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La lutte idéologique est d’une importance vitale. Encore faut-il savoir quoi critiquer !
Publie le samedi 5 juillet 2008 par Open-Publishing2 commentaires
A l’heure ou les interprétations pratiques de Lénine à partir des réflexions et observations de Marxet Engels sur l’impérialisme redeviennent d’actualité tellement les faits tétus sont massifs et difficiles à éluder, il est d’une importance majeur de se livrer à une critique des "marxistes post".
Ces théories font le lit et servent de fond de boutique et de rationalisation déculpabilisante aux tendances petites bourgeoises tant du futur NPA que de la direction du Pcf toutes tendances confondues.
Ces analyses sont bien sur très intéressantes et il n’y a pas à douter de l’honnêteté de leurs auteurs. Les forces du capital dans leur pragmatisme machiavélique, car lui sait ce sur quoi il compte (les billets) a favorisé l’émergence de ces interprétations "UNIVERSITAIRES".
Ci joint deux textes pour exemple : on y retrouve ces termes de dominés et de dominants qu’on accole au mots exploité à la mode à la direction du Pc mais bien autre chose aussi.
Un est d’origine marxiste et est écrit par Michel Vakaloulis
L’autre de sensibilité libertaire par Juan Luis Pinto.
Il existe un dictionnaire d’un Marx contemporain aux éditions P U F dirigé Eustache Kouvakélis qui donne un bon aperçu de toutes ces thèses
L’Auteur le plus important serait l’américain Fréderic jameson:il y aurait un avant et un après Jameson pour certains. Il est celui dont les théories sont l’arrière fond de ces deux textes :
PREMIER TEXTE
Capitalisme post-moderne et conflictualité sociale :
http://www.generationmilitante.fr/a...
par Michel Vakaloulis
La définition rigoureuse de la nouvelle période systémique est une entreprise malaisée. On connaît le « nouveau Beaujolais » mais point le « nouveau capitalisme ». Ce point mérite d’être d’emblée souligné. Assurément, le « nouveau capitalisme » est un terme aporétique. à la différence des avatars sociologiques de la « société post-industrielle » qui refoulent la prépondérance historique du capital comme rapport social à des fins d’accumulation, le projecteur conceptuel est ici braqué sur l’évolution des processus d’exploitation. Mais comment articuler les éléments nouveaux et les permanences structurelles ?
On pressent l’avènement de l’inédit, mais sa « spécificité » reste indicible. La phénoménologie de la dissémination est la représentation sociale dominante, comme l’illustre la ruée vers le différentialisme culturel. Le risque est d’extrapoler abusivement une des dimensions de la nouveauté (par exemple, la communication ou l’intellectualisation du procès de travail) pour en faire le vecteur d’une description totalisante des transformations sociales en cours (à l’image de la « révolution informationnelle » ou du « travail immatériel »).
Telle est notre thèse : le monde « post-moderne » n’est pas le dépassement mais la radicalisation des tendances constitutives de la modernisation capitaliste (Cf. Michel Vakaloulis, Le capitalisme post-moderne, Paris, PUF, 2001). Son pluralisme désordonné est basé sur la persévérance dans l’être des rapports d’exploitation et de domination. La reproduction de ces rapports est un processus hautement conflictuel à l’échelle de la société. Dans les notes de recherche qui suivent, présentées sous forme de sept points, l’analyse des motifs contestataires et des mobilisations collectives constitue le passage obligé pour informer le questionnement sociologique sur les métamorphoses de l’espace social.
1. Une hypothèse à double tranchant sous-tend notre propos. D’une part, la nouvelle période du capitalisme qui succède au fordisme historique (les Trente Glorieuses [1945-1973], pour reprendre l’expression de l’économiste Jean Fourastié désignant la forte croissance dans les pays de l’OCDE de la fin de la Seconde Guerre mondiale au premier choc pétrolier) est celle de l’accumulation flexible mondialisée à dominante financière. Un nouveau régime de pouvoir et de domination émerge, poussant au paroxysme la marchandisation « esthétisée » de la vie sociale. La modernisation flexible ne concerne pas seulement le travail mais tous les aspects du rapport salarial ainsi que les équipements, les investissements, l’organisation de l’entreprise et les interactions avec ses multiples partenaires. Il s’agit, effectivement, d’une tendance historico-géographique à l’expansion et à l’intensification des rapports capitalistes à l’échelle globale qui élargit le champ de l’exploitation. D’autre part, cette nouvelle période n’est pas lisse mais matinée de tensions, de contradictions, de mouvements. Son émergence n’est pas une marche triomphale mais un processus résistible qui empêche toute permanence ou « clôture » systémique. Un nouvel espace de contestation sociale se dessine. Autant dire que la célébration de la « fin de l’histoire » (Francis Fukuyama) est illusoire.
