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"La CGT n’a-t-elle pas fait un pari un peu audacieux ?"

Publie le mercredi 4 août 2004 par Open-Publishing
4 commentaires

Malaise à Vergèze où l’usine Perrier est menacée de vente après le veto du syndicat.

de Mathieu DESLANDES

Vergèze (Gard)

« Bienvenue sur ce site de 75 hectares où sont produites 3,5 millions de bouteilles par jour. C’est considérable, car Perrier exporte 45 % de sa production dans 130 pays. Déjà, au début du siècle dernier, on buvait du Perrier dans toutes les colonies britanniques... » Hier matin, à la visite de 10 heures, des touristes venus de Haute-Savoie, Orange, Lyon ou Manchester assistaient au « spectacle industriel grandeur nature » évoquant la fabuleuse épopée de la maison Perrier. Le guide loue les prouesses techniques, vante « la verrerie intégrée u-nique-au-monde », conte les recherches menées, il y a un siècle, par le docteur Louis Perrier et, devant la source, réclame théâtralement le silence pour écouter le bouillonnement de l’eau qui remonte à la surface. Un discours lénifiant qui a du mal à dissimuler une atmosphère tendue. Inutile de songer à s’éloigner du minibus. Au moindre pas de côté, des vigiles accourent.

Chantage. Une heure plus tard, le guide conclut la visite en apothéose : « ...Et nous appartenons maintenant au grand groupe Nestlé. » Puis lance : « Des questions ? » Pas à ce sujet. Pourtant, les visiteurs ne peuvent pas ne pas avoir vu les inscriptions à la peinture blanche qui, sur la route, jalonnent l’arrivée à l’usine : « Nestlé tue l’emploi », « Nestlé = chômage ».

Dans le local du comité d’entreprise (CE), élus et délégués CGT se sont réunis autour de la cafetière. Régine, Momo, Laurent, Christian et les autres tentent d’imaginer leur avenir. « On ne sait qu’une chose : la direction est capable de tout. Mais on imagine mal qu’ils nous vendent à un concurrent, que ce soit Danone ou Coca... » Sur tous ces visages syndicaux, la belle assurance affichée par la CGT depuis octobre, durant ces mois où elle dénonçait le chantage de Nestlé, semble se lézarder. Le doute s’est installé. Mais pour l’instant, personne ne veut remettre en cause publiquement la stratégie adoptée, ni le coup de poker de jeudi. La CGT avait alors choisi d’exercer son droit d’opposition au plan de suppression de 1 047 emplois sur les 4 100 salariés que compte Nestlé Waters France (Vittel, Contrex et Perrier). Ce projet de réduction d’effectifs, signé par la CFDT et la CFE-CGC, prévoyait le départ en préretraite des salariés âgés de plus de 55 ans d’ici avril 2007. A Vergèze, 356 emplois (sur 1 650 que compte l’usine de Perrier) devaient disparaître. Le lendemain, en guise de représailles, la direction de Nestlé annonce qu’elle renonce à son plan et qu’elle envisage maintenant de vendre Perrier.

« Pendant deux mois on a été en grève tournante, tonne Régine Jalbert, élue au CE. Les salariés n’auraient pas compris que l’on ne s’oppose pas ! » Ne sont-ils pas allés trop loin ? « On n’avait pas d’autre solution. Ne pas dénoncer, c’était offrir un chèque en blanc à Nestlé ! » Jean-Paul Franc, le délégué syndical central, confesse pourtant avoir « beaucoup hésité » avant de se décider à utiliser le droit d’opposition. « Nous voulions organiser une consultation des salariés à la rentrée de septembre. Mais après la dernière négociation, la direction ne nous a donné que huit jours pour nous décider. Trop court pour consulter tout le monde. » Il se demande aujourd’hui si « tout n’était pas écrit d’avance ». « Evidemment, maintenant, si ça tourne mal, on nous en fera porter la responsabilité. La direction ne voulait-elle pas en arriver là pour casser la CGT ? On se pose sérieusement la question. » Nestlé ne répondra pas à l’insinuation : la direction a décidé de garder le silence jusqu’en septembre. Mais l’hypothèse n’est pas dénuée de tout fondement. « Les dirigeants de Nestlé sont excédés par la CGT », dit-on en ville. Car le syndicat, ici, est tout puissant. 83 % des voix aux dernières élections professionnelles sur le site de Perrier ! Et un tiers des salariés est syndiqué.

