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La contestation refuse de battre en retraite

Publie le vendredi 24 septembre 2010 par Open-Publishing
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de LUC PEILLON

Equivalente à la journée d’action du 7 septembre, la mobilisation d’hier pourrait obliger le gouvernement à des aménagements, sans remettre en cause les fondamentaux de la réforme.

Il y a décidément deux façons - inconciliables - de compter les manifestants dans ce pays. A l’issue de la nouvelle journée d’action organisée hier contre la réforme des retraites, syndicats et gouvernement ont dressé un bilan assez opposé de la mobilisation. En forte hausse par rapport au 7 septembre pour la CGT (+ 300 000), en « baisse sensible » pour l’Elysée (- 120 000). Plus, moins, autant que le 7 septembre, qui avait rassemblé entre 1,12 million de manifestants (selon la police) et 2,7 millions (selon la CGT) ? La réalité, comme à chaque fois, devrait se situer entre les deux, soit une participation quasi équivalente au mardi 7. Ce qui fait beaucoup de monde. Or, réussir à faire descendre dans la rue, à quinze jours d’intervalle, entre 1 et 3 millions de personnes contre un projet de loi adopté entre-temps par l’Assemblée nationale constitue, de fait, un succès pour les opposants à la réforme.

Quelles réactions des différents acteurs ?

C’est « un pari gagné pour les syndicats », s’est empressé d’affirmer le secrétaire général de la CFDT, François Chérèque, au départ de la manif parisienne, afin de donner rapidement le ton dans cette guerre de communication avec le pouvoir. « Le gouvernement misait sur une démobilisation après le vote intervenu à l’Assemblée, son plan a visiblement échoué », estimait son homologue de la CGT, Bernard Thibault.

L’exécutif, lui aussi, s’est empressé de réagir, mais dans un sens diamétralement opposé. Sans même attendre le départ de la manifestation dans la capitale, une source élyséenne confiait à l’AFP que cette baisse « sensible » de la participation signifiait « que soit les Français considèrent que tout cela est déjà derrière eux, soit ils adhèrent davantage » au projet de réforme des retraites, « soit les deux ». Le soir même, sur France 2, le ministre du Travail, Eric Woerth, en rajoutait une couche sur la « décélération incontestable de la mobilisation ».

Quelle suite pour le mouvement de protestation ?

Les huit organisations syndicales (CFDT, CGT, CFTC, CGC, FO, FSU, Unsa et Solidaires) se retrouvent ce matin au siège de la CGT pour débattre des suites du mouvement. Selon nos informations, elles pourraient décider d’une nouvelle journée d’action pour le samedi 2 octobre, soit trois jours avant le début du débat sur le projet de loi au Sénat. Pas très enthousiaste, il y a encore peu, pour une mobilisation durant un week-end, la CGT aurait finalement rallié la CFDT dans son souhait d’appeler les Français à bouger un samedi ou un dimanche, afin d’élargir la mobilisation. « Demander aux gens de sacrifier un troisième jour de salaire devient très compliqué, confie un dirigeant syndical réformiste. Un week-end permet aussi aux salariés des PME, qui ont du mal à faire grève, de nous rejoindre. »

Sur un plan plus politique, les demandes des confédérations sont toujours les mêmes : « Le gouvernement doit prendre conscience qu’il ne peut plus continuer à ignorer la mobilisation, disait le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, hier, en tête du cortège parisien. Il va vraiment falloir qu’il accepte de discuter du fond de la réforme. » Sans concession sur le projet de loi, « nous sommes prêts à remettre le couvert durablement », avance même Laurent Berger, l’un des principaux dirigeants de la CFDT. Et, pour les syndicats, faire bouger significativement le texte, c’est revenir sur le report des deux bornes d’âges (de 60 à 62 ans pour l’âge légal de départ, de 65 à 67 ans pour l’âge du départ sans décote).

Qu’est-ce qui pourrait réellement bouger ?

Renoncer au recul des deux âges de départ à la retraite reviendrait, pour le gouvernement, à enterrer sa réforme. Ces deux mesures représentant à elles seules les deux tiers des nouvelles ressources censées combler le déficit des régimes de retraites. L’exécutif ne ferme cependant pas complètement la porte à de nouvelles concessions. Après avoir accepté, lors du débat à l’Assemblée, d’élargir le nombre de salariés - de 10 000 à 30 000 - pouvant continuer à partir à 60 ans sur des critères de pénibilité, et de régler le cas de certains polypensionnés, il pourrait lâcher sur d’autres amendements lors de l’examen du projet de loi par le Sénat. Sur la pénibilité, encore, en acceptant des départs anticipés au niveau des branches, mais aussi sur le recul de l’âge de départ sans décote de 65 à 67 ans, qui pourrait être neutralisé ou aménagé pour certains publics (femmes avec enfants, chômeurs âgés). Un geste serait aussi prévu pour les handicapés.

Le gouvernement devrait être d’autant plus incité à faire des efforts au Sénat que l’UMP n’y dispose pas d’une majorité absolue. Il lui faudra le soutien des centristes, dont nombre d’entre eux ne sont pas insensibles aux arguments des syndicats sur le caractère injuste du projet de loi.

Quelles suites politiques pour la majorité ?

Officiellement, à l’Elysée, tout est sous contrôle. Les Français jugent la réforme des retraites « inéluctable » et, même s’ils tempêtent sur le coup, ils sauront gré au gouvernement d’avoir eu le courage de « sauver » le système. C’est en tout cas ce que le conseiller social de Nicolas Sarkozy, Raymond Soubie, lui susurre à longueur de journée. Sûrement n’a-t-il pas eu beaucoup de mal à convaincre le chef de l’Etat, qui considère qu’il n’y a de vraie réforme sans d’imposantes manifestations. Et qui apprécie le rapport de force « viril », dans les sommets européens comme dans la rue. Sauf que sa vision des relations sociales pourrait s’avérer un peu datée. Quoi qu’il en soit, Nicolas Sarkozy n’a plus vraiment le choix. Reculer sur son projet ne poserait pas qu’un problème économique : il signerait aussi, et surtout, sa mort politique.

http://www.liberation.fr/economie/01012292113-la-contestation-refuse-de-battre-en-retraite

Messages

  • A Bar le Duc le déroulement de la manifestation n’était pas pour rassurer le pouvoir en place. On a vu, contrairement au 7 septembre, de nombreux jeunes se joindre au cortège avec une façon de manifester pas du tout dans le style bisounours. Ici les manifs ont toujours eu un côté campagnard avec des manifestations qui se déroulaient dans le calme, les gens devisent souvent gaiement avec les forces de l’ordre puisque tout le monde se connait dans notre milieu rural. Cette fois-ci cela s’est terminé avec des affrontements sous forme de lancements de projectiles et ripostes par des gaz lacrymo, ce qui a provoqué une certaine panique dans une foule où on compte souvent des enfants quand leurs parents ne peuvent pas les mettre à garder. Quelques photos sur notre blog pour constater cette évolution. Les cris de victoire de l’Elysée sonnent surréalistes à Bar le Duc. commercynpa

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