2. Au risque de schématiser, on peut considérer que la régulation keynésiano-fordiste reposait sur l’existence d’une classe ouvrière qui, sans être un bloc monolithique, tendait à s’homogénéiser (partiellement mais incontestablement) sous l’emprise d’un puissant mouvement de classe, d’une culture laborale et syndicale, des traditions de luttes. Les formations partisanes progressistes relayaient les aspirations populaires dans le champ politique. Dans cette configuration relativement stable, tout s’articulait : projet politique (bien-être généralisé), projet historique (émancipation universelle), projet syndical (défense des travailleurs). Les politiques de redistribution de type social-démocrate impulsaient le « cycle vertueux » de l’économie. La marée montante de la croissance poussait tous les acteurs sociaux « vers le haut ». Sans être forcément utopique, la vision de l’histoire était optimiste. Les dominé-e-s disposaient d’un horizon d’attente historique. L’imaginaire du progrès social incluait des dimensions économiques (amélioration du niveau de vie des classes laborieuses), sociales (démarchandisation de certains aspects de la force de travail, sécurisation de ses conditions de reproduction et de valorisation), politiques (services, politiques et dispositifs publics qui entérinaient la socialisation des besoins collectifs).
3. A partir du milieu des années 1970, on assiste à des bouleversements en cascade qui désagrègent la belle harmonie de l’édifice fordiste. La décollectivisation du monde ouvrier, l’éclatement des collectifs de travail, et surtout, la dissolution de l’imaginaire et des référents traditionnels de classe sont des phénomènes marquants et déconcertants. La conflictualité d’usine s’émousse, les luttes ouvrières cessent d’apparaître comme le moteur du conflit social ou comme l’épicentre de la lutte de classes. Les luttes pour le classement au sein de la classe exploitée s’intensifient, ressurgissent au travers de formes pernicieuses telle l’ethnicisation des inégalités parmi les dominé-e-s dont le vote populaire frontiste est l’aboutissement ultime. Dans ce contexte défavorable pour la mise en mouvement des travailleurs, l’affaiblissement du syndicalisme salarié, qui s’apparente dans certains secteurs à un véritable affaissement, est une évolution qui conforme la domination des forces systémiques. Ce que l’on appelait autrefois « la centralité ouvrière », centralité sociologique mais aussi politique, historique, symbolique, semble s’éclipser, entraînant dans sa chute la forme idéologique générale de la lutte de classes qui caractérisait le capitalisme de l’accumulation fordiste. Le pouvoir structurel du capital sur la société se renforce. Les promoteurs de la Weltanschauung (vision du monde) qui accompagne la percée du libéralisme économique célèbrent la vision utilitariste et instrumentale de la modernisation globale en s’efforçant de remplacer, avec plus ou moins de succès, l’État-providence par le Marché-providence. La dissolution du conflit de classe dans la « moyennisation » de la société capitaliste (constitution supposée d’un grand groupe central allant des ouvriers à statut aux cadres supérieurs, avec un brassage de toutes les couches de la société vers le haut) serait le happy-end de cette configuration historique.
4. Il est nécessaire d’examiner analytiquement le rapport social de travail soumis au primat de la flexibilité. Comme l’analyse le sociologue américain Richard Sennett (Le travail sans qualités, Paris, Albin Michel, 2000), le nouveau régime capitaliste « ressemble à un tourniquet ». Tout devient fluide et imprévisible. Les collectifs traditionnels de travail sont remplacés par des équipes autonomes qui tendent à internaliser les nouvelles contraintes du marché (« juste à temps », « contrôle qualité », etc.). La gestion économique des entreprises s’aligne sur le court terme et installe les salariés dans la biochimie de l’inquiétude quotidienne. Cette économie flexible généralise la « culture du risque » pour en faire le souci ordinaire du plus grand nombre ! Pas le souci exclusif de l’entrepreneur schumpétérien pour qui le profit est la rémunération de son « audace » en tant qu’investisseur, mais le souci banalisé de Monsieur-tout-le-monde confronté aux aléas de la conjoncture économique et contraint de se comporter, avec plus ou moins de conviction, en capitaliste apprenti. En réalité, il s’agit d’une opération de légitimation de la prise de risques par les exploités eux-mêmes. L’insécurité se loge désormais au centre des relations professionnelles, y compris chez les salariés du secteur public dont la sécurité statutaire de l’emploi est tendanciellement contredite par l’insécurisation du poste et des conditions de travail, prélude à sa prochaine mise en cause. L’agent de production (de biens matériels ou de services) est condamné au changement perpétuel, mais il ne maîtrise ni le sens ni l’accomplissement du changement. Dans le nouvel espace productif, la stabilité passe pour une attitude de faiblesse, ou à la limite, pour un signe d’inadaptation conduisant à l’échec. L’important est de prouver que l’on est capable de suivre le rythme du changement, de rester dans la course préoccupé uniquement par son « salut » personnel (préservation de l’emploi, déroulement de carrière).
