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LA PLUS ETRANGE DES CREATURES

Publie le lundi 21 août 2006 par Open-Publishing
5 commentaires

Comme le scorpion, mon frère,
Tu es comme le scorpion
Dans une nuit d’épouvante.
Comme le moineau, mon frère,
Tu es comme le moineau,
dans ses menues inquiétudes.
Comme la moule, mon frère,
tu es comme la moule
enfermée et tranquille.
Tu es terrifiant, mon frère,
comme la bouche d’un volcan éteint.
Et tu n’est pas un, hélas,
tu n’es pas cinq,
tu es des millions.
Tu es comme le mouton, mon frère,
quand le bourreau habillé de ta peau
quand l’équarisseur lève son bâton
tu te hâtes de rentrer dans le troupeau
et tu vas à l’abattoir en courant, presque fier.
Tu es la plus étrange des créatures, en somme,
Plus drôle que le poisson
qui vit dans la mer sans savoir la mer.
Et s’il y a tant de misère sur terre
c’est grâce à toi, mon frère,
Si nous sommes affamés, épuisés,
Si nous sommes écorchés jusqu’au sang,
Pressés comme la grappe pour donner notre vin,
Irai-je jusqu’à dire que c’est de ta faute, non,
Mais tu y es pour beaucoup, mon frère.
 
Ecrit en 1947
par Nâzim HIKMET, Poète communiste turc,
et publié en recueil (423 pages) chez NRF par Poésie/Gallimard
sous le titre "Il neige dans la nuit et autres poèmes".

Messages

  • Cher NOSE,

    En prose ou en vers, en rime ou sans rime, tout celà est si vrai que l’on devinerait où se trouvent les retours à la ligne.

    Esteban

  • Cher NOSE,

    En prose ou en vers, en rime ou sans rime, tout celà est si vrai.

    Esteban

    • je ne connaissais pas ce poeme , c’est beau tant c’est simple ou simple tant c’est beau , au debut j’ai eu peur , je croyais qu’il parlait de nous (toi et moi ) aprés j’ai vu qu’ils parlait de nous tous .je n’ai pas été rassuré pour autant , mais c’est si vrai , si pur , si limpide , que je n’ai plus pensé qu’aux mots .
      merci pour ce poeme ami Nose ,
      Amitié a toi el andalous
      claude de T.

  • Oui, oui, vraiment très beau, cher Nose. Sauf erreur, je crois que ce poème a été dit en son temps par Yves Montand (avant que ce dernier ne sombre dans la cohorte des êtres gris).

    Une chose m’aurait fait plaisir, c’est que tu le mettes à la suite de mon petit billet sur LA FIN DE L’ÉTÉ. Si tu veux bien, je vais le mettre en commentaire sur mon blog ?

    Le Yéti

    PS : merci beaucoup également à Tzigane qui nous a mis le poème à l’oreille.

    • EXACT !

      Exact, Yéti, ce poème a été "mis en musique" par Yves Montand...
      Une très belle interprétation d’ailleurs... très touchante.
      À vous, Estéban, Claude, Yéti et Tzigane, et à tous ceux qui se battent pour que l’humanité soit plus humaine,

      avec toute ma fraternité, à ciao bonsoir !

      NOSE