Omerta. « Les gens ne parlent pas volontiers mais ils sont très inquiets, estime Jacques Biau, élu CGC au comité d’entreprise. Ils ont le sentiment que ce qui va arriver sera beaucoup plus grave que ce qui aurait pu se passer. Seulement, personne ne vous le dira car, ici, la CGT est trop forte pour qu’on puisse la contester. Il y a un peu d’omerta. » A l’abri des regards, quelques salariés âgés osent néanmoins confier leur déception : « Un départ à la retraite à 55 ans, on n’aurait pas craché dessus... », avoue l’un d’entre eux.

Héritage. Mêmes circonvolutions dans la bouche de René Balana, le maire de Vergèze : « Je me demande si la CGT n’a pas fait un pari un peu audacieux. Evidemment, elle agit dans le bon sens en défendant l’emploi. Mais c’est quand même un gros coup de poker... » Jean-Paul Franc dit comprendre ces réactions. « Mais on ne pouvait pas céder si la direction n’acceptait pas au moins 100 embauches en compensation des 356 départs à Perrier. Et puis nous ne pouvons pas trahir l’héritage des luttes passées. » Comme cette bataille judiciaire contre le propriétaire précédent, Gustave Leven, à l’issue de laquelle la CGT avait notamment obtenu que l’entreprise assume, en plus de la subvention allouée au CE, les salaires de la cafétéria et de la supérette maison. « Tout ça, on l’a obtenu de haute lutte, après plusieurs grèves dans les années 60-70, ajoute-t-il. Alors on y tient. » A la mairie, René Balana tente de se rassurer comme il peut : « On n’a jamais vu une multinationale délocaliser une source, non ? »

http://www.liberation.fr/page.php?Article=228300

Messages

  • voilà bien Le Journaliste dans toute sa splendeur ! Ca rabache des lieux communs !
    Un pari audacieux !
    Les joueurs en bourse c’est pas les salariés CGT !
    C’est nestlé, qui je le rappelle a déjà une histoire jalonnée par les scandales - le lait en afrique - et le parc d’eau de São Lourenço - brésil- qui a plusieurs sources minérales !
    Vous vous rappelez de cette histoire d’ô ! Non. Mais si, ils pompaient pompaient et asséchaient...
    Je vous invite a taquiner de votre moteur de recherche !

    Le groupe nestlé nage en eau trouble ! Ca c’est sur !

    Alors qui aujourd’hui dans la presse NATIONALE (pffffff !!!!!) s’interroge, enquête...de l’impact de la politique de nestlé sur l’environnement local humain : les familles, les sous traitant...

    Les journaleux de GOCHE ( laisser moi rire) ils cautionnent des scénarios a l’entreprise BOSCH !

    Je rappelle que NESTLE, LE GROS TUBE A FRIC , il S’en fiche . Lui ce qu’il veut c’est faire du pognon envers et contre tout !

    Alors la vraie question cela doit être - Quelle démocratie face aux marchés boursiers ?

    L’ensemble des salariés CGT ( 87 %) a dit NON démocratiquement, et cela sans se placer au dessus des Lois de la République !

    Les Salariés avec l’appui d’un ELU - le MAIRE - ont dit NON à la dictature des profits au détriment des hommes et du développement !

    Alors pour NESTLE s’en est trop ! TROP DE DEMOCRATIE ! : "JE M’ENFICHE DE LA DEMOCRATIE ! MOI JE VEUX FAIRE DU POGNON, même s’il faut que je passe en force ! J’ai plein de bénéficie et je vous vois plus !"

    Que devons nous faire, nous aujourd’hui nous tous, pour stopper cette spirale infernale et avancer dans le sens d’un VRAI progrès, ou l’Homme pourra protéger et développer le bien commun !

    Quant à LIBE, vraiment ... Cela ne devient plus possible !

    • Ah ! Tirer sur Libé pour enfin se sentir de gauche... La belle posture ! Le titre de cet article reprend une question que se pose le maire, qui a peur que de ce bras de fer entre Nestlé et la CGT, le dénouement soit pire que ce que proposait la multinationale. Il ne s’agit pas de lieux communs. Mais du destin de tous ces salariés. Pour l’honnêteté intellectuelle, il faudra repasser.

