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L’Etat hébreu envoie des délégués pour encourager les démarches des candidats au départ.
Publie le mardi 15 juin 2004 par Open-PublishingPar Catherine COROLLER
Ça n’est pas encore l’opération Salomon qui a vu, en 1991, l’évacuation des juifs d’Ethiopie vers Israël, mais ça s’en inspire un peu. Hier, Menahem Gourary, le directeur de l’Agence juive (AJ) en France et en Europe, nous a confirmé que le gouvernement israélien et l’institution qu’il dirige avaient mis au point un plan « afin de faciliter les démarches des juifs de France qui ont fait le choix de monter en Israël ». Ce plan a été élaboré au cours d’une réunion organisée le jeudi 10 juin à Jérusalem en présence, notamment, de la ministre israélienne de l’Intégration, Tzipi Livné. « Vu le potentiel des juifs de France qui veulent aller vivre en Israël (30 000 selon un sondage réalisé par l’Agence juive, ndlr), nous avons décidé de nous décentraliser, explique Menahem Gourary. Au lieu de demander aux gens de venir dans nos bureaux à Paris, nous allons vers eux. Nous avons fait venir d’Israël des délégués pour renseigner ces personnes, et nous avons ouvert depuis avril, et jusqu’à juillet, des permanences à Sarcelles, Créteil, dans le XXe arrondissement de Paris, à Lyon et à Marseille. Il s’agit pour nous d’une période propice. La plupart des gens qui montent en Israël le font pendant l’été. »
Le 13 juin, le quotidien israélien Maariv avait révélé cette information en la gonflant un peu. Et celle-ci avait été relayée (et traduite en français) par le journal en ligne Proche-Orient info sur son site Internet : « des centaines d’émissaires de l’Agence juive vont prendre d’assaut les quartiers de Paris, les banlieues et les grandes villes de France. Parallèlement, le gouvernement israélien entreprendra des démarches officielles en vue d’augmenter les aides en faveur de ces futurs "nouveaux immigrants" de France. [...]Tout commencera à Sarcelles : ces émissaires feront du porte-à-porte grâce à des listes de membres de la communauté juive préparées à l’avance », détaille Maariv. Ensuite, « les émissaires de l’Agence juive se déploieront à Paris et sur les grandes villes de France ». En Israël, les immigrants français seront installés dans la région du Sharon, au nord de Tel-Aviv. Les maires des communes concernées se regroupant en une « force de frappe » d’intégration pour faciliter leur acclimatation.
« Maariv a exagéré, poussé à l’extrême, il ne s’agit en aucun cas d’une opération commando », nous précisait hier soir, sans démentir l’information, Menahem Gourary. Roger Cukierman, le président du Crif, a en tout cas pris la nouvelle au sérieux. Interrogé par Maariv, il s’est surtout scandalisé de ce qu’« Israël passe au-dessus de notre tête, au-dessus du leadership de la communauté ». Ajoutant toutefois que « le gouvernement français fait tout son possible pour vaincre l’antisémitisme avec notre concours ». « Ce n’est pas le moment de provoquer une crise avec les institutions françaises », a-t-il conclu. Du côté des autres leaders de la communauté juive organisée, le plan israélien est diversement apprécié : « Ce gouvernement a l’espoir de faire venir un maximum de juifs français en Israël, il l’exprime de façon plus ou moins subtile », commente Richard Prasquier, membre du comité exécutif du Crif. Mais sur le fond, pas de contestation : « Les juifs sont affolés, continue-t-il. Il y a actuellement d’immenses inquiétudes dans les zones géographiques de France où des actes antisémites ont été commis. Lorsque nous parlons avec les gens qui vivent dans ces endroits-là, nous entendons toujours le même son de cloche : "mes enfants ne sont plus en sécurité dans ce pays". » Et si ce responsable communautaire juge que le gouvernement a pris conscience du problème, il estime en revanche que la montée de l’antisémitisme « n’a pas été prise en compte par certaines composantes de la société civile ». Pour lui, « beaucoup d’enseignants sont en retard ». Quant à Dominique Strauss-Kahn, ancien maire de Sarcelles et député du Val-d’Oise, il se serait borné à déclarer, toujours à Maariv, qu’il ne connaissait pas la teneur de cette initiative et qu’il s’agit en tout état de cause « d’une décision d’un gouvernement étranger ».