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Italie : "Liberté de presse en danger"

Publie le jeudi 24 juillet 2008 par Open-Publishing
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de Carlo Lania

Les directeurs de journaux face au risque de fermeture par coupure de fonds.

"Système inique, on ne finance que les sociétés cotées en bourse".

Aujourd’hui ils donneront voix à leurs inquiétudes de la façon qu’ils connaissent le mieux, c’est à dire par le biais d’une série d’articles et d’éditoriaux.

Par contre, à l’avenir, ils n’excluent pas des initiatives communes.
Une chose est en effet sure : indépendamment des diverses positions politiques, souvent antagonistes, en Italie une série de journaux risque de fermer du fait des suppressions (RÉDUCTIONS ?) aux subventions d’état pour la presse écrite, décidées par le gouvernement avec le décret sur la manœuvre fiscale approuvé par la Chambre des Députés.

Des noms historiques ou plus jeunes, de droite comme de gauche, liés aux partis politiques ou aux coopératives de journalistes, mais aussi à l’édition no-profit, dont la survie est mise en danger par la suppression voulue par le ministre de l’Economie Giulio Tremonti du “droit subjectif à recevoir les subventions”. Une décision qui subordonne le certitude d’obtenir des financements presque toujours vitaux à une générique disponibilité des ressources mises chaque année à disposition par le gouvernement.

Un vrai couperet pour des journaux tels que le Manifesto, l’Unità, il Secolo d’Italia, Liberazione, il Corriere Mercantile, l’Avvenire, et pour des dizaines de journaux mineurs dont tous les directeurs, à juste titre, réfléchissent sur les possibles conséquences que pourrait causer la réduction des financements. « Si même le Sénat approuve le décret tel qu’il est, on ferme un point c’est tout », explique sans demi-mesures le directeur de Liberazione, Piero Sansonetti. « Evidemment que nous sommes aussi inquiets » lui fait écho à l’opposé le directeur du Secolo Flavia Perina, tandis que Mimmo Angeli, directeur du Corriere Mercantile, définit « une tragédie » la seule idée de devoir renoncer à des financements indispensables.

Aujourd’hui, avec un bref éditorial, Sansonetti expliquera à ses lecteurs une situation qu’il résume ainsi : « Fermer par décret les journaux les plus faibles est un coup porté à la liberté de presse ; il ne resterait pratiquement plus que les journaux de Confindustria ( n.d.t. : le Medef italien). Mais il y a plus : cela signifierait aussi affaiblir en même temps la gauche politique, puisque après le résultat électoral elle n’aurait plus aucun moyen de s’exprimer ».

Un détail qui n’échappe pas à Perina : « Le centre-droite a un problème en plus, qui est d’assurer la tutelle des sources d’information politique après que l’expulsion d’une partie de la gauche du Parlement ait donné lieu à une sorte de démocratie limitée ». Toutefois, pour le directeur du Secolo, il n’y a qu’une façon pour sortir de la crise : « Il faut construire une enceinte de tutelle pour les quotidiens d’information politique ayant un rôle réel. On ne peut pas mettre sur le même plan le Manifesto, il Secolo, Liberazione, ou bien Europa et la Padania avec des organes de presse liés à des organisations de catégories, et je le dis avec tout le respect pour ces journaux ».

Une part importante de la partie se jouera en octobre, lorsque la discussion sur comment réformer la loi sur l’édition rentrera dans le vif du sujet. « Il est clair qu’il faut faire quelque chose », explique le directeur de Avvenire, Dino Boffo. « Comme journal nous n’avons aucun problème à discuter de nouveaux critères de rationalité pour les contributions. Nous demandons seulement que soit respectée la dignité des sujets concernés, et que nous soient faites des propositions présentables ». Comme d’autres directeurs, même Boffo conteste les critères qui aujourd’hui gouvernent la distribution des subventions. « Je trouve inacceptable – dit-il – que l’argent destiné à la liberté de presse soit également versé à des sociétés cotées en bourse, qui ensuite distribuent des dividendes aux mêmes riches ».

Même l’Avvenire dédiera aujourd’hui un éditorial et une page interne au problème. « Le système est inique », poursuit Boffo. « Il faut sauvegarder le droit subjectif de celui qui est en règle et contrôlable suivant des paramètres objectifs ». Un concept qui trouve également l’accord du directeur du Corriere Mercantile. « Il faut récupérer des ressources qui jusqu’à ce jour ont été gaspillées en finançant des journaux fantômes, des coopératives bidon et des éditeurs qui ne représentent qu’eux-mêmes », explique en effet Mimmo Angeli. Mais peut-il y avoir une décision politique derrière la décision du gouvernement ? Angeli ne le croit pas : « Je pense plutôt que c’est l’oeuvre de Tremonti, je ne pense pas que Berlusconi soit d’accord.

Si le décret devait être approuvé sans modifications, nous risquerions de nous retrouver dans un régime de quasi monopole, avec juste quelques journaux : Corriere delle sera, Repubblica, Stampa, Sole 24ore et quelques rares autres ».

« Il faut concentrer les financements sur les journaux qui produisent vraiment de l’information, et ne sont pas uniquement des machines à faire des affires », ajoute Perina.

« Je crois qu’il faut s’engager à gérer de façon bipartisan la réforme que le gouvernement a promis de présenter d’ici la fin de l’année. Et ce jour-là – conclut le directeur du Secolo - chacun sera appelé à faire ses choix »

Il Manifesto du 23/07/2008

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