Jolivet : pas mieux que Bigard ?

Au hasard d’un zapping hasardeux, ce matin, vers 8 heures, je découvre avec surprise la présence de Marc Jolivet sur canal +. Fort bien ! Marc Jolivet est un artiste de qualité, avec de véritables convictions politiques écologistes. La déception n’allait pas tarder...

Passons sur les volontés de participer à la star academy ou de rencontrer Le Lay, les explications que l’artiste a fournit sont même plutôt convaincantes ( entre autres : « pour constater la part de cerveau disponible qu’il lui reste »).

Mais, alors que le journaliste évoque le contexte politique et, donc, forcément, la période post-référendaire, Jolivet commence à « dérailler ». Surfant sur la vague d’assimilation du non à un refus de l’Europe, il déclare finalement : « tous les malheurs de la France et de l’Europe dans les années à venir sont dus à José Bové et à Fabius ». Alors que se manifeste, enfin, dans toute la gauche, la volonté de réconcilier les camps du oui et du non, il est regrettable que l’on en soit encore à de vulgaires querelles qui ne pourront aboutir à rien (sauf à vouloir un éparpillement des forces de gauche).
De quels malheurs parle-t-on ? Nous n’allons pas ici refaire la campagne référendaire. Simplement, le peuple a choisi. Il n’y a pas eut de non à l’Europe, il n’y a pas eut de non au gouvernement Raffarin (malgré ce que certains veulent croire). Le résultat du référendum n’a qu’un sens : un refus du « traité constitutionnel » européen tel qu’il était proposé. Les causes du non sont divers : ce traité pouvait être jugé « trop libéral », « pas assez social », que sais-je encore ? Peu importe, tenons-en nous au résultat.
Les conséquences, elles, sont certes considérables. Pour Marc Jolivet, tout ne serait que malheur après le 29 mai. Disons qu’il n’y a encore aucun projet alternatif à la constitution proposée, mais, après tout, tous les pays ne se sont pas encore prononcés. Malgré cela, de nombreuses nouvelles initiatives ont été lancées : appel pour une assemblée constituante (consulter le peuple européen pour savoir quelle constitution et quelle Europe il souhaite : en voilà une bonne idée), nouvelles réflexions sur l’Europe dans plusieurs organismes de gauche (Verts-ATTAC-etc), etc. Il y a donc un souhait de « restructuration » de l’Europe, mais les institutions actuelles ne semblent pas encore y prêter une grande attention.
Deuxième conséquence : la gauche sort divisée, et semble incapable de se régénérer. Ni autour d’un programme, ni autour d’un candidat. Paradoxalement, seul le parti pour ses débats les plus vifs (les Verts) semble en mesure de dépasser les frontières posées par le référendum. Mais l’état des lieux de la « sphère de la gauche » parait presque dramatique pour qui aurait l’espoir d’une gauche victorieuse en 2007. Aucun parti ne veut entendre parler d’une union. Même Bové, lui le responsable de tous nos malheurs, qui refusait jusqu’alors tout mandat politique, évoque la possibilité d’une candidature « s’il n’y a pas d’éparpillement » à gauche. C’est aujourd’hui le SEUL candidat qui puisse avoir une certaine popularité, tout en permettant une union minimum. Les partisans du « oui verts » seraient prêts à l’accueillir... S’il adhérait aux Verts.

Dans un deuxième temps, Jolivet dira préférer voter Sarkozy en cas d’un duel Sarkozy-Le Pen en 2007. Explications : « parce que sinon Le Pen va nous mettre Bigard à la culture ». Sans défendre Le Pen : qui Sarkozy pourrait-il mettre à la culture ? Jean-Marie Messier, peut être. Christian Clavier ? Encore mieux ! De Bigard à Clavier, quelle différence nous faut-il percevoir ? Et de Sarkozy à Le Pen ?

Finalement, le présentateur demande à Marc Jolivet ce qu’il manque pour qu’il y ait plus de femmes en politique. Réponse étonnante : « c’est peut être un problème de culture ». Puis, après un certain temps : « les femmes manquent encore certainement d’appétit politique », de volonté...

Etranges convictions que celles de Jolivet, le temps d’une matinée, pour une personne qui a toujours défendu les valeurs de « l’écologie politique », et ce contre toutes les attaques de la droite. Une émission qui laissera probablement des regrets à un homme qui, pourtant, garde d’énormes qualités artistiques.