Cette violence symbolique exercée par le pouvoir patronal subvertit les rapports de production et de coopération dans le travail. La méfiance gagne du terrain parmi les agents économiques, la solidarité régresse. Les co-équipiers deviennent des concurrents directs qui vivent, avec beaucoup d’appréhension, la perte de repères solides aussi bien dans l’entreprise que dans la société. Dans cet univers structurellement instable, troublé et troublant, l’expression du mécontentement social n’est pas automatique. Au contraire, elle se heurte à de nombreux obstacles. La posture de protestation ou de contestation se trouve de fait dépréciée, voire ringardisée par les stratégies patronales. Elle est renvoyée de manière récurrente à des problèmes de communication ou aux agissements de minorités actives réfractaires aux exigences de la modernisation. Les directions d’entreprise dénoncent de la sorte le corporatisme des « droits acquis », le conservatisme syndical, les résistances au changement. Les compétences douces de la communication ainsi que l’assouplissement des lignes hiérarchiques leur permettent d’exercer le pouvoir sans l’assumer explicitement, et surtout, sans assumer les conséquences sociales des politiques de la flexibilité.
5. Il faudrait englober dans cette description une série de paramètres supplémentaires. Par exemple, l’emprise d’un individualisme de crise caractérisé par la méfiance vis-à-vis de l’action collective et le repli sur la sphère privée, les valeurs de l’intimité ou les groupes affinitaires. Le tribalisme post-moderne est, au mieux, le règne différentialiste de l’éclatement de la société, et a minima, la nouvelle religiosité (au sens étymologique de « relier ») d’un monde sans âme qui s’en sert pour rendre la vie plus facile. Le redoublement médiatique du monde réel, partie prenante de l’organisation de rapports sociaux de connaissance comme rapports sociaux de méconnaissance de la société, est une autre évolution significative (Cf. Jean-Marie Vincent, « Société du brillant, dévalorisation du social », Politique, n° 5, mars 2003). Il se construit, précisément, en jouant subtilement sur la peur, l’intimidation et la menace, mais aussi sur l’insouciance et le cynisme, sur le divertissement et l’évasion. La marchandisation de la culture et des créations de l’esprit humain s’accroît à un rythme frénétique. Différentes enclaves pré-capitalistes, semi-capitalistes qui étaient jusqu’ici tolérées ou exploitées de manière tributaire, deviennent ouvertement de nouveaux champs d’accumulation. Les rapports politiques, les passions humaines, la vie privée, les idées elles-mêmes tombent dans les créneaux du « calcul économique ». De ce point de vue, on peut considérer que les attaques libérales contre les services publics et les protections sociales ne sont pas une simple option politique (ou une variante de la « politique bourgeoise ») mais expriment des tendances structurelles de la nouvelle phase du capitalisme.
Cette évolution est observable dans la production culturelle qui devient elle-même une activité économique ordinaire. L’industrie du divertissement en est la parfaite illustration. Mais le mouvement inverse de l’économie vers la culture est également significatif. La marchandisation est aussi une esthétisation du monde. En effet, la production marchande constitue un phénomène culturel au sens où la marchandise est esthétiquement consommée. La plupart des produits sont désormais achetés par le consommateur aussi bien pour leur valeur d’usage immédiat ou pour leur image. Ce constat a d’importantes conséquences politiques pour comprendre les mouvements contestataires contemporains qui adviennent à un moment où le capitalisme refaçonne profondément les identités, les affects et les modes de vie dans le cadre de l’économie-monde (Cf. Fredric Jameson, « Globalisation and political strategy », New Left Review, Second Series, n° 4, july-august, 2000).
Ces mouvements font surtout appel à la subjectivité des individus et s’opposent aux orientations de la modernisation systémique, notamment au post-modernisme comme force culturelle hégémonique du capitalisme avancé (Cf. Fredric Jameson, Le postmodernisme ou la logique culturelle du capitalisme tardif, Éditions de l’École Normale Supérieure des Beaux-arts, 2007). En ce sens, il serait erroné de les opposer (comme le fait la sociologie des « nouveaux mouvements sociaux ») aux conflits traditionnels du travail en traitant ces derniers comme des réalités déclinantes, c’est-à-dire appartenant à la « défunte » société industrielle. Au contraire, ils sont intrinsèquement liés à la nouvelle forme de l’antagonisme social. C’est l’émergence des nouvelles mobilisations contestataires (dont l’altermondialisme) nées de la modernisation post-moderne du capitalisme dans sa conjonction avec les conflits de travail qui crée la dynamique du mouvement social dans son ensemble. Tous ces mouvements « culturels » ou « sociétaux » risquent de rester inintelligibles, voire énigmatiques si l’on fait abstraction du fait que nos sociétés développées ne sont pas « moins » capitalistes que les précédentes mais représentent la forme la plus « pure » du capitalisme que l’humanité ait jamais connue. La forme sociale capitaliste la plus intensive, la plus composite et contradictoire, et partant, la plus riche en potentialités émancipatrices des citoyens démocratiquement mobilisés contre les forces dominantes.
