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Le Maroc prône la non-intégration
Le 12 février, le Maroc, par la voix du ministre Machin, a déclaré vouloir renforcer l’arabe et la culture d’origine chez les expatriés marocains. Il a demandé explicitement aux émigrés de “préserver leur langue et leur culture” et de conserver leur “identité arabe”.
Ces déclarations ont considérablement irrité les politiciens néerlandais (en Belgique, pas un mot bien sûr…). Le gouvernement néerlandais s’est dit “préoccupé”. Une députée du CDA (démocrate-chrétien, parti gouvernemental) a déclaré : « Nous avons déjà des difficultés à convaincre la jeunesse marocaine à la dérive de s’intégrer à la société. Nous sommes fort mécontents de voir le gouvernement marocain exercer des pressions en sens inverse. »
Les efforts du Maroc pour garder le contrôle de sa population émigrée n’ont rien de neuf : le Maroc refuse d’autoriser les migrants à abadonner la nationalité marocaine et tente d’obliger les migrants à choisir le nom de leurs enfants dans une liste officielle “autorisée”. « La communauté marocaine résidant à l’étranger doit être considérée comme la 17e région de notre pays. » a déclaré le ministre Machin.
Source : F Desouche
be.novopress.info
L’Etat marocain contre l’Amazighité
Par : Moha Moukhlis
Etat nation jacobin, centralisateur hérité du colonisateur, notre pays s’est édifié idéologiquement sur des mythes arabo-islamiques obsolètes et anachroniques, conforté par une répression et une négation qui ont fait de l’amazighité, identité, langue et culture, l’ennemi à abattre. Monolithique par essence et totalitaire dans ses fondements, l’Etat marocain a adopté une politique d’exclusion et de discrimination vis-à-vis de l’amazighité et de ses dépositaires. L’esclavagisme enrobé de religion. Le racisme et le mépris, affichés ostensiblement à l’égard de l’amazighité, ont inhibé les consciences, éreintées par les effets dévastateurs de la colonisation que les amazighes ont subi de plein fouet, formatées par un discours politique cynique, une école « arabocranisée » à outrance et des médias du tout arabe. L’Etat, qui s’est érigé en ennemi féroce contre les amazighes, en misant sur la disparition totale et définitive de l’amazighité (un ethnocide programmé), a hypothéqué son devenir. Les dégâts sont incommensurables. La gestion chaotique du dossier de l’amazighité a entraîné l’émergence d’une force sociale amazighe qui, tout en réhabilitant l’amazighité dans ses dimensions historique, politique, linguistique et culturelle, s’inscrit dans un cadre de lutte universel gouverné par des valeurs modernistes, en cohérence avec le fonds civilisationnel amazighe : la démocratie, la tolérance et le droit à la différence.
Le projet de l’Etat a conduit ses promoteurs vers l’impasse : l’amazighité se redéploie avec sérénité et dans la souffrance aussi. Le référentiel idéologique de l’Etat se confond avec les topiques obscurantistes et totalitaires. L’arabisation a entraîné l’intégrisme qui se recycle en terrorisme. Le mouvement amazighe avance. Les apprentis sorciers de la politique du ventre et les architectes de la nouvelle ère, frappés d’une cécité idéologique endémique, s’enfoncent dans la vase. La stabilité du pays et de ses institutions risque d’être ébranlée. La politique de l’Etat se fonde sur des critères népotistes, corporatistes, ethniques et racistes. Le modèle imposé au niveau culturel et idéologique se confond avec celui d’un groupe minoritaire dont la légitimité politique et historique est plus que douteuse. La haine de l’amazighe et de l’amazighité a atteint des proportions cliniques. Comme en témoigne la répression sauvage qui s’est abattue sur les manifestants pacifiques amazighes à Boumal n Dades et au sein des universités. Comme en témoigne les sévices subis par les étudiants amazighe à Meknès. La répression est perfectionnée : le militant Ouattouch Hamid détenu à la prison de Sidi Saïd de Meknès à été traité comme un animal par les barbouzes de la nouvelle ère de notre Etat de Droit : les flics ont fait preuve de création et d’innovation dans le domaine macabre de la torture. Ils l’obligèrent à se mettre nu à chaque interrogatoire mené par les experts de M. Bemoussa. Ils l’ont violé avec la bouteille. Ils l’ont tabassée des heures durant. Ils l’ont traité d’amazighe fils de pute. Ils lui ont enfoncé le visage dans les toilettes. Parce qu’il est amazighe et veut le rester. Parce qu’il milite pour la cause d’un peuple colonisé sur sa propre terre. La panoplie des moyens de torture mis en place par les flics nous révèlent la vraie nature du pouvoir et sa conception palpable de la démocratie, de l’amazighité et des droits de l’homme.
Plus de quatre décennies après « l’indépendance », l’Etat est toujours loin d’être une réalité tangible, se limitant à un dispositif sécuritaire oppressant et un quadrillage territorial inaptes a amener l’adhésion du citoyen amazighe, qui ne peut s’identifier à un mirage idéologique « fabriqué ». La gestion du pouvoir se fait continuellement dans l’exclusion de la majorité et dans la négation de ses spécificités. Les tensions identitaires au niveau national, alimentées par l’arrogance du discours du pouvoir, risquent de tracer des lignes de conflits, dont les symptômes sont visibles, qui seront source de déstabilisation. Car le conflit identitaire qui couve, nourri de frustrations, est le fruit de la politique d’exclusion sur des bases identitaires qui a taillé aux amazighe, un manteau « d’apatrides » sur leur propre terre. Des « apatrides » à assimiler et surtout, à exclure de l’exercice du pouvoir, réservé à une caste.
Dans beaucoup de pays, la déstabilisation s’est opérée à chaque fois qu’un groupe dominant (les arabou-andalous au Maroc), cherche à s’affirmer dans la négation et l’assujettissement des autres identités. Dans notre pays, les amazighes refusent désormais de se laisser confiner dans un statut de citoyens de seconde zone et développent des réflexes de survie, s’organisent et risquent, faute d’une réponse conséquente, rapide et palpable, d’aller vers loin, légitimement. Le cas des amazighes du Niger qui ont pris les armes contre le régime despotique de Niamey devrait nous interpeller. Car derrière toute rébellion existe un soubassement identitaire.
L’Etat marocain devra prendre la question identitaire amazighe au sérieux. Faire son mea culpa et permettre aux roues de l’Histoire de tourner dans la bonne direction. La question des majorités minorisées et des minorités opprimées a pris des proportions, dans le monde, tel que les Nations Unies ont adopté, en 1992, la Déclaration sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses ou linguistiques. Et au Maroc, les amazighes ne sont pas une minorité.
Le slogan déclamé par les tenants du pouvoir – du moment- quant à la coexistence dans la diversité, suppose, au Maroc, le droit, inscrit dans la constitution, des amazighes de jouir de leur propre culture sans ingérence et de participer, pleinement et souverainement, aux décisions, toutes les décisions, nationales. L’intégration des amazighe dans la construction nationale ne peut se faire sans une école qui enseigne la vraie histoire amazighe, les traditions amazighes, la langue amazighe. Une école « décrassée » de toutes les scories arabo-andalouses. Elle ne peut se faire sans une politique économique qui se fixe comme objectif prioritaire et immédiat, le développement des régions amazighes, laissées à l’abandon, enclavées par rapport à un centre qui polarise tous les investissements et les cercles de décisions, composées d’amazighophobes déclarés et gravitant autour des cercles du pouvoir.
http://www.amazighworld.org/human_rights/index_show.php?id=1401