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La Cimade dénonce l’inefficacité des centres de rétention

Publie le vendredi 30 octobre 2009 par Open-Publishing

de MAXIME AMIOT

L’association a présenté hier son rapport annuel sur l’activité des centres de rétention. Outre une critique des conditions de placement, l’association a pointé le coût "élevé" des procédures de reconduite à la frontière.

Le "poids budgétaire" des politiques d’éloignement des immigrés en situation irrégulière est "très élevé" et "extrêmement opaque". A l’occasion de la remise de son rapport annuel sur l’activité des centres de rétention en 2008, la Cimade a expérimenté un nouvel angle d’attaque contre "la politique du chiffre" en matière d’expulsions qu’elle dénonce de longue date.

Les 23 centres existant en France servent à regrouper les étrangers en situation irrégulière avant leur reconduite à la frontière. La Cimade est, pour l’heure, la seule association habilitée par l’Etat à se rendre dans ces établissements, afin d’y assurer une mission d’accompagnement juridique et social des personnes retenues. En 2008, quelque 32.284 étrangers, représentant 163 nationalités, ont été placés dans ces centres, pour une durée moyenne de 10,47 jours.

La Cimade s’est penchée cette année sur l’efficacité même des procédures de rétention, s’appuyant sur plusieurs rapports et audit. Un rapport du Sénat remis en 2008 montrait que 58,3 % des étrangers placés en centre n’étaient finalement pas expulsés, soit que la justice les remette en liberté, soit que leur consulat refuse de délivrer le laissez-passer permettant le rapatriement dans leur pays d’origine. « Les centres ne remplissent même pas leur mission », raille Damien Nantes, chargé du dossier au sein de l’association. En juin dernier, un rapport de la Cour des comptes pointait de son côté « d’importantes lacunes dans le suivi des coûts »des centres de rétention. A la lumière de ces deux écrits, la Cimade a chiffré hier à 533 millions d’euros le coût de la politique globale de reconduite aux frontières, soit 27.000 par expulsion. Un budget que le ministère de l’Immigration a immédiatement contesté,
affirmant que le « coût global de la politique d’éloignement peut être estimé de 232 millions d’euros », soit un montant de 12.000 euros par reconduite.
Pressions

Au-delà des chiffres, l’association a mis en cause les conditions de placement en rétention. Elle pointe notamment des « pressions » exercées par le ministère sur l’administration (policiers, fonctionnaires des préfectures…) pour interpeller les clandestins et remplir ainsi les objectifs d’expulsion fixés par le gouvernement. « Pour faire du chiffre, on n’hésite plus à renvoyer des gens installés en France depuis des années, à expulser les malades, voire à utiliser les moyens de délation », relève Damien Nantes, responsable du dossier à la Cimade. Egalement, le placement d’enfants - 222 ont séjourné dans les centres en 2008 - est dénoncé par l’association.

Ces nouvelles passes d’armes rappelle l’enjeu qui règne autour de la gestion des centres. Depuis 2008, le gouvernement souhaite mettre fin au « monopole » de la Cimade, permettant à six autres associations (Secours Catholique, France Terre d’Asile…) d’intervenir dans les centres. Pour la Cimade, cette perspective est avant tout un moyen de « diviser l’action des associations » , et « amoindrir ainsi leur parole » . Après plusieurs rebondissements, le litige doit être tranché dans les prochains jours par le Conseil d’Etat.

http://www.lesechos.fr/journal20091030/lec1_france/020195789330-la-cimade-denonce-l-inefficacite-des-centres-de-retention.htm