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LA LIBERTE D’INFORMATION NE SE POURSUIT PAS EN JUSTICE
Publie le mercredi 3 octobre 2007 par Open-Publishingde Enrico Campofreda traduit de l’italien par karl&rosa
C’est l’histoire de Roberto Ferrario et du site web parisien www.bellaciao.org . C’est une histoire de notre époque, marquée par cette enclave de la libre information qu’est devenu le réseau sur lequel passent des nouvelles que tant de médias – publics ou privés – évitent de diffuser. La force alternative des nouvelles sur la toile s’est vu confirmée en ces jours de révolte des moines et du peuple birman contre la dernière odieuse dictature militaire de ce pays.
Quand un journaliste japonais est tombé sous les rafales de mitraillettes d’un militaire et que les images télévisées qui, aux premiers jours de la révolte, avaient rendu compte de la brutalité des interventions de l’armée, ont été censurées, Internet est resté le seul rempart de communication avec le monde. Comme cela s’était passé à l’époque pour le cas Fallujah dévoilant les à côtés de la sale guerre de Bush, faite de mensonges et d’armes plus odieuses que les armes conventionnelles. Nouvelles qui n’apparurent pas à la télévision.
Il y a deux ans sur le site de Bellaciao apparut l’appel lancé par la Cgt qui dénonçait de très graves épisodes rapportés par des ouvriers polonais des chantiers navals de Saint-Nazaire : sur ce site étaient perpétrés des actes mafieux et menaçants pour les salariés. Les ouvriers lésés en témoignaient, le syndicat le dénonçait. Le site parisien, conscient de son rôle d’information, recueille la nouvelle en la publiant et en la divulguant sur le web.
Les patrons des chantiers, enivrés par l’air à la Dickens réintroduit depuis quelques années par la globalisation et le turbocapitalisme, pensent que de telles dénonciations ne doivent pas être diffusées. La vérité a toujours déplu au Capital. Et alors, ils attaquent et au lieu de rétorquer avec des arguments ils provoquent avec des plaintes. Pour diffamation, en opposant à des nouvelles, avocats et papier timbré. L’assaut est d’autant plus traître qu’il est lancé contre un site tenu par un groupe de personnes engagées dans l’information libre et autogérée sans couverture éditoriale, et puis personnellement contre Roberto Ferrario.
D’un côté on cherche un bouc émissaire à qui faire payer personnellement, de l’autre on veut frapper un moyen efficace de dribbler les filtres de tant d’information contrôlée et asservie, pour humilier surtout l’engagement de ceux qui n’exposent pas en vitrine des nouvelles vaines et droguées mais qui donnent voix aux problèmes et aux contradictions réels et appellent par leur nom les responsables de comportements économiques, sociaux et politiques de véritable banditisme.
La tentative se révèle immédiatement être un boomerang pour les chantiers navals de Saint-Nazaire, Ferrario et Bellaciao reçoivent pendant des mois le soutien et la solidarité de journalistes, de structures politiques et syndicales, de personnalités du monde du spectacle et de milliers de travailleurs, de démocrates, de militants. La pétition en leur faveur recueille plus de 25 000 signatures, deux avocats illustres – André Tinière et William Bourdon – prennent la défense du site et de Ferrario. Selon ce qui a été prononcé récemment par le Procureur de la République Jean-Marie Blin, il n’y avait pas de motif pour continuer le procès ; ce soir [hier soir, Ndt], la cour a accepté cette ligne en acquittant les accusés.
Les démocrates du web ont le sourire.