Accueil > L’Allemagne vacille sur ses bases
Le système social allemand, longtemps considéré comme un modèle, est remis en cause tant par le gouvernement que les grandes entreprises du pays
BERLIN Les sociétés allemandes procèdent à des réductions des coûts et appellent à des sacrifices, en dépit de l’amplification de la grogne contre ces réformes. « Ce que le gouvernement qualifie de plus grosse réforme sociale de la République fédérale est ressentie par les personnes concernées comme un démontage social sans équivalent. La peur de la chute entraîne les gens dans les rues, mais, en dépit de toutes les erreurs, il n’existe point d’alternative aux réformes », tranchait récemment le magazine de centre-gauche Der Spiegel, en ouverture d’un grand dossier sur « la peur de la pauvreté » dans la prospère Allemagne.
Lundi soir encore, les manifestations désormais hebdomadaires contre la réforme du marché du travail du social-démocrate (SPD) Gerhard Schroeder ont rassemblé quelque 70.000 personnes dans 140 villes, majoritairement dans l’ex-RDA où le chômage touche en moyenne près d’un actif sur cinq.
Mardi matin, c’est avec des jets d’oeufs que le chancelier était accueilli dans une petite ville de RDA. Dans le cadre de l’« Agenda 2010 », Schroeder a lancé un audacieux chantier : outre l’impopulaire réforme du marché du travail qui réduira les allocations aux chômeurs de longue durée, il a lancé des réformes sur les retraites et l’assurance-maladie.
Elles visent entre autres à alléger le fardeau de l’Etat, à supprimer certaines rentes de situation, à cibler le versement d’allocations pour les rendre plus efficaces et sont accompagnées de mesures visant à relancer l’innovation et la formation des Allemands.
Le chancelier ne cesse de répéter que les fruits de ces changements, aujourd’hui perçus comme des sacrifices douloureux, seront visibles dans quelques années, et qu’il maintiendra d’ici là le cap, en dépit de leur impopularité à deux ans des élections législatives de 2006.
Un exemple montre le coût de l’ancien système social et l’impact profond des réformes, qui ont été votées par l’opposition conservatrice : un chômeur, après 18 mois sans emploi, pouvait toucher jusqu’à 80% de son ancien salaire. Cela ne sera plus possible dès janvier prochain : après un an sans emploi, un chômeur ne touchera plus que l’aide sociale, soit une nette réduction de revenu, mal véçue à l’est où les perspectives d’emploi sont parfois quasi nulles.
Au même moment, de grandes entreprises demandent des sacrifices, utilisant la menace de suppressions d’emplois ou celle des délocalisations, notamment en Europe de l’Est, pour obtenir un allongement du temps de travail et la réduction des coûts salariaux.
Siemens a ainsi imposé en juin sur deux de ses sites le retour à la semaine de 40 heures contre 35 jusqu’alors, sans compensation salariale, en échange de l’abandon d’un projet de délocalisation en Hongrie.
Volkswagen veut imposer une sévère cure d’austérité, accroître la flexibilité du temps de travail, davantage lier les salaires aux performances de l’entreprise. Avant les négociations salariales à l’automne, la direction de VW propose aux salariés un gel des salaires pendant deux ans, comme première contribution à un projet de réduction des coûts de personnel de 30% d’ici à 2011.
En juillet, un autre constructeur automobile allemand, Mercedes, avait imposé un plan d’économies en échange de garanties d’emplois. Selon une étude présentée lundi par l’Office fédéral des statistiques, face à ces changements, beaucoup d’Allemands réagissent par l’amertume et le manque de confiance dans l’avenir. Surtout les jeunes s’inquiètent de l’évolution d’un système social jusqu’alors favorable.
Un Allemand de l’Est sur deux pense même que la forme actuelle de l’Etat allemand n’est pas la meilleure et 76% d’entre eux estiment que le socialisme est une bonne idée qui a été mal appliquée
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