Accueil > L’Italie à Rangoon, du bois, des pierre précieuses et des moteurs

L’Italie à Rangoon, du bois, des pierre précieuses et des moteurs

Publie le dimanche 7 octobre 2007 par Open-Publishing

Dossier de la CISL sur les entreprises italiennes en affaire avec la junte : de Bulgari à Foppapedretti, en passant par Avio
L’Italie à Rangoon, du bois, des pierre précieuses et des moteurs

de JUNKO TERAO traduit de l’italien par Karl&rosa

Avec la junte militaire birmane on fait de bonnes affaires : le business italien avec le gouvernement qui depuis deux semaines réprime d’une main de fer les manifestations pro démocratie amorcées par des moines bouddhistes atteint cette année presque 121 millions d’euros. C’est la CISL qui le révèle, ayant livré hier les noms et les prénoms des Italiens qui font du commerce avec le régime de Rangoon.

Et en soirée, toujours hier, les premiers effets se sont fait sentir : le ministre des Affaires étrangères a convoqué la semaine prochaine toutes les entreprises, 360 environ, contenues dans la liste.

La liste des entreprises italiennes grandes et petites qui font des affaires avec Rangoon, qui cette année ont importé de Birmanie surtout du bois, des confections et des pierres précieuses pour 59 592 916 euros, est longue. Parmi les noms excellents, des fleurons du luxe comme Bulgari, qui a importé cette année des pierres précieuses pour environ 386 000 euros. Van Cleef & Arpels, leader français du secteur pierre précieuses – dont une division s’avère être en Italie – publie sur son site web un code éthique de tout respect, déclarant entre autre que « l’entreprise croit aux droits humains fondamentaux et à la dignité des individus conformément aux déclarations des Nations Unies et s’engage à les respecter ». La junte birmane, qui se fiche des droits humains, a empoché cette année 4,8 millions d’euros de Van Cleef & Arpels, une somme qui fait gagner à l’entreprise la deuxième place dans la liste des importateurs.

Mais de la Birmanie n’arrivent pas que les biens de luxe. C’est le précieux tek birman qui se taille la part du lion parmi les importations. Des dizaines d’entreprises achètent ce bois costaud, typique du Sud-est asiatique, pour fabriquer des meubles, du parquet et des objets pour l’intérieur qu’on peut même acheter à des prix raisonnables dans les magasins de la grande distribution. Oviesse et Auchan sont les autres noms qui sautent aux yeux en parcourant la liste. Le Groupe Coin, propriétaire d’Oviesse, lie son code de comportement à la Déclaration des droits de l’enfant, à la déclaration des droits humains et à la convention Ilo (Organisation internationale du Travail), déclarant respecter les valeurs éthiques et sociales.

Mais il y a quelque chose qui cloche, puisque la CISL [l’une des trois grandes centrales syndicales italiennes, NdT] dénonce justement le non respect de la convention Ilo de 2000, qui demande « de cesser n’importe quel rapport pouvant entraîner un effet direct ou indirect d’aide ou de connivence avec le travail forcé ». Il y en a ensuite qui, comme Foppapedretti et Margaritelli, moins connue, se targuent de certifications pour la traçabilité de produits provenant de ressources compatibles avec l’environnement. Autrement dit, ils garantissent que leur bois vient de forêts gérées d’une façon correcte et responsable selon des standards environnementaux, sociaux et économiques rigoureux : il n’est pas donné de savoir comment la Birmanie pourrait respecter ces standards.

En Birmanie, on ne fait pas qu’acheter : le chiffre d’affaires des exportations atteint environ 60 millions d’euros. Parmi les entreprises figure Avio Spazio Difesa [Avio Espace Défense, NdT] qui, avec Avio Spa, a facturé cette année environ 1 400 000 euros. Leader dans la propulsion aérospatiale, comme l’affirme son site Internet, Avio est spécialisée dans la production de moteurs et de composants militaires et se targue, entre autre, de la collaboration avec nos forces armées.

Dans le dossier de la CISL, ce que Avio vend exactement aux généraux birmans n’est pas indiqué. « Les entreprises italiennes ne peuvent pas avoir de sang sur les mains en gardant des relations avec la junte militaire actuelle, ayant sous sa botte un peuple tout entier, vexé, torturé et tué » : le secrétaire de la CISL Raffaele Bonanni s’est adressé ainsi hier à l’assemblée régionale de la Vénétie à Padoue, en montrant du doigt les entreprises de la liste incriminée. En vue des possibles activités économiques avec une future démocratie birmane, Bonanni a aussi invité les entrepreneurs italiens à éviter de garder des rapports avec le régime actuel.

Une admonestation aussi dans un autre secteur concerné, celui du tourisme. En effet, plusieurs tours opérateurs organisent des voyages dans ce pays du Sud-est asiatique. Le débat sur la question s’il est plus ou moins juste de visiter le pays en étant conscient que les recettes du tourisme se retrouvent dans les poches des généraux est rapporté aussi dans les grands guides touristiques. Mais jusqu’ici les Italiens ayant choisi la Birmanie comme but de leurs vacances, environ 20 000 chaque année, ont pu choisir parmi des tours organisés par les plus connus : Francorosso, Viaggidea, Viaggi del Mappamondo, Rallo Luxury Travel, Gastaldi, Hotelplan, Tucano viaggi.

Et justement hier soir, à la veille de la conférence de Bonanni, les opérateurs adhérant au groupes Astoi et Fiavet on déclaré la suspension des voyages dans l’attente des suites de la situation.

http://www.ilmanifesto.it/Quotidian...