6. Après ce détour rapide, revenons sur les derniers épisodes de l’action collective en France. Au début des années 1990, il existe dans le pays un véritable sentiment d’insécurité sociale redoublé d’un doute profond sur l’avenir qui gagne différentes catégories de la population. Le paysage politique est plutôt morose. Les luttes ouvrières diminuent en fréquence et en intensité. Mais le climat social est loin d’être euphorique. En l’absence d’une défaite frontale du mouvement ouvrier, comparable à l’échec de l’épuisante grève des mineurs (mars 1984 - mars 1985) dans l’Angleterre thatchérienne, la conjonction d’évolutions régressives pour les salariés conforte la conviction générale que la « classe politique » n’a pas la volonté ni la capacité de résoudre les problèmes importants de la société française, en première ligne le chômage et la précarisation du travail. La faible conflictualité de la période n’entérine guère, loin s’en faut, l’adhésion populaire à l’idéologie de la modernisation. Le reflux de l’action collective ne consacre pas la victoire idéologique du libéralisme. Si l’idéologie dominante des élites reste l’idéologie libérale, un cycle « antilibéral » s’amorce au sein de l’opinion vers 1992-1993. En fait, les études quantitatives révèlent un hiatus entre « représentation dominante » des citoyens et « idéologie dominante » portée par des leaders économiques et leurs relais d’opinion. (Stéphane Rozès, « La “grève par procuration” de l’opinion à l’égard des mouvements sociaux révèle un nouveau cycle politique », dans Michel Vakaloulis (dir.), Travail salarié et conflit social, Paris, PUF, 1999).
C’est dans ce contexte que de nouvelles luttes interviennent, dans le sillage des coordinations qui ont marqué la deuxième moitié des années 1980 : mouvements à Air France, mobilisations contre le CIP (tentative d’instauration d’un SMIC-jeunes par le gouvernement d’Édouard Balladur), conflits industriels comme à Aluminium-Dunkerque et à EGT-Alsthom, etc. L’impact de ces conflits n’est pas tant numérique (nombre d’agents mobilisés), mais plutôt symbolique puisqu’ils émergent dans des zones d’activité réputées « post-fordistes » que l’on croyait à l’abri des séquences contestataires. Les contradictions du nouvel ordre productif sont exposées au grand jour.
Le mouvement social de l’automne 1995 constitue la plus grande mobilisation populaire depuis mai 1968 (Cf. Bernard Thibault, « On ira encore plus loin ! », Entretien avec Toni Negri et Michel Vakaloulis, Futur antérieur, n° 33-34, 1996/1-2). Il comporte une dimension « anti-libérale » indissociablement événementielle (ébranler la vie politique à peine quelques mois après l’élection présidentielle, briser l’élan réformateur du gouvernement d’Alain Juppé) et projectuelle (rompre avec le fatalisme d’une réforme « irréformable » de la Sécurité sociale, déplacer symboliquement les lignes de démarcation entre le possible et le souhaitable). Dans le sillage de ce mouvement émergent d’autres foyers de protestation, bien au-delà des seuls lieux de travail : mouvements des « sans », luttes contre le racisme et le Front National, mobilisations des femmes pour l’égalité et la dignité, manifestations pour la défense des libertés individuelles et collectives, percée spectaculaire de l’altermondialisme.
Pour être peu ou prou antilibéraux, tous ces mouvements ne sont pas (et ne se revendiquent pas) « anticapitalistes ». Leur émergence ne connote pas a fortiori l’émergence d’un « nouveau mouvement ouvrier » qui rechercherait en hésitant ses marques. Réduire aujourd’hui le mouvement social au mouvement ouvrier serait, sur la forme, un abus de langage, et sur le fond, une méprise empirique de l’hétérogénéité politique et sociologique de ces mouvements. Comment considérer, par exemple, l’altermondialisme comme le simple prolongement du mouvement ouvrier traditionnel ? En revanche, ces mouvements ne représentent pas non plus « l’après-mouvement ouvrier » (culturel-identitaire) qui se situerait à l’extérieur de l’antagonisme capital/travail. Leur développement devient inintelligible si on les place dans un état indéfini d’apesanteur, en faisant notamment abstraction du fait qu’ils « résistent » contre la reconstruction post-moderne du rapport social et la gouvernance libérale du monde. La circularité des engagements et la multipositionnalité du militantisme que l’on observe au sein du « mouvement social » sont un indicateur de cette tendance.
7. Récapitulons. Il existait auparavant un mouvement ouvrier qui avait ses organisations de masse, ses combats emblématiques, ses mythes mobilisateurs. Il était constitué autour du prolétariat industriel et tendait à recouvrir l’ensemble de l’espace protestataire. Pour le dire schématiquement, il n’était pas simplement le modèle du mouvement social mais le seul mouvement social. À l’ère du capitalisme post-moderne, le conflit social se présente sous des formes diversifiées, décentrées, éclatées. À première vue, on remarque l’absence d’un foyer central et inamovible. Chaque conflit conserve sa « dignité » événementielle, sa singularité irréductible à une « grande cause », mais aussi, sa manière spécifique de renouer avec les enjeux centraux de la « question sociale ». La lutte contre la soumission du travail au capital « excède » l’espace du mouvement ouvrier au sens traditionnel du terme. De ce point de vue, le « fondamentalisme de classe » des périodes historiques précédentes a vécu.