    • c’est ça ; le dénouement du pire ! Ceder aux chantages ! Voilà le dénouement , le pire !
      y’a aucune originalité dans cette article ! je le réaffirme !
      Que des lieux communs, Libé défend une politique "d’accompagnement" du libéralisme, et ne veut a aucun moment parler des doutes qui viennent du chantage des entreprises et non de la décision des salariés de l’entreprise représentés par la CGT ! C’est ça qui est de sortir des lieux communs ! et donc ne posent pas les vraies questions !
      Quand a mon honneteté , je ne vois pourquoi tu la remets en question ?
      Le destin des salariés ! Comme si je n’y pensais pas ! Je pense aux salariés , a leurs familles et aux emplois de leurs enfants !
      Nous salariés devons nous céder à tous les chantages, aux chantages des groupes qui font enormément de profits !
      Et je le repete, quelle démocratie pouvons nous construire nous les salariés face à l’horreur des groupes et marchés financiers !
      Cet été c’est l’horreur des milliers de salariés ont vu leurs entreprises fermées - et je sais de quoi je parle j’étais sur le terrain pour une d’entre elles et t’en fait pas les salariés et moi on dialogue !,
      Doit on accepter le chantage pour imposer des conditions de travail qui nous font tous regresser, au nom de l’Economie mondialisée de M---E !
      Je rappellerais ici que pendant la guerre 39-45 les patrons se sont vautrés dans le CAPITAL Nazis. La famille Seillères était largement mouillée dans ce buisness honteux ! Et a la sortie de la guerre, alors que la pauvreté était partout, on a pu grace au CNR mettre en place de nombreux acquis sociaux ! Les libéraux ne l’ont jamais acceptés ! il est hors de question de laisser sur la route un nombre croissant de personne, les mettre en concurrence pour satisfaire ces messieurs riches à milliard !
      Monsieur / Madame qui me parle de se sentir de Gauche , tu dis n’importe quoi, je suis profondément anti libérale, je ne veux pas de politique d’accompagnement de la destruction du bien commun !
      Que des personnes traversent des doutes, cela est normal puisqu’on ne donne pas aux citoyens des moyens léguax pour agir sur les requins de la finance ! y’a basta ! ça suffit !
      Tous les jours des gens doivent vivre avec moins de 400 euros au nom de la libéralisation économique, c’est un scandal ! 1 million d’enfants pauvres en france, et pendant ce temps la les entreprises du cac 40 font de gros bénéfices ! la crise du logement et les prix des loyers font que un SDF sur 3 travaille, de nombreux salariés ne peuvent que survivre grace a leur travail ! Et n’oublions pas les femmes dans tout ça !
      Cette année et l’année dernière avec les Retraites, on a vu où nous ont amené la politique d’accompagnement des orientations libérales : les recalculés, les chomeurs , presqu’un million ont été précipité dans la misère - bravo la CFDT ! le Même syndicat qui défend les salariés de l’entrepise BOSCH ! L’horreur elle est là ! - plus que jamais la RESISTANCE et la construction de proposition alternative est nécessaire, le rassemblement à gauche est nécessaire ! NON a la politique d’accompagnement du libéralisme, ces choix ravagent des familles entières ! Quant a Libé, faudrait que ce journal se donne plus d’esprit critique et d’indépendance d’esprit !
      Au fait un peu d’espoir les Marches du Lundi en allemagne, pour virer schroeder et son plan de reforme HARTZ IV ; une honte cette réforme - qui dans bien des points va nous arriver sur le coin de la figure ( gauche et droite, mais qu’est ce qui se passe, c’est dangereux, on va glisser sur les pentes de la violence, quand les idéaux du socialisme sont détruits comme ça par ces soit disant représentants ! ), et ça c’est européen !
      La question : qui se sacrifie aujourd’hui ? Qui ? Toujours les memes ! y’en a assez ! On culpabilise les chomeurs, les malades, les vieux, tu parles d’une société , la fabrication médiatique de l’opinion nous fait doucement glisser vers l’acceptation de la barbarie ! Faut dire NON, faut construire la SOLIDARITE pour un vrai progrès social ! RESISTANCE ! Se sentir de gauche...vraiment, n’importe quoi ! et toi tu sens quoi ! non mais je te jure !

    • Je suis entièrement d’accord avec ton coup de gueule.

      Ni Libé, ni la CFDT ne peuvent plus se dire de gauche, ils ne luttent plus, ils accompagnent les plans sociaux et la CFDT signe n’importe quoi, sous prétexte de sauver des emplois. En fait rien du tout. C’est une politique à très courte vue, dans 1 an, dans 2 ans, les postes "sauvés" seront supprimés.

      La paupérisation va bon train. Dans la mission locale où je travaille, on voit actuellement arriver des jeunes, moins de 25 ans, sans boulot, sans RMI, donc revenus = 0,00 €. D’où des demandes d’aide financière d’urgence pour eux, simplement pour qu’ils puissent manger pendant quelques jours. Pourtant, les parents ont l’obligation légale de les aider. Oui, mais voilà, les parents sont déjà au chômage, surendettés... et, crève coeur, ne peuvent rien pour aider leurs enfants. J’en ai vu un qui avait reçu un avis d’expulsion pour un impayé de loyer de 5,70 € !!!!!!!!

      On va accepter encore longtemps, cette situation ?

      L’honnêteté est bien le fait de regarder cette situation en face et agir, résister.

      Bien à toi et à tous ceux qui luttent

      Caro