Accueil > La triste comédie de Bali

La triste comédie de Bali

Publie le vendredi 4 janvier 2008 par Open-Publishing
10 commentaires

de Aurélien BERNIER

"Les Parties ont reconnu l’urgence de la situation en matière de changement climatique et apportent maintenant une réponse politique aux alertes des scientifiques".

Si une échelle équivalente à celle de Richter permettait de mesurer la langue de bois, aucun doute que cette déclaration de M. Yvo de Boer, secrétaire exécutif de la Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique, obtiendrait la note maximale. Cette affirmation d’un optimisme débordant à la sortie de la conférence de Bali est une totale contre-vérité. Le 15 décembre dernier, la clôture de la rencontre a marqué au contraire le décalage incroyable entre la gravité de la situation environnementale et la capacité des Etats à agir politiquement.

Comme on pouvait s’y attendre, rien de ce qui ressort de Bali ne permet de penser qu’un engagement chiffré et contraignant de réduction des gaz à effet de serre pourrait être accepté par les Etats-Unis ou par les pays émergeants comme la Chine et l’Inde. La première puissance mondiale tente même avec l’applomb qu’on lui connaît de contourner le cadre des Nations Unies pour négocier sur le climat. De nombreux commentateurs ont utilisé le terme de « sabotage ». Certes, le comportement des américains est une provocation, mais encore faudrait-il qu’il y ait quelque chose à saboter !

La première victoire, selon les officiels, est l’accord autour d’une « feuille de route » qui devra déboucher sur un Protocole de Kyoto bis d’ici fin 2009. Pas de quoi pavoiser lorsqu’on sait que l’intégralité du contenu du futur texte reste à écrire, et que le bilan de Kyoto se résume à dix années de perdues ! Avec ses objectifs dérisoires que de nombreux Etats n’atteindront vraisemblablement pas, le fameux protocole aurait besoin d’un succésseur qui marque une profonde rupture. Mais personne n’y croît une seconde, à juste titre. Les mêmes recettes seront conservées, comme le marché des droits à polluer – véritable aubaine pour la finance – ou les mécanismes incitatifs qui ont remplacé toute idée de réelle contrainte sur les entreprises. Avec une totale inefficacité environnementale, démontrée par les chiffres. Bali a d’ailleurs été l’occasion de constater que le transfert des technologies propres entre les pays développés et les pays en développement ne fonctionnait pas. Curieuse découverte dans un monde où le brevet s’impose jusqu’au domaine du vivant !

La question primordiale de la déforestation fut traitée avec une détermination et un courage équivalents. Que faire contre la dégradation des forêts ? Appliquer des sanctions économiques contre les Etats qui refusent d’agir ? Non, les 187 pays présents en Indonésie ont eu une bien meilleure idée : rémunérer le maintien des zones boisées. On paiera donc le fait de ne pas couper les arbres qui stockent le CO2, tout comme sera payé le reboisement. A chaque étape, la monétarisation de l’environnement s’accélère encore un peu plus.

Enfin, un fonds d’adaptation pour les pays qui seront les premières victimes du changement climatique est créé. Il sera alimenté par un prélèvement de 2% sur les projets du Mécanisme de Développement Propre (MDP). Le MDP est une disposition du Protocole de Kyoto qui prévoit de récompenser les investissements dans des pays en développement pour des projets émettant moins de CO2 que la moyenne. La récompense est constituée de « crédits d’émission », qui permettront aux industriels de continuer à polluer dans les pays développés ou de faire des profits sur le marché du carbone en les revendant. Les ressources des Etats les plus pauvres pour se protéger du changement climatique seront donc les miettes que laisseront des multinationales après s’être goinfrées du nouveau marché des MDP.

Cette fois encore, la communauté internationale a réaffirmé le choix de la voie néo-libérale pour tenter de gérer la crise climatique. En proposant la mise en place d’une « Taxe Tobin 2 » sur les flux financiers, M. Jean-Louis Borloo a joué à Bali un véritable rôle de révolutionnaire. Dans cette posture, le ministre français est aussi crédible qu’un SDF qui réclamerait mille euros aux passants, tant les négociations sont à des kilomètres de telles extrémités. Mais ce dépoussiérage de la revendication initiale d’Attac par un dirigeant de droite aura au moins le mérite de souligner à quel point les ONG sont globalement absentes ou à côté du sujet. Plus personne ne devrait sérieusement croire qu’il sera possible d’agir en matière d’environnement sans s’attaquer à la finance, au libre-échange, à cette mondialisation qui n’a jamais été que néo-libérale. Il faut le répéter : la rupture doit être économique. Puisque la comunauté internationale a déjà renoncé à l’envisager, c’est aux Etats courageux, s’il en existe, de prendre des mesures. Y compris de façon unilatérale.

http://abernier.vefblog.net

Messages

  • Aurélien Bernier, un vrai spécialiste de l’environnement et des OGM écrit :

    « Plus personne ne devrait sérieusement croire qu’il sera possible d’agir en matière d’environnement sans s’attaquer à la finance, au libre-échange, à cette mondialisation qui n’a jamais été que néo-libérale. Il faut le répéter : la rupture doit être économique. »

    Mais ce n’est pas cet article qui est commenté sur Bellaciao, c’est celui sur la grève de la faim de Bové.

    L’aliénation semée par les médias est pire que le poison OGM qui vole à travers champs. Elle touche même les purs. Elle fera crever la planète.

    Ainsi, les médias ont fabriqué Bové (même s’il n’est pas sans quelques mérites et talents). Les médias et lui se servent mutuellement.