Pour mieux cerner le contenu de cette inflexion, on pourrait distinguer analytiquement deux « pôles » du mouvement social. Le « pôle laboral » s’inscrit dans le sillage des luttes ouvrières. Les conflits de travail sont toujours d’actualité et la capacité de résistance du mouvement syndical demeure importante tant au niveau national qu’à l’échelle mondiale. À ses côtés se construit, avec beaucoup de contradictions et de ramifications, un deuxième pôle, « sociétal », du mouvement social. Ces deux pôles sont constitutivement interdépendants. Leurs racines plongent dans les mêmes causes structurelles, leurs pratiques s’opposent aux effets combinés produits par le système. Leur interaction constante est source de dynamisme pour le mouvement social d’ensemble (Sophie Béroud, René Mouriaux, Michel Vakaloulis, Le mouvement social en France. Essai de sociologie politique, Paris, La Dispute, 1998).
Au total, nous sommes face à des mouvements radicaux, polymorphes et « multi-fronts », traversés souvent par des « pulsions anticapitalistes », mais en même temps, dépourvus d’une réflexivité élaborée pour se projeter au-delà des limites du système. Cela ne signifie pas que la dynamique des mouvements sociaux se réduit à la posture du refus. La mise en mouvement comporte une dimension proprement affirmative. Pour s’opposer avec efficacité aux stratégies libérales, il faut produire de nouveaux rapports au réel en tenant compte des conditions de vie et des aspirations du plus grand nombre, et notamment, des groupes sociaux fragilisés. Autant dire que protestations sociales, éléments d’anti-capitalisme et prémisses d’une politique de l’émancipation coexistent, mais sans coordination, au sein des mobilisations collectives qu’il est convenu d’appeler « mouvement social ».
Or, le mouvement social fait objet de stratégies de conceptualisation divergentes. Une intense lutte symbolique pour sa définition « légitime » ainsi que pour la délimitation de ses frontières et sa caractérisation historique se déroule dans l’espace public. Le défi pour les forces progressistes est de théoriser l’objet réel – la conflictualité sociale dans tous ses états – dans ses transformations morphologiques et sociologiques incessantes. De penser l’existence des luttes dans leur fragmentation constitutive et leur recomposition inaccomplie en les situant dans le paysage contrasté du capitalisme flexible. De donner un nom à ce qui advient, quitte à prendre des risques de se fourvoyer dans l’effort de restituer au mouvement social la dignité conceptuelle qu’il mérite. Mais il vaut mieux « mal nommer » que laisser dans l’ombre sans nom, sinon innommable, en passant à côté d’une réalité largement méconnue, occultée, décriée. Un tel travail de clarification est aussi un travail de prospection qui vise à tirer au clair les éléments d’une politique d’émancipation contenus dans les luttes contemporains contre l’exploitation et l’oppression.
DEUXIEME TEXTE :
http://1libertaire.free.fr/pintos01.html
Les conditions engendrées à partir de la destruction du modèle des rapports entre les dénommées "Grandes puissances" ("Guerre froide", "Coexistence pacifique", "Désarmement") et la disparition résultante du modèle des "Trois mondes", nous oblige à reconsidérer les transformations de nos sociétés dans un cadre "planétaire" ou de "Système - monde" (1), où l’on part de phénomènes de "Globalisation" sans oublier ceux de "Localisation" (2).
I / Cet épuisement ou disparition des modèles et paradigmes qui servaient de référence commune pour expliquer ce qui se passait dans les différentes sociétés (3), et pourquoi cela arrivait, a vidé de contenu les différentes positions idéologiques dans le sens où :
a / Il a rendu les langages politiques traditionnels insignifiants.
Ce manque de signification affecte non seulement les discours programmatiques des périodes électorales qui assument majoritairement une rhétorique commune de type pragmatique (en croyant que les électeurs se comporteront exclusivement comme des "usagers" ou des "clients" - "valeur d’usage" du vote disponible individuellement - ), mais aussi les dénominations les plus générales des différents groupes. Il est très difficile de distinguer conservateurs, libéraux ou progressistes selon les politiques (économiques, culturelles, militaires...) que proposent les partis politiques, ainsi que les argumentations utilisées pour défendre leurs propositions (qui sont généralement interchangeables). En dernier lieu, il n’est pas non plus facile de différencier les positions idéologiques traditionnellement appelées de "gauche" et de "droite", malgré les protestations changeantes de ceux qui ne veulent pas être accusés comme tels ou de ceux qui affirment qu’on se situe déjà au - delà de cette distinction (seulement justifiée par rapport au passé) ; les maux de la droite et de la gauche se ressemblent de plus en plus.
b / il a remis en question le noyau central de chaque position idéologique.
En effet, ce noyau se fondait sur une conception obsolète du pouvoir dont surgissait un point de repère unique de ce qu’est l’ordre social, et sur une croyance à l’unité du monde comme seule réalité ontologique de référence. On disait, banalement, que la droite avait pour programme fondamental la "défense et le maintien de l’ordre existant" et que la gauche prétendait d’une manière ou d’une autre "bouleverser l’ordre et imposer la révolution". Quand les citoyens ont pu observer des positions discursives paradoxalement conservatrices (communismes au pouvoir) et nécessairement promotrices de changement (les plus conservateurs prenant des mesures draconiennes pour en finir avec le dénommé "état du bien - être"), on se rend compte qu’il n’est plus possible de revenir à des schémas antérieurs.
c / il a laissé en suspens la capacité communicative et émotive des discours idéologiques.
