Le Médiator° est mort ! Vive le Médiator° !

Le Médiator° (de son vrai nom Benfluorex) a été (enfin) retiré du marché, et l’on commence à s’interroger sur les responsabilités au regard des ravages qu’il a occasionné.

Tout le monde découvre donc avec effroi qu’en France, au XXIème siècle, des médicaments possédaient une AMM (autorisation de mise sur le marché) tout à fait valide tandis qu’ils étaient non seulement inefficaces, mais en plus dangereux !

Chacun y va donc de son incrédulité, de son indignation, voire d’une véritable vindicte…

Les journalistes “médicaux” d’abord. Le spécialiste médical de chaque rédaction (quel que soit le média), nous décrit par le menu les diverses études mettant en avant l’absence d’efficacité, ainsi que les milliers de décès imputable à la substance.

Les politiques ensuite, qui promettent un changement radical de rapport à l’industrie pharmaceutique, et dénoncent toutes ces informations cachées par les laboratoire Servier…

Cachées ??? Encore un grand complot du à Big Pharma ? Des données que personnes ne connaissaient ? Des industriels qui agissaient dans l’ombre en fournissant aux pouvoirs publics des études biaisées ? Et bien pas vraiment !

En Mai 1997, le journal indépendant Prescrire parlait du Médiator en ces termes : “Après 20 ans de commercialisation du benfluorex (Mediator°), on ne sait toujours pas à quoi sert ce médicament administré
aux diabétiques.(…)Il n’y a actuellement aucune raison de traiter les diabétiques non insulinodépendants avec le benfluorex. Le maintien sur
le marché et la prise en charge par l’assurance maladie de ce médicament doivent être reconsidérés.”(Prescrire. Benfluorex antidiabétique ?. Mai 1997 : 173(17).). Difficile de faire plus clair !

Peut-être me direz vous ne s’agit-il là que d’un article perdu au milieu de la publication. En fait, Prescrire a consacré pas moins de 16 articles entre Octobre 1986 et Janvier 2010, tous plus alarmants les uns que les autres à la dénonciation du Benfluorex.

Ce que les journalistes médicaux et les politiques font mine de découvrir très opportunément est bien connu de tous les professionnels de santé depuis une vingtaine d’années au bas mot !

Alors comment expliquer ce désastre ? Tout simplement par le fait que le domaine de la santé est loin d’être exempt de la logique capitaliste.

L’industrie pharmaceutique est partout, à tous les niveaux. C’est elle qui gère la formation continue des médecins dans son immense majorité (!), c’est elle qui finance la recherche et donc les chercheurs (ces mêmes chercheurs deviennent du coup grand spécialistes dans leur domaine, et seront donc appelés à décider de l’opportunité de mise sur le marché d’un nouveau médicament), c’est elle qui finance les congrès internationaux des diverses spécialités médicales,c’est elle qui finance les sociétés savantes et les associations de patients c’est encore elle qui donne l’information et prévient des effets indésirables les praticiens à la sortie d’un nouveau médicament.

Alors le fusible Servier va certainement sauter et on ne va pas le pleurer ! Mais la situation est la même ! Sans une révolution de la formation continue, de la recherche, des relais d’opinion, et des organismes indépendants rien ne va changer.

D’autres bombes exploseront, elles s’appelleront Di-antalvic° (Dextropropoxifène), Fonzylane° (Buflomedil), Ketum° (Ketoprofene gel) ou encore Avandia° (Rosiglitazone)… Et la liste est loin d’être exhaustive.

Alors le Médiator° est mort, mais vive le Médiator°.

FP pour Le Chicaneur

FP