est plus considérée comme une valeur, cette envie de cohabitation avec la mafia exprimée dans une malheureuse boutade d’un ministre en fonction prend le dessus", en se référant clairement à Pietro Lunardi.
"Dans le monde de la politique - souligne le leader de Md - les prétentions d’impunité semblent avoir le dessus sur l’assomption de responsabilité, avec l’augmentation conséquente de la surexposition de tous les citoyens". Et cela, tandis que "l’emporte une politique insensée, basée sur la réduction des ressources, qui contraint les parquets à un fonctionnement minimal et à de la pure survie". Les ressources manquent, 14% du personnel administratif manque, les projets de requalification sont bloqués, la réalisation d’un réseau informatique est en retard. Pour Castelli, la raison de tout cela est évidente : "l’inefficacité est consciemment poursuivie pour rééquilibrer le rapport entre politique et justice, autrement dit pour éliminer le contrôle de légalité diffus".
Le secrétaire de Md souligne en outre les raisons pour lesquelles le Garde des Sceaux n’a pas été invité à participer au congrès. "Il ne s’agit pas d’un refus de la confrontation - dit-il - mais de la prise d’acte d’une politique qui cherche à détruire la juridiction, une politique violemment hostile à la magistrature que le ministre et les forces politiques actuellement aux affaires ont développée. Une invitation aurait été un choix hypocrite".