Ceci impliquerait, comme résultat, une progressive démobilisation des citoyens face à des questions qui les touchent, puisque l’idée de participation dans l’exposé et la résolution des problèmes communs est remplacée par la "délégation" de cette tâche aux institutions et à la "classe politique" (qui a trouvé des manières de s’auto - reproduire à moindre frais). La rhétorique politique n’est plus nécessaire car les questions importantes ne sont pas débattues (objectifs des institutions, hiérarchisation des souhaits, différenciation des possibilités, justification des asymétries, etc.) et les sujets dont s’alimente le simulacre « d’opinion publique régnante », par le biais des différents "agenda setting", ne font que nous orienter vers des questions banales (noces royales, faits divers, etc.) ou vers des questions complexes et lointaines (guerres, épidémies, catastrophes, etc.).
Le résultat général auquel nous sommes arrivés, et qui peut être estimé depuis la fin des années quatre - vingt (1989 : "Annus mirabilis"), consiste en un manque progressif de légitimation sociale des différentes instances de l’exercice du pouvoir (4). Cette carence touche non seulement les niveaux les plus globaux (ONU, UE, BM, FMI, UNESCO, OMS, etc.) et les états et gouvernements nationaux, mais elle peut également être appréciée dans la pratique des institutions et organisations les plus proches de l’individu (Systèmes de l’éducation, de la santé et de la sécurité, Syndicats, Partis, Mairies, Associations diverses de citoyens, de familles, de moyens de masse, etc.). Ce qui est peut - être en train de se passer, c’est que la fonction des différents pouvoirs a changé et que nous ne l’avons pas encore perçu d’une manière généralisée.
Nous sommes arrivés à ce résultat par l’un des chemins suivants :
1°/ Par la transformation des valeurs habitudes et rélevances d’une société donnée, sans la génération corrélative d’un accordd’une discussion publique, qui soit le plus ample possible, sur ces mêmes valeurshabitudes et rélevances, et qui puisse rendre possible le renouvellement des discours qui légitiment (cas des pays européens "du sud").
2 / Par la disparition d’un monopole idéologique qui légitime le système établi, et son remplacement par des mécanismes stratégiques dépourvus d’idéologies (cas des "pays de l’est").
3 / Par la croyance que la multiplicité et la variété de la consommation de produits pouvaient remplacer la recherche de sens qui surgit dans les sociétés complexes (cas des pays capitalistes centraux).
4 / Par l’imposition de systèmes de démocratie politique formelle dans des zones de conflit permanent et de grandes asymétries économiques parmi les populations correspondantes, dans l’intention d’homologuer les formes de domination légitimées dans le monde capitaliste (cas de quelques zones du "Sud").
II / "La probabilité de trouver une obéissance dans un groupe déterminé pour des ordres spécifiques" (5), selon ce que Max Weber comprend par domination, paraissait avoir besoin d’un type de croyance à une légitimité, qu’elle soit "traditionnelle, charismatique ou rationnelle". L’obéissance à celui qui exerce le pouvoir trouverait ainsi son fondement sociologique (au - delà de la simple violence et de l’économie). Les différentes idéologies politiques (libéralisme, socialisme, nationalisme, conservatisme, populisme, etc.) élaboraient le discours de justification de l’ordre social établi, sans se soucier des ontologies qui définissaient la réalité comme une référence extérieure aux idéologies (6).
D’ailleurs, un phénomène propre aux époques les plus fortement chargées d’idéologies, consiste précisément au maintien d’une hypothèse commune à toutes les idéologies, qui reste en marge de toutes les discussions et qui les rende possibles. Cette référence commune n’est rien d’autre que l’affirmation du monde et d’un ordre "naturel" des choses comme l’unique réalité existante et raisonnable. Les différentes idéologies se distinguaient selon la manière de concevoir, de programmer et de promouvoir les formes qui pouvaient (et qui devaient) assumer cette réalité.
Cette unicité, ou cette considération univoque d’un monde ontologique, était celle qui permettait la différenciation idéologique et le pluralisme politique. L’idée de tolérance tourne ainsi autour de ces limitations fondamentales, puisqu’en prescrivant comme obligatoire "pour tous" une idée unique de réalité, elle doit exclure ceux qui osent penser à d’autres formes de réalité ou à des réalités alternatives (prisons, asiles de fous, “révolutionnaires”, etc.).
Jusqu’à maintenant, les couches dominantes se sont considérées dans le même ordre de réalité que celui des dominés. D’ailleurs, elles avaient besoin de ce monde unique afin de pouvoir exercer ce qu’elles comprenaient par pouvoir, étant donné que celui - ci était toujours défini dans une dialectique de réalité unique (domination, exploitation, appropriation, asymétrie, inégalité, tous ces concepts supposant que ces deux groupes sont situés dans une même réalité sociale).
Les raisons qui essayaient de légitimer les différentes positions sociales s’articulaient dans différentes régions ou champs (économie, politique, culture, religion, institutions, etc.) où étaient produites les argumentations opposées mais toujours régies par un codage commun de la réalité (ontologie, logique, épistémologie, rationalité, etc.). Au cours de ces multiples luttes idéologiques, les phénomènes suivants ont pu être observés :
a / Recourir à un critère unique compris comme "vérité" qui, au - delà du niveau logique, pourrait devenir opérant d’une manière empirique, a été de plus en plus problématique.
b / Maintenir une seule rationalité argumentative (une fois vérifiée son orientation dernièrement totalitaire) est peu à peu devenu limité, pour avoir laissé, hors de l’argumentation, une multitude d’expériences des sujets.
c / L’apparition d’un conflit de rationalités (7) dans le cadre d’une logique de l’argumentation idéologique a conduit à deux issues non désirables :
a / soit à la généralisation et au caractère inévitable de l’idéologie, avec la conséquence de l’implantation du relativisme comme unique alternative épistémologique,
b / soit à la négation des métadiscours comme des totalités extérieures aux argumentations idéologiques, avec la conséquence d’accepter l’équivalence de n’importe quelle alternative idéologique.
d / Le soupçon, dans beaucoup de cas confirmé, que la position de pouvoir (dominant) a permis d’accéder à des savoirs et à des connaissances déterminés, inaccessibles à partir de positions marginales ; ce qui a donné lieu à la généralisation de l’argument "pouvoir = savoir", face à la perspective des dominés "pouvoir (capillaire) = savoirs (fragmentaires)" (8).
Les difficultés pour articuler un discours rationnel, croyable sans la référence au "métadiscours" correspondant et à ses hypothèses ontologiques, (difficultés créées par cette situation où nous nous trouvons - et que certains définissent comme "Postmodernité" - (9)), ont contraint les groupes détenteurs des différents pouvoirs à utiliser une stratégie différente de justification de la domination.
III / Les fonctions sociales que les discours idéologiques ont exercées se sont orientées vers un renforcement des convictions, une réaffirmation des croyances et un apport d’un fondement rationnel des émotions et des sentiments. C’est pour cela que la mobilisation de masses d’individus a été rendue possible, pour obtenir des objectifs façonnés de l’extérieur par une minorité intellectuelle ou le dévouement militant de membres de groupes volontaires avec une forte identité symbolique (religieuse, politique, militaire, patronale, nationale, etc.) aux tâches programmées par les leaders du groupe.
La fonction stricte des idéologies consiste donc à rendre plausibles les contenus du discours et à fournir un sens qui réduise les niveaux de complexité structurale des rapports sociaux de manière à rendre possible les prises de décisions des sujets (antérieurement : "prise de conscience") et l’exécution de rôles multiples (assignés et acquis). Arrivé à ce point, il faut savoir si ces fonctions continuent à être exercées par les idéologies ou, ce qui constitue l’hypothèse de cet écrit, si un remplacement des fonctions (10) est en train de s’effectuer, remplacement nécessaire pour le maintien d’une domination légitimée ou en cours de déligitimation.
Selon nos observations, les groupes actuellement dominants ont laissé de côté, dans une grande mesure, les complications provenant de la construction (ou de la reconstruction) du discours idéologique, afin d’essayer d’obtenir les mêmes résultats à travers d’autres moyens plus accessibles et plus économiques.
En principe, il n’est pas nécessaire de récupérer l’unité perdue des univers symboliques religieux ou politiques tels qu’ils ont été construits à des époques déterminées de l’histoire du monde appelé "Occidental". Il ne faut pas rappeler, comme principe latent dans notre culture de fin de siècle, la phrase de T.W. Adorno : "Le tout est ce qui n’est pas vrai." (Das Ganze ist das Unwahre) (11), qui instaure le règne provisionnel du fragment exorcisant la totalité du champ épistémologique. La réalité empirique du marché a également établi l’inévitable fragmentation de la consommation et la segmentation multiple des consommateurs.
Maintenir la domination n’est plus de "tromper tout le monde tout le temps" mais plutôt de lui faire croire à l’existence ponctuelle de ce qui est provisionnel et éphémère, et qui est à sa portée. Il n’est pas nécessaire de construire de grandes et permanentes plausibilités qui nous affectent seulement dans les "situations limite" ("Grenzerfahrungen"), mais il faut plutôt élaborer les croyances, les sentiments et les savoirs de recette dont nous avons besoin dans nos expériences quotidiennes. Le "Lebenswelt" (12) n’est plus un horizon généralisé de compréhension de la réalité humaine mais plutôt la perspective d’interprétation des événements quotidiens qui fournit une sécurité ontologique fragmentaire moyennant l’absolutisation du présent comme unique fait vécu du temps.
L’offre sociale de sens abandonne toute apparence transcendantale ("sens de la vie", "de la mort", "de la douleur", etc.) pour devenir une stratégie de réduction de la complexité des rapports sociaux. Le sens s’oriente plus vers la communication (en tant que réalisation de possibilités) que vers la satisfaction de buts personnels (13). Pour donner un sens, il ne s’agit plus d’obtenir une illumination sur le monde mais plutôt d’offrir un fil d’Ariane qui nous permette de sortir indemnes du labyrinthe.
