Accueil > LE 19 AOUT 1893

LE 19 AOUT 1893

par Histoire

Publie le mardi 19 août 2014 par Histoire - Open-Publishing
1 commentaire

Il y a un siècle, les Ritals … Mohammed s’appelait alors Giovanni. Les transalpins sont d’abord venus pour échapper à la pauvreté et trouver du travail, avant d’être rejoints par une génération qui fuyait le fascisme. Il faut cependant admettre que l’émigration n’aurait pas pu prendre une telle ampleur si le pays d’accueil n’avait pas été demandeur …

La spécialité professionnelle des travailleurs italiens du début du siècle était justement de n’en avoir aucune, ce qui leur permettait d’intervenir dans tout type d’activité manuelle. Ils devenaient terrassiers, dockers, manœuvres, saisonniers agricoles ou métallurgistes dans les chantiers navals.

L’accueil des Français fut inégal : d’abord indifférent, il devint hostile dans un contexte de crise et de nationalisme exacerbé par le boulangisme après la défaite de 1871. La violence xénophobe finit par s’exprimer par des émeutes anti-italiennes en 1881 à Marseille et en 1894 à Lyon (après l’assassinat du président Carnot par un anarchiste italien, Caserio) ; elle culmina à Aigues-Mortes en 1893.

A la fin du dix-neuvième siècle, la récolte des sels dans les salines de Peccais était l’occasion pour plusieurs centaines de personnes, travailleurs itinérants, de venir au mois d’août grossir la population d’Aigues-Mortes… Les « trimards » français et italiens acceptaient ainsi un travail harassant en raison des salaires pratiqués.

La récolte de 1893 tourna au drame en se transformant en véritable « ritalade », conséquence de la Grande Dépression des années 1875, et des fantasmes relatifs à la préférence nationale ou à la protection du travail national (termes déjà employés à l’époque !) Les bilans firent état d’un nombre de morts italiens compris entre 8 et plus de 50.

Il est difficile et sans réel intérêt de définir précisément l’origine du massacre ; les tensions dans ce genre de chantier étaient courantes depuis de nombreuses années et les renforts de gendarmerie très prisés par la population locale. Cet évènement permit à la presse locale de s’exprimer dans un véritable festival de propos nationalistes et de mauvaise foi xénophobe.

Alors que la population hexagonale n’assurait plus son propre renouvellement, que les bras manquaient (les couples français réduisaient la natalité par la contraception naturelle), l’appel à l’immigration apparut comme une nécessité vitale. Celle-ci assura entre 1918 et 1939 l’essentiel de l’accroissement démographique en France.

Le développement de ces propos est intéressant par l’analogie évidente qui apparaît entre deux climats « fin de siècle ». On s’aperçoit que les vagues de xénophobie sont toujours liées à une crise économique ou politique, et non au dépassement d’un quelconque « seuil de tolérance ».

En 1897 déjà, il valait mieux être né au bon endroit pour prétendre profiter sereinement de la Promenade des Anglais. Cette année-là, la municipalité ouvertement italophobe (elle venait d’être réélue sur le slogan « Nice aux niçois ») décida de ne pas renouveler le permis de travail de cent cochers transalpins …

http://2ccr.unblog.fr/2014/08/19/le-19-aout-1893/

Messages

  • (les couples français réduisaient la natalité par la contraception naturelle)

    Exact , conséquence du remplacement du droit d’aînesse dans l’héritage par l’égalité (code Napoléon) qui conduit à la division des propriétés foncières et immobilières. La France perd sur ce coup le leader chip démographique en Europe....