    La carrière de Bové est faite de « coups ». Seul ou avec des petits groupes. Un leader, au contraire, rassemble autour de lui des masses toujours plus nombreuses. Ne confondons jamais la révolution et le putsch, le coup d’éclat, le coup de force. La preuve est faite que, malgré une médiatisation inouïe, la bienveillance parfois active de la gauche classique et alternative, Bové ne convainc pas. Aux élections présidentielles, il a failli arriver dernier.

    Chacun ressent bien sa part d’ambition, de jeu perso, d’incapacité à entendre, de refus de se remettre en question, sa volonté de ne dépendre que de lui, d’accaparer seul les médias. Les noms de ses compagnons restent inconnus, même quand ils vont comme lui en prison. Il ne leur laisse pas sa place devant les caméras, il ne les nomme pas. Imaginons un gouvernement dont on ne connaîtrait aucun nom de ministres et où le chef parlerait seul pour tous (à la Sarko).

    Aurélien Bernier a raison de vouloir s’attaquer à la finance et de prôner la rupture.

    Vaste programme qui ne sera pas mené à bien sans que se lève le peuple dans sa majorité, lequel n’a pas envie de suivre un chef qui fait la bise à Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’homme des oligarchies.

    Chat échaudé.

  • le réchauffement climatique à cause de nos émissions de CO2,je n’y crois plus une seule seconde !
    il y a une trentaine d’années on nous prévoyez un âge glacière !
    Merci aux blogs de personnes compétentes qui l’ont étudié et qui ont comparé leurs résultats.Bien des paramètres entrent dans le fonctionnement du climat (Une irruption volcanique par exemple)
    Bref si c’est pour nous faire peur,pour nous manipuler,cela vas devenir malsain et très dangereux.
    Laissons la planète gérer son climat et penchons nous sur les ressources que la planète peut nous donner.Quand je vois le saccage de nôtre environnement sur la terre entière j’en suis malade.
    Ce n’est pas vers une catastrophe climatique mais écologique qui vas nous arriver.

    • Tu es sans doute un des derniers à ne plus y croire.

      Ne voudrais-tu pas savoir comment tu vas crever ?

      Dand

    • j’étais certain que quelqu’un me répondrai un truc de ce genre !
      mais avant de crever vas voir ce site http://www.pensee-unique.fr/
      tu mourras moins con.

    • Comment ce fait-il que la calotte glacière des pôles est en régression constante ? Que les glaciers de nos montagnes fondent deux fois plus vite qu’il a 50 ans ? Sans doute est-ce un phénomène surnaturel qui engendre cet état de fait, voire l’oeuvre de quelques génies malfaisants, d’une puissance divine courroucée, peut-être est-ce tout simplement le réchauffement de la planète ? Va savoir... Si l’on écarte toute les interventions supra naturelle qui ne font encore flipper que quelques ignares, il s’agit bien du réchauffement climatique qui en est la principale cause.

      M.M. 

    • Je suis allé voir.

      Je n’y ai vu que le site d’un chercheur retraité dont on ignore la spécialité.

      Il se dit sceptique, mais n’a pas dans ses liens aucun des sites zététiques (scientifiques sceptiques), par exemple...

      Mouais...

      Faut pas croire tout ce que tu lis.

      Dand

    • Bonjour,

      Personnellement, je n’ai pas les compétences pour juger de la solidité des études scientifiques des uns ou des autres. Si je m’intéresse aux enjeux politiques et économiques autour du climat, c’est que le (supposé) changement climatique pose la question de l’incompatibilité entre le néolibéralisme et le maintien des équilibres écologiques quels qu’ils soient.
      Quand bien même les émissions de GES d’origine anthropique ne menaceraient pas directement le climat, beaucoup d’autres ressources sont menacées : l’eau, les sols, la biodiversité, et j’en passe. Ce qui est intéressant dans ce dossier, c’est que face à une crise possible (ou supposée, ou probable...), les néolibéraux apportent des réponses dérisoires. Ils s’enfoncent dans des mécanismes de marché, de laisser-faire, ils montrent tout le pouvoir perdu par le politique sur la finance. De plus, si nous voulons changer la donne, les réponses à apporter sont identiques qu’il s’agisse de climat, de biodiversité ou de tout autre impact écologique : il faut stopper le délire libre-échangiste qui empêche toute réelle intervention politique qui s’opposerait au marché.

      Cordialement,

      Aurélien Bernier

  • Aurélien, tout à fait d’accord. Le néolibéralisme, qu’il faut appelé par son nom : le capitalisme, va-t-il dans le sens de la sauvegarde de la planète ? Qu’elle soit écologique et humanitaire ! A l ’évidence non.

    Lors du compte rendu des travaux de la FAO le 17 décembre à Rome, un cri d’alarme a été jeté. Celui concernant les augmentations faramineuses des prix alimentaires. Augmentation principalement dues à celle des céréales. Tout simplement parce que on veut en faire des agro-carburants afin de compenser la raréfaction du pétrole. On sait par exemple que l’union européenne veut multiplier par douze sa production de blé à l’horizon 2016 afin de pouvoir fournir du carburant à toutes nos bagnoles. On imagine déjà qu’elles vont être les retombées, pesticides, OGM, arrosages inconsidérés, pendant que le pain et la poche de nouille vont devenir à des prix inabordables pour beaucoup de gens. Donc, avec une lutte contre le principe capitaliste il va falloir revoir nos habitudes de consommations.

    M.M.