IV / Les vastes et complexes processus individuels et collectifs, à travers lesquels a été construit ce que notre culture dénomme réalité sociale (14), ont subi, dans les circonstances actuelles, une rapide (et efficiente à court terme) transformation. Cette transformation a consisté dans le fait que les instances qui détiennent le pouvoir de domination dans une société (fondamentalement à travers les mécanismes du marché qui ont plus à voir avec la distribution et la consommation de marchandises, sans oublier cependant les décisions complexes à propos des processus de production et de la division internationale du travail) et pas l’ensemble des citoyens à travers différents processus de génération de consensus, sont celles qui peuvent décider au sujet de la réalité ou pas de différents phénomènes sociaux. Plus encore, dans beaucoup de cas, il est évident que le pouvoir n’est pas entre les mains des représentants publics dans les différents domaines (État, économie, système mondial, Église, syndicats, partis, etc.) qui ne peuvent plus modeler la réalité à leur guise, mais qui doivent à présent entrer en lice avec un grand nombre de concurrents horizontaux et verticaux. Ceci explique que les sources traditionnelles du pouvoir (violence, économie, raison) soient entrées dans une profonde crise et que les monopoles des nouvelles alternatives (information, technologies, savoir) n’en finissent pas de se constituer.
Ce qui nous intéresse dans notre argumentation, ce n’est pas tant une redéfinition du pouvoir et de son exercice, ou la différenciation des pouvoirs et de leurs formes d’exercice, mais plutôt l’apparition de substituts fonctionnels de l’idéologie.
Nous nous trouvons dans une situation où la fonction de "construction de la plausibilité" est réalisée au moyen de stratégies généralisées par les canaux massifs de médiatisation sociale, parmi lesquelles se détachent la "naturalisation", le "déplacement" (ou "agenda setting") et la "narrativisation". Différentes stratégies d’évaluation symbolique qui fournissent une construction de sens différenciée selon les positions sociales (dominante, médiatrice, subordonnée) (15) sont peu à peu construites.
Mais tout cela nécessite un mécanisme partagé, un espace social indéterminé, des procédés reconnus par les différentes positions et permettant de rendre vraisemblable la plausibilité et assumables les sens offerts.
Ma proposition consiste à dénommer cette complexe agence sociale ("agency") "Imaginaires sociaux", lesquels seraient des schémas de représentation qui structureraient à chaque instant l’expérience sociale et qui engendreraient aussi bien des comportements que des images "réelles" (16). "Ce qui sera croyable" comme fonction de la plausibilité ne se définit pas par l’apport d’arguments face à un public étant capable de débattre mais plutôt par la construction/destruction d’imaginaires sociaux déterminés, qui permettent d’élaborer et de distribuer d’une manière généralisée des instruments de perception de la réalité sociale construite comme réellement existante (17).
Les imaginaires agissent plutôt dans le domaine de la plausibilité ou de la compréhension généralisée de la force des légitimations. Sans imaginaires déterminés qui rendent croyables les systèmes de rationalisation qui légitime, les vieilles idéologies ou bien sont simplement rejetées par la majorité (et elles deviennent des sociolectes résiduels), ou bien sont maintenues dans le strict champ des idées reconnues comme précieuses, mais qui n’engendrent aucun type de pratique sociale ou de mouvement susceptible de transformer les ordres existants.
V / Un programme de critique de l’idéologie et de ses fonctions sociales devrait remplacer la critique de l’argumentation par la critique de l’imaginaire ; à partir des différences engendrées par la consommation, plus que de celles engendrées par la production, comme fondement de l’asymétrie de la domination ; faire l’anatomie des systèmes de communication et des pouvoirs et contrepouvoirs qui y sont configurés, plus qu’analyser les ordonnances légales qui essaient de les justifier ; désidentifier les offres de "sens" de leurs formes religieuses et laïques afin de rétablir la fonction de sujet des individus reconstruits.
En résumé : Il ne suffit pas de critiquer les vieilles idéologies, ce qui importe est d’engendrer de nouveaux mouvements de sujets conscients qui établissent comme réalisable une société sans dominants et dominés (18).
Juan - Luis Pintos
Santiago de Compostela, 1994
Messages
1. La lutte idéologique est d’une importance vitale. Encore faut-il savoir quoi critiquer !, 5 juillet 2008, 17:52, par Colargolette
"l’impérialisme"
Aujourd’hui, n’est-il pas devenu un colonialisme à l’envers et tout aussi assassin ?
1. La lutte idéologique est d’une importance vitale. Encore faut-il savoir quoi critiquer !, 5 juillet 2008, 18:33, par turlututu chapeau pointu
D’accord avec toi, quand on pense aux camps de concentration prévus aux états unis pour les soi-disant dominés récalcitrants dans les mois à venir, si guerre civile se pointe aux états unis, à cause d’une